DICTIONNAIRE D'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE
CONTENANT EN ABRÉGÉ L'HISTOIRE DE TOUS LES PAPES ET ÀNTIPAPES, CELLE DES CONCILE8, DES PÈRES DE L'ÉGLISE, DES PRINCIPAUX DOCTEURS, DES HÉRÉTIQUES ET DES HÉRÉSIES, DES SECTES, DES MISSIONNAIRES, DES MARTYRS, DE8 PRÉCURSEURS DE LA RÉFORME, DES THÉOLOGIENS, DES VILLES QUI ONT JOUÉ UN RÔLE DANS L'HISTOIRE DE L'ÉGLISE, ETC.
JEAN-AUGUSTIN BOST PASTEUR
1886
PRÉFACE On sait le développement extraordinaire qu'ont pris depuis une cinquantaine d'années les sciences historiques. Le monde ancien, le moyen âge, les documents originaux, les vieilles chartes, ont été exhumés; on a fouillé les couvents et les archives, on a déchiffré les manuscrits; les découvertes ont abondé; des faits nouveaux ont été mis au jour, de belles légendes ont dû disparaître,- et les excellents manuels qu'on nous faisait apprendre si consciencieusement il y a un demi-siècle, ne sont plus bons à consulter que pour mémoire, et pour établir la comparaison entre le présent et le passé.
L'Église a eu sa part dans ce mouvement de réveil, et si peut-être, comme cela était naturel, la Réformation a fixé d'abord l'attention sympathique de nos savants et de nos écrivains, d'autres périodes ont été également élucidées; les monographies, les études spéciales, les biographies, se sont multipliées, dues à d'humbles ou à d'éminents chercheurs, dont les noms sont Légion (l'Encyclopédie des sciences religieuses n'a pas compté moins de cent soixante et douze collaborateurs), et cet ensemble d'esquisses, de fragments détachés sur les sujets les plus divers, histoire proprement dite, édification, missions, dogmes, controverse, constitue un fond sûr et solide, assez considérable pour qu'il soit permis de dire que nous possédons enfin une histoire ecclésiastique. *
Le livre que je présente aujourd'hui me paraît être la suite naturelle et désirable des travaux publiés ces dernières années, et presque la conséquence de l'accueil qui leur a été fait. Notre siècle aime les Dictionnaires. L'ordre alphabétique n'est x sans doute ni logique, ni profond, et il ne prête pas & de grands développements philosophiques ou littéraires, mais il est simple et commode au point de vue des recherches.
Naturellement un Dictionnaire ne peut pas tout donner, et il ne faut pas non plus tout lui demander. Je m'en suis tenu aux faits matériels et extérieurs, aux hommes et aux choses, et si quelques-unes des catégories comprises dans mon travail sont précises et bien déterminées, il en est d'autres qui sont plus élastiques; lorsqu'on parle par exemple des principaux théologiens d'un pays, ou de ses meilleurs orateurs religieux, il est clair que la limite à fixer entre ceux qui sont plus connus et ceux qui le sont moins, dépend beaucoup du pays où l'on écrit et des lecteurs auxquels on s'adresse. Il y a tel écrivain anglais, allemand, romain ou russe, qui jouit d'une certaine notoriété dans son pays ou dans son Église et qui ailleurs est absolument inconnu. J'ai dû élaguer ainsi des noms qui figurent dans la Real-Encyclopaedia de Herzog, ou dans le Dictionnaire des Sciences ecclésiastiques de l'abbé Glaire, et en revanche revoir et compléter la liste des noms protestants français, qui chez eux est plus ou moins écourtée. On peut demander la liste complète des papes, mais non celle des martyrs ou des missionnaires.
En outre, sur chaque individu l'on ne peut pas tout dire, et le volume lui-même, s'il avait la prétention de faire de chaque article une monographie complète, manquerait son but et cesserait d'être populaire, soit comme usage, soit comme prix. Ce n'est pas une Encyclopédie que j'ai voulu faire; sous ce rapport nous sommes déjà servis, et bien; mais un livre d'un emploi courant, à la portée de tous, et qui résume ce qu'il y a d'essentiel sur chaque sujet. Dans mon intention, ce livre rendra des services non seulement aux pasteurs qui connaissent déjà leur histoire ecclésiastique, aux évangélistes, aux instituteurs, aux directeurs d'écoles du dimanche, mais aux simples fidèles, aux lecteurs de la Bible, aux dames, à toute personne un peu cultivée, qui veut éclaircir un point oublié ou inconnu. J'ai cherché à dire beaucoup de choses en peu de mots, sans phrases, sacrifiant au besoin l'élégance à la clarté et à la concision du style. Je ne saurais mieux donner une idée de mon travail qu'en l'appelant un Bouillet ecclésiastique, bien que je donne plus de développements à certains articles généraux.
Lorsque je mis la main à l'œuvre et que j'écrivis les premières lignes de ce travail, le 9 mai 1865, je comptais un peu sur divers collaborateurs qui, par écrit ou de vive voix, m'avaient promis leur concours et me permettaient même de les nommer. Il y en avait ainsi plus de quarante, et je conserve avec reconnaissance leurs précieux autographes. Mais leur concours a été surtout moral, et leurs bons conseils ne m'ont pas manqué, assez semblables pour le fond, mais un peu différents dans la forme, depuis M. Merle d'Aubigné qui me recommandait de tenir haut et ferme le drapeau de l'Évangile, jusqu'à M. Éd. Sayous qui m'engageait à être aussi objectif que possible: «Même en faisant effort dans ce sens, ajoutait-il, le subjectif percera toujours assez.» Je crois avoir profité de ces bons conseils, mais quant à l'espoir d'une collaboration active j'ai bien vite vu qu'il fallait y renoncer, et sauf quelques amis de la dernière heure, je ne puis nommer comme m'ayant secondé d'une manière efficace et un peu suivie que mon regretté fils, le pasteur Hermann Bost, à Anduze, qui, chargé d'une immense paroisse et d'une Consistoriale à relever, trouvait cependant encore le moyen de m'envoyer, surtout sur la patristique, des articles qui seront appréciés.
Du reste, en imposant à l'auteur une charge plus lourde et plus longue, l'absence de collaborateurs aura eu l'avantage de donner à son travail plus d'unité, et le lecteur ne sera pas exposé à voir le pour et le contre sur un même personnage, lui être offert dans toute la beauté du scepticisme moral et scientifique, a c'est un fanatique, » nous dit Herzog en parlant de Judas Maccabée; et plus loin le même Maccabée est appelé «un témoin de la foi.» Que chacun se fasse son opinion, c'est très bien; mais en général on n'aime pas voir sortir de la même fontaine le doux et l'amer, l'affirmation et la négation. Dans tous les cas un Dictionnaire ne saurait sous ce rapport prendre les mêmes libertés qu'une Encyclopédie.
Je ne ferai pas l'énumération des ouvrages auxquels j'ai dû recourir; la liste en serait aussi longue que peu intéressante; je les cite brièvement au fur et à mesure que je suis appelé à m'en servir, mais il n'en est aucun dont je puisse dire qu'il a servi de base à mon travail. Celui que j'ai le plus souvent utilisé, le Theologisches Universal-Lexicon, d'Elberfeld 1874, est un excellent dictionnaire, surtout pour la théologie allemande, mais il présente de graves lacunes pour tout ce qui concerne les noms et l'histoire de la Réforme française.
Des lacunes, hélas ! où n'y en a-t-il pas ? C'est toujours l'auteur lui-même qui les sent le plus vivement, et je serais presque tenté, maintenant que j'ai sous les yeux ces deux mille colonnes, de me mettre à en faire la critique. J'y renonce, parce que d'autres feront ce travail, je suppose; les uns me reprocheront d'avoir omis des noms importants, ou de n'avoir pas assez développé certains points; d'autres trouveront qu'il y en a d'inutiles, que j'aurais pu laisser de côté sans inconvénient. Tout cela est possible, et je reconnais d'avance que chaque critique aura raison à son point de vue. Tout ce que je puis dire, c'est que j'ai fait de mon mieux, avec le désir délaisser à l'Église un souvenir utile, avec l'espoir que malgré ses imperfections mon travail sera reçu avec la même bienveillance qu'à rencontrée il y a trente ans mon Dictionnaire de la Bible.
Je remercie tous ceux qui m'ont encouragé et soutenu de leurs sympathies, et en particulier ceux qui, hommes ou journaux, ont bien voulu présenter mon travail au public.
La partie typographique, si importante pour un ouvrage de ce genre, a été l'objet des soins les plus scrupuleux et les plus minutieux, et je dois en témoigner ma reconnaissance à l'imprimerie de M. Schuchardt.
Je bénis Dieu qui m'a conservé les forces dont j'avais besoin, et c'est du fond du cœur que je m'approprie les paroles du vieux Samuel: Jusqu'ici l'Éternel nous a secourus. Genève, 19 mai 1884. J.-Aug. Bost.
Pour les personnes qui n'ont pas l'habitude de certaines abréviations, j'indique ici la signification de celles qui apparaissent quelquefois dans ce Dictionnaire.
DICTIONNAIRE D'HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE
ABAISSEMENT de J.-C. v. État.
ABARBANEL (don R.-Isaac), aussi nommé Xbrabanel, Abravanel, Barbanella, Barbinellus et Ramnelia„ célèbre rabbin portugais, né à Lisbonne 1437, d'une famille noble qui prétendait descendre du roi David, et dont l'émigration datait de la première destruction du temple. Son père, Juda ben Samuel, lui fit donner une éducation distinguée qui, jointe à ses talents naturels et à son extérieur aimable, lui attira successivement la faveur d'Alphonse V, roi de Portugal, et celle de Ferdinand de Castille (1484-1492). Les juifs ayant été bannis d'Espagne, il se réfugia à Naples, en 1493, où le roi Ferdinand d'abord, puis le roi Alphonse l'accueillirent parfaitement. Ce dernier ayant dû fuir devant Charles VIII. se retira à Messine où Abarbanel l'accompagna. Après la mort de son protecteur, le rabbin se rendit à Corfou, puis à Monopoli en Apulie, où il composa la plupart de ses écrits; enfin à Venise, comme médiateur entre cette république et le Portugal. Il + 1508 a l'tye de 81 ans, et fut enterré à Padoue où les Vénitiens lai firent de splendides funérailles. Il a laissé de nombreux écrits, qui se distinguent par une vaste érudition, un style facile et une critique relativement indépendante, mais aussi par une regrettable prolixité et par des développements trop considérables donnés à des détails. Ses principaux ouvrages sont: Une dissertation sur la Création du monde; un Traité de la prophétie; une dissertation sur les prophètes messianiques; un travail sur les différents articles de la foi des Juifs; enfin plusieurs commentaires sur l'A. T.. le Pentateuque, les livres historiques, les grands prophètes et les douze petits prophètes. Presque tous ses écrits ont été traduits en latin. On regrette l'amertume constante de sa polémique contre les chrétiens, que les persécutions exercées contre son peuple expliquent sans la justifier.
ABAUZIT, Firmin, né 1679 à Uzès (Gard), à l'époque des persécutions, fut, après la mort de son père, enlevé fort jeune à sa mère pour être élevé dans la religion catholique. Sa mère réussit à le faire évader et l'envoya à Genève, 1689, mais elle expia par plusieurs années de prison le crime qu'elle avait commis de reprendre possession de son enfant. Le jeune Abauzit, vif et intelligent, s'adonna avec ardeur à l'étude des lettres, des sciences et de la théologie. Pour compléter ses études, il voyagea, se lia en Hollande avec Bayle, fit la connaissance de Basnage et de Jurieu; vit de près en Angleterre Newton qui le tint plus tard en haute estime, et refusa les offres de Guillaume III qui aurait voulu le retenir. Il revint à Genève à la demande de sa mère, prit une part active & la nouvelle traduction du N. T. qui parut en 1726, et mérita les remerciements de la Compagnie des pasteurs. Il fut nommé en 1727 bourgeois d'honneur. L'Académie lui offrit une place de professeur de philosophie, mais il préféra garder son indépendance. Il se contenta du titre de bibliothécaire honoraire qui lui fut décerné, et en 1767, âgé de 87 ans (notice de Végobre). — Il avait cultivé avec succès les sciences naturelles; on lui attribue même plusieurs découvertes que d'autres se seraient plus tard appropriées, abusant de son désintéressement à tous égards. Mais c'est surtout dans la théologie qu'il se fraya des voies nouvelles, et son Essai sur l'Apocalypse fit époque; il est le premier qui, délaissant l'ancienne méthode d'interprétation, émit l'idée que ce livre mystérieux pourrait bien avoir été écrit sous Néron et n'être que la paraphrase poétique du discours de Jésus sur la ruine de Jérusalem, Matth. 24. Parmi ses autres ouvrages, qui ne furent publiés (1770) qu'après sa mort, on en remarque deux, l'un sur la Connaissance du Christ, l'autre sur l'Honneur qui lui est dû, qui paraissent avoir inspiré dans YÉmile la Confession de foi du vicaire savoyard. Rousseau avait une grande estime pour Abauzit, qu'il comparait à Socrate; Voltaire lui-même l'admirait, d'où cependant il serait injuste de conclure qu'Abauzit eût adopté l'ensemble des idées philosophiques et religieuses qui avaient cours au 18me siècle.
ABBÀDIE, Jaques, né 1654 à Nay? Béarn, t à Mary-le-Bone, Londres, 1727. Il étudia d'abord dans sa ville natale, sous les soins du ministre J. de la Placette. puis à Puylaurens, à Saumur et à Sedan où il fut reçu docteur en théologie. Les églises durent faire les frais de son éducation. Bien que l'édit de Nantes ne fût pas encore entièrement révoqué, les persécutions grandissaient chaque jour et provoquaient de nombreuses émigrations. Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, accueillait avec bienveillance les réfugiés, et bientôt il chargea son grand écuyer, le comte d'Espense, en ambassade à Paris, de lui procurer un ministre pour la colonie naissante. Abbadie fut choisi et se rendit à Berlin où il mit son influence au service de ses malheureux compatriotes proscrits. Il fit plusieurs voyages en Hollande. Après la mort de Frédéric-Guillaume 1688, il accompagna le maréchal de Schomberg en Angleterre, à la suite du prince d'Orange, qui devint Guillaume III. Il fut nommé pasteur de l'église dite de Savoye, à Londres (aujourd'hui allemande-luthérienne), puis doyen de Killabow, Irlande; retourna à Amsterdam pour y soigner la réimpression de ses œuvres, et mourut à son retour à l'âge de 73 ans. — Outre plusieurs sermons, discours et panégyriques officiels, il a publié divers ouvrages de théologie, dont le plus célèbre est son livre d'apologétique: La vérité de la religion chrétienne (Rotterdam, 2 vol. 8<> et 4°, 1684), qui a été réimprimé plusieurs fois, qui a été traduit en plusieurs langues et qui a obtenu un succès de vogue tel que les catholiques eux-mêmes, à la cour de Louis XIV, le lisaient avec admiration. Madame de Sévigné, Bussy-Rabutin, le duc de Montausier en parlaient avec le même enthousiasme que Bayle, qui le plaçait au-dessus de tous les autres ouvrages du même genre. Il s'y trouvait des digressions dogmatiques ou polémiques qui ont disparu dans plusieurs éditions subséquentes, de manière à ce que le livre pût devenir le patrimoine, non d'une secte religieuse, mais de tous les chrétiens. — Il est davantage controversiste dans: Les caractères du chrétien et du christianisme, et dans: La vérité de la religion chrétienne réformée, suivi du: Triomphe de la Providence et de la religion, ou l'Ouverture des sept sceaux. — L'Art de se connaître soi-même, ou Recherche sur les sources de la morale, montre dans le vrai amour de soi le principe des actions vertueuses; D. Lami lui a reproché de faire l'éloge de l'égoïsme, mais Malebranche l'a victorieusement défendu sur ce point. Il avait écrit aussi des notes sur les Commentaires philosophiques de Bayle. et une Nouvelle manière de prouver l'immortalité de l'âme, mais on ne les a pas retrouvées dans ses papiers.
