Sur Γ ancien et le nouveau Testament.
Le premier et le plus considérable, ce sont ses HexapleSj recueil des versions publiées jusqu’à lui des saintes Ecritures. Origène les réunit dans un seul volume, qui présente , rangés sur six colonnes parallèles, 1° le texte hébreu, écrit en caractères hébreux;2°le même texte,en caractères grecs; 5°la version d’Aquîla; 4° celle de Symmaque; 5° celle des Septante ; 6° celle de Théodotion ( 1 ). Elles n’é-toientpas les seules qui eussent paru plus ou moins complètes, et toutes avec des différences essen-tielies. Origène avoit eule bonheur d’en rencontrer troisautres,dont les auteurs nous sont inconnus(2). Il les réunit comme par appendices, et sous des colonnes nouvelles , aux divers livres qu’elles tradui-soient : ce qui-en étendoitle nombre jusqu’à huit, et même neuf, d’où leur vient le nom d’Octaples et d’Ennéaples; mais l’ancienne dénomination a prévalu (1).Lc savant auteur n’y borne pas son tra-tail à une simple compilation. Parce qu’il s’étoit glissé beaucoup de fautes dans les copies des Septante, pour rendre celte version plus correcte et ])lus exacte, il en fit la révision sur l’hébreu, avec la précaution de marquer les variantes par des obèles et par des étoiles. Ce grand ouvrage, qui ne nous est point parvenu dans son entier, a servi de modèle à nos modernes polyglottes, qui ne l’ont pas fait oublier.
(1) Sur le texte hébreu, on peut consulter les dissertations de l’abbé de Venee dans la Bible de D, Calniet, vol. 1, à la pag. 545 et suiv., et vol. vu, pag. 54 et suiv. —Sur la version des Septante, le même abbe de Venee, vol. 1, pag. Si.—Aquila, originaire du Pont et païen de religion, se convertit au christianisme, puis changea de religion pour se faire juif. 11 traduisit laZizôZe vers l’an 150 de Jésus-Christ, dans la vue non-seulement de décrier la version des Septante, mais d’obscurcir les prophéties qui concernent Jésus-Christ. — Théodotion , juif de la secte des ébiouites, suit en général les Septante. Sa version parut vers l’an 184 de Jésus-Christ.—Symmaque, vers la fin du 2* siècleou aucommen-cernent du 5e, donna une quatrième version de !’Écriture, moins litté-raie que celle d’Aquila, mais plus claire ; il s’est beaucoup éloigné des Septante, surtout pour la chronologie. Pour plus d’éclaircissemens toy. Duguet, Conf. ecclés., tom. 1, pag. 222 et suiv., et les éditeurs d’Origène.
(2) La première à Jéricho, en 217 : elle ressemble souvent à une paraphrase plutôt qu’à une traduction, surtout dans les douze petits prophètes; la seconde à Nicople, sur le cap d’Actium, vers 228 de Jésus-Christ; elle, paroît être l’ouvrage d’uu chrétien ; la troisième , sur laquelle on ne nous apprend rien, fut composée par un ébionite ; elle manque plus que les autres de fidélité.
(1) La plus estimable des éditions qui en out été publiées est celle du P. Monlfaucon, imprimée à Paris en 1715, 2 vol. in-fol.
Non content de rédiger en un seul corps les édi-lions diverses de la Bible, deles confronter, de les corriger les unes par les autres, travail immense dont on sent 10’ates les difficultés pour le temps surtout où il fut exécuté, Origène entreprit de l’expliquer tout entière: et il en vint à bout, soit en éclaircissant les textes par des scolies ou notes courtes et savantes ; soit par des commentaires ou dissertations sous le nom de Tomes, par lesquels il en établit les divers sens , s’attachant, avec une prédilection qu’on lui a reprochée , au scias allégori-que(2); soit, enfin, par des homélies prononcées dans les églises d’Orient et d’Italie au nombre de plus de mille (1). C’estlà que,selon ]’expression de saint Jérôme, déployant toutes les voiles de sàbril-lante imagination et d’une science en quelque sorte inépuisable, il quitte terre, et semble voguer en (Page 116.) pleine mer (2). Saint Epiphane affirme qu’Origène avoit commenté toute la Bible (3).
(2) More suo lotus in allegorice interpretalione versalus est. Ilierou , !,roi. Comm. inMalach. —Allegorîis nimis induisisse Origenem Patres clamant. Huet. Origen., tome 1, pag. 170.
(1) Mille et eo amplius tractatus quos in ecclesia locutusest edidit. Hier., Ep. ad Pammach., t. iv, cap. cccxlvi. Sena niillia librorum. S. Epipli. Hceres., cap. lxiv, n" 65. Ce qui a fait dire à S. Jérôme et à Vincent de Lerins : Quis nostrum tanta potest legere quanta ille con-scripsit? Hier., ep. xli adPamm., torn. 1v, col. 546. Nemomortalium conscripsit plura. Vine. Lirin. Comm., pag. 551, ed. Baluz.
(2) De vir. ill., cap. lvi, pag. 611.
(3) S. Epiph. Hœres. lxiv, cap. v. Cave, Script., pag. y5.
Après ces grands ouvrages, qui lui ont mérité !’admiration même de ses ennemis, car il faut avouer, à la honte de l’humanité, qu’il en eut, et d’implacables (4), viennent des traités particuliers sur divers points d’histoire et de critique, comme sa Réponse à Julien Africain sur Γhistoire de Suzanne; de philosophie et de religion, tant sur le dogme que sur la morale; des lettres , et autres ouvrages que nous n’avons plus.
(4) Voy. les judicieuses dissert, de Duguet à ce sujet dans ses Confer, ecclés., torn. 1, pag. 205 et suiv. ; VOrigencs defensus du P. Halloix; le jugement sur Origène, qu’en portent D. Ceillier, Hist, des écriv. ccclês., torn. 11, pag. yy4> et Tillem., Mém., torn, ni, pag. 584·
Les principaux sont :
d^ePèriarchon, ou des principes, en quatre livres, dont l’original est perdu. Saint Jérôme en avoit fait une traduction; Ruffin en publia une autre: c’est la seule qui nous reste, et qui nous ait conserve' l’on-vrage !’Origène (1). Il l’entreprit clans le dessein de rétablir la vraie doctrine d’Origène, corrompue par des hérétiques de son temps , qui couvroient leurs erreurs du nom de ce grand homme; artifice dont Origène se plaint lui-même, et que ses apologistes ont eu raison de de'voiler (2). 2° Un traité de la prière, justement célèbre. 5° Une Exhortation au martyre, adressée à Ambroise, et à Prototecte prêtre de ]’Église de Césarée en Palestine, arrêtés potir lafoi dans la persécution de Maximin.
(1) 11 y en a de lungs extraits dans l’ouvrage intitulé Philocalia.
(2)In .Ipolog. Pampli., pag. 251, tom. n. Oiigen., Opel’. S. Hieron, edit. Huet, Origen,, pag. 196 et seq. D. Ceillier, ton!, 11, pag.
