LA SAINTE BIBLE
S.P.C.K.
(Société pour la Propagation de la Connaissance Chrétienne)
M. Matter
1862
mise en page par Jean leDuc
De 1842 à 1852, la SPCK (Society for promotion of christian knowledge), en Angleterre, entreprend une révision de la Bible Martin/Ostervald. Il s'agit de répondre aux besoins des chrétiens francophones établis à Jersey, Guernesey et au Canada. La plupart des réviseurs qui travaillent sous la direction du pasteur Rodolphe Cuvier sont des luthériens. L'évêque anglican H.T. Luscombe patronne cette traduction publiée pour la première fois à Londres en 1849, mais qui n'a aucun succès du coté français, sans doute à cause de ses origines britanniques. Cette Bible a parfois été confuse avec la Bible Synodale, ce qu'elle n'est pas. Cette Bible se tient dans une tradition complètement à part, celle de la famille des manuscrits Byzantins.
C'est une grande joie et une grande bénédiction pour nous que de vous présenter la Bible SPCK de 1862. Cette Bible Calviniste de la Société pour la Propagation de la Connaissance du Christianisme est complètement inconnue de nos jours du au fait qu'on ne lui fit aucune publicité lors de sa parution. Elle fut complètement négligée de la communauté chrétienne mondiale du au poison de l'arminianisme et du piétisme qui se rependait en son sein. Elle est une combinaison du meilleur de la Martin et de l'Ostervald révisée et retraduite sur l'Hébreu et le Grec, le Texte Massorétique et le Texte Reçu, et mérite d'être légèrement révisée, réimprimée et diffusée mondialement.
Jean leDuc
Dans les dernières années du dix-septième siècle commença la réaction contre la sèche et violente scolastique protestante, et elle se manifesta par un retour à la Bible. En 1698 fut fondée à Londres, à l'aide de souscriptions volontaires, la Société pour la propagation des connaissances chrétiennes. Elle avait pour but d'imprimer la Bible en diverses langues (arabe, gallois, etc.), de distribuer d'autres ouvrages religieux, de fonder des écoles de charité, de soutenir les missions étrangères, notamment aux Indes-Orientales. C'est à cette société, encore aujourd'hui florissante, qu'est due la publication de la Bible française, revue par MM. Matter, Cuvier, etc.
M. E. Arnaud, pasteur aux Vans et, lui-même, auteur d'une traduction du Nouveau Testament, exprimait le vœu semblable: « En tant qu'il s'agit de versions ecclésiastiques, disait-il, nous ne sommes pas partisan d'une opinion extrême et radicale dans la question des versions. Nous ne voulons pas qu'Ostervald soit remplacé, mais corrigé. En se rangeant à celte opinion, on sauvegardera la tradition, qui doit toujours être respectée dans ce qu'elle a de légitime; on répondra aux besoins de réforme qui se font généralement sentir, on rattachera l'avenir au passé; on habituera peu à peu l'Église à un nouveau texte et, plus tard, quand la science aura fait des progrès parmi nous, et que nous aurons un Synode général, on pourra charger les théologiens de travailler entièrement à nouveau. Pour le moment, contentons-nous de révisions; ce sera le parti le plus prudent et aussi le plus réalisable.»
Ce dernier vœu de M. Arnaud est d'autant plus réalisable, qu'il est en quelque sorte déjà réalisé. Elle existe, depuis dix ans, quoique obscure, la révision demandée: c'est la Bible dite de Matter. M. Matter, ancien inspecteur général de l'Université, avait exprimé, il y a une trentaine d'années déjà, dans le sein de la Société biblique de France dont il luisait partie, son désir de voir des améliorations apportées à l'état de nos versions; mais à cette époque, nous dit-il, nulle idée d'entreprendre un travail de ce genre, sous le patronage ou avec le concours de qui que ce soit, ne s'était présentée à son esprit. Ce fut l'Angleterre qui s'adressa à la France à ce sujet: la Société pour la propagation de la vérité chrétienne (for promoting Christian knowledge, 1698) demandait qu'on s'occupât d'une révision dont elle voulait faire les frais, et qu'elle destinait plus particulièrement aux troupeaux français des îles de Jersey et de Guernesey. «J'acceptai d'autant plus volontiers ce qui m'était proposé, dit M. Matter, que les vues manifestées étaient plus conformes aux miennes et me donnaient, avec les moyens matériels mis au service de l'œuvre, plus de liberté dans le choix de mes collaborateurs. En peu de mois, un petit local était loué, une bonne provision de livres achetée, le travail en train. Notre travail demandait impérieusement la connaissance complète de la langue allemande, qui est plus familière aux membres de l'une de nos communions qu'à l'autre. D'habiles théologiens de Londres nous assistèrent de leurs lumières, ainsi que Messieurs les pasteurs français des Iles-Britanniques; de sorte que, s'il y eût eu une divergence touchant le dogme, le calvinisme eût prévalu. Notre travail s'est fait lentement, mais assidument. Il est tel livre de la Bible dont il a été fait jusqu'à trois traductions suivies de trois révisions. J'ai corrigé, pour les deux éditions (in-4°et in-8°), jusqu'à dix épreuves de la même feuille. M. Eug. Haag et d'autres personnes corrigeaient, tantôt avant, tantôt après moi; et toutes nos feuilles ont été vues à Londres avant le tirage.»