ABBÉ, Abbesse, Abbaye. Le mot syriaque Abba a passé dans presque toutes les langues d'Europe avec la signification de père. On s'en servit de bonne heure dans l'église comme distinction honorifique; on le donna d'abord à tous les moines, puis, vers le 5me siècle, on le restreignit aux chefs ou supérieurs des couvents seuls. Dans la règle de St-Benoit siècle) on trouve déjà le nom d'Abbat, d'où les Allemands ont fait Abt, et les Français abbé. Presque vers la même époque on fit le féminin abbesse (abbatissa) pour la supérieure d'un couvent de femmes, et le mot abbaye (abbateia) pour la maison et pour l'institution. Avec le temps le nom se généralisa dans le sens de président, ou directeur; il y eut l'abbé du palais, de la cour, des cloches, des écoles, etc. D'un autre côté, des mots différents prirent la place de celui d'abbé; dans l'église grecque, le chef d'un couvent, d'après la règle de St-Basile, s'appelle l'archimandrite; cbez les dominicains, les augustins. les carmélites, il s'appelle le prieur ou le préposé; chez les franciscains, le custode, ou gardien; chez les jésuites, le recteur; chez les camaldules, le major; ailleurs l'igoumène, etc. Les bénédictins conservèrent le nom d'abbé, mais depuis la réforme de Clugny ils le réservèrent pour le chef de la maison-mère, et donnèrent le nom de co-abbés à ceux des succursales. Le supérieur du couvent du Mont-Cassin portait, à cause de certains privilèges, le titre de abbas abbatum, abbé des abbés. Dans d'autres ordres il porte le nom d'abbé général, ou simplement général. Dans les couvents de femmes il y a eu de même des archi-mandritesses, des prieuresses, etc. On distingue les abbés en réguliers et séculiers. Ces derniers sont des ecclésiastiques séculiers qui jouissent d'une abbaye comme d'un bénéfice, mais qui se font remplacer pour tout ce qui touche aux règles, ou aux fonctions de l'ordre, par un moine qui est leur vicaire. Si c'est un abbé qui n'a reçu que les premiers ordres, s'il n'est que tonsuré, par exemple comme les anciens abbés de France, il doit se faire remplacer pour toutes ses fonctions, mais il en est autrement si c'est un ecclésiastique d'un degré supérieur, un évêque surtout. Ordinairement, le bénéfice n'est qu'à terme; dans ce cas le commandataire n'a droit qu'aux revenus et aux honneurs, et c'est l'abbé régulier qui reste chargé de l'administration et de la juridiction; mais s'il est à vie, le commandataire peut aussi exercer tous les droits. Les rois ont souvent récompensé des laïques par la collation de bénéfices; du 8™ au iOme siècle on trouve fréquemment en France de ces abbés-soldats, qu'il ne faut pas confondre avec les abbés de camp qui étaient des aumôniers militaires. On dut renoncer aux abbés-laïques, lorsqu'il fallut rétablir. au besoin par la force, la discipline des couvents, qu'ils avaient entièrement comprenne. Les abbés réguliers sont de vrais moines, appartenant à l'ordre, au couvent, et régulièrement nommés, à temps ou à vie, soit parles pères du couvent, soit par le chapitre provincial. Ils sont, comme les couvents eux-mêmes, presque toujours placés sous la juridiction de l'évoque du diocèse. Quelquefois cependant, anciennement surtout, ils avaient rang d'évêque avec line juridiction quasi-épiscopale; de là aussi la mitre et la crosse qu'ils avaient le droit de porter et qui figurent parmi leurs insignes. Quel-queuns avaient des droits sur certains territoires. et s'appelaient princes-abbés, ce qui leur donnait aussi (à Fulda et ailleurs), comme à plusieurs abbesses, voix délibératives dans les assemblées du royaume. Les droits et les devoirs des abbés sont fixés par le droit canon et par les règlements de chaque ordre. En général, ils ne peuvent être installés ni exercer aucune fonction avant d'avoir reçu la bénédiction épiscopale, sauf exceptions par privilège spécial du pape. L'abbé a la discipline du couvent et l'administration de ses biens; dans les cas graves, il doit être assisté de son chapitre. Pour les abbesses, la loi exige qu'elles soient filles légitimes, âgées de 40 ans au moins, et qu'elles soient dans les ordres depuis 8 ans. Ces deux chiffres peuvent être réduits à 30 et à 5 ans, en cas de nécessité. Elles sont élues au scrutin secret; l'évêque les installe solennellement et leur remet la crosse et le pectoral. Les religieuses doivent obéir à l'abbesse comme à une mère. Une abbesse doit se faire représenter par un vicaire pour toutes les fonctions que son sexe ne lui permet pas de remplir en personne. Des honneurs spéciaux ont été conférés à quelques-unes d'entre elles; le titre même d'évêque, qucopa, a été décerné à Tune d'elles; plusieurs ont eu le droit d'assister aux synodes. Le nom d'abbé a fini par se donner aussi aux prêtres catholiques sans charge d'âme, et on l'a conservé dans quelques églises protestantes pour des dignitaires ecclésiastiques mis en jouissance des bénéfices d'anciennes abbayes. ABBON de Fleury, un des rares savants qui dans la décadence du lO"® siècle, cherchèrent à relever les études dans les couvents et amenèrent le règne de la scolastique. Né dans la Fran-conie occidentale, il fut envoyé fort jeune au couvent de Fleury et c ntinua ses études dans les célèbres écoles de Reims et de Paris, où il cultiva fortement la philosophie, l'astronomie et les mathématiques. L'archevêque Oswald de York lui confia, en 985, une chaire dans l'abbaye de Ramsey, mais, au bout de deux ans, il retourna à Fleury, dont il fut nommé abbé, ajouta un nouveau lustre à la réputation de cette école et prit une part active aux débats religieux de son temps; il fut même envoyé à Rome comme représentant du roi Robert. Son zèle pour le rétablissement de la discipline dans les couvents lui coûta la vie; il fut tué d'un coup de lance, 13 novembre 1004. dans une émeute de moines, à La Réole, en Gascogne, ce qui lui valut la réputation d'un martyr et d'un saint. Il reste de lui des lettres et des traités manuscrits, sur l'histoire (la vie de 91 papes), la langue, les mathématiques, etc. Le célèbre moine Aimoin, historien, était son élève et a écrit sa vie. ABBOT, Georges, né à Guilford 29 oct. 1564, fils d'un tisserand, se rendit 1578 à Oxford, où il passa 30 années, d'abord comme élève, puis comme docteur, professeur et prédicateur de l'université. Il fut trois fois vice-chancelier, à la satisfaction de tous. La part qu'il prit à la revision de la Bible (version anglaise actuelle) attira sur lui l'attention, puis la faveur de Jacques 1er. En 1608, il fut chargé, avec deux autres théologiens, de travailler à l'union des églises d'Angleterre et d'Écosse, et il réussit à décider un certain nombre de presbytériens qui se rattachèrent à la forme épiscopale. Il correspondit aussi avec Duraeus et avec Cyrille Lucar. Son tact, sa modération, ses talents, lui valurent, en 1609, l'évêché de Lichfield et Coven-try, en 1610, celui de Londres, et bientôt après il fut appelé à l'archevêché de Cantorbéry avec le titre de primat et de métropolitain pour toute l'Angleterre. Il continua de se montrer favorable aux presbytériens, s'opposa aux mesures de rigueur projetées contre les puritains, combattit le ritualisme et les tendances catholiques d'une partie du clergé, entretint arec les églises protestantes du continent les meilleures relations, travailla de toutes ses forces à marier la princesse Elisabeth avec un prince protestant, l'électeur palatin, Frédéric V qui devint roi de Bohême, empêcha le mariage du prince de Galles (Charles Iw) avec une princesse espagnole, et maintint les droits de l'Église avec une courageuse fermeté. Le roi ayant fait, en 1618, une Déclaration autorisant certains plaisirs bruyants du Dimanche, il en interdit la lecture dans son église de Croydon. Àbbot protesta non moins vivement et publiquement contre le divorce du comte d'Essex, que le roi avait autorisé par faiblesse, et n'en conserva pas moins la faveur royale. Il assista le roi Jacques à son lit de mort, 27 mars 1625, et couronna son successeur. Charles Mais les tendances absolutistes du nouveau monarque et l'hostilité d'une camarilla catholique et dissolue, à la tête de laquelle se trouvaient la reine et le duc de Buc-kingham, devaient tôt ou tard amener un conflit. On reprochait au prélat d'être trop sévère vis-à-vis du haut clergé et de ses tentatives ri-tualistes, trop indulgent pour les fidèles qui ne mettaient pas leur salut dans les formes du Common-prayer-Book; il aggrava noblement ses torts en refusant le permis d'imprimer à un sermon du Dr Sibthorp, qui plaçait l'autorité royale au-dessus de tout contrôle et qui ne laissait aux sujets que l'obéissance passive. C'était l'époque où le parlement luttait déjà pour ses franchises. Buckingham et l'évêque Laud, de Londres, jetèrent de l'huile sur le feu, et Abbot fut suspendu 1628; on n'alla pas jusqu'à le destituer, par crainte du peuple et du parlement, mais on remit à une commission l'administration de son diocèse, et ce fut Laud qui eut l'honneur de baptiser le prince de Galles (Charles II). Il mourut à Croydon, le 4 août 1633, en pleine disgrâce, à l'âge de 71 ans. — 2° Son frère Robert, évêque de Salisbury, f 1617, s'était fait une réputation par ses ouvrages de controverse. — 3° Jacob Abbot, né 1813, aux États-Unis, pasteur congrégationaliste, puis professeur d'un collège de la Nouvelle-Angleterre; f 1879. Auteur du Jeune chretien et d'une trentaine d'autres volumes pour la jeunesse, histoires et voyages, plusieurs composés avec la collaboration de son frère John, aussi pasteur indépendant. < ABÉLARD ou Abailard. Au plus fort des débats entre les réalistes et les nominaux, vers le commencement du 12^® siècle, apparut un homme remarquable par sa vaste érudition, son attachement à la logique et son talent de dialecticien. Pierre Abailard. Né 1079 près de Nantes, ou à Tours, il étudia sous Guill. de Cham-peaux, son adversaire à venir, et devint bientôt célèbre à son tour par ses leçons philosophico-théologiques; il fut suivi par un grand nombre d'élèves des deux sexes. Dans le nombre, une jeune femme, la triste Héloïse, s'éprit pour lui d'une violente passion. Abélard avait reçu déjà les ordres: il répondit cependant à son amour, l'enleva, la conduisit en Bretagne où elle lui donna un fils, Astrolabius, et pendant quelque temps ils vécurent tranquilles. Mais Fulbert, l'oncle d'Héloïse, découvrit l'intrigue, surprit Abélard dans la nuit et le fit affreusement mutiler. Héloïse se retira dans un couvent, et Abélard vint fonder une école à Paris dès qu'il eut recouvré sa liberté. Il obtint un immense succès. Mais ses leçons, basées sur le conceptua-lisme, système qui conciliait le réalisme et le nominalisme et qui s'efforçait de démontrer la vérité du christianisme par la philosophie et non par l'autorité de l'Église, le firent condamner une première fois par le concile de Soissons, 1122. Ses 3000 élèves lui fournirent les moyens de rouvrir son école loin de Paris, à Nogent sur-Seine. Sa dialectique poursuivait, du fond de sa retraite, les mystiques et les autoritaires. On envoya saint Bernard pour le combattre, mf^s celui-ci n'osa engager la lutte contre un aussi formidable* adversaire. Attaqué de nouveau, persécuté par le clergé et le pouvoir civil, condamné comme hérétique par un second concile, Sens 1140, Abélard eut l'idée de se rendre à Rome, mais le pape lui donna tort. Pour éviter d'être enfermé ou assassiné, il dut promettre de se taire. Mais dès qu'il fut libre, il se retira dans le monastère de Cluny, auprès de Pierre le Vénérable, où il passa ses derniers jours et d'où il continua de foudroyer ses adversaires. Il mourut dans cette retraite vers 1142. Abélard peut être considéré comme le fondateur de la scolastique. Orthodoxe non suspect quant au fond de la doctrine, mais logicien implacable quant à la méthode et jaloux des droits de la raison, il s'efforça de concilier la religion et la philosophie en démontrant celle-là par celle-ci, sans s'apercevoir du danger que cette méthode faisait courir à l'Église. On lui doit plusieurs ouvrages considérables: une Introduction à la Théol., une Théol. chrétienne, de Trinitate, et particulièrement le Sic et non qui ne fut connu que longtemps après sa mort. Il y expose chaque dogme catholique avec les différents arguments pour (sic) et contre'(nan) et termine par la conclusion, toujours favorable à Rome. Toutefois, son indépendance et son peu de soumission le firent persécuter. Il fut l'un des premiers martyrs de la liberté de penser. Plusieurs de ses ouvrages sont malheureusement perdus. — Vie, par dom Gervaise. Biographie, par Ch. de Rému-sat, Cousin, Jacobi, etc. H. B. ABÉLITES, ou Abèloniens; petite secte du Nord de l'Afrique, n'est connue que par ce qu'en dit Augustin (de Hœres. ch. 86). Ils prétendaient se rattacher à Abel; comme lui, disaient-ils. ils admettaient le mariage, mais sans en remplir les conditions. Ils adoptaient un garçon et une fille, et si l'un d'eux venait à mourir, ils le remplaçaient par un enfant du même sexe. Cette secte, qui dura peu et qui ne s'éten* dit guère au delà des environs de Hippo-Regius, était nne émanation des vieilles sectes gnostiques, peut-être aussi un dernier reste du système manichéen. ABÉLY ou Abelli, évêque de Rhodez, auteur d'une biographie de Vincent de Paul et d'un traité dogmatique serni-pélagien, la Medulla theo-loffica, qui lui a valu d'être surnommé le Moelleux par les Jansénistes, ses adversaires. Ce surnom lui a été conservé par Boileau, Lutrin, IV. II a écrit aussi sur le culte de Marie, prouvé par la tradition. Il mourut, à l'&ge de 88 ans, le 14 oct. 1691, dans le couvent de Saint-Lazare fondé à Paris par Vincent de Paul. ÀBEN-ESRÀ. ou plutôt Abraham ben rabbi Meyer ben r. Esra, né à Tolède vers 1093, voyagea beaucoup en Angleterre, en France et en Orient, et se distingua comme rabbin par sa science et par ses commentaires sur TA. T. Ses coreligionnaires l'avaient surnommé le Sage. Il avait un grand bon sens critique, et un caractère indépendant; il repousse l'exégèse allégorique. Il a écrit aussi sur la grammaire, l'astronomie, la morale, et on a de lui quelques poésies. f vers 1168 ou 74, à Rhodes ou à Rome. ABGARE (syriaque boiteux), nom de plusieurs rois d'Edesse. Le plus connu est le 14m*, surnommé Oukhômé, ou le iVotr, qui vécut sous Auguste et Tibère, et auquel une vieille tradition prête d'avoir correspondu avec Jésus. Il lui aurait demandé de venir le guérir d'une grave maladie, et Jésus, en le félicitant de croire sans avoir vu. lui aurait répondu qu'il ne pouvait se rendre auprès de lui, mais qu'après son ascension il lui enverrait un de ses disciples; il lui aurait en effet envoyé Thaddée. Malgré l'autorité d'Eusèbe, cette correspondance n'a jamais été regardée sérieusement comme authentique, non plus que le portrait que Jésus aurait envoyé à Abgare, et dont Gênes et Rome se disputent l'original La prétention de quelques théologiens modernes, de joindre la lettre de Jésus au canon sacré, est une fantaisie d'amateur plutôt qu'une conviction critique. Deux mss. récemment découverts, l'un eu arménien, l'autre en syriaque, désignent Labou-bna comme l'auteur, et le feraient contemporain df Abgare; en tout cas la tradition est fort ancienne, mais les documents sont interpolés. ABOUL-FARADJ, Aboul-Fèda, v. Abul-F. ABRABANEL, v. Abarbanel. ABRAHAM DE SAINTE-CLAIRE, qui s'appelait de son nom de famille Ulrich Megerle, né 4 juin 1642 à Krahenheimstetten, g.