Le premier motif qu’il y fait valoir, c’est l’espérance (Page^71. De exhort. tnartrr.,BasiL ' ,67* Page 65ז. ) des récompenses que Dieu prépare dans le ciel à ceux qui souffrent pour lajustice. Exemple des saints patriarches qui ont renoncé à tout pour suivre la voix de Dieu, particulièrement d’Abraham : « La même voix qui lui commanda de sortir de son pays pour une terre étrangère, nous dit peut-être à ce moment: Sortez de toute la terre. Notre devoir est d’obéir. »
Le second motif est l’épreuve que Dieu met à la charité de ses serviteurs. « Il veut s’assurer si en effet vous l’aimez, comme vous le dites, de tout votre cœur et de toute votre âme. C’est par une vie pure (pagc 171.) qu’il faut se préparer au martyre, afin de ne pas donner prise au démon, qui travaille à nous infecter de pensées mauvaises, pour nous entraîner ou dans le renoncement ou dans l’hésitation. Il faut se garder de la moindre parole capable de faire soupçonner (pagc 172.) noire foi; tout endurer de la part de nos adversaires, et les moqueries, et les menaces; compter pour rien la compassion qu’ils ont l’air de donner à Fer-rear ou au fanatisme dontilsnous accusent; s’élever (Pages 1,6,) courageusement au-dessus des affections les plus douces de la nature et de l’amitié. »
Le troisième motif est puisé dans l’esprit du christianisme. « L’Evangile tout entier nous prêche le renoncement à nous-mêmes, le mépris de la vie présente pour une vie meilleure. Le martyre est une route assurée vers le salut. » S’adressant à Ambroise en particulier: <׳ Quand je posséderais sur la terre autant de biens, et plus encore que vous n’en possédez, je souhaiterais mourir martyr pour le nom de Jésus-Christ, afin de recevoir d’autant plus dans le ciel que j’aurois plus quitté ici-bas; je sou-haiterois, en mourant martyr, laisser des enfans, des champs et des maisons, afin de pouvoir devenir le père d’une plus nombreuse et plus sainte troupe d’enfans devant Dieu, et le Père de notre Seigneur (Epti.,115 .״.) Jésus-Christ, de qui procède toute paternité dans le ciel et sur la terre : car, s’il est juste que ceux qui n’ont point passé par l’épreuve des tourmens le cèdent à un autre dont la patience a éclaté sur les chevalets, dans les tortures et sur les bûchers, (pagc 177.) quand nous mourrions martyrs, nous qui sommes pauvres , la raison nous obligerait de nous rabaisser au-dessous de vous, qui avez tout quitté pour 1’amour de Jésus-Christ.
(Page 1 17s-) Le quatrième motif est pris des engagemens contractés au baptême. « Vous avez promis au Seigneur dele servir parce qu’il est votre Dieu. Maintenant ce n’est plus le temps de délibérer sur un choix que vous avez déjà fait. Vous le déclarâtes alors, et vous avez dit : Il n’arrivera jamais que nous servions des dieux étrangers ;(Deut., v. 7 / Page 178.) que nous renoncions au Seigneur, qui est le seul Dieu vivant el véritable.
»Ce n’est pas à ses ennemis, c’est à ses amis, (Page 198. Luc., xiv.27) I ses disciples que Jésus-Christ commande de boire son calice, de porter sa croix.
» Notre Seigneur Jésus-Christ ne s’est pas contenté de nous exhorter à souffrir, le premier il nous en a donné l’exemple; (Luc. xxiv.26.) il n’est parvenu que par la voie des souffrances à son immortelle gloire.
» Eh! pourquoi liendrions-nous à la vie , quand elle nous est disputée tous les jours par tantd’acci-dens qui sans cesse nous menacent? tant redouter la mort, (Pages 205 et suiv.) quand il viendra un moment où elle viendra nécessairement nous saisir? Peut-être Dieun'avoit-il prolongé votre vie jusqu’à ce temps de persécution que pour laver vos souillures dans votre sang. »
(Page 215.) Un dernier motif, non moins pressant, « c’est le désir que notre âme a naturellement de s’unir à Dieu comme à un être avec qui elle a quelque affinité par sa raison et son intelligence. Pourquoi donc appréhenderions-nous d’être dépouillés de ce corps terrestre et corruptible qui ne fait qu’appesantir l’âme, abattre l’esprit sous le poids des soins dont il l’agite, et l’empêche d’aller jouir au sein de Jésus-Christ du repos qui doit nous rendre heureux à jamais de son propre bonheur?
(Page215.) Voici le moment de faire voir sur quel fondement nous avons bâti notre édifice spirituel ; si c’est (Matth.,vu. 26.) sur la pierre ou sur le sable. Si la violence des tempêtes ne l’ébranle pas, c’est la preuve que l’édifice est fondé sur la pierre ferme, qui est Jésus-Christ. Montrons que nous avons reçu la divine semence de la parole sainte, non comme les chemins ouverts à tout le monde, non comme les terres pierreuses, ou celles qui sont chargées d’épines, (70״/.1 a-22 ) mais comme cette bonne terre dont nous parle l’Evangile.
Votre mort ne restera pas stérile. La voix de votre (IJeln., xii.) sang, comme celle d’Abel, demandera vengeance au Seigneur. Peut-être aussi . comme nous avons été rachetés par le sang de Jésus-Christ , peut-être de même quelques-uns pourront être rachetés par votre sang.
Passages tirés des autres écrits d’Origène.
Extraits du Périarchon(1).
(1) Dans la Philocalic, à la suite du Traité contre Celse, édit, de Spcu-eer, in-.״{׳, Cantabr., 165S. Quatre livres, au rapport de S. Jérôme, Ep. ad Paul,, xxix.
«L’Écriture sainte est inspirée de Dieu; (Page ו.) elle est 1’ouvrage du Saint-Esprit. On prêche hautement dans nos églises que !,Esprit-Saint a dicté à chacun des prophètes et des apôtres tout ce qu’ils nous ont transmis. »
Origène établit cette proposition sur divers rai-sonnemens. Le premier tiré du consentement unanime de tous les peuples à recevoir la doctrine contenue dans l’ancien et le nouveau Testament.
«Il s’estrenconlré parmi les Grecs et les Barbares des législateurs et des écrivains qui ont conçu l’espérance (Page 2.) d’amener les hommes à la connaissance de la vérité par leur doctrine ; pas un seul n’a réussi à la faire adopter par tous les peuples. Les philosophes eux-mêmes, avec tout l’appareil de leur dialectique, et toute la pompe de leur éloquence, n’ont pu venir à bout de persuader quelques contrées parlicu-lières ; ils n’ont pas même osé l’entreprendre , tant un semblable projet leur semblait inexécutable ! Il étoit réservé à nos saintes Ecritures de soumettre à la législation de l’Evangile des milliers de Grecs et de Barbares; il étoit réservé à ces divins livres d’obtenir des peuples entiers le sacrifice de leurs anciennes coutumes, de tous leurs préjugés héréditaires en fait de religion, de tous les intérêts, pour une discipline nouvelle qu’ils ne pouvoient cm-brasser sans s’exposer à la haine des infidèles, et au danger de perdre la vie : et, pour peu qu’on relie-dusse sur la rapidité avec laquelle cette doctrine s’est répandue et s’est établie dans le monde à travers les persécutions qui menaçaient de l’anéantir à sa naissance, on ne pourra s’empêcher de reconnaître qu’un progrès si étonnant étoit au-dessus des forces humaines. »
Le second est tiré du fidèle accomplissement des prophéties.
« Les prophètes avoient annoncé qu’après Jésus-Christ, il n’y auroit plus de princes ni de chefs dans Juda ; et nous voyons que depuis son avènement (l’B 5.) le peuple juif est entièrement désolé , qu’il n’a plus ni temple,ni culte, ni sacrifice, ni gouvernement. » « Les prophètes,parlant duMessie, avoient ditque (l’s. xi.ix. 5.) Ja grâce étoit répandue sur ses lèvres, que sa langue (ibid. 2.) ressemblerait, par son agilité3 à la plume de l’habile écrivain : son caractère et la promptitude avec laquelle sa doctrine s’est répandue ont justifié la prédiction. (j’ages 3 et4) Ils avoient prédit... or une conformité-aussi parfaite entre les prophéties et les événemens, du moment où elle est bien établie , prouve par-là même, selon moi, invinciblen|cnt la divinité des Ecritures. 11 falloit !’accomplissement des prophé-lies, pour que l’onpiit prouver manifestement l’inspiration des livres saints; car, bien qu’ils portassent en eux-mêmes les caractères de l’inspiration, on ne pouvait néanmoins la démontrer par desar-gumens positifs avant l’accomplissement même des prédictions.Mais l’avènement de Jésus-Christ, par son incarnation, a mis le sceau de l’évidence à cette importante vérité. Jusque-là on avoit quelque apparence de raison pour en douter ; mais depuis, il n’a plus étépossible. La lumière qui couvrait Moïse, couverte comme d’un voile, a brillé de tout son éclat avec l’apparition de Jésus-Christ.