Ces lignes de M. Matter se terminaient par une sérieuse et cordiale invitation à Messieurs les pasteurs et aux savants de nos Églises, de vouloir bien communiquer au Comité de révision, toutes les observations que leur suggérerait la lecture ou l'examen de cette nouvelle Bible. Dans une lettre au journal de l'Espérance, insérée à la date du 19 septembre 1862, M. Matter entre dans de nouveaux détails nécessaires pour nous faire connaître le plan que s'est proposé le Comité présidé par lui.
«Martin et Ostervald ont à ce point présidé à l'éducation religieuse du monde protestant de langue française, dit M. Matter, que toute idée de rompre avec eux est un non-sens révolutionnaire, passez-moi cette expression. Leurs textes sont devenus à ce point notre langue maternelle, que toute version entièrement nouvelle, si admirable qu'elle puisse être au point de vue philologique, doit être écartée, au point de vue de nos plus saintes habitudes de famille et de nos plus graves intérêts d'Église. Comme l'Allemagne, en révisant la Bible, doit partir de sa version reçue, et l'Angleterre de la sienne; de même, nous aussi, nous devons partir de la nôtre ou des nôtres, puisque Martin est encore admis concurremment avec Ostervald. Mais il ne faut pas conserver une seule de leurs fautes reconnues ou signalées par la science. Or, il en est beaucoup. Cela étant, combiner Martin avec Ostervald, là où l'un est exact et l'autre clair, c'est la méthode de toutes la meilleure; mais là où ils ne sont plus exacts, ni fidèles, mes amis et moi, nous n'avons pas combiné Martin et Ostervald, mais nous nous sommes appliqués à traduire le grec et l'hébreu... Grâce à la composition de notre Comité qui possédait toutes les langues nécessaires à son œuvre, et tenait à toutes les nuances de l'exégèse ancienne et moderne, nous avons pu profiter de toutes les versions et de tous les commentaires qui se trouvent dans la librairie.»
M. A. Eschenauer énumère quatre principes fondamentaux auxquels le Comité est demeuré invariablement attaché, et qui n'avaient été adoptés qu'après de mûres délibérations:
1° De prendre pour point de départ les versions de Martin et d'Ostervald, dont l'une est plus fidèle, l'autre plus élégante et qui, toutes deux, sans avoir en France le rang que la version de Luther occupe en Allemagne, et que celle qui remonte à Wiclef occupe en Angleterre, ajoutent cependant à l'avantage de remonter à Calvin, celui d'être adoptées dans nos Églises;
2° De recourir toujours aux textes originaux (Texte Massorétique Hébreu et Texte Reçu Grec), tout en consultant les commentaires les plus estimés;
3° De mettre La fidélité de la traduction au-dessus de tout autre mérite;
4° De recevoir, dans le corps de l'ouvrage, toutes les corrections immédiatement admissibles, et d'indiquer les autres en marge.
SILENCE INEXPLICABLE DES JOURNAUX.
C'est sous la présidence de M. Matter, qui réunissait à la qualité de membre correspondant de l'Institut el à celle d'inspecteur général de l'Université, la science d'un professeur de théologie, que le Comité de Paris a fait son œuvre, dont la principale part revient, après le président, à MM. Rodolphe Cuvier, pasteur et président du consistoire de la Confession d'Augsbourg, à Paris; Sardinoux, professeur de la faculté de théologie de Montauban; Munk, de la bibliothèque impériale; Kreiss, Kroh et Fuchs, pasteurs; Bartholmess, professeur du séminaire de Strasbourg; Pichard, littérateur orientaliste; Gerock, etc. »
Le Nouveau Testament sortit le premier de presse, en 1842; l'Ancien date de 1849; mais personne n'en parla. Le Bulletin du monde chrétien est, que nous sachions, le premier journal qui ait fait mention de cet important travail. L'article qu'il lui consacra est du mois de mars 1858; c'est celui-là même que nous venons de citer. L'année suivante, MM. Bost, Arnaud et M. Matter lui-même ont pris la plume à ce sujet; et il n'en a plus été question jusqu'à l'année passée. Nous nous attendions à ce que, dans les dernières Conférences pastorales de Paris, où la question des traductions de la Bible était à l'ordre du jour, la révision dont nous parlons serait sinon adoptée, du moins prise en sérieuse considération. Les comptes-rendus des journaux ne disent pas même qu'elle ait été proposée.
M. Reuss, dans son article de l'Encyclopédie de Herzog (1860), en parle avec quelque sévérité. «En 1834, dit-il, un Comité fut constitué à Paris, sous le patronage de l'évêque anglican Luscombe; l'historien et philow - Je préfère, dans l'Église, dire cinq mots compréhensibles, pour l'instruction d'autrui, plutôt que dix mille dans une langue inconnue. I Cor. xiv, 19.
Il faut comprendre. imaginer, sentir avant de traduire. La Bible révisée de M. Matter est, dans notre opinion, la seule qui, pour le moment, réponde aux besoins urgents de nos Églises. Cela jette-t-il la moindre défaveur sur les travaux de ces hardis pionniers qui, brisant avec le texte traditionnel, n'ont point révisé, mais retraduit? Est-ce à dire que tant d'efforts et de sueurs eussent pu recevoir un plus utile emploi ? Nous ne le pensons pas. L'admission d'une traduction foncièrement nouvelle peut être différée, mais le savant qui l'aurait créée dans les conditions requises, nous insistons, qui l'aurait créée, ce savant-là aurait rendu à l'Église un service plus signalé encore que celui dont la révision serait admise. La foi du premier est plus grande que celle du second. Ce fut la foi d'un Luther; et son œuvre, profondément gravée sur le roc éternel, a traversé les siècles.
La Bible en France: ou Les traductions françaises des Saintes Écritures
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A Christ seul soit la Gloire
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