-duché de Bade, entra en 1662 dans l'ordre des capu-cins-augustins et y occupa plusieurs charges importantes. Sa réputation d'orateur le fit appeler i Vienne comme prédicateur de la cour, en 1699, et il y resta jusqu'à sa f 1*' déc. 1709. Il n'agit pas seulement par sa parole, mais aussi par ses écrits, qui ont été réimprimés à Vienne 1846, à Passau et à Lindau. de 1833-50. C'était un orateur puissant, original, cotoyant souvent le burlesque, le dépassant parfois et qui se faisait en tendre de tous, princes ou vulgaire, disant à chacun la vérité, ne flattant ni la cour, ni le peuple. Il connaissait les replis du cœur humain et ses mystères; en chaire il les dévoilait avec une crudité de langage que lui seul pouvait se permettre; ses prédications appartenaient à la même tendance religieuse qui a fait la fête des fous et celle des ânes, mais si beaucoup de ses auditeurs venaient l'entendre pour s'amuser, tous y trouvaient des appels pour leur conscience. Son style est quelquefois noble et pur; il s'élève avec la pensée. Comme catholique il retient les superstitions les plus grossières; il s'attache à ce qu'il y a de plus matériel dans la religion et son culte pour Marie a quelque chose de fabuleux. Parmi ses écrits on remarque: la Grammaire religieuse, Mic-mac salutaire, la Fête des fous, Hui et pfui au Monde. Judas le chef des scélérats (der Erzschelm); Range-toi, Quelque chose pour tous. etc. ABRAHAMITES 1<> v. Pauliciens; 2<> déistes de Bohême, qui se rangeaient à la foi d'Abraham avant la circoncision; ils n'admettaient que la foi en Dieu, les dix commandements et Notre Père. Refusant de se dire chrétiens ou juifs, ils se trouvèrent exclus des bienfaits de l'édit de tolérance rendu en 1782 par Joseph II et ils furent transportés jusqu'aux frontières de l'empire; les hommes même furent incorporés dans les bataillons de frontière. Quelques-uns se firent catholiques; le plus grand nombre restèrent fidèles à leur foi, mais sans la transmettre à leurs enfants, et la secte ne tarda pas à s'éteindre. ABRAXAS, nom mystérieux, d'origine égyptienne (?), et que les gnostiques donnaient à l'Être suprême, soit au Dieu-Soleil considéré comme embrassant toutes les intelligences pures, soit à l'ensemble des 365 intelligences qui ne sont que le développement du Dieu-lumière, Dieu-soleil. Dieu-plérôma. (Les lettres du mot Abraxas représentent en chiffres le nombre 365.) On a été amené peu à peu, dès l'époque des gnostiques, à donner le nomd'abraxas à des pierres précieuses ornées de dessins, de gravures, d'inscriptions ou de devises; puis, par extension, on a groupé sous ce nom des plaques de métal, des ornements, des tablettes d'or, d'argent, de cuivre, de plomb, et tous les monuments gnostiques dont la signification mystérieuse a échappé jusqu'ici aux recherches des savants. Parmi les écrivains qui ont étudié ce sujet, il faut noter Chiflet, qui a eu le tort d'attribuer aux basilidiens toutes le» pierres gravées qu'il a pu trouver; puis Fabretti, Ca-pello. de Venise, dont l'archéologie n'est que de l'arbitraire; Montfaucon, plus exact dans ses - descriptions, mais sans méthode; Maffée; Gor-lée, Cabinet de pierres antiques; Bachmann; Belermann, précis dans ses dessins; Gori. Spon, Recherches curieuses sur l'antiquité; Matter, Hist. du gnostic, t. II. et planches; etc. Les pièces désignées sous le nom d'Abra-xas, sont loin d'avoir toutes droit à ce titre, attendu que les unes ne sont ni des pierres précieuses, ni même des pierres quelconques, et que les autres ne sont pas des abraxas, mais de simples œuvres d'art ou d'imagination, sans caractère symbolique ni religieux. On ne doit comprendre sous cette désignation que les objets qui, dès le 2me siècle et jusqu'au moyen âge, ont été travaillés avec l'intention de représenter les idées gnostiques. et pou vant au besoin servir d'amulettes. Or jusqu'ici les amateurs d'antiquités se sont préoccupés surtout du désir d'accroître les collections, plutôt que du besoin d'établir l'authenticité et la signification réelle des pièces recueillies. Matter, qui aie plus étudié ce sujet, fait ressortir (Encycl. de Herzog) l'impossibilité où Ton est d'établir une classification, aussi longtemps que l'on n'aura pas expliqué le sens exact des inscriptions et des symboles. Il propose pour le moment de distinguer io L'abraxas pur, une figure k tête d'épervier ou de coq. finissant en serpent, avec bouclier, fouet, sceptre, etc. 2° L'abr. avec d'autres puissances gnostiques, Éons, etc. 3° L'abr. avec des puissances juives, Jéhovah. Adonaï. Sabaoth, Gabriel, Raphaël, etc. 4° Le même avec des puissances perses, Mithras. 5° Id. égyptiennes: le Phre conduisant son chariot, ou assis sur un crocodile, un lion: Isis, Horus, Thot, Harpo-crate dans le calice du lotus. 6° Puissances grecques: planètes. Jupiter, Vénus. 7* Voyage vers un monde supérieur, à travers les espaces stel-laires. 8° Le jugement: Anubis pèse les cœurs. 9° Culte et consécration. 10° Groupe astrologique. 11° Inscriptions (qui se subdivisent elles-mêmes en plusieurs classes). ABRÉV1ATEURS, nom qu'on donnait aux employés de la chancellerie romaine, souvent de hauts dignitaires, chargés de rédiger ou d'expédier les lettres, brefs et bulles du pape. Ce nom se trouve pour la première fois dans une bulle de Benoît XII, au commencement du 14m« siècle. La charge fut supprimée par Paul II à la suite d'abus commis. ABSALON, nom ecclésiastique d'Axel, né 1128 à Soroé. Danemark. Il étudia à Paris en 1148, voyagea beaucoup et à son retour servit puissamment l'Église et l'État. Il avait manié l'épée, il maniait également bien le glaive de la parole; on dit de lui qu'il parlait comme un dieu. Le roi Waldemar, dont il avait aidé à fonder la dynastie, le nomma en 1156 évêque de Rœskilde. En 1177 le chapitre de Lundeo le nomma archevêque et primat de l'Église de Suède. Absalon refusa énergiquement; on en vint aux mains et il y eut des coups de poing donnés. A la fin le pape dut intervenir et il se prononça en faveur du chapitre. Absalon dut accepter, sous peine d'excommunication; il fut installé, 1178, comme primat de Suède et légat du saint-siège. Il conserva cependant aussi son diocèse de Rœskilde, dans lequel il fonda quelques couvents, et f 1201 dans le monastère de Soroé où il s'était rendu avec le pressentiment de sa fin prochaine. Il avait travaillé activement à la conversion et à la conquête des îles voisines, de Rugen, etc. Il a posé les fondements de Copenhague, et concouru à fonder l'unité de l'Église danoise, surtout en y établissant par la force le célibat des prêtres. Il se montra très rigoureux pour la perception des dîmes, et fit fermer les églises qui se disposaient à les refuser. Les cisterciens, qu'il appela à Soroé en remplacement des bénédictins, furent chargés par lui d'écrire l'histoire du pays, et l'un d'entre eux, Saxon le grammairien, nous a laissé en outre l'histoire d'Absalon lui-même. % ABSIDE, ou Apside, en grec Apsis, voûte; la partie d'une église où est placé le sanctuaire, derrière et y compris le chœur; elle est ordinairement demi-circulaire, quelquefois cependant carrée, ou polygonale. Comme les châsses renfermant des reliques sont presque toujours placées dans le chœur ou dans les cryptes, on les désigne aussi quelquefois sous le nom d'absides. mais par une simple extension du mot. ABSOLUTION, rémission des péchés prononcée par le prêtre après la confession; v. Pénitence. Se dit aussi de l'acte par lequel sont levées certaines irrégularités, empêchements ou obstacles à l'exercice de droits ou de fonctions ecclésiastiques. ABSOUTE, cérémonie et aspersions qui accompagnent l'enterrement d'un mort ou le service fait à son intention. ABSTINENCE, vertu qui est moins que le jeûne, mais plus que la simple sobriété. Elle porte non seulement sur la nourriture et la boisson, mais sur toute jouissance sensuelle. L'instinct chrétien la recommande comme un moyen d'affranchir l'esprit en mortifiant la chair, mais l'Évangile n'en fait nulle part une prescription, v. Tempérance. ABUKARA, Théodore, disciple de Jean de Damas au 8"* siècle, a écrit: Questions et Réponses. ABUL-FARADJ, dont le vrai nom syriaque était Grégoire, né 1226 à Malathia (Mélitène), ville de Cappadoce. Il était fils d'un médecin juif qui avait embrassé le christianisme et s'était rattaché à la secte des Jacobites. Versé de bonne heure dans la connaissance du syriaque, de l'arabe et du grec, ii étudia la philosophie, la médecine et la théologie, et a composé dans ces trois branches des écrits qui lui ont lait une grande réputation. Mais il est surtout connu par son Histoire universelle, que Pococke a traduite et publiée en latin 2 vol., Oxford, 1665. Lors de l'invasion des hordes tartares, il s'enfuit à Antioche avec sa famille et vécut en ermite dans une caverne près de cette ville. Il se rendit ensuite à Tripoli pour y étudier l'éloquence et la médecine auprès d'un sage nesto-rien nommé Jacob, et de là le patriarche David, qui le connaissait d'Antioche, l'appela au siège épiscopal de Gubos, non loin de Malathia. Par des services qu'il rendit à Denys Angur, successeur de David, il mérita1' d'être nommé évê-que d'Alep. Denys ayant été tué par son propre clergé pendant le service divin, 18 févr. 1261, son rival Jean bar Maadani fut reconnu sans contestation comme patriarche par tous les Jacobites, et comme il avait une grande considération pour Abul-Faradj, quoique celui-ei l'eût toujours combattu, il le nomma mafrten, titre ecclésiastique qui lui assurait la juridiction absolue sur les églises de la Galdée, de l'Assyrie et de la Mésopotamie. Le mafriennat, qui datait de 629, était l'acheminement au patriarcat; il avait pour siège Takrit, sur les bords du Tigre. Les troubles de l'époque empêchèrent Abul-Faradj de se rendre immédiatement à son poste; il ne put en prendre possession qu'en 1266, sous le nouveau patriarche Josué (Ignace III). Son frère Bar Çauma, et lui-même, ont écrit l'histoire de son ministère, mais bien que l'Église syriaque eût encore des missions en Chine et en Mongolie, les deux frères se bornèrent surtout, semble-t-il, à fonder des couvents, à bâtir des églises, à traduire Euclide et à commenter l'Almageste de Ptolémée. Il protesta contre l'élection faite, en 1283, d'un patriarche d'Antioche sans qu'il eût été consulté, mais en déclarant qu'il ne réclamait rien pour lui-même, étant rassasié de charges et d'honneurs. Il attendait sa fin pour l'an 1286. Je suis né, dit-il, dans une année où Jupiter et Vénus étaient en conjonction dans le Verseau; 20 ans après, ils étaient dans la Balance, et je fus nommé évê-que; 20 ans après, dans les Gémeaux, et je fus élu mafrien; ils vont se trouver dans le Verseau après 20 nouvelles années, et je dois partir. Il mourut en effet le 30 juillet 1286 à Maraga, après une courte maladie, pendant laquelle il conserva toute sa sérénité, honoré et pleuré des Arméniens, des Grecs, des Nesto-riens et des Jacobites. — On le désigne quel- j quefois, à cause de son père, de sa race et de sa profession, sous le nom de bar Ahrun (fils d'Aa-ron), bar Ebraja (fils d'hébreu), ou ibn Hakiou (fils d'un médecin). — Ce qu'il a laissé de plus important en théologie, c'est le Trésor des secrets, explication des passages les plus difficiles de l'A. et du N. T. Il s'est servi du canon des monophysites, où manquent Néhémie, Esdras, Ester, les Chroniques, la 2® de Pierre, les 2<* et 3« de Jean et l'Apocalypse; en revanche on y trouve l'Ecclésiastique, la Sapience de Salomon, l'histoire de Suzanne et celles de Bel et du Dragon. Il paraît n'avoir eu sous les yeux qu'un mauvais mss. de la Peshito. ABUL-FÉDA, né à Damas 1273. f 1331, joua un rôle dans les croisades, comme guerrier, puis comme écrivain (Hist. abrégée du genre humain; Vraie situation des pays). Successivement gouverneur, puis prince de Hamath, Syrie. ABYSSINS, l'Église abyssine. Une des grandes fractions de l'Église d'Orient, très rapprochée des coptes, mais qui ne doit pas se confondre avec eux. L'Abyssinie actuelle, ancienne Ethiopie, se divise en trois provinces principales, Tigré, Amhara et Shoa, réunies sous le sceptre d'un empereur. La population, que les estimations diverses évaluent de 4 à 6 millions d'habitants, est en grande majorité chrétienne; on compte cependant 2 à 300.000 juifs et un certain nombre de mahométans. Les juifs sont considérés; ils jouissent de plusieurs privilèges et d'une grande indépendance. Leur nom, Fé-lashas (les exilés) s'explique par les traditions, dont les unes font remonter la première émigration au temps de Menihélek, fils de Salomon et de la reine de Scéba; les autres placent l'arrivée des Juifs en Éthiopie à l'époque des .conquêtes d'Alexandre, quelques-unes même après la destruction du temple par les Romains. On a été jusqu'à donner aux Abyssins eux-mêmes une origine juive, parce que l'on retrouve chez eux. même chez les chrétiens, des coutumes et des habitudes judaïques, circoncision, sabbat, aliments purs et impurs, jeûnes, partage de l'église en compartiments distincts, etc. On croit généralement que le christianisme fut apporté en Abyssinie par l'officier de la reine Candace, Act. 8; mais c'est seulement au commencement du 4™ siècle qu'eut lieu la conversion en masse des Éthiopiens, par le ministère de l'un d'entr'eux, Frumentius, qui fut consacré à Alexandrie par Athanase, 326. Ils tiennent à cette origine non moins qu'à leur filiation apostolique. Ils ont coutume de dire: «Nous buvons à la source du patriarche d'Alexandrie, 9 et ils se servent, pour le baptême, du symbole de Nicée et non du symbole des apôtres. C'est encore chez les Coptes, auprès du patriarche d'Alexandrie, qu'ils vont chercher leur chef ou primat, auquel ils donnent le titre d'Abouna, Notre Père. Perdus pendant des siècles et séparés du reste de la chrétienté, les chrétiens abyssins furent en quelque sorte découverts par les Portugais vers la fin du lo^e siècle. La cour de Rome essaya de se les rattacher; ses missionnaires, les jésuites, furent d'abord favorablement accueillis, au moins par l'empereur, qui se sépara du patriarcat d'Alexandrie et fit sa soumission au patriarche Mendez, légat du pape. Mais, à la suite d'intrigues politiques, le peuple se souleva, chassa les jésuites 1634, et revint à son patriarche traditionnel. Les relations avec l'Europe furent de nouveau interrompues pendant près de deux siècles. En 1808, le consul de France, M. d'Asselin, chargea le vaillant Abyssin Abreka, le compagnon de Bruce, de traduire l'A. et le N. T. de l'éthiopien en amharique; ce mss. fut acheté par la Soc. biblique de Londres. M. Jowett fit ensuite traduire deux évangiles dans la langue du Tigré, et il fut amené peu à peu à l'idée d'une mission épiscopale dans ces contrées. MM. Gobât et Kugler y furent envoyés en 1826, mais ne purent arriver qu'en 1830, v. sur cette mission: Gobât, Journal d'un séjour en Abyss., Paris 1835. Des missionnaires catholiques arrivèrent à leur tour en 1838, firent de la politique, opposèrent l'influence française à l'influence anglaise, firent chasser les missionnaires protestants et fermer leur mission; puis, l'an d'après. 