»Qu’il se rencontre, en certains endroits de l’Ecriture, des détails que la majesté divine paroit repousser ; que les caractères de sa divinité échappent quelquefois à des intelligences peu élevées , ce n’est pas la prcuw que !’Ecriture soit ici en défaut. De même que, dans l’ordre des choses naturelles, il y a des parties qui heurtent nos idées sur la puissance et la sagesse du Créateur, et fournissent aux incrédules des objections dontilssaventbiense prévaloir, bien qu’avec un raisonnement plus réfléchi on y reconnoisse (Page I.) la même Providence qui gouverne tout; de même doit-on se pénétrer de la pensée que tout est divin dans les Ecritures, encore que la lettre ne présente rien de sublime. C’esl un trésor que Dieu s’est plu à renfermer dans des vases d’argile, pour empêcher que l’on n’attribuât à un langage humain ee qu’elles révèlent de la puissance suréminente de Dieu. En effet, s’il n’y avoit de remarquable dans ces divins livres que la pompe d’une éloquence viveetinsinuante, ce seroit à la sagesse humaine, et non pas à une vertu divine, qu’il faudrait rapporter l’honneur de notre foi.
(]’age 7 et suiv.) » Il y a dans nos livres saints des obscurités; nous ne le désavouons pas : et ee qu’il y a de plus étonnant encore, c’est que les plus simples d’entre les fidèles découvrent, à travers ces obscurités, des mystères qui souvent échappent aux esprits les plus pénétrans. Ceux-là veulent-ils leur donner un sens : ou ils se trouvent obligés d’avouer leur ignorance, ou ils donnent à gauche. Et ce n’est pas seulement par rapport à l’ancien Testament que l’on se sent arrêté par ces 'obscurités , le nouveau lui-même a les siennes, que Ton n’éclaircit pas sans une grâce particulière, telle qu’elle fut donnée à celui qui disoit : Pour nous, nous avons !,Esprit de Dieu pour comprendre les dons que Dieu nous a faits. (1 Cor., 11.16.) Peut-on, par exemple, lire l’Apocalypse de saint Jean sans admirer la profondeur des mystères qui s’y découvrent? Les Epîtres même des apôtres n’ont-elles pas leurs endroits obscurs et difficiles pour les plus savans ?
»Comment prétendrions nous entendre toujours le sens caché des divines Ecritures , quand il se dérobe quelquefois à l’Apôlrc lui-même? D’où vient <]11e vous l’entendez s’écrier: O profondeur des ri-chessesi de la sagesse et de la science de Dieu! (Rom., xi. 55.) Ce qui le prouve encore, c’est l’aveu qu’il fait que les ju-geinens de Dieu sont impénétrables, et que ses voies divines ne peuvent être aperçues des hommes ; (Ibid.) il ne dit pas qu’il est difficile de les pénétrer, mais que cela est impossible : (B. Page 16.) ce qui n’empêche pas que Dieu ne les ail donnés à son Eglise pour la corn-munc édification des fidèles. »
Extraits de la Réponse à Jules Africain (1), et de diverses Homélies (2).
(1) Jules Africain, ainsi nommé parce qu’il étoit originaire de cette partie du monde. Il fut d’abord païen. S’étant converti au christianisme, il s’appliqua particuliérement à l’histoire et à la chronologie, mais sans négliger les autres parties de la science. Aussi S. Jérôme et Socrate outils vantésa profonde érudition. Hier., Ep. ad Magn. lxxxiii. Socr., Ihst. eccles., lib. 11, cap. xxxv. Ayant assisté à une conférence sur une matière de religion où Origène s’étoit appuyé de l’autorité de l’histoire de Suzanne, Jules lui écrivit une lettre savante,.où il en attaquoit Pau-thenticité. Origène lui en écrivit une également remarquable pour la défendre. Nous avons encore l’une et l’autre.
(2) Nous avons fait usage des éditions de Bâle, de II net et de Gencbrard , distinguant la première par la lettre B, celle de Huet par la lettre II, et celle de Genebrard par la lettre G.
«Avec toutes ses obscurités, (II. II. Page 442·) !’Ecriture ne laisse pas d’être utile à tous ceux qui la lisent, même sans l’entendre. Dans ce cas, il en est de la lecture des livres saints comme des paroles dont l’efficacité est en elles-mêmes, et agit indépendamment de celui sui' qui on les prononce. La lettre et le son des paroles forment une sorte d’aliment dont les bonnes dispositions qui sont ennous se nourrissent et se fortifient, en même temps que les mauvaises, entraîne'es et surmonte'es par celles qui leur sont contraires, (II. I. Pag. 27.) cèdent insensiblement au charme secret de cette sainte lecture, par qui elles sont comme assoupies. Ne nous lassons donc jamais de la lec-turc de ces livres divins, quoique nous n’en corn-prenions point le sens ; mais demandons qu'il nous soit fait selon la foi qui nous persuade que toute . Ecriture inspire'e de Dieu est utile. (11 Tim., i 16.) Car enfin, ou il faut dire que !’Écriture n’est point inspire'e de Dieu, si elle n’est pas utile; ou qu’elle est utile, si l’on croit qu’elle est inspire'e de Dieu(1).
(1) Concord-, par D. Maiéch., iom. 11, pag, 125. Philoc., cap. xn, pag. 50.
»Parce que vous n’y entendez pas telle chose, ne croyez pas que ce soit la faute du livre. Prenez-vous-en plutôt à vous-même.
»Les saints oracles ne nous laissent pas ignorer que les Écritures sacrc'es sont fermées et seellées.
(II. I. Page 220.) » C’est ce que nous apprend saint Jean dans son Apocalypse, quand il dit que le Sauveur tient la clef de David , quilouvre, et que personne ne ferme - qu’il ferme,et que personne n ouvre : (Apoc., v. 1.5) comme quand il parle du livre e'crit au dedans et au dehors, que personne ne peut ouvrir, à l’exception du lion de la tribu de Juda. Ce qui doit s’entendre non pas seulement de (APOC· 'י °·) l’Apocalypse de saint Jean , mais en général de toute !’Ecriture.
(il. 1. Page40.) »11 y a dans la nature une foule de choses que notre intelligence ne saisit qu’avecpeine ; que même elle ne sauroit pénétrer. Faut-il s’en prendre au Dieu qui les a faites? Par exemple, nous ne corn-prenons pas pourquoi il y a des poisons. Nous avons beau chercher, nous n’en découvrirons jamais le vrai motif. En coûtera-t-il beaucoup à notre ignorance de répondre que c’est là le secret de Dieu ? Pas d’autre réponseà toutes ces sortes de questions. Un jour viendra où toutes les énigmes de la nature se dévoileront à nos yeux, si nous sommes dignes d’arriver à la clarté céleste. Portons le même jugement des obscurités qui se rencontrent dans nos livres saints.
(G. 1. Page 66.) »Nous faisons des vœux non-seulement pour que vous entendiez la parole de Dieu dans l’église, mais pour que vous vous appliquiez à sa lecture dans l’intérieur de vos maisons, et que vous méditiez jour et nuit la loi du Seigneur. Car c’est là principalement que se trouve Jésus-Christ; et quoiqu’il soit présent partout à ceux qui le cherchent, il l’est néanmoins plus particulièrement dans la loi divine; afin que nous soyons sans cesse occupés à la méditer, à la ville ou à la campagne, et la nuit et le jour.
(G. 1· Page 20.) » Je tremble que !’Eglise n’enfante encore dans 1 affliction et les gémissemens. Car n’est-ce pas pour elle un sujet d’afiliction et de gémissemens de voir que les fidèles s’éloignent de nos temples, qu’ils dédaignent la parole de Dieu ; qu’ils se rendent à peine à nos assemblées dans les jours de fêtes; et qu’ils y viennent encore moins pour satisfaire à un devoir de religion, que par un vain esprit de curiosité , et seulement pour y chercher une distraction et un relâchement ?
(Page 60.) » Où voit-on aujourd’hui des chrétiens qui s’appliquent aux sciences divines avec la même ardeur qu’ils en mettent aux études profanes ?
(Philoc.) » La nourriture de l’âme, c’est la lecture des livres (a^es.p^j.) sa*nts qU’accompag־ne Ja prière fréquente. C’est là l’aliment qui la sustente, la fortifie, lui donne la victoire sur la chair.
| Ne dites plus : Je voudrais bien faire, mais je n’en ai pas la force ; je voudrais garder la continence, mais la fragilité de la chair m’entraîne. Cet aiguillon de la chair, c’est vous-même qui le produisez, vous qui l’excitez en vous, vous qui l’armez contre l’esprit, qui fortifiez en vous la chair aux dépens de l’âme. Vous ne ménagez rien pour l’une; vous refusez tout à l’autre.
(Périarch.) » Il n’y a qu’un seul Dieu, créateur de l’univers, (5■ 7<s.’) Esprit pur, dégagé de loute matière, dont la substance invisible échappe à nos sens. Personne, dit Γ Apôtre, na jamais vu Dieu, c’est-à-dire, ne l’a vu (Jean., !. !8.) des yeux du corps. Quand donc nous lisons qu’il s’est fait voir à Moïse; entendons une vue non réelle , mais spirituelle et intérieure, ce qui devient possible à toute créature raisonnable ; et il n’en est point à qui il ne se manifeste par la beauté de ses ouvrages et la brillante décoration de l’univers. Connoissance toutefois imparfaite, qui ne s’élève pas jusqu’à la divine essence. Elle reste voilée ici-bas , même pour les âmes les plus pures et les plus éclairées.
מ Sa Providence embrasse tout, elle gouverne tout. Et comme nous confessons que Dieu est incorporel, tout-puissant, invisible, de même nous tenons comme dogme constant et invariable qu’il veille sur nous, et que rien ne se fait ni dans le ciel, ni sur la terre que par sa Providence. Mais souvenez-vous que nous disons simplement que rien ne se fait sans sa Providence, et non sans sa vu-lonté. Car s’il y a bien des choses qui se font sans sa volonté, il n’y a rien, absolument rien qui ait lieu sans sa Providence.יי
La foi de la Trinité est le fondement sur lequel (n· ·״ 71 . ׳ Page 165.) pose toute l’Eglise.
Un Dieu, en trois personnes, Père, Fils, et Saint-Esprit.(Page H.) Une Trinité qui pourtant se partage en trois personnes réellement distinctes, car le Fils est autre que le Père , et le Saint-Esprit autre que le Père et le Fils, sans qu’il y ait toutefois nulle différence de nature ni de dignité dans les trois personnes divines: c’est là un mystère à quoi l’infidèle ne peut rien comprendre. Nous-mêmes nous ne le comprenons pas. Elle est au-dessus de toute intelligence et temporelle et éternelle. Tout ce qui est hors de cette Trinité sainte , se mesure par les siècles et par les temps. Mais dans l’éternité il n’y a point de temps. Une seule substance , une même nature dans la Trinité. Les trois personnes sont égales en toutes choses, en puissance, en opérations, en perfections. Le Fils et le Saint-Esprit participent à toute la splendeur de la gloire de Dieu le Père ; une seule et même vertu dans ,l’unité de la Trinité (1).
(1) Voici les paroles textuelles dont se compose ce paragraphe : Tri-nitatis fides per quam substinetur omnis Ecclesia. Hom. 1x in Exod. n° 3, pag. 163.
Substantia Trinitatis ex toto incorporea. Périarch., lib. iv, n° 27 pag·1S9·
Alius a Pâtre Filius, et non idem Filius qui est Pater, alius et ipse Spiritus Sanctus a Pâtre et Filio; est crgo hœc trium distinctio personarum in Pâtre et Filio et Spiritu Sancto. Hom. xn in Num. n° 1, pag. 812.
Cum confitearis meum Dium, eademque con/èssione Patrem et Fi-Hum et Spiritum Sanctum asseras unum Deum; quam inextricabile vi-detur hoc esse infidelibus! Horn, vin Exod. n° 3, pag. 145. Sanctœ Tri-nitatis inJinita cognitio... Supra omnem œternitatem intelUgenda sunt ca quœ de Pâtre et Filio et Spiritu Sancto dicuntur. In ps. cxlv, pag. 84.5. — Périarch., lib. iv, n28 ״, pag. !45.
Una enim substantia est et natura Trinitatis. Horn, xn inNuiner., pag. 512. Ut unilatem Deitatis in Trinilate cognoscas, solus Christus in prce senti lectione mine peccata dimittit ; et tamen cerium est a Trinilate peocatadimitti. Inlsai. tom. 1, pag. 350. Nihil in Trinitale majus, minusve dicendum est. Periarch., lib. 1, cap. ht, 11° 7, pag. 65. A’ozz arbitrer per ~ cipere aliquem posseomnem splendorem gloriœ Dei, nisi Filium Dei. Si ei addas etiam ejus Spiritum, optime; et absolutissime de Deo et dices et senties. In Joan. torn, π, pag. 4>6. ed. Huet.
Dieu le Père est de toute éternité' père de son fils : (II. t.Pages 325, 506.) car il n’est pas devenu père à la manière des hommes. Mais étant Dieu parfait, et ne pouvant par Conséquent être privé de la qualité de père, qui est un bien par rapport à un fils tel que le sien; quelle raison auroit-il eue d en arrêter l’exercice, et de ne point se rendre père dès les commencemens, si l’on peut s’exprimer de la sorte (1)?
(1) Bossuet a étendu admirablement cette pensée dans ses Elèvat' sur les mystères, 2e sem. 1reélév. tom. x des OEuvr. compl. éd. in4־". Pâtis, 1/45. pag. 22 et suiv.
La génération éternelle du Fils n’empêche point le Père d’être toujours dans le Fils, comme le Fils est toujours dans le Père, parce que le Père est inséparable du Fils comme le Fils l’est du Père.
N’allez point chercher parmi les choses humaines (Périarcb.Page 55.) d’objet de comparaison ni de rapprochement; c’est là un mystère que la pensée elle-même ne sauroit atteindre. Ce n’est point l’adoption qui donne au Fils la qualité de Fils de Dieu ; il l’est de sa nature, procédant du Père, comme la splendeur de la lumière. Et comme la lumière n’a jamais pu être sans splendeur, de même l’idée de Fils est inséparablement unie à celle de Père ; en sorte qu’il n’est pas possible de concevoir un seul moment où le Fils n’ait pas été.
(G. 11. page 382) Le Dieu que nous adorons est le Dieu de l’ân-cien et du nouveau Testament ; le Dieu de tous les justes, tantde l’ancienne que de lanouvellealliance. Si Enoch, Moïse, Aaron, Samuel, invoquaient le Seigneur, sans doute qu’ils invoquaient le Seigneur Jésus-Christ. Et si, invoquer le nom du Seigneur, c’est adorer le Seigneur, il s’ensuit qu’invoquer le nom de Je'sus-Christ, c’est par-là même adorer Je'sus-Christ. Nous offrons nos prières au Seigneur Je'sus-Christ, comme nous faisons au Père de l’univers, parce que le A'erbe divin nous enseigne lui-même qu’il faut rendre le même hommage à Dieu le Père et le Fils, comme il nous apprend dans !’Evangile à honorer le Fils comme le Père.
(h. 11. ld°e 58. ) La foi que les saints apôtres nous ont transmise sur !,Esprit-Saint, c’est qu’il este'galau Père et au Fils en honneur et en dignité. C’est lui, cet EspritSaint, qui a inspiré tousles saints, les prophètes et les apôtres : c’est par lui que les divines Ecritures ont été écrites.
(11. ן.■׳ge *°1·) Jésus-Christ après sa résurrection est descendu Jans jes lieux bas pour délivrer les âmes des saints qui s’y trouvaient détenues. Quelle ־inconvenance y a-t-il qu’un médecin aille visiter des malades: que le souverain médecin soil descendu vers ceux qui avoient besoin de son secours? Il y est descendu non pour être l’esclave du tyran qui y régnoil, mais pour le combattre et pour le vaincrc.il n’a pas cessé dans ces lieux bas d’être le Christ, le Fils de Dieu.
Nous devons à la parole de Dieu le même respect (H. Π. Pa o1 ־׳ ! £״.) que pour le corps et le sang du Seigneur ; car la parole dont nos âmes se nourrissent est une es-pèce de second corps dont le Fils de Dieu s’est re-vêtu (1).