1839, ils furent eux-mêmes renvoyés du pays. Ces rivalités durèrent quelques années et firent plus de mal que de bien; la brillante expédition anglaise de 1868 aura eu du moins pour résultat de réduire à néant les tentatives d'intervention politique et d'assurer aux missionnaires et à l'église abyssine elle-même une plus grande indépendance. Les Abyssins sont monophysites, comme les coptes, et ils se complaisent dans les diseussions les plus puériles sur les différentes natures de Christ, sur ses différentes naissances, dont ils comptent trois: sa naissance coéternelle avec le Père, sa conception et sa naissance terrestre, sa naissance par le St-Esprit dans le sein de sa mère. Les provinces ne sont pas d'accord sur ces points, et parfois l'empereur et l'abounaont eu de violentes contestations, dans lesquelles leurs partisans en sont venus aux mains. Il est probable qu'ils ne comprennent pas toujours très bien ce qu'ils disent, et que le sens réel de la discussion leur échappe. Ils admettent les trois premiers conciles, mais rejettent celui de Chalcédoine. Outre les livres apocryphes des Latins, ils ont encore le livre d'Enoch et le 4* d'Esdras. Leur exégèse a quelque chose d'enfantin; ainsi Matih. 8. 20. Ils entendent que les renards sont les rois et les princes, tandis que les oiseaux du ciel sont les prêtres et les évêques, parce que leurs prières s'élèvent vers Dieu; Matth. 5, 29. l'œil, c'est la femme, ou l'enfant; la main, c'est le serviteur, ou l'esclave (Krapfs Journal). Leur principal livre de dévotion, après leur Bible qui est en langue geez et qui date du ou du 5me siècle, est un recueil intitulé La foi des pères (Heimanst Abutk). où se trouvent des paroles des apôtres, des maximes des pères, les Constitutions apostoliques, le symbole de Nicée, etc. Ils adorent les saints, au nombre de 105, choisis dans l'A. et le N. T. et dans les Églises grecque, copte, abyssine, et la Vierge comme créatrice du monde et mère de Dieu. Ils prient pour les morts; baptisent par immersion, après la circoncision; le mercredi et le vendredi sont des jours de communion, par conséquent de jeûne; ceux qui ont communié ne peuvent manger ce jour-là que du pain et des pousses d'ortie. Ils commencent en février leur carême, ou Kabala, qui dure 40 jours; en juin, ou dès Pentecôte, un jeûne de 12 à 25 jours; en juillet, 3 jours; en août, 16; puis viennent les jeûnes de l'Assomption et en dé-cemboe ceux de l'Avant; en tout, plus de 200 par année. Inutile de dire qu'il y a bien peu de fidèles qui s'astreignent à ces macérations. Ils font de fréquents pèlerinages, soit à leurs couvents, soit surtout à Jérusalem. La magie et les amulettes abondent chez eux comme chez les païens et les musulmans. Ils regardent comme souillés tous les aliments déclarés tels dans l'A. T.; ils y ont joint même le café, pour n'avoir rien de commun avec les sectateurs de llslam; on assure toutefois qu'ils s'en dédommagent en secret. L'aumône est considérée comme une des principales vertus, et ils la multiplient sous ses formes les plus variées, donnant aux prêtres, aux pauvres, aux moines, aux couvents, aux pèlerins. Le mariage se célèbre sans aucune cérémonie religieuse et ses liens ne sont pas très solides. Le divorce est facile, mais un homme ne peut se divorcer que quatre fois. Si le mariage a été accompagné de la sainte communion, il devient par là presque indissoluble, et le divorce ne peut être prononcé que par le prêtre. Celui qui a été marié quatre fois doit entrer dans un ordre de moines, sous peine d'excommunication. Il arrive aussi qu'un homme entre dans un couvent, sans prévenir, et abandonne sa femme et ses enfants. La polygamie n'est pas permise, mais les puissants se mettent au-dessus de la loi, et ils ont, comme les musulmans, jusqu'à quatre femmes légitimes sans parler des autres. Sur le point de mourir, on fait venir le prêtre pour se confesser et recevoir l'absolution. Les Abyssins admettent la transsubstantia-lion on, comme ils disent, le Malawat, le changement dn pain et du vin. Ils attachent une grande importance aux cérémonies et aux sacrements, notamment à celui de l'Eucharistie, et se figurent que les anges interviennent en personne dans la préparation du pain sacré, qui se fabrique et se cuit dans un four spécial attenant an temple. Leurs temples sont en général bâtis sur des hauteurs, entourés d'arbres, simples, presque mesquins, recouverts de toits de chaume de forme conique et ceints d'un parvis qui sert en même temps de cimetière. A l'intérieur ils sont divisés. comme celui de Jérusalem, en deux compartiments, le Lieu Saint et le Très Saint; dans ce dernier une table. Taba (arche, coffre) représente l'arche de l'alliance et sert pour la communion. Beaucoup d'images sur les portes, de colossales figures d'anges. Point de sièges; on se tient debout ou à genoux. Pour cloches, des pierres que l'on frappe. Ils ont un clergé ignorant et pauvre, dont la seule ressource est dans le casuel qu'il perçoit pour les absolutions et les funérailles. Les prêtres, une fois consacrés, ne peuvent plus se marier. Ils n'ont pas de costume officiel et ne portent d'autres insignes, quand ils sortent, qu'une croix qu'ils donnent à baiser. 11 faut qu'ils sachent lire l'éthiopien, chanter les hymnes du Yared, et qu'ils aient la barbe. Le patriarche les consacre en soufflant sur eux et en faisant sur eux le signe de la croix; il reçoit pour cela 40 à 50 c. Le chef du clergé est l'Abuna. toujours un étranger, désigné par le sort ou par le patriarche copte, et choisi parmi les moines coptes, souvent malgré sa volonté; il réside dans un magnifique palais à tiondar, et n'a au-dessus de lui que l'empereur. Puis viennent les évêques. Komur, dont l'unique devoir est d'entretenir les églises en bon état; pais l'Alaka, qui perçoit et administre les deniers de la communauté; enfin les prêtres, qui peuvent seuls entrer dans le Lieu très saint, d'où les diacres sont exclus. Comme rang, TEtchégué, ou chef des moines, vient immédiatement après l'Abuna; c'est le grand-prieur du célèbre couvent de Debra-Liba-nos, érigé dans le Shoah au 13"»® siècle, par la sainte Tekla Haimanet. 11 est le supérieur, non seulement de tous les couvents de son ordre, mais encore des couvents de Saint-Eusta-the* quoique ceux-ci aient aussi leurs abbés. Les occupations de tous ces moines sont ce qu'elles étaient en Europe au moyen âge; ils mendient, ils lisent leurs bréviaires, ils aident quelquefois à la desserte des églises, ils se promènent, et ils disputent à l'infini sur les questions de dogme doit ii a été parlé plus haut. Ils font vœu de cé-liiot. L'Église abyssine a gardé pendant des siècles la foi en la divinité de J.-C., mais par suite de son isolement elle est tombée dans un état de langueur spirituelle qui nécessite un prompt remède et qui appelle la sollicitude des autres églises plus vivantes, v. les Journaux de missions. etc. ACACIUS ou Acace* 1° Disciple d'Eusèbe et depuis 340, son successeur comme évêque de Césarée. Il était surnommé le Borgne. Il fut l'un des chefs du parti arien pur, rejetant à la fois l'identité de nature et la ressemblance de nature du Père et du Fils (v. Homoiousiens), et fut, pour cela même déposé par les synodes d'An-tioche 341 et de Séleucie 359. Ses partisans peu nombreux s'appelèrent de son nom. les Acariens. Il s1 brouilla ensuite avec les Ano-méens et se rangea aux décisions du concile de Nicée, qu'il recommanda par un écrit à l'empereur Jovien. 11 mourut en 363 ou 36o. laissant la réputation d'un caractère intrigant, ambitieux et versatile. Protégé par l'empereur Constance, il avait fait déposer saint Cyrille, et plus tard exiler le pape Libère. Ses ouvrages sont perdus. 2° Acacius, anachorète, né vers 322, adhérent du symbole de Nicée, fut envoyé k Rome auprès de Damase. puis nommé en 378 évêque de Bérée et de Syrie; l'un des plus violents ennemis de ChrysosWme, il l'accusa d'origénisme et sollicita sa condamnation. Plus tard cependant, et peut-être sous l'influence de Rome, il revint à d'autres sentiments et fit rétablir son nom sur les registres de (Constantinople. 11 se montra hésitant dans l'affaire de Nestorius, le fit condamner à Éphèse 431 par son suppléant, l'évêque d'Emesa, mais ne put marcher d'accord non plus avec Cyrille et son parti. + vers 436, âgé de 110 ans. C'était un homme énergique, mais d'humeur changeante. 3<> Évêque et patriarche de Constantinople. de 471-488. Zélé défenseur de ses prérogatives hiérarchiques, il adhéra aux décisions du concile de Chalcédoine contre Eutyches et le mo-nophysisme, mais refusa de rompre avec les patriarches d'Alexandrie et d'Antioche qui n'avaient pas adhéré. Il essaya de concilier les uns et les autres dans l'espoir de les absorber, et ne fit que susciter de nouveaux troubles. Il chercha aussi à s'affranchir de l'autorité du pape; cependant, ayant à lutter contre l'empereur Basilisque et les hérésies d'Eutyches, il demanda l'appui du pape Simplicius. Il réussit à soulever le peuple de Constantinople et à détrôner l'empereur avec l'aide de l'usurpateur Zénon. Basilisque s'enfuit dans une église, mais Acacius l'en fit arracher et le livra à son ennemi. Fort alors de l'appui du nouvel empereur, il se tourna de nouveau contre le pape, et, en 485, fit porter par Zénon un édit d'union avec les Eutychéens. Cet édit, favorable à la secte d'Eutyches, reçut le nom d'Hénoticon q. v. Anathématisé par le pape Félix III, et cité devant un petit concile à Rome, il dut se soumettre; mais à peine de retour àConstantinople, il anathématisé de son côté Félix III, persécute ouvertement les orthodoxes et met sur tous les sièges épiscopaux de son ressort des prélats euty-chéens. En 4S6, il joua un rôle plus noble et plus digne de sa charge; l'empereur Zénon voulait faire périr sa femme Ariadne, lorsqu'Aca-cius accourt, fait des reproches sévères au prince et le détourne de son projet criminel. Il mourut tranquillement sur son siège en 489. On n'a de lui que deux Lettres. 4o Acacius, évêque d'Amide sur le Tigre, né au milieu du siècle, fut mêlé aux affaires de la persécution de Varane. roi de Perse, persécution suscitée par l'excès de zèle de l'évêque mésopotamien Abdas. Il se signala par un acte de générosité en vendant les vases d'or et d'argent de son église pour racheter 7,000 esclaves persans tombés entre les mains de Théodose-le-Jeune; il les secourut dans leur misère et les renvoya au roi. Varane. admirant cet acte de charité chrétienne, demandi à Acacius un entretien qui amena probablement la fin des persécutions et la paix signée peu après entre les deux monarques. ACCEPTANTS, nom qui fut donné en France, par opposition aux Appelants, à ceux des membres du clergé qui reçurent, après la mort de Louis XIV, la bulle Unigenitus de Clément XI. tandis que ceux qui la rejetèrent ou qui subordonnèrent leur adhésion à la décision d'un concile prirent le nom d'Appelants. Les Acceptants reçurent aussi le nom de Constitutionnels. ACCÈS 1° Recueil de prières de préparation pour les prêtres avant le sacrifice de la messe. 2° Dans l'élection de hauts dignitaires ecclésiastiques. des papes en particulier, on désigne sous ce nom les voix qui, ayant été d'abord données à un autre, l'abandonnent pour arriver à former la majorité nécessaire. ACCLAMATION, ou quasi-inspiration; réu-i^on de toutes les voix, sans entente préalable, pour l'élection d'un pape ou d'un évêque. ACCOMMODATION. On appelle ainsi d'une manière générale la condescendance d'un supérieur envers un inférieur, le premier témoignant par actes ou par paroles, pour ne point blesser ou froisser le second, une indulgence passive ou active, pour ses idées, ses préjugés ou ses goûts. Jésus-Christ s'ac^mmodait à la faiblesse de la multitude, quand il lui parlait en paraboles, et à la faiblesse de ses disciples, quand il réservait pour l'avenir ce qu'il avait encore à leur dire. Matth. 13, 11. Jean 16, 13. Il entrait dans leurs vues, sans les réfuter ni les rectifier directement, quand il disait aux disciples de Jean, que leur maître était l'Élie qui devait venir. Matth. 11, 14. Paul s'accommodait aux préjugés des judéo-chrétiens, quand il faisait circoncire Timothée, et qu'il se joignit à Jérusalem aux hommes qui avaient fait un vœu, Act. 16. 1-3. 21. 17-26.; il leur parlait comme à des enfants en Christ, s'asservissant à tous, afin de les gagner, 1 Cor. 3, 1. 