(1) C’est cette pensée qui fait tout le fond du sermon de Bossuet sur le rapport entre le mystère de !’Eucharistie, et la parole de Dieu. Serin, pour le 2e dim. de car. torn, iv, pag. 40־· H y cite le mot d’Origène à la pag./μ 9420 ג.
Vous le savez, vous qui assistez à nos divins mystères,(l’age 176.) avec quelle précaution et quelle révérence vous recevez le corps de Jésus-Christ qui vous y est donné ־, vous trembleriez qu’il ne tombât quel-que parcelle du don sacré. Vous vous le reproche-riez, et avec raison, comme une coupable négli-gence. Or, si vous apportez tant de soins pour ne rien perdre du corps de Jésus-Christ : croyez-vous que ce soit un moindre manquement de négliger la parole de Dieu ?
La manne qui fut donnée aux Juifs dans le désert, (l’age 290·) n’étoit qu’une nourriture figurative. Mais ici, la chair du Verbe de Dieu est un aliment réel, aux termes de Jésus-Christ lui-mêine : Ma chair est vé-ritablement une nourriture.
(A. II. Page 25y.) Lorsque vous recevez le pain mystique, mangez-le dans un lieu pur ; c’est-à-dire ne recevez pas le sacrement du corps du Seigneur dans une âme impure et souillée par le péché. Car ce pain mystique est ce qu’on appelle le saint des saints. On ne le nomme pas simplement saint, mais le saint des saints, pour faire voir que cette nourriture n’est pas un aliment indifférent, qu’elle n’est pas pour ceux qui en sontindignes, mais seulemcntpour les saints.
(Page 255.) Nous disons à Dieu, d’après l’ordre que Jésus-Christ lui-même nous en a donne' : Pardonnez-nous nos offenses, comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés. Chacun de nous a donc le pouvoir de pardonner les offenses qu’il a reçues. (Edit. Oxon., page 129) Mais il n’y a que ceux sur qui Je'sus a soufflé, qui aient le pouvoir de remettre celles qu’il appartient à Dieu seul de pardonner, et de lier les pécheurs dont les fautes n’admettent point de guérison.
(R. U. l’age 9SS) ( Sur cette parole du Psaume XXXVII : Je confesserai mon iniquité.) Voyez ce que nous enseigne !’Ecriture sainte : qu’il ne faut point cacher le péché que l’on a commis. Car, de même que ceux qui se sentent incommodés de réplétion d’humeurs, éprouvent du soulagement lorsque leur estomac s’en est débarrassé, de même le pécheur qui a confessé son iniquité, coupe racine à la cause de son mal. Seulement l’important est de bien choisir la personne à qui vous découvrirez votre péché.
« Après avoir comparé ceux qui se déchargent (G. I.Page 295.) de leurs péchés par la confession avec ceux qui se soulagent par le vomissement, et qui trouvent dans ce remède le moyen de garantir leur estomac des crudités et des indigestions dont il étoit accablé, Origène ajoute que notre plus grande inquiétude doit être de faire un digne choix d’un prêtre éclairé et charitable pour lui déclarer notre conscience. La seule chose, dit-il, que vous devez faire en celte rencontre est d'examiner avec grand soin quel est celui à qui vous devez confesser votre péché. Faites une épreuve sérieuse du médecin à qui vous devez exposer la cause de votre maladie , et voyez s’il sait s’affoiblir avec les foibles, et pleurer avec ceux qui pleurent, s’il connoit de quelle manière il faut compatir aux afflictions des autres, et prendre part à leur douleur; afin qu’ayant fait paroître dans sa conduite la prudence et la commisération d’un véritable médecin, vous suiviez et pratiquiez avec une fidélité très-exacte les conseils qu’il vous aura donnés. Que si même il reconnoît que votre maladie soit assez grave pour être exposée publiquement à l’assemblée de toute !’Eglise , et s’il juge que ce remède soit nécessaire tant pour l’édification des antres que pour procurer plus facilement votre guérison, c’est une chose dont vous devez déli־ bérer mûrement, etdans laquelle vous êtes obligé de vous conduire par l’avis de ce sage me'decin. (1)»
(1) Traduct. d’Hermant, fie de saint Jean-Chrysost., liv. xi. ch. xvii, pag. 2/5. Voyez aussi le même passage traduit avec plus de briè-veté dans le vol. xm (posthume ) des fies des saints , d’Alban Butler, pag. 1y5. Origène exprime la même doctrine dans !’Homélie !11 sur le Lévitique , pag. 70 du tom. 1, édit, de Genebrard. La foi de notre Eglise catholique, sur le devoir de la confession faite au prêtre, se trouve solidement appuyée par l’argument de prescription , par les textes précis de S. Irénée ( adv. Hcercs. lib. 11, cap. vi ); de Tertull. (adv. Marcion. lib. 11, cap. xxv ); de S. Cyprien , comme l’observe très-bien D.Ceillier à son article (Hist, des écriv. ecclés. tom. m, pag· h et 199)·
La confusion que vous subissez devant les hommes vous sauvera de celle que vous auriez un jour à souffrir en pre'sence des saints anges. Eh ! pourquoi rougiriez-vous d’exposer aux yeux des hommes ce que vous savez bien n’être pas caché aux yeux du Seigneur? Pourquoi attendre d’autres accusateurs que de votre propre conscience ? Peut-être Dieu m’épargnera si je ne m’épargne pas moi-même. Aimez-vous mieux que le démon se porte pour votre accusateur au tribunal du souverain Juge ? Alors il aura pour compagnons de son châ-timent ceux qu’il aura convaincus d’être les coin-plices de ses iniquités.
(G. II.Page 300.)Ce n’est qu’après de longues épreuves que s’ac-corde la rémission des péchés ; autrement on ouvre une libre carrière au péché. L’indulgence doit se proportionner à la pénitence qui en a été faite.
(Përiarch. Page 420 et suiv.) L’âme humaine est d’un prix inestimable, comme étant crée'« à !’image de Dieu ; comme son divin auteur, invisible, intelligente, spirituelle. Le dogme de son immortalité s’est fait sentir à tous les peu-pies, Chrétiens, Juifs, Grecs, Barbares n’importe.
Il est des péchés commis par ignorance qui seront expiés temporairement dans un lieu que la justice divine a destiné à cet effet, et que les âmes qui n’ont pas mérité de prendre aussitôt leur essor vers le ciel habiteront, mais sans y demeurer enchaînées pour jamais.
Dieu a donné à l’homme le libre arbitre. (Périarcli. Page 422. G. II. Page 158.) Toutes les âmes raisonnables ont reçu du Créateur cette prérogative; et aucune d’elles n’est sortie vicieuse des mains de Dieu. Si donc parmi les hommes on voit ceux-ci embrasser la vertu et pratiquer le bien, ceux-là s’attacher au mal et commettre l’iniquité; cette différence ne doit pas être imputée au Créateur qui les a faits tous semblables, mais à l’usage que les uns et les autres ont fait de leur liberté. C’est leur libre arbitre qui sauve les premiers en les portant à imiter Dieu, et perd les autres en leur faisant négliger le bien. Il dépend de nous de mener une vie louable ou criminelle. Nous ne sommes pas les maîtres de certains accidens extérieurs qui nous poussent soit vers le mal, soit vers le bien ; mais il appartient à la raison de diriger la conduite dans l’üsage que l’on doit en faire. En commettant le péché, l’âme s’asservit volontairement. Elle abandonne son brevet d'immortalité, qui lai fut donné par son divin créateur. Nous restons libres de consentir ou de résister à ce qui nous porte soit au vice soit à la vertu.
Otez à la vertu la liberté de choisir, vous lui ôtez son mérite et son essence.
(G. 1. Page 217.) La grâce est tellement nécessaire pour faire le bien, que sans elle on ne peut ni confesser Jésus -Christ, ni pratiquer aucun autre commandement de Dieu. Jamais personne n’a pu faire aucune bonne action, qu’étant assisté du secours du Verbe divin.