9,19. cf. Hébr. 5,11-14. Il donne Rom. 14. I et suiv. la théorie de cette condescendance chrétienne, mais il montre aussi. Gai. 2, 11-13. qu'il y a des limites à l'accommodation, et qu'elle ne doit être un acte ni de timidité, ni d'hypocrisie. Supporter une erreur ou une faiblesse ne doit pas aller jusqu'à la justifier ou la sanctionner. Les pères de l'Église ont déjà connu la chose et le mot. Clément d'Alexandrie dit que s'il y a, pour un auditeur, quelque intérêt à ne pas tout lui expliquer, on peut taire certaines choses, mais il ajoute que ce silence ne peut porter que sur les points secondaires. De même Tertullien. Origène, saint Jérôme, Chrysostome, etc. Saint Augustin au contraire repousse cette prudence, comme un manque de respect et d'amour pour la vérité. La question de l'accommodation, qui, pendant longtemps, n'a présenté qu'un intérêt assez médiocre, a pris au commencement da ce siècle une importance toute particulière. Avec le développement de la critique historique, on s'est demandé si plusieurs des faits racontés dans l'Écriture ne seraient pas simplement une accommodation à des idées régnantes au temps de Jésus-Christ. Partant du fait que les anthro-pomorphismes de l'A. T. ne peuvent guère être envisagés autrement que comme une accommodation; constatant une accommodation dans le judaïsme lui-même et dans la plupart de ses institutions, les théologiens qui désiraient se débarrasser de certaines difficultés, sans trop porter atteinte à l'autorité des Écritures, ont tenté d'expliquer différents passages au moyen de cette théorie; ainsi la doctrine du diable et des anges, celle de l'expiation, de nombreuses apparitions, la messianicité de beaucoup d'oracles, qui, selon eux, n'avaient aucun rapport avec le Messie, mais que Jésus-Christ s'est appliqués à lui-même, parce que le peuple les interprétait dans ce sens. Avec ce système on n'allait à rien moins qu'à ruiner l'autorité des Écritures; aussi Mosheim, Storr, Knapp, Reinhard le combattirent vivement. Mais il tomba de lui-même, quand on crut n'en avoir plus besoin et que l'exégèse critique se décida franchement à traiter d'erreur ce qu'elle ne pouvait pas expliquer. La vie de Jésus, de Strauss, en traitant de fables ou de mythes les principaux faits de l'histoire évangélique, a donné du courage aux timides, et les a dispensés de la tâche ingrate et laborieuse de mettre d'accord leur respect pour l'Écriture avec leur droit d'en rejeter les faits ou les enseignements. ACÉMÈTES, moines du 5*e siècle, qui s'étaient imposé de ne jamais dormir, ou de dormir aussi peu que possible, et d'avoir nuit et jour des services religieux. L'exemple donné par Marcel d'Apamée, en Orient, trouva aussi des imitateurs en Occident. Leurs deux principaux couvents étaient, l'un à Constantinople, l'autre à Agaunum, ville des Nantuates, aujourd'hui Saint-Maurice (Valais) dont l'abbaye fut fondée par Sigismond, roi de Bourgogne. ACÉPHALES (Sans tête). Quand l'empereur Zénon eut réussi, par son Henotikon, à faire vivre quelque temps en paix les mono-physites et les orthodoxes, quelques-uns des roonophysites les plus résolus, se séparèrent de leur patriarche, Pierre Mongus, et comme ils n'avaient plus de chef (de tête), on les appela Acéphales. Plus tard ils se rallièrent autour de Sévère et de Pierre Fullo. v. Monophysites. ACHÉRY, don J.-Luc d' — v. Dachéry. ACOLYTHE, serviteur chargé d'accompagner son maître quand il sortait. Peu à peu le sens étymologique changea, on donna ce nom aux serviteurs de l'évêque, chargés du service de l'autel; le formulaire de leur consécration mentionne encore aujourd'hui le soin des cier ges et des lumières, la préparation de l'eau et du vin pour l'eucharistie. Puis quand ces fonctions eurent passé aux enfants de chœur, le titre seul resta, mais il n'est plus qu'un degré, le dans l'ordre de la prêtrise, le plus élevé des ordres mineurs chez les catholiques. ACOSTA, Uriel, prit plus tard le nom de Gabriel; Portugais, né 1594 à Porto, d'une famille juive de la noblesse, convertie au christianisme depuis plusieurs générations. Il fut baptisé catholique et étudia avec zèle les Évangiles et plusieurs livres traitant de la religion; mais la théorie des Indulgences l'irrita et lui rendit le christianisme suspect; il finit par abandonner une position lucrative qu'il avait obtenue au collège, et sous prétexte que les juifs et les chrétiens étaient d'accord à recevoir l'A. T.. tandis que les chrétiens seuls adoptaient le N., il se décida à rentrer dans le judaïsme d'où sa famille était sortie. La chose n'était pas possible en Portugal; il s'enfuit à Amsterdam où il se fit circoncire et reconnaître juif. Mais le pharisaïsme de ses nouveaux coreligionnaires ne le satisfit pas non plus, et il professa ouvertement les maximes de l'incrédulité sadducéenne. Il fut accusé de nier Dieu et l'immortalité de l'âme, affirmant (1623) que sur ce dernier point la loi de Moïse était muette. Le Dr Samuel de Sylva lui répondit. L'autorité fit emprisonner Acosta, qui au bout de 8 à 10 jours obtint sous caution d'être remis en liberté, mais en payant une amende de 300 florins; son livre aussi fut condamné à être détruit. En même temps la synagogue le mit à l'interdit, et il resta sept ans sous le poids de cette excommunication, ne voulant pas se soumettre aux conditions qu'on lui imposait pour le réintégrer. Il céda cependant, et dans son autobiographie (Exempter vitœ humanœ) il raconte d'une manière assez lamentable les humiliations qu'il eut à subir, les 39 coups de fouet qu'on lui administra, tout nu, en pleine synagogue, et comment il dut se coucher sur le seuil de la porte pour être foulé aux pieds par les juifs. Il n'abandonna d'ailleurs aucune de ses convictions, et ne voulut reconnaître d'autre loi que la loi naturelle, f 1640, ou 1647; le bruit courut qu'il s'était suicidé; mais ce n'est pas prouvé. ACTES DES MARTYRS, Acta Martyrum et plus tard Actes des Saints, Acta Sanctorum. On désigne sous ce nom les notices plus ou moins complètes, plus ou moins authentiques, et, dans tous les cas, de valeur fort diverse, qui ont paru à différentes époques sur les hommes illustres de l'Église chrétienne. On comprend que dès l'origine chaque église ait tenu à honneur de conserver la mémoire de ceux de ses membres martyrs, qui avaient payé de leur vie leur fidélité; puis on y a joint les noms des confesseurs. c'est-à-dire de ceux qui, au risque de la mort, avaient bravé l'autorité romaine et s'étaient déclarés chrétiens, quoiqu'il y eût du danger à le faire. On y ajouta ensuite la liste de ceux qui avaient été persécutés pour l'Évangile, des saints qui avaient honoré l'Église par leur sainteté, par leur dévouement, par leur ascétisme ou par leur activité. Tout cela se fit lentement, peu à peu. naturellement, sans plan densemble et sans parti pris. Chaque église avait sa liste, et elle y ajoutait à l'occasion quelques noms des églises voisines, au fur et à mesure qu'elle en avait connaissance par des lettres ou des communications. Ainsi l'église de Smyrne écrivit à celle de Philadelphie le martyre de plusieurs des siens et finalement celui de son évêque Polycarpe; les églises de Lyon et de Vienne racontent leurs malheurs aux chrétiens d'Asie et de Phrygie; Denys d'Alexandrie écrit à Fabien d'Antioche; Cyprien est rempli de détails de même sorte, et Ponce, le biographe de Cyprien. explique ce qui l'a amené à raconter la vie et la mort d'un si grand évêque. A mesure que ces listes grossissaient, on devait y mettre un peu d'ordre, el Ton classait volontiers les martyrs d'après la date de leur mort, de manière à ce que chaque jour de chaque mois eût son saint ou son martyr. En même temps, à mesure qu'on s'éloignait de l'époque où le souvenir était encore vivant, on complétait par des détails et par des notices plus développées la simple mention qui avait suffi dans l'origine, afin de conserver aux générations suivantes des mémoires et des exemples précieux. De là deux espèces de listes: les ca-lendaria, simples catalogues des noms rangés suivant l'ordre des jours de l'année, et les mar-tyrologia qui formaient des espèces de notices biographiques d'un caractère général, destinées à l'édification des chrétiens. Les diptycha présentaient plutôt un intérêt local; on y inscrivait les noms des pasteurs et des évêques de l'endroit, et cette liste était complétée par les noms de personnages qui avaient illustré la localité, ou par coux d'hommes vénérés de l'Église entière. On eut ensuite les passionalia (le latin se gâte déjà), histoires de martyrs proprement dits, et enfin les legenda, fragments qui devaient être lus aux anniversaires de la mort de ceux dont on racontait l'histoire. Ces derniers n'avaient pas le caractère d'une simple notice; ils étaient soignés, ornés, et avec le temps on se permit de les embellir au point qu'il fut difficile de distinguer la réalité de la fiction; ce furent les légendes des saints. La plupart de ces documents historiques furent malheureusement détruits lors des persécutions de Dioctétien, et tout fut à refaire, en partie de souvenir, quand le premier empereur chrétien eut assuré le triomphe du christianisme. Eusèbe écrivit un livre sur les martyrs de la Palestine, et un autre plus général sur les martyrs de l'Église chrétienne, mais ses livres se sont perdus de bonne heure. Vers la fin du siècle, sous Grégoire I, il est question d'un martyrologe qui se lisait à Rome, et dont un double se trouvait à Alexandrie; on l'attribuait, mais sans preuves, à saint Jérôme, comme on mettait volontiers sous le nom du traducteur de la Bible, beaucoup d'écrits dont l'auteur était inconnu. Cassiodore recommande plusieurs écrits de même nature, Vies des pères, Confessions des fidèles, Passion des martyrs, comme formant une littérature assez considérable, destinée à édifier, à affermir la foi et à servir d'exemples. Mais déjà le pape Gélase devait s'opposer à ce que ces livres fussent lus dans les églises sans avoir été préalablement contrôlés; plusieurs étaient anonymes, et un grand nombre étaient de pures et simples compositions littéraires, sans aucune valeur historique. Adrien I«r, fin du 8rae siècle, dit positivement que, outre les Saintes Écritures, il est permis de lire publiquement les Vies des pères, mais seulement si elles ont été écrites par des auteurs orthodoxes. Ces Vies des pères, qui servent en quelque sorte de transition entre les Actes des ^fartyrs et les Actes des Saints. étaient le récit en général authentique et vrai de l'histoire de la propagation du christianisme; on y trouvait l'histoire de Séverin, celles de Boniface, de Jonas, de Gall, etc. A l'heure qu'il est encore, c'est une source précieuse à consulter: chez les Latins, dans le catalogue dit de saint Jérôme, dans les 14 hymnes de Prudence, dans la Collatio patrum de Cassien, dans les œuvres de Grégoire de Tours, etc.; chez les Grecs, dans Palladius, Héraclide, Jean Mos-chus, Siméon Métaphraste. quoique ce dernier soit déjà sujet à caution comme exactitude. Un martyrologe publié par ordre de Sixte V est à peu près sans valeur, car il n'est guère que la reproduction du travail attribué à Jérôme. Bède, Florus, Wandelbert (qui mit l'histoire en vers), Rhaban Maur, Adon, archevêque de Vienne, Usuard enfin et Notker, développèrent et enrichirent de détails historiques les anciens martyrologes, et constituent un progrès. A partir du 9™ siècle, il y a chute et décadence. Toutes les Églises veulent remonter aux apôtres ou à leurs successeurs immédiats, et les moines font l'histoire à cette intention; les légendes s'élèvent jusqu'à la fraude et à la puérilité; c'est l'époque où saint Denis, martyr, s'en va, sa tête à la main, fonder l'église des rois de France, qui porte son nom. Mais le souffle de la Renaissance et l'étude de l'antiquité dissipent aux lime et lo^e siècles cette érudition fantastique; des travaux sérieux sont entrepris; on compile les documents, on cherche à dégager le vrai du faux, et les Bollan-distes entreprennent l'œuvre colossale, encore inachevée, qui se rattache à leur école. Jean Bolland (1596-1665) reçut des jésuites, à la mort de Heribert Rosweyd (1629) les nombreuses pièces et les manuscrits rassemblés par celui-ci, et il fut chargé de rédiger les Acta Sanctorum, sur le plan des anciens calendaires, mais en donnant à chaque notice tous les développements possibles. Avec les immenses ressources que l'ordre avait à sa disposition, trésors de toute nature, relations dans toutes les parties du monde, Bolland se mit à l'œuvre, et il trouva des collaborateurs dignes de lui dans les pères Gottfried Henschen (1600-1681) et Daniel Papebroch (1628-1714). qui, sous le patronage du pape Alexandre VII, visitèrent vers 1662 une grande partie de l'Europe. On avait compté sur environ 18 volumes in-folio; le Martyrologe donna pour le mois de janvier seul 2 vol., pour février, mars et avril, chacun 3. mai 8, juin et juillet chacun 7, août 6, septembre 6, octobre (l^ volume, jusqu'au 14) 6 volumes; en tout 53. L'œuvre fut alors interrompue par la suppression de l'ordre, en 1773, et la maison des bollandistes à Anvers fut convertie en une école militaire; mais ils réussirent à poursuivre leur travail dans l'abbaye de Can-denberg. L'empereur Joseph II, qui n'aimait pas les jésuites, donna l'ordre aux bollandistes de publier à l'avenir un volume par année et d'avoir tout fini dans l'espace de 10 ans. En 1788 cette association de savants fut dissoute, et ils n'eurent plus qu'une préoccupation, mettre leurs trésors historiques et littéraires à fabri. Ils y réussirent par une vente fictive à rabbaye des Prémontrés, de Tougerloe, 1791. A l'arrivée des Français, qui proclamèrent en Belgique lecir république et qui déclarèrent biens nationaux tous les biens du clergé, les bollandistes durent s'enfuir, et une partie seulement de leurs collections littéraires put être sauvée, grâce au voisinage de la Westphilie. La Restauration permit aux religieux de Tougerloe de retrouver quelques-uns de leurs documents, et les jésuites reprirent leur travail. En 1845 parut le 7c e volume d'octobre, comprenant les 15 et 16 du mois, en 1189 pages in-folio. L'ensemble de la collection ne compte pas moins de 25,000 biographies. Mais les derniers volumes n'ont pas la valeur des précédents, et, malgré bien des circonstances favorables, l'ordre semble avoir perdu le sentiment de sa dignité ancienne. La vie de sainte Thérèse en particulier est un tissu de puérilités, aussi dépourvues d'intérêt que de critique, et n'offre aucune garantie pour Theureux achèvement de l'œuvre. — Il a paru à Venise en 52 vol., une réimpression de l'édition d'Anvers, mais elle est peu correcte. ADALARD, ou Adalhard, ou Adelard, né 753. et WALA, deux cousins germains de Charlemagne, petits-fils de Charles Martel par le comte Bernard, furent soigneusement écartés des affaires et de la vie publique à l'avènement de leur parent au trône. On craignait leur influence, et ils furent enfermés dans un cloître, Adalard à Corbie, où il fut d'abord condamné aux travaux les plus vulgaires, mais dont il finit par devenir abbé, après avoir réussi une première fois à s'enfuir au Mont-Cassin. Cependant vers 796, leur position changea; Charlema-gne donna Adelard comme conseiller à son fils Pépin, nommé roi d'Italie; Wala reçut le gouvernement de la Saxe. Un troisième frère, Bernard, fut nommé abbé de Corbie. Mais de nouveaux changements politiques et les incertitudes de la succession de Charles troublèrent à plusieurs reprises l'existence de ces trois frères. Ils maintinrent énergiquement l'unité du royaume, en soutenant, tantôt avec Louis-le-Débonnaire, tantôt contre lui, que la couronne devait revenir au fils ainé, tandis que d'autres voulaient un partage égal du royaume entre les fils. Grégoire IV ayant voulu intervenir à Worms dans ces questions de politique intérieure, les évéques résistèrent et menacèrent même le pape de le faire déposer. Wala, mandé par Lothaire, vint de Noirmoutiers avec son ami Radbert. et tous deux donnèrent connaissance au pape (qui les ignorait) d'anciens documents, ordonnances papales, décrets de conciles, qui établissaient le pape comme juge de tout le monde, sans que personne pût le juger. Ces pièces, qui voyaient le jour pour la première fois, étaient un «acheminement à la production des fausses Décrétâtes. Le parti de l'unité du royaume triompha un moment, mais Lothaire ne sut pas profiter des circonstances; les siens l'abandonnèrent, et Wala, découragé, se retira dans son couvent lombard de Robbio, où il f 836. Adalard mourut la même année. ADALBERT lo Évêque de Prague, puis missionnaire en Prusse et en Pologne. Woycech, ou Woytech, né vers 950, fils d'un des plus puissants woy wodes de la Bohême, avait étudié à Mag-debourg d'où il avait rapporté une bibliothèque fort nombreuse. L'archevêque de cette ville, Adal-bert. lui avait donné son nom, par attachement, et c'est sous ce nom seulement qu'il est connu. Appelé à l'épiscopat par ses compatriotes qui désiraient voir un des leurs occuper ces hautes fonctions, il ne tarda pas à les froisser par son caractère trop rigoureux et surtout par sa soumission trop absolue à la cour de Rome. Sous prétexte d'un pèlerinage au Saint-Sépulcre, il partit pour Rome, 984, où il passa quelques années dans un couvent, avec son ami Gauden-tius. Rappelé par sa paroisse, 993, il consentit sur l'ordre du pape à y retourner, mais son exagération des pratiques romaines indisposa toujours plus Je peuple, et malgré l'appui du duc Boleslav, il vit son autorité méconnue, déposa de nouveau sa crosse et retourna à Rome, 995. En chemin, il baptisa le jeune Waïk, qui plus tard, sous le nom d'Etienne, devint roi de Hongrie. L'année d'après, sur les instances de l'empereur, il essaya une troisième fois de reprendre son évêché, 996, mais il fut si mal reçu qu'il y renonça définitivement et se décida à aller chercher la couronne du martyre chez les païens de la Pologne, puis en Prusse. Il se fixa successivement à Cracovie et à Gnèse, avec son ami Gaudentius, puis à Dantzik, et là, pendant une tournée d'évangélisation, il fut attaqué par une troupe de païens furieux et tomba percé de sept coups de lances, 23 avril 993. La semence sacrée ne devait lever que 250 ans plus tard. Son corps fut réclamé par Boleslav. qui le fit déposer dans la cathédrale de Gnèse et lui fit de magnifiques funérailles. Le bruit ne tarda pas à se répandre que des miracles avaient lieu sur son tombeau. 