La nature humaine est incapable par elle-même de chercher Dieu, et de le trouver purement, sans le secours de celui qu’elle cherche. Dieu ne se manifeste qu’à ceux qui, après avoir fait tout ce qui est en eux, reconnoissent qu’ils ont besoin de la grâce de celui qui se fait connaître à eux. Aussi personne ne se flatte-t-il de la victoire, personne ne s’en fait honneur à soi-même ; on sait que c’est Jésus-Christ qui la donne. (G. I. Page 192.) C’est lui, c’est ce divin Sauveur qui combat pour nous contre les princi-pautés et les puissances de ce siècle ténébreux. C’est donc avec raison que les saints ont coutume de chanter à Dieu des cantiques d’actions de grâces, quand ils ont remporté quelques avantages sur l’ennemi, persuadés qu’ils sont que c’est par la grâce divine et non par une vertu propre et per-sonnelle à eux-mêmes qu’ils ont triomphé.
(S’adressant aux. Catéchumènes): (H. II Page 138) Qui vous a rassemblés dans !’Eglise ? qui est-ce qui vous a fait quitter vos maisons pour vous réunir à cette assemblée ? nous n’avons point été vous chercher chacun en particulier dans votre domicile, pour vous attirer dans le lieu où vous êtes : c’est le Père Tout-Puissant qui י par sa vertu secrète , a fait sentir à vos cœurs le mouvement même involontaire qui vous appeloit à la foi. Mais par-là même que nous pouvons nous laisser aller à ces impressions surnaturelles, il est possible aussi que l’on y résiste. (Périarch. Page 141·)
Il n’y a pas d’homme qui n’ait jamais péché, à la réserve de Jésus-Christ seul, qui, en se revêtant de notre nature humaine, seul n’a point connule péché. Personne, pas même l’enfant qui vient de naître, (G. I. Page 90.) n’échappe à la contagion héréditaire du péché. Nous entrons dans le monde souillés de la tache que nous ont fait contracter un père, une mère coupables ; il n’y a encore une fois que le seul Fié-dempteur qui ait été sans péché. Tous les autres hommes sont demeurés quelque temps au moins sous le joug du péché. Pourquoi baptisons-nous les enfans , si ce n’est pour les purifier, par le bain du baptême, de la souillure qu’ils ont apportée en naissant? Autrement, à quoi bon leur appliquer la grâce de ce sacrement, s’il n’y avoit rien en eux qui eût besoin de rémission et d’indulgence ?
Dieu fit aux Juifs un commandement de la circoncision, (G. II. Page 394.) non comme une pratique bonne par elle-même , mais comme une marque qui les distinguât du reste des nations ; comme un sceau que le fer chaud imprime sur le front des animaux, pour empêcher de les confondre avec d’autres. Encore ne devoil-elle avoir lieu que pour un temps.
Il y a aujourd’hui une autre circoncision, mais spirituelle, qui doit s’imprimer non sur une partie de la chair, mais sur tous les membres ; plus rigoureuse encore que la première.
(G. I. Page 155.) Tout acte qui n’a pas Dieu pour objet ou pour principe, est vain et illusoire. Vous avez beau pratiquer à !’extérieur la loi divine ; si vous agissez intérieurement par un amour de vaine gloire pour plaire aux hommes, vous êtes bien loin d’être sans reproche : c’est faire injustement des œuvres de justice.
(Page 48ג.) ConsideTez les dispositions de la divine sagesse. Dieu n’a point décerné, dans le Décalogue, des peines contre les prévaricateurs de sa loi ; c’est qu’il veut qu’on l’observe non par crainte, mais par amour ; il veut une obéissance fdiale. Ailleurs il punit de mort ces mêmes prévaricateurs, pour nous apprendre que si nous venons à mépriser ses ordonnances il nous punira comme des esclaves en révoile , il en agira avec nous comme avec des esclaves, non plus comme avec des enfans.
(G. 11.Page 11o.) Pourtant Dieu ne laisse pas sans récompense sur la terre les actes de vertu opérés par le seul motive־ ment de la justice naturelle. Quoique ce ne soit point là une huile d’un parfum bien suave, elle ne laisse pas d’avoir son prix auprès du Seigneur.
Sans la foi, il est impossible d’etre sauve'. Il n’y a, dans !’Eglise qu’une seule foi, qui est comme le lien qui unit les fidèles entre eux et avec leurs pasteurs. (G. t. Page 185. G. II. Page 45.)
(G. I. Page 537·) Point d’autre mesure dans l’amour que l’on doit à Dieu, que de l’aimer sans mesure. L’aimer, c’est se consacrer à lui tout entier et sans réserve.
« Quelque parfait qu’on soit dans la foi, (G. II.Page 9·) si votre puissance manque, ô Seigneur! la foi sera réputée pour rien. Quand on serait parfait en pudicité, si l’on n’a pas la pudicité qui vient de Dieu, ce n’est rien. Si quelqu’un est parfait dans la justice et dans toutes les autres vertus , et qu’il n’ait pas la justice et toutes les autres vertus qui viennent de vous , ô mon Dieu ! tout cela est réputé pour néant. Ainsi que le sage ne se glorifie pas dans sa sagesse , ni le fort dans sa force ; car ce qui peut donner de la gloire n’est pas nôtre, mais il est un don de Dieu; c’est de lui que vient la force et tout le reste. (1) »
(1) Traduit par Bossuet , Défense de la Tradit., liv. xn, cl>. xxvn, tom. ni des OEuvr. posth., in-4°> pag. 467, 468.
L’ange dit à Loth, après qu’i] fut sorti de Sodome: Ne regardez point en arrière, (Gen., xix.>9·)et ne demeurez point dans toute cette contrée, mais sauvez-vous sur la montagne. Vous avez quitté Sodome, n’y retournez plus ; vous avez quitté vos vices et vos péchés , ne vous y rengagez plus. Mais il ne suffit pas pour le salut de ne point regarder en arrière, si l’on n’a soin outre cela de ne point demeurer dans toute la contrée; c’est-à-dire qu’il seroit inutile de commencer à se mettre dans le chemin de la vertu si l’on demeuroit encore dans les confins du vice, et si l’on ne se sauvoit jusque sur la montagne dans laquelle seule on trouve le salut qui est Jésus-Christ.
(Num., vi. 20.) « Il est remarqué dans le livre des Nombres que les Nazaréens, qui se consacroient à Dieu par un vœu particulier, ne dévoient jamais boire de vin, ni de quelque autre liqueur qui put enivrer. Mais comme, nonobstant cet engagement, ilspouvoient être tentés d’en boire et de violer leur vœu, Dieu, pour empêcher que cette passion ne les portât à ce qu’il leur défendoit, ne leur permet pas même de boire du vinaigre qui est fait de vin corrompu, ni de manger des raisins soit verts, soit secs, ni aucune chose qui vînt des grappes de la vigne. Admirable conduite! dit Origène, et qui doit vous apprendre que, si vous voulez arriver à la perfection, et conserver la grâce que vous avez reçue, vous devez quelquefois mortifier vos passions en des choses permises, afin qu’elles ne vous portent pas à de mauvaises. Ce n’est que du vinaigre qui n’est nullement agréable à boire, n’importe, il est fait de vin: ce ne sont que des raisins aigres et insipides, n’importe. Si vous ne mortifiez en cela votre appe'tit , vous passerez bientôt les bornes, et vos passions, qui sont insatiables et infinies, vous entraîneront à de fâcheuses extrémités(1).»
(1) Domin.de Joly, ev. d’Agen, tom. 1, pag. 178, éd. Paris, 17Ô4· page 562.
Ayez dans vos mains des lampes ardentes. Que le (L״c XII 3י־·) feu de la foi brille toujours en vous, que la lampe de la science y soit toujours ardente.
« Cet usage où nous sommes de prier vers (Ed.Oxon.) !’Orient vous invite à regarder sans cesse cet orient (Page 1) d’où se lève pour vous le soleil de justice, d’où vous vient continuellement la lumière de la foi ; afin que vous soyez toujours environnés de son éclat, et que le jour de la foi luise sans cesse pour vous (2). »
(2) Bossuet, Serm. sur la vigil, chrét., tom. pag. 267.
La continence de la chair, destituée des autres , vertus, n est pas une hostie à présenter au Seigneur. (G. i. Page !87.)
Mettez à votre chair le frein de la continence. (Page 2gg<) Egorgez-la devant le Seigneur par la mortification de tous vos membres. Tant que nous sommes assujettis à cette chair corruptible , c’est une nécessité de la châtier.