2<> Adalbert, archevêque de Brème, 1045, d'une famille considérable d'Allemagne. Il faisait déjà parler de lui quand il était sous-diacre de l'archev. Hermann. 1032-35. et son caractère altier inspirait des inquiétudes. Nommé ar-ehevêq. par Henri III, il joua un grand rôle sous ce monarque et sous son successeur Henri IV, qui tous les deux ans travaillant à établir leur domination en Allemagne, et ne le pouvant qu'avec l'appui des papes, trouvèrent en Adalbert l'instrument qu'il leur fallait. C'est par lui qu'ils parvinrent à faire nommer trois papes allemands, Clément II, Damase II et Léon IX. En même temps ils distribuèrent à un certain nombre de familles romaines les biens qui, depuis Charlemagne, appartenaient à l'Église, et ils réduisirent autant qu'ils le purent les revenus de la curie, de manière à la rendre dépendante de l'empire. Adalbert poussa à l'érection d'un patriarcat du nord, avec résidence à Brème, comme l'église de Milan avait été de son côté érigée en patriarcat, et par conséquent rendue indépendante de Rome. Henri III obligea Clément II, sa créature, à regarder Adalbert comme son égal. Un moment, dit l'historien Adam, la petite Brème fut comme une seconde Rome, où affluaient les envoyés de tous les pays du nord, des Orcades de l'Islande, du Groenland, venant demander des missionnaires. A la mort de Henri III (5 oct. 1056) les choses changèrent de face; il s'agissait de tenir tête aux haines déchaînées par la tyrannie du roi mort. Adalbert réussit à s'emparer de Ja régence du jeune Henri IV, et il gouverna souverainement pendant quelques années, mais en 1066 il fut précipité du pouvoir et dut se retirer modestement dans son diocèse. En 1069 il réussit à reconquérir un peu de son ancienne influence auprès du roi, et il allait se venger de ses ennemis, notamment des Billungen, quand il f 1072. ADALGAR, second successeur de saint Ansgar sur le siège archiépiscopal de Brème, 888. Il eut le chagrin de voir, 890 et 895. son siège réduit par les intrigues de Heriman, archev. de Cologne, à un simple évêché. 11 réussit un moment, sous Serge III, févr. 905, à rentrei dans ses anciennes prérogatives, mais l'accord de l'archev. de Cologne avec celui de Mayence, Hatto, les lui fit perdre de nouveau, et définitivement. Brème, en perdant les missions du nord, qui en avaient fait une véritable métropole, avait en réalité diminué d'importance, et l'on redoutait pour l'unité de l'empire, surtout avec un empereur de 6 ans, Louis IV, dit l'Enfant, sa trop grande prépondérance, f 9 mai 909. Son successeur, Hoger, reçut de Rome tous les honneurs personnels, mais ne put reconstituer l'arche- véché. ADALHARD, v. Adalard. ADAM 1° de Brème; chanoine saxon, vint à Brème 1068 sous Adalbert; il est déjà mentionné, 14 juin 1069, comme magister schola-rum; auteur d'une Hist. des églises de Hambourg, Brème, etc., et d'uneGéogr. de la Scandinavie. En général exact, même dans les notes qui y ont été ajoutées plus tard, mais partial contre les ducs de Saxe, qui étaient en hostilité avec Brème. Edit. abrégée de Lappenberg, Hanovre, 1846. 2° Melchior Adam, né à Grotkau, Silésie, fit de bonnes études à Brieg. puis à Heidelberg, ou il soutint ses thèses 1601, fut couronné et devint recteur du gymnase et professeur de l'université. Il mourut pasteur à Hoppenheim, 1622. C'était un travailleur et un collectionneur intrépide. Il a écrit des Vies des savants allemands, philosophes, théologiens, médecins, etc., au nombre de 136. et deux Décades, ou 20 Vies de théologiens étrangers, Cranmer, Calvin. Farel, Knox, etc. Ces notices sont sans doute de valeur inégale, mais l'ensemble forme une collection intéressante pour l'hist. de la Réformation. ADAMITES, petite secte du nord de l'Afrique, au 3™ siècle; mélange d'ascétisme et de gnosticisme; en vivant nus comme Adam avant la chute; ils pensaient établir leur innocence. Ils furent excommuniés. Une secte semblable surgit encore au 15™e siècle parmi les Beghards; ils furent persécutés par les Hussites que l'on affectait de confondre avec eux. De pareilles manifestations ne durent pas. ADELBERT, personnage singulier, un peu mystérieux, qui parut jouir en France, à la cour de Carloman, d'un assez grand crédit, ainsi que son ami Clément: il fut nommé évêque, mais sans diocèse, et eut pour constant adversaire l'apôtre de l'Allemagne, Boniface, par qui seul nous le connaissons. Les reproches qui lui sont faits sont contradictoires. Il semble qu'il ait condamné les pèlerinages, la confession obligatoire. la consécration des églises aux apôtres et aux martyrs. D'autre part, on l'accuse d'avoir présenté ses ongles et ses cheveux à l'adoration des fidèles, d'avoir exploité une lettre du Christ, qui lui aurait été envoyée du ciel, d'avoir composé des prières au nom d'anges inconnus. Condamné dans un synode à Soissons, 744, puis dans un concile à Rome, 25 sep. 745. il ne paraît pas avoir beaucoup souffert de ces deux sentences, et le pape Zacharie, en remettant la question à l'étude, 747, infirmait moralement la condamnation prononcée. Carloman n'abandonnait pas volontiers ses protégés, mais, après son abdication, Pépin qui avait besoin du secours de Rome, se prononça contre l'ennemi de Boniface. A la suite d'une discussion publique à Mayence, Adelbert aurait été officiellement condamné, puis dégradé et enfermé au couvent de Fulda; s'étant évadé, il aurait été assommé par des porchers. ADÉODAT, v. Dieu-donné. ADIAPHORA. Nom scientifique donné en théologie à la question des choses indifférentes. En existe-t-il dans la doctrine? Et en morale? De même que les stoïciens, les chrétiens des premiers siècles se sont posé la question, et l'ont résolue diversement, suivant leur tendance personnelle et leur manière d'envisager la vie et la sainteté. Schleiermacher, 1826, a établi qu'endroit positif, et vis-à-vis de toute législation humaine, il y a des actions qui ne méritent ni éloge, ni blâme: ainsi les jouissances artistiques, les délassements après le travail, etc., tandis qu'au point de vue de la morale stricte, il n'est aucune action qui ne se rattache directement ou indirectement à l'accomplissement d'un devoir. A cet égard il y a eu des controverses, presque à toutes les époques de Fhistoire. Parmi les plus modernes on peut citer celles qui éclatèrent à l'occasion de Plnte-rim de Leipsic 1548, trêve imposée aux évan-géliques et aux romains, et qui ménageait plus que l'Intérim d'Augsbourg les doctrines protestantes. Toutefois il maintenait encore la juridiction des évêques. plusieurs parties de la messe, l'extrême-oncton, les 7 sacrements, la confirmation, les cierges, les prières pour les morts, etc., que l'Intérim déclarait être des choses indifférentes, adiaphora; Mélanchthon les accepta comme telles; d'autres, notamment Flaeius, les repoussèrent énergiquement. La latte dura dix ans, jusqu'à la paix d'Augsbourg 1555, et se prolongea même jusqu'en 1577 où la Formule de concorde y mit un terme. — L'autre controverse se rattache au réveil religieux de Spener. qui condamna comme contraires à la sainteté de la vie tous les plaisirs mondains, les jeux, danses, théâtres, promenades, plaisanteries, luxe dans la nourriture ou dans les vêtements. Il n'avait en vue que certains excès dont il avait été témoin, mais il y avait de l'excès dans son jugement trop absolu, et ses adhérents allèrent plus loin encore que lui. La lutte éclata en 1692 par une violente brochure anonyme d'un piétiste. En 1698 nouvelle brochure, avec préface de Franck. Les opposants, cependant orthodoxes, maintinrent qu'il existe des choses indifférentes, et ils en dressèrent la liste; mais ils exagérèrent à leur tour, et quelques-uns de leurs arguments laissent beaucoup à désirer; ainsi, quand Stier, à propos de Luc 15, 25. prétend que les paysans ne comprendront pas la parabole de l'enfant prodigue, si on leur retire leurs danses et leur musique. Cette controverse a duré longtemps, elle n'est même pas terminée, et par sa nature même elle échappe à une solution: c'est à la conscience chrétienne de chacun de la résoudre pour son propre compte, v. 1 Cor. 10, 31. ADO, archevêque de Vienne, né vers 800 sous Charlemagne, f 16 décembre 875. D'une famille considérée des environs de Sens, il étudia dans les couvents de Ferrière et de Prilm et fit de bonne heure un voyage en Italie où il se lia avec Claude de Turin. Pendant les 16 ans de son épiscopat, il travailla pour l'affermissement de la hiérarchie papale dans le sud de la France. Nicolas I et Adrien II le traitent dans leurs lettres comme un intime. Il a laissé une Histoire du monde depuis la création jusqu'au 9®e siècle, et un Martyrologe, bien supérieur à ceux de Florus et de Raban Maur.,etc. ADOPTIANISME, doctrine qui eut au 8me siècle pour principaux représentants l'archev. Elipand de Tolède et l'évêque Félix d'Urgel. C'était une espèce de nestorianisme mitigé, adapté aux besoins d'esprit de l'Occident. Poursuivi du besoin de s'expliquer les deux natures qui sont en Christ et ne réussissant pas à les comprendre, Elipand en était venu à cette idée que quant à sa nature divine, Christ est réellement le fils de Dieu, mais que quant à sa nature humaine il n'est que son fils par adoption. C'était respectueux, mais ce n'était pas orthodoxe. Elipand, qui vivait à Tolède, sous le joug des musulmans, ne fut pas inquiété par eux pour ses opinions, mais Félix, qui habitait une partie de l'Espagne incorporée à la France depuis 778. eut à rendre compte de ses nouvelles idées dans plusieurs conciles: à Narbonne d'abord 788, où rien ne fut décidé, puis à Ratis-bonne 792. où il confessa son erreur et se rétracta. De retour en Espagne et sur les sollicitations de ses amis, il revint à l'adoptianisme. Charlemagne, au lieu de le condamner comme récidiviste, chargea Alcuinde l'éclairer. Dans un concile de 300 évêques, tenu à Francfort 794. mais où Félix ne comparât pas, il fut condamné; à Aix-la-Chapelle enfin, à la suite d'une conférence avec Alcuin, il abjura de nouveau, 799. Dès lors il resta à Lyon placé sous la surveillance de l'archevêque, jusqu'à sa f 816. Elipand continua de prêcher et d'avoir des adhérents, mais la secte fut bientôt oubliée. ADRETS (baron des), v. Reaumont. ADRIEN. On connaît sous ce nom plusieurs saints: un officier de l'armée de Galère, converti par l'héroïsme des martyrs chrétiens, et martyr lui-même à Nicomédie 306; un martyr à Césarée 309; un missionnaire en Gr. Rreta-gne, envoyé par le p. Vitalien, f 720; le év. de Saint-André, Écosse; martyr 874. — En outre 6 papns: 1° Adrien I, né à Rome, 772-95. Inquiété par Didier, roi des Lombards, il est protégé et vengé par Charlemagne, qui détruit le peu qui restait encore de la souveraineté des empereurs grecs. Le 7me (0u 8™) concile écuménique. 2rae de Nicée, convoqué par Adrien 787, consacre pour la première fois l'invocation des saints; il introduit aussi le culte des images, qui est cependant bientôt derechef condamné par le concile de Francfort; id. le culte des reliques. 2° Adrien II, né à Rome, 867-72, avait refusé deux fois le pontificat. Il prend parti pour Louis, frère de Lothaire, contre Charles-ie-Chauve, et lève l'excommunication lancée contre Lothaire, qui avait répudié sa femme. Les évêques français lui répondent, 870, que le pape ne peut être à la fois roi et évêque. Hinc-mar de Reims résiste également et appelle les Décrètales une invention de l'enfer. Hincmar île Lion, son neveu, tient pour le pape; Charles-le-Chauve le fait emprisonner et le prive de la vue: les rois ne sont pas encore très obéissants. Adrien tient un concile à Rome 863, où Pho-tius est excommunié; ce jugement est confirmé par le 8rne concile écuménique, tenu à Constantinople 869, après un conflit avec l'empereur Basile et le patriarche Ignace. Adrien a aussi des difficultés avec Charles-le-Chauve, à l'occasion d'un évêque condamné en France. 3° Adrien III, de Rome, 884-85, maintient les résolutions prises à Constantinople contre Photius. 4° Adrien IV, Nicolas Breakspear. né à Abbots-Langley, Hertfordshire, le seul pape anglais, était tîls d'un mendiant, et quelques temps réduit à mendier lui-même. Honteux de ce rôle il passa en France, entra comme domestique chez les chanoines de Saint-Ruf. près d'Avignon; se fit recevoir comme religieux dans ce couvent, et finit par en devenir le supérieur. Eugène III le créa cardinal d'Albano et l'envoya comme légat en Danemark et en Nor-wège pour y achever l'œuvre de la conversion de ces peuples. Élu pape à son retour 1154, il eut des démêlés avec les Romains au sujet d'Arnaud de Brescia; avec Guillaume, roi de Sicile, et avec l'empereur d'Allemagne. Frédéric étant venu à Rome pour rétablir les droits impériaux depuis longtemps oubliés, Adrien le couronne, mais bientôt, à propos d'un pèlerin, il écrit à Frédéric: De qui tiens-tu ton empire, si ce n'est de Ion seigneur le pape (a domino Papâ)? Les légats du pape sont immédiatement renvoyés, et Adrien f 1159, au moment où il va excommunier l'empereur. Trois papes lui succèdent à la fois. 5° Adrien V, de Gênes, neveu d'Innocent IV, élu 1276, ne régna qu'un mois. 6° Adrien VI. Adrien Florentio, fils d'un tisserand d'Utrecht, né 1459, prof, de théologie à Louvain et vice-chancelier de l'université, précepteur de Charles-Quint, évêque deTortose, vice-roi en Espagne, fut élu pape sans être bien connu, grâce à la protection de Charles-Quint. Honnête et droit, il voulait réformer l'Église en dehors de la Réforme. Il fit divers essais, mais ses cardinaux et toute la curie lui représentèrent qu'une réforme ferait trop de plaisir au parti de Luther, que ce serait confesser que l'Église avait failli. Il recommanda donc, an peu malgré lui, l'usage du fer et du feu contre les hérétiques, une croisade. Il reconnaissait qu'il y avait de grands abus à la cour de Rome et que le siège du mal était là. La Diète germanique pensait de même et le fit connaître par la publication des Cent griefs. Il mourut, 14 sept. 1523, peu regretté en cour de Rome, où l'on redoutait sa probité et ses intentions sincères d'une réforme. ^EGIDIUS 1° Grec d'origine, vint d'Athènes dans les Gaules, s'attacha à Césaire d'Arles et fonda à St-Gilles un couvent dont il fut le premier abbé; sa réputation de sainteté a fait de l'église où ses cendres reposent un pèlerinage très recherché. Il vécut, selon les uns. au commencement du 6roe siècle; selon les autres, il serait f vers 720 ou 725. 2° iEgidius Colonna, de Rome, célèbre sco-lastique, surnommé Doctor fundatissimas et theologorum princepe, 1247-1316. D'abord ermite, puis professeur à Paris et général des au-gustins, il avait étudié sous Thomas d'Aquin et Bonaventure. Chargé de l'éducation de Philippe-le-Bel, il composa pour lui un ouvrage De régi-mine principum, et beaucoup d'écrits, qui ne sont pas tous imprimés. Il fut nommé 1295 archevêque de Bourges. MUA CAPITOLINA, nom qui fut donné à Jérusalem après qu'elle eut été reconstruite sous Adrien, et qu'un temple y eut été élevé à Jupiter-Capitolin, vers 136. AEPINUS, Hoch Jean, né 1499 dans le Brandebourg; théologien allemand qui, après avoir embrassé la réforme et étudié à Wittemberg, se rendit, après un court voyage en Angleterre, à Hambourg, où il introduisit la réforme. 1525, fut nommé pasteur 1529 et surintendant 1532. Il avait des talents et un caractère bien équilibré. Il publia quelques écrits sur la descente de Christ aux enfers, et prit parti contre l'Intérim et ses trop nombreuses concessions, mais ne chercha pas à passionner la discussion, f 13 mai 1553. iERIUS, ami d'enfance d'Eustache qui devint plus tard évêque de Sebaste, Pont. Ils avaient mené ensemble une vie d'ascètes. Depuis l'élévation de son ami, 355, jErius, nommé par lui ancien et directeur d'une maison de pauvres, se tourna contre lui, par jalousie peut-être, et lui reprocha d'avoir renié son passé et de ne plus penser qu'à l'argent. Ils se séparèrent, 360, et iErius se mit à prêcher partout où il trouvait des auditeurs; les adhérents ne loi manquèrent pas. Il enseignait l'égalité des anciens et des évêques, et condamnait les jeûnes forcés et les prières pour les morts. Ce mouvement dura peu et n'eut pas de suites directes. AÉTIUS, fondateur de la secte des Anoméens, était syrien d'origine, probablement d'Antioche, ouvrier en cuivre, d'un esprit dégagé, peu instruit, mais désireux de s'instruire; d'un caractère difficile, ergoteur; il fit de la philosophie, de la médecine, de la théologie. C'était l'époque des luttes ariennes, il prit parti pour 1 aria-nisme et se promena d'Antioche à Tarse, à Anazarbe, à Alexandrie, à Sirmium, à Constan-tinople, se faisant partout mettre à la porte pour son outrecuidance ou excommunier pour ses doctrines. Condamné dans plusieurs conciles, exilé par Constance, il eut le bonheur de trouver un protecteur et un ami en Julien l'apostat, qui lui donna une propriété dans l'île de Lesbos. Il fut môme consacré évêque, mais sans diocèse, et il profita de cette position pour consacrer à son tour des évéques ariens. Sa vie fut plus d'une fois menacée, pour cause de caractère ou de politique. Il + 366 à Constanti-nople dans les bras de son ami Eunomius. Ses partisans reçurent le nom (Vaétiens, quelques-uns le transformèrent en athées; on les appelait aussi anoméens, v. Arianisme. Il a laissé plus de 300 lettres ou dissertations, dont une a été conservée et réfutée par Êpiphane, sur la non-conception du Verbe. AFFRE (d'), Deni$-Auguste, né 1793 à Saint-Rome, Aveyron, étudia à Saint-Sulpice, fut successivement prof, de philos, et de théol. à Nantes et à Paris, aumônier des Enfants-trouvés, vicaire général à Luçon et à Amiens, combattit Lamennais, accepta en 1840 l'archevêché de Paris, sans reconnaître officiellement la dynastie de juillet, se prononça conlre les tendances philosophiques de Cousin, et f 17 juin 1848 tué sur les barricades, en demandant de n'être pas vengé. Un des rédacteurs de la France chrétienne, il a écrit: Traité de l'administration temporelle des paroisses, 1827 et Essai historiq. et critiq. sur la suprématie temporelle des papes et de l'Eglise. AFRA (sainte), chrétienne qui fut brûlée à Augsbourg pendant la persécution dioclétienne, 304. Ses antécédents sont obscurs, et les récits contradictoires. Les uns disent qu'avant sa conversion, elle vivait dans le désordre (Aschbach, d'après les Act. Martyr.); les autres le nient (Tillemont, Rettberg). ÀFRICANUS. v. Julius. AFRIQUE. C'est ordinairement de la côte septentrionale de l'Afrique, l'Algérie actuelle, que l'on parle, quand on mentionne les églises d'Afrique. Il faut y joindre cependant TÉgypte, l'Abyssinie, et quelques autres localités, que l'on trouvera sous leurs rubriques spéciales, ainsi que les églises africaines plus modernes. AGAPES, repas fraternels que les premiers chrétiens célébraient en même temps que la sainte Cène, et souvent comme demi» acte de ce repas sacré, d'abord tous les jours, et habituellement le soir. On sait les abus qui s'y glissèrent bientôt, notamment dans l'église de Corinthe, où, chacun apportant sa nourriture, la différence entre riches et pauvres qui aurait dû ne pas exister, se produisait au contraire d'une manière choquante. Quoique parfaitement inoffensives au point de vue politique, les agapes éveillèrent les soupçons des gouverneurs romains, qui y virent comme une résurrection des hétairies païennes. Pline s'en préoccupe dans son rapport à Trajan (Ép. L. X, 96). Au siècle, les agapes sont séparées de la Cène, qui reste exclusivement un acte de culte, et elles ne sont plus que des repas chrétiens, accompagnés de prières et de conversations édifiantes; mais là encore on retrouve les inconvénients signalés à Corinthe (Tertul-lien, Clément d'Alex.). Les riches pieux commencent à s'abstenir d'y paraître. L'institution tombe en decadence et dans une sorte de mépris, et le concile de Gangre doit les réhabiliter; elles reprennent quelque faveur, mais ce ne sont bientôt plus que des repas d'amis, offerts aux pauvres par les riches. Plusieurs conciles durent défendre la célébration des agapes dans les églises. Par leur caractère même, les agapes sont une institution qui a reparu souvent dans l'Église, notamment aux époques de réveil. AGAPET 1° Romain, fils du prêtre Gordien, élu pape en 535, ne régna que dix mois, mais non sans gloire. Il fut envoyé comme député auprès de Justinien, à Constantinople, par Théodat, roi des Ostrogoths, qui avait fait mourir sa cousine et femme Amalasonte, et contre qui Justinien, pour venger ce meurtre, et aussi pour chasser les barbares, avait envoyé Réli-saire. Agapet trouva la cour divisée. Justinien tenait pour le concile de Chalcédoine et pour les deux natures en Christ; c'était l'opinion reçue dans l'Église latine. Mais Théodora sa femme était monophysite et avait fait nommer au siège de Constantinople un prêtre de son opinion, Anthime, précédemment évêque de Trébizonde. Agapet, pour gagner la faveur du roi, et aussi par conviction, déposa Anthime et le remplaça par Mennas. Il écrivit à l'église de Jérusalem que Mennas, sacré par un pape, devait être considéré comme l'égal de ceux qu'avait établis saint Pierre lui-même. Satisfait de son ambassade. il se remit en route pour Rome, mais une maladie l'emporta en peu de jours pendant le voyage, à la fin d'avril ou septembre 536. 2 2° Agapet II, Romain, élu pape en juin 946. Marousia et Théodora étaient mortes, mais leur esprit vivait encore dans la personne de leur rejeton, le prince Albéric, soutenu par toute la noblesse romaine. Pour secouer ce joug ignoble, Agapet fit alliance avec Othon 1er, d'Allemagne, et concourut ainsi pour sa bonne part à assurer la prééminence à cet empire. Il eut également à intervenir dans les affaires de la France, à propos des rivalités qui éclatèrent, pour la repourvue de l'archevêché de Reims, entre Hugues et Artold (ou Artaud). Il se prononça tour à tour pour l'un et pour l'autre, suivant en cela les conseils de la modération ou de la prudence, et finit par donner le siège à Artold, le protégé de l'Allemagne, quand il se vit absolument délivré de la domination d'Albéric. Il mourut à la fin de 955. Son successeur Jean XII, fils d'Albéric, compléta sans le vouloir le triomphe de l'Allemagne, en forçant par ses désordres Othon de revenir à Rome. 3<> Agapet, diacre de Constantinople, auteur d'un livre De officio régis (ou Scheda regia) dédié à l'empereur Justinien, sur les devoirs des rois. Venise, 1509, grec-latin, 8<>. Trad. plusieurs fois en français, entre autres par Louis XIII, Paris 1612. AGATHE, vierge sicilienne, qui subit le martyre à Catane 251, sous Décius. AGATHON, pape 678 ou 79, f 682, condamna les monothélètes dans un concile, et refusa le premier de payer le tribut que les papes avaient coutume de payer aux empereurs lors de leur élection. AGENDE, formulaire déterminant l'ordre du culte public; ce mot est surtout usité en Allemagne, où les différentes agendes locales ont été en partie remplacées, sous l'influence de Bunsen, avec l'exemple et l'autorité du roi de Prusse, par une agende commune, la même pour toutes, ce qui amena de nombreuses protestations et une controverse passionnée, 1822 à 29. AGIER, Pierre-Jean, né 28 déc. 1748, f 22 sept. 1823; janséniste célèbre, président de cour à Paris; défenseur énergique de la constitution civile du clergé. Il a écrit un Traité sur le mariage, 1800, et plusieurs traductions ou commentaires sur la Bible, notamment sur l'Apocalypse, 1823. Napoléon dit de lui, en le voyant: Voilà un magistrat ! AGNÈS, jeune chrétienne appartenant à une noble famille romaine. A l'âge de 13 ans, elle attira les regards du fils du préteur Symphro-nius, qui lui demanda sa main. Elle refusa, ayant, disait-elle, un autre fiancé, Jésus-Christ. Symphronius lui fit de belles promesses, puis des menaces en exhibant devant ses yeux ses appareils de supplice. Voyant qu'elle ne s'effrayait pas, il lui donna le choix entre se faire prétresse de Vesta ou être déshonorée publiquement. La jeune fille, pleine de foi, lui répondit: € L'ange du Seigneur est auprès de moi, il me gardera. » Entièrement dépouillée de ses vêtements, elle fut conduite dans un lieu de prostitution. Là, le fils de Symphronius voulut s'approcher d'elle, mais avant qu'il pût seulement la toucher, il tomba comme frappé de la foudre. Symphronius effrayé n'osa continuer son œuvre de persécution et remit la jeune héroïne à son remplaçant Aspasius, qui la fit égorger, 21 janvier 306. Elle a été chantée par Prudence. AGNOÈTES, secte du 6*e siècle, qui prit naissance pendant les querelles monophysites. Christ, comme homme, savait-il toutes choses, ou y a-t-il des choses qu'il ignorait? Thémis-tius, diacre d'Alexandrie, se prononça dans ce dernier sens; il fut combattu par le patriarche Timothée et par son successeur Théodosius, qui donna aux Thémistiens le surnom d'Agnoètes (qui ignore). Grégoire-le-G. condamna la secte; elle s'éteignit au 8"ne siècle. AGNUS DEL 1* Vieux chant d'église; vient à la fin de la messe; ordinairement très doux. Dans l'Église grecque, il se chantait le matin. Vers l'an 1120, l'usage s'introduisit de répéter 3 fois Agnus Dei, répétition dont les évêques et les commentateurs donnent les explications les plus diverses. Luther le traduisit (O Lamm Gottes untchuldig) 1523, et l'introduisit dans sa messe allemande, 1526, pour être entonné aussitôt après la consécration des espèces, au moment où les communiantss'approchentde l'autel. 2° On donne aussi ce nom à de petits agneaux en cire, fabriqués avec les restes des cierges. Le pape les bénit le mardi après Pâques, la i™ et la 7n" année de son règne et la distribue comme amulettes à de hauts personnages; ils doivent préserver de la foudre. AGOBARD, né en Espagne, 779, archevêq. de Lyon, 816, appartient à cette pléiade d'hommes distingués qui brillèrent au temps de Char-lemagne. Il restaura les églises et les couvents, enrichit le culte, fonda des écoles et des bibliothèques, et combattit plusieurs des superstitions de son temps; il fit abroger la loi Gombettequi autorisait les duels judiciaires, il fit la guerre aux épreuves dites Jugement de Dieu, à la sorcellerie, à l'adoration des images. Il travailla à l'amélioration du chant sacré. Il émit sur la doctrine de l'inspiration des Écritures des idées saines et modérées. Il joua enfin un rôle considérable dans les luttes de Louis-le-Débonnaire avec ses fils, et prit parti contre le père dans l'intérêt de l'unité du royaume, en maintenant la loi de succession telle que Louis l'avait donnée en 817, tandis que l'impératrice Judith voulait la faire modifier en faveur de son fils Charles. Il concourut à la double humiliation qui fat infligée k Louis 833, et qui devait le rendre inapte à régner. Déposé pour ce fait, en 835, par le concile de Thionville, il se réconcilia cependant avec Louis et fut réintégré dans son diocèse de Lyon, f 840- Œuvres publiées par Baluze, Paris 4666. AGONISANTS, v. Pères. AGR£DA (Marie d'). Célèbre visionnaire née, 1602, à Agreda, Vieille-Castille, d'une famille pieuse nommée Coronel. Elle fit ses vœux dans le couvent de l'Immaculée conception 1620, dont elle devint abbesse, 1627; passe pour être fauteur de la Mistica Ciudad (cité) de Dios, qui parut à Madrid, 1655. et qui renferme la biographie de la Mère de Dieu, tissu d'absurdités et parfois d'indécences. Elle raconte l'enfance de la Vierge qui, plusieurs fois, fut transportée dans l'empyrée; qui avait sous ses ordres, pour la servir, 900 anges commandés par l'archange Michel; qui aurait parfaitement pu parler dès sa naissance, mais ne voulut pas; qui est la princesse célébrée Prov. 8, etc. Le livre fut condamné par la Sorbonne, mis à l'index par l'Inquisition, interdit en Espagne et en Portugal, sans toutefois qu'aucun pape se soit prononcé catégoriquement. Marie d'Agreda était protégée par les franciscains, à l'ordre desquels elle appartenait, et quand, après plus d'un siècle de discussions, le pape fut mis en demeure de se prononcer, il ne réussit à éluder la difficulté qu'en demandant d'abord des preuves authentiques établissant que Marie était bien l'auteur du livre. On avait été moins scrupuleux et plus expéditif pour lancer l'Unigenitus contre Jansénius et contre le p. Quesnel, 1710. Marie f 1665. Son livre a été trad. en fr. par le p. Crozet, 3 vol. Marseille, 1696. AGRICOLA. 