Le moyen de conserver une chasteté rigoureuse . à moins de s’étayer sur les étroites observances du jeûne ? Et comment s’appliquer à la méditation de !’Ecriture . si ce n’est par l’abstinence ?
Ne vous persuadez pas que ce soit assez de se (Ί. IV. ed. Bened, Page 562.) renouveler une seule fois ; il faut renouveler la nouveauté même (1).
(1) Bossuet .".plusieurs fois cité ce précepte d’Origène d’après l’Apô-tre;Serm. torn. 111, pag. 46-i (tom. nn, pag. 28). Le commentaire te plus judicieux qu’il en fait, est, selon moi, celui qui se lit à la page 80 àuserm. sur la résurrection, tom. vm. « C’est peu de se dépouiller de » ses péchés et d’en nettoyer sa conscience ; il faut aller maintenant aux » mauvais désirs ; il faut porter la main à ces habitudes vicieuses que le «péché a laissées en nous en se retirant, comme un germe par lequel »il espère icvivrc bientôt, comme un reste de racine qui fera bie.ntôt * repousser celte mauvaise herbe. ״
(G. t. P‘■ 289-) (Contre la médisance , à l’occasion de Marie sœur de Moïse). Cet exemple est une instruction salutaire qui nous apprend qu’il ne faut pas médire, non-seulement contre les saints, maiscontre le prochain quel qu’il soit. Par le châtiment dont Dieu punit ce péché, apprenons à en connaître l’énormité. Ce n’est pas le seul témoignage que nous donnent nos livres saints de l’aversion que le Seigneur a de la médisance. Faisons usage de ces exemples comme d’épées à deux tranchans pour retrancher de nos cœurs le vice de la médisance, à moins que nous (Xm״.,x11.) ne voulions nous soumettre à la lèpre spirituelle qui en devient le juste châtiment.
(G. 1.) C’est par la prière qu’Anne obtient le don de la (F׳ge 2θ/·) fécondité et le bonheur d’être la mère de Samuel.
Combien d’âmes stérilesn’ont-ellespas du, comme elle, à la prière, le bienfait d’enfanter des discours salutaires et pleins de la connaissance de la vérité !
Je ne me rappelle qu’avec effroi celte parole de (Page 401.) !,Écriture : Ne vous chargez point d’un fardeau plus pesant que vous ; et celte autre : Ne cherchez pointa devenir juge , de peur que vous ne puissiez pas ôter les iniquités du peuple. Car enfin que me servira-t-il d’être assis avecautorité dans une chaire, et de recevoir les honneurs de la prééminence, si je ne suis pas autant élevé au-dessus des autres par la sainteté de ma vie, que je le serai par l’éminence de ma dignité ? Et ne dois-je pas m’attendre à être d’autant plus tourmenté, qu’étant un pécheur je recevrai de tout le monde des hommages qui ne sont dûs qu’au juste ?
Toutefois que voit-on aujourd’hui? (H. I. Page 420.) Des évêques qui veulent enchérir sur le faste des princes. Il nous faudrait presque des gardes comme aux rois; on se rend redoutable et inaccessible, surtout aux pan-vres. Ceux qui nous demandent des grâces, on en • agit avec eux comme les tyrans les plus durs et les plus farouches. Il semble que l’ordre sacerdotal devienne un titre d’orgueil, faute de connoîlre en quoi consiste sa vraie grandeur. On voit des prêtres qui perdent le souvenir de l’humilité, du moment où ils ont été ordonnés, comme s’ils ne l’avaient été que pour cesser d’être humbles; au lieu qu’ils devaient devenir d’autant plus humbles qu’ils étaient devenus plus grands dans !’Eglise.
L’évêque ne doit prêcher aux fidèles que ce qu’il (G. 1. Page 84.) a appris de Dieu, et non ee qu’il ne sait que de lui-même.
(G. 1. Page 199.) La lumière de la science s’obscurcira si vous ne fournissez de l’huile à la lampe. Et il arrivera par votre faute ce que dit le Seigneur dans l’Evangile : (Matth., xv.) Qu un aveugle conduisantun autre aveugle 3 tousdeux tombent dans le précipice. Afin donc que la lumière de la science demeure dans les prêtres, et que cette lampe soit toujours allumée, acquittez-vous de ee que vous leur devez. Que si, recevant de vous abondamment les choses nécessaires , ils négligent de s’appliquer à !’instruction, ee sera à eux à rendre compte à Dieu de vos âmes.
(Page 81) Ce n’est pas le sacerdoce en lui-même qui sauve le prêtre, mais la pureté de ses mœurs. Sa dignité le sanctifie, et il honore sa dignité.
(Page 51.) Voulez-vous savoir quelle différence il y a entre les prêtres de Pharaon et les prêtres du Seigneur : Le roi de l’Égypte enrichit les siens en leur donnant des terres ; (Deut., XVI״.) Jésus-Christ ne donne aux siens d’autre partage que lui-même.
(g. ז Pages 150, 151.) La loi ordonne d’offrir aux prêtres les prémices et des fruits et du bétail: et je pense qu’il est nécessaire (Un8. X) encore aujourd’hui d’observer cette loi au pied de la lettre. Il est convenable , il est avantageux aux fidèles d’offrir ces prémices aux prêtres de !’Évangile. Jésus-Christ lui-même l’a ordonné, en voulant que ceux qui annoncent !’Évangile vivent de !’Evangile,etque ceux qui servent à l’autel vivent de l’autel (1). Comme donc il est digne et convenable de donner cette marque de reconnaissance aux ministres de Jésus-Christ, je pense au contraire qu’il est indigne et impie de. vouloir les en priver.
(1) Ita et Dominas ordinavit iis qui Evangelium annuntiant. de Evangelio vivere. 1. Cor. ix. 1/[.
Il y a dans l’âme du pécheur une semence de démon ( A. 1.) qui, durant tout le temps qu’elle y réside , le détourne de faire aucun bien. Si mon péché n’é-toit écrit, qu’avec de l’encre, peut-être viendrois-je à bout de l’effacer; mais c’est avec un stylet de fer, qui l’a empreint dans mon cœur, si fortement qu’il y reste attaché, et qu’il m’accompagneradevant le tribunal de Jésus-Christ.
Les péchés que nous commettons restent gravés dans notre âme ( tant qu’ils ne sont pas effacés par la pénitence) (2). Au jour du dernier jugement, ils reparoîtrontpour être nos accusateurs par-devant le tribunal du souverain juge. Vous avez commis un meurtre, vous êtes enrôlé au service du démon ; un adultère, vous vous êtes vendu au démon ; c'est là l’image et !’inscription du prince auquel vous vous êtes donné. Voilà sa monnoie et son effigie. Cespéchés se sont imprimés dans votre âme comme avec le burin; ils se montreront au grand jour , pourle fidèle accomplissement de ce motde Jésus-Christ, Rien de caché qui ne doive être manifesté. (Matth., χ.26.)
(2) V. la note au bas delà page 656 de D. Ceillier, loin. 11 de son Ilist. des ec/ïi׳. ccclés.
(G. I.Page t93.) Comme la justice s’engendre de la justice , et la chasteté de la chasteté , de sorte que celui qui n’est d’abord que légèrement chaste le devient tous les jours de plus en plus en conservant le ferment divin de cette vertu ; de même celui qui a une fois reçu le levain, quoique petit, de l’iniquité, devient de jour en jour plus méchant, s’il n’a soin de rejeter ce levain.
A celui seul peut appartenir d’offrir le sacrifice perpétuel, qui s’est voué à une perpétuelle chasteté.
Dites-moi, vous qui n’assistez à !’Eglise que les jours de fêtes , les autres jours ne sont-ils pas aussi des fêtes comme ceux-là ?
Parmi les hommes, les uns !’enorgueillissent d’être issus de race royale , de familles distinguées ; d’autres tirent vanité du pouvoir qu’ils ont de faire du mal; d’autres sont fiers de leurs richesses, de leurs terres, de leurs habitations. Tous ces hommes ou se glorifient vainement, ou se louent honleu-sernent, ou se flattent bien à tort. 11 y en a d’autres qui semblent avoir des raisons plus plausibles de se glorifier , les uns pour leur sagesse ou la pureté de leur vie, quelques-uns pour les souffrances qu’ils ont pu essuyer pour le nom de Jésus-Christ.
Tout cela est très-solide. Pourtant nous ne pouvons néanmoins nous en glorifier avec justice , si nous aimons la vérité, après que sain tPaul lui-même, avec tant de sujet de se glorifier , n’a pu néanmoins le faire sans péril; (nCor.su.7) et qu’il lui fut donné un ange de Satan qui le lourmentoit pour l’empêcher de tomber dans la vaine gloire.
Observez quelque disciple de Marcion, (G. 1.Page 405.) de Valentin ou de quelque autre hérétique: avec quel soin vous le verrez couvrir d’un masque de douceur et de pureté les idoles qu’il s’est faites , c’esl-à-dire ses fausses opinions! Je crois, moi, qu’un hérétique de bonnes mœurs peut faire beaucoup plus de mal qu’un autre , parce qu’il a plus d’autorité que celui qui dément et qui décrédite la sienne par ses actions. C’est pourquoi nous devons nous garder soigneusement de ces hérétiques dont la conduite paroît si exemplaire, el dont on peut dire que la vie est réglée, non par l’esprit de Dieu, mais par celui du démon. Car de même que les oiseleurs présentent aux oiseaux un appât qui sert à les faire prendre plus aisément; de même , s’il est permis de parler de la sorte , il est une cer-laine sainteté diabolique dont use le malin esprit pour attirer l’homme dans l’erreur, et l’y engager davantage.
(G. II. Page y5. Marc., xui.) Vous ne devez point prêter l’oreille à ces hommes qui vous disent, Voici le Christ avec nous; quand ils ne se trouvent pas dans celte Eglise qui est toute resplendissante de clarte's de l’orient à l’occident, qui est toute pleine d’une lumière e'clatante ; dans cette ]Eglise qui , dù moment où elle a coin-mence' à subsister au nom de Je'sus-Christ, se doit maintenir jusqu’à la consommation des siècles.
« Telle e'toit l’ide'e que se faisoit Origène de la pre'tendue sévérilé des pharisiens , lorsqu’il appliquait si inge'nicusement aux he're'-tiques le reproche que Dieu faisoit à son peuple dans le prophète Ezéchiel, d’avoir pris les orne-mens de son sanctuaire pour en revêtir les idoles; car, voyez, disoit ce savant homme, avec quelle régularité un Marcion , un Valentin, jeûnent, se mortifient et domptent leur chair : or, qu’est-ce que tout cela, sinon les ornemens du sanctuaire et du temple de Dieu, dont ils couvrent leurs mœurs, qui sont proprement leurs idoles ? (1) »
(1) Bourdaloue , Sermon sur la sévérité chrét., Dominic., tom. 11, pape 560, éd. Rigaud.
(Mattb., xxvi. 58.) ( Pourquoi, demande Origène, cette douleur profonde où Jésus-Christ est plongé au jardin des Olives ? Et il répond) « que c’est en pensant au peu de fruit que les hommes en général dévoient tirer de sa passion : qu’il songeoit alors au grand nombre d’âmes qui ne laisseroient pas d’être damnées. (2) »
(2) La Colombière, Sermons, lom. 1, pag. K.
(Hom. in Jer.) Quand nous disons dans les prières de !’Eglise , Dieu tout-puissant donnez-nous part avec vos pro-phèteSj et tous les apôtres de votre Christ· je ne sais si nous comprenons bien ce que nous demandons. Cai* c’est comme si nous disions en effet au Seigneur: Faites-nous souffrir ce que les prophètes ont souffert ; faites que nous soyons haïs des hommes comme l’ont été les prophètes; et faites-nous annoncer aux hommes votre vérité en telle sorte que cela nous attire leur persecution. Autrement de dire à Dieu , donnez-nous part avec eux Λ et ne vouloir pas souffrir comme eux , ce seroit lui faire une demande injuste et déraisonnable.
Lorsque Dieu ne se montre pas irrité contre les pécheurs, (1V.) il est vrai de dire que c’est par colère qu’il les épargne (1).
(1) Bossuet a magnifiquement développé cette idée dans son dis־ cours sur l’importance du salut. Semi., tom. 1, pag. 227 et suiv.
Si Dieu n’étoit que bon , nous mépriserions sa bonté ; et s’il n’étoit que sévère , le désespoir du salut à la vue de tant de péchés que nous avons commis nous précipiteroit dans l’abîme de tous les vices.
(Sur la fuite du péché.)(I.) Nous devons travailler à en déraciner jusqu’aux germes les plus cachés. Vous devez abattre cette maison qui, infectée par la lèpre , est condamnée à être renversée. Ce n’est pas assez : jusqu’aux pierres elles-mêmes, jusqu’aux ruines de celte maison, tout doit en être détruit, de peur que le démon n’y trouve des matériaux dont il sauroit bien recomposer une autre maison d’iniquité.
« La tentation suppose deux parties ; l’une qui attaque, l’autre qui conteste ; et où il n’y a point de résistance, il n’y a point, à proprement parler, de tentation. Or, parmi ceux qui s’échauffent à la poursuite des biens temporels, combien y en a-t-il qui ne donnent pas seulement au démon la peine de les attaquer dans les formes ! (1) »
(1) Trad, par Fromentières , Carême , toin. 1, pag. g2 , gâ.
(Sur le vœu de saint Paul, Je voudrais être anathème ,etc.) « Quelque étrange que paroisse un pareil souhait, il ne faut pas s’étonner que l’esclave veuille être anathème pour ses frères, après que le maître s’est fait périr pour ses esclaves. (2) «
(2) Trad, par Senault, Panégyr., toin. 111, pag. 50ÿ.
Origène mourut en 255, sous l’empire de Gallus et de Volusien, laissant une mémoire immortelle , regardé dès son vivant comme un prodige d’érudition. Sa renommée, bien loin de s’affoiblir, n’a fait que s’accroître avec le temps , les préventions qui obscurcissoient sa gloire ayant cédé peu à peu à l’éclat des discussions (3).
(3) Cujus vida, si c/uœ suntin scripds, potest eoruni quœ fidélité!׳ scripsit luminosus quidam ac cœlestis splendor exsuperare. Haymond Halberstad. cpisc. Breviar. Hist, eccl., lib. vi, cap. 111, pag. 20S.
Sur les erreurs qu’on lui a reprochées , il est bon de consulter les écri-\ains qui en ont parle avec moins de légèreté que ses critiques, entre autres Dufossé , dans la Eie qu’il a publiée à.’Origène et de Tertullien; Huet, Halloix, Petit-Didier, Duguet, dans les savantes apologies qu’ils ont données de la vie et des ouvrages de cet illustre défenseur de la vérité chrétienne. On peut regarder l’éloge qu’en ont fait les Centuria-teurs de Magdebourg {Eccles, hist, centur.m, cap. x, pag. 268 et suiv. ) comme une réfutation anticipée des sarcasmes que le ministre Saurin s’est permis contre Origène (Sez’zzz., tom. 11, pag. 219, éd. Lausanne, 1/49)· Bourdaloue , Bossuet ne le citent guère sans ajouter à son nom les titres de pieux, de docte , d’admirable.
(1) Ce grand homme l’avoit été dès l’âge de 17 ans ; et il ne tint pas à lui de répandre dès lors son sang pour le nom de Jésus-Christ. Sa vie tout entière appartint à la religion; et peu d’hommes ont pu dire comme lui avec !’Apôtre, que le monde étoit crucifié pour lui, et lui pour le monde. Dans la dernière année de sa vie, il eut beaucoup à souffrir par la persécution de Dèee. Eusèbe en parle ainsi dans la version de Ruffin : Ita ut mille moitibus vexatus sit, nec tamen una ei quam exop-tabat accideret, persecutore summo studio id gerente, ut nec interltus prœstaretur, nec pœna cessaret.
Si Origène n’a pas eu l’honneur d’être martyr, on ne peut lui refuser le titre de confesseur (1 ) ; il mourut dans !avilie deTyr, à l’âge de 69 ans.