1° Rodolphe, né 1443 en Hollande, étudia à Zwoll chez les Frères de la vie commune, sous A. Kempis, et travailla en Allemagne au relèvement des études, f 1485 à Heidelberg où il était professeur. Auteur d'un traité De inventione dialecticâ, qui a une direction pratique. 2o Jean, né à Eisleben le 4 avril 1492, étudia à Wittemberg et fut le commensal et l'ami de Luther. Il assista comme secrétaire à la dispute de Leipsic, 1509, fut qlq. temps professeur à Wittemberg. puis pasteur à Francfort, et prédicateur à Eisleben, où il obtint un grand succès. Il insistait sur la justification par la foi, au point de dire que la loi était inutile pour être sauvé, et l'on donna à ses sectateurs le nom d'antino-miens. D enseignait que sous la nouvelle alliance la loi ne devait plus être prêchée 1537, et il se brouilla momentanément avec Luther et Mé-lanchthon qui trouvaient du danger dans la ma nièredont il accentuait, en l'exagérant, la vérité évangélique. Il contribua à l'Intérim d'Augs* bourg 1548, où les intérêts de la Réforme étaient étrangement sacrifiés; on l'accusa même d'avoir reçu pour cela 700 couronnes, mais cette calomnie ne trouva pas de crédit. Il + de la peste à Berlin, 22 déc. 1566, âgé de 75 ans. Ses ennemis firent courir le bruit qu'il s'était suicidé. Outre ses sermons et traités de théologie, il a laissé un recueil de 750 proverbes allemands, avec un Commentaire qui lui assigne une bonne place dans la littérature de son pays. AGRIPPA, Henri-Corneille, dit de Nettes-heirn; né à Cologne 1487, f à Grenoble 1535; savant, presque un géni\ un des hommes qui ont le plus fait pour les progrès de la science de son temps, mais d'un esprit inquiet, aventureux, mal équilibré, espèce de mélange d'Érasme et du chevalier de Hutten. Il eut une carrière digne de son caractère, parcourut presque tous les pays de l'Europe, servit le roi de France, puis Louise de Savoie comme médecin, puis Marguerite de Hollande, se rendit ensuite en Angleterre, de là à Cologne, puis à Wurz-bourg, en Suisse, à Venise, à Pavie où, docteur en théologie, il se fit aussi recevoir docteur en droit et en médecine, et où il se maria. Syndic de Metz en 1518, il entre en relation avec Lefe-vre d'Étaples, sauve une sorcière des mains de l'inquisition, retourne à Cologne, vient à Genève où il se remarie, est nommé médecin de la ville de Fribourg, etc. Il comptait finir ses jours à Cologne, mais dans une excursion qu'il fait à Lyon il est arrêté, puis, mis en liberté, il meurt en passant à Grenoble. Ses principaux ouvrages sont (tous en latin) un Traité sur l'incertitude et la vanité des sciences, trad. en fr. par Tur-quet 1682; un livre sur la Philosophie occulte, qui l'a fait accuser de magie et emprisonner à Bruxelles, une apologie (Declamatio) du sexe féminin, écrite pour faire sa cour à Marguerite, trad. p. Gueude ville. Édition complète de ses œuvres, Leyde 1560 et 1600. Partout on croit trouver déjà le souffle de la réforme, mais scepticisme, défaut de caractère ou manque de convictions, il ne se prononça jamais. AGUIRRE (Joseph Saënz d') né 1630 à Logro-gno. Espagne; bénédictin, prof, de théol. à Salamanque, secrétaire de l'Inquisition, fait cardinal par Innocent XI, défendit dans deux ouvrages considérables l'autorité du pape contre les libertés gallicanes, f 1699 à Rome. AHASVÉRUS, v. Juif errant. AICHSPALT, ou Aspelt, Pierre, né près de Trêves vers 1250. f 5 juillet 1320, fut successivement chancelier de Bohême et archevêq. de Mayence. Partisan des Habsbourg jusqu'en 1303, il devint dès lors leur plus ardent ennemi et suscita contre eux l'alliance de Wenzel, roi de Bohême avec Philippe, roi de France. Intrigant et cupide il sut jouer un rôle dans l'histoire de son pays et se fit bien venir des papes auxquels il eut à faire. De mœurs régulières, il fut sévère sous ce rapport avec son clergé. AILLY 1° Pierre d'Ailly, né à Gompiègne de parents pauvres 1330, s'éleva par son travail et ses talents aux plus hautes positions. C'était l'époque oti la philosophie scolastique commençait à baisser, et il se rangea parmi les nomina-lis'.es les plus décidés. Il a écrit un grand nombre d'ouvrages, entre autres sur l'astronomie; dans ce dernier, 1414, il cherche à montrer qu'il y a concordance entre l'histoire du monde et la conjonction des planètes, et l'on y trouve entre autres une curieuse prophétie sur les grands changements qu'il annonce pour 1789, t si le monde dure encore jusqu'à cette époque. » Notons aussi plusieurs livres philosophiques, sur la Trinité, l'âme, le but de la vie, la vertu; des commentaires sur les Psaumes, le Cantique. l'Oraison dominicale, et un grand nombre de lettres et brochures de circonstance. Sous-diacre il jouissait déjà d'une telle considération qu'il fut délégué 1357 au Concile provincial d'Am-boise. En 1362 il fut nommé docteur en théologie et dans son discours de réception il prit pour sujet l'étude de l'Écriture Sainte, comme la pierre sur laquelle le Christ a promis d'édifier son Église. C'était hardi, et toute sa vie il poursuivit le môme but, la réforme de l'Église dans son chef et dans ses membres. Il fut nommé successivement grand-maître du collège de No-varre (comptant parmi ses élèves Gerson et Clémangis) 1384. chancelier de l'Université de Paris 1389 (à la suite d'une mission réussie à Avignon), évêque du Puy 1397 et de Cambrai 1398. confesseur de Charles VI, et enfin cardinal 1411, nommé par Jean XXIII. Il souffrait beaucoup du schisme, auquel par ses différentes missions il s'était trouvé mêlé. Il avait connu P. de Lune, quand il n'était que légat à Paris 1393, il le reconnut et le fit reconnaître par la France, lorsqu'il fut devenu le pape Benoît XIII. mais il finit par l'engager, ainsi que Jean XXIII à donner sa démission. Il prit part au concile de Pise, mais malgré sa modération, ne put en obtenir aucune réforme. En 1414, envoyé comme légat en Allemagne, il écrivit encore pour demander la démission volontaire des trois papes, et il finit par arriver le 17 nov. à Constance, 5 mois après l'ouverture du Concile. Il obtint que les votes auraient lieu par nations, et non par têtes, ce qui consterna le parti ultra -montain. Il stimula le zèle des princes. Il fit voter la supériorité des conciles sur les papes, et assura ainsi la démission ou la déposition des trois papes qui se partageaient le pouvoir. Tout allait bien et l'on pouvait entrevoir une réforme comme la conclusion de tant d'efforts, quand d'Ailly, par une de ces inconséquences qui abondent dans sa vie, fit tout échouer. Sigismond, les princes allemands, Gerson et beaucoup d'autres, voulaient que le concile s'occupât immédiatement de la réforme de l'Église avant l'élection d'un nouveau pape; d'Ailly se joignit aux cardinaux qui voulaient au contraire que l'on commençât par l'élection du pape; il assura ainsi le succès du parti romain et peut revendiquer le triste honneur d'avoir compromis l'œuvre du concile. Il concourut à la sentence contre Huss. qu'il condamna non comme réaliste, mais comme disciple de Wicleff. II. demanda avec Gerson, mais en vain, la condamnation de Jean-Petit qui avait essayé de justifier l'assassinat du duc d'Orléans, et proposa entre-temps une réforme du calendrier. Mécontent de l'issue du concile, et peut-être aussi mécontent de lui-même, il retourna à Cambrai où il passa les dernières années et d'où il continua de s'occuper avec intérêt du collège de Navarre. Envoyé en mission par Martin V en Allemagne, il f en route 1420; son corps fut transporté à Cambrai et enterré dans la cathédrale. Les catholiques l'ont surnommé l'Aigle de France et le Marteau de ceux qui s'écartent de la vérité; les protestants le comptent parmi les précurseurs de la Réforme. Les uns et les autres vont peut-être trop loin. Ses principaux écrits ont été publiés à Strasbourg, 1490, in-fol. ATT, 2° D'Ailly, noble famille de Picardie, dont les titres remontent à 1090, et qui a donné à la Réforme deux capitaines, Louis et Charles, tués l'un et l'autre à la bataille de Saint-Denis 1567, et une fille, Marguerite, qui épousa 1581 François de Châtillon, 4me fils de l'Amiral, femme de tête et de courage qui, en l'absence de son mari, repoussa en personne les ligueurs commandés par Salard et fit leur capitaine prison-nier 1590. Le d'Ailly de laHenriade, liv. VIII, n'est qu'une fiction bien réussie. AIMOIN ou Aymoin 1<> moine de Saint-Germain des Prés, f 889, auteur de plusieurs vies de saints qui ne sont pas sans valeur. 2<> Chroniqueur français, né à Villefranche, Périgord, vers 950, f 1008, disciple d'Abbo de Fleury, a écrit une Hist. des Francs de 353-654, en cinq livres. Les deux derniers, qui sont les meilleurs, paraissent être d'une main étrangère. AIX-LA-CHAPELLE. Ville célèbre déjà bien connue des Romains, puisqu'on y retrouve partout leurs traces sous la forme de monnaies, de bains, d'inscriptions, d'aqueducs, mais qui est nommée pour la première fois dans une donation de Pépin 754. Cette donation est datée des Aquis Grani palatio, du palais d'eaux de Gra-nus, soit que Granus fût le propriétaire du palais, soit que, remontant beaucoup plus haut, comme quelques-uns le pensent, ce soit un Romain, Gratins, qui ait fondé la ville sous Adrien, vers 124. Son nom d'Aix, Aqua, vient incontestablement des eaux thermales sulfureuses et ferrugineuses que Ton y trouvait en abondance, et qui décidèrent Gharlemagne à s'y fixer et à s'y faire bâtir une chapelle. Une des tours de l'hôtel de ville porte encore aujourd'hui le nom de Gr&nus. Aix-la-Chapelle doit aux Carlovin-giens toute sa grandeur, et ce n'est guère que par eux qu'elle touche à l'histoire de l'Église. Pépin y possédait un palais, et il y passa les fêtes de NoPl 765 et celles de Pâques. Gharlemagne y célébra Noël en 768 et y passa dès lors tons les hivers, quand il n'était pas retenu par de lointaines expéditions. Il y fit construire la cathédrale de Sainte-Marie, seul reste aujourd'hui de la grande architecture carlovingienne, pour laquelle Adrien lui envoya de Ravenne des colonnes, du marbre et des mosaïques. Elle fut achevée vers 796, et inaugurée, dit-on, par Léon III. Elle est construite en rotonde, dans le style byzantin, et non dans le style des basiliques romaines. Un certain nombre de reliques, aussi curieuses que problématiques, y sont renfermées; les petites, clous, morceaux de la croix, épines, dent de sainte Catherine, cheveux de Jean-Baptiste, etc., sont dans des vases de vermeil, facilement abordables pour les visiteurs; les autres, les grandes, langes du Christ, robe de la Vierge avec quelques taches de son lait, linge dans lequel fut enveloppée la tête de Jean-Baptiste, le linge enfin qui ceignait 1? corps du Seigneur sur la croix, ne s'exposent que tous les 7 ans et avec une pompe qui attire une foule de pèlerins, dont les offrandes forment un des gros revenus du chapitre. Mais ce qui a donné à Aix-la-Chapelle sa plus grande notoriété, ce sont les nombreux capitulaires (ou lois), environ 65, que Gharlemagne publia, réédita, ou fit élaborer par ses assemblées générales, notamment le 23 mars 789, le 28 oct. 797, en avril et oct. 802, en nov. 809, etc. On discutait de tout dans ces assemblées, mais Charlemagne décidait seul. On s'occupait d'administration et de législation, parfois de l'État, souvent de l'Église, de sa discipline, de son organisation, de ses dogmes. En 811 Gharlemagne se plaint des difficultés qu'il rencontre dans son œuvre et du peu de concours qu'il trouve chez les ecclésiastiques et chez les laïques. En 813 il convoque des synodes à Mayence. Reims. Chalon-sur-Saône, Arles et Tours, qui doivent préparer des travaux pour une assemblée générale convoquée à Aix-la-Chapelle la même année. Il f le 28 janvier 814, et il est enterré dans l'église de Sainte-Marie. L'an 1000, à Pentecôte, Othon III fait rechercher son tombeau dans l'église que les Nor-| mands avait saccagée en 881, et il donne à l'archevêque de Cologne les divers ornements qu'il y trouve, couronne, croix, sceptre, épée, etc. En 1165 Frédéric I** fait rouvrir le tombeau et veille à ce que les restes de Charles soient recueillis par l'archevêque de Cologne et l'évêque de Liège et soigneusement conservés dans un cercueil spécial. — Louis-le-Débonnaire continua de résider à Aix-la-Chapelle. Il y avait été couronné; il y convoqua 816 une assemblée ecclésiastique chargée de régler sur certains points les détails de la vie des religieux, hommes et femmes, chanoines et chanoinesses; ces prescriptions ne comptent pas moins de 80 chapitres, et furent promulguées en 817. D'autres assemblées y furent tenues encore en 819, en 825 pour la translation des os de saint Hubert en 831 pour la justification de l'impératrice Judith; enfin enS40un concile est appelé à juger Lothaire et le dépose. A partir de ce moment l'unité du royaume disparaît pour un temps et l'importance d'Aix-la-Chapelle diminue; ce n'est plus que par un reste de respect traditionnel qu'à partir du 10™e siècle on y couronnera les empereurs d'Allemagne; d'Othon I«r 936 à Ferdinand I«r 1558. on n'en compte pas moins de 29. — Il faut encore mentionner parmi les souvenirs religieux de cette ville la cathédrale où reposent les restes d'Adalbert; commencée par Othon III. elle ne fut achevée que sous Henri II, 1005. 20 ATX AKIBA, célèbre rabbin juif, qui vivait vers l'an 100; directeur d'une école à Bani-Brak, auteur d'un livre sur la loi. d'une étude sur la création et d'un traité sur l'alphabet; ces deux derniers ont fait de lui un des pères de la cabbale. Il s'attacha à la révolte de Bar-Kochba. Les Romains l'ayant fait prisonnier, le mirent k mort de la manière la plus cruelle; ils lui arrachèrent la peau avec des crochets de fer; il avait 120 ans. Le Talmud de Jérusalem nomme comme son bourreau Jursus Rufus qui était gouverneur de Palestine l'an 135. Dix autres savants juifs souffrirent le martyre avec lui. ALACOQUE, Marie, née le 22 juillet 1647 à Hautecour, diocèse d'Autun, fut mise au couvent à 8 ans et entra à Paray-le-Monial dans Tordre des salésiennes, ou visitandines, le 25 mai 1671. Elle devint de bonne heure célè-' bre par ses extases. Ayant été guérie d'une paralysie, elle l'attribua à la Vierge et, pour lui faire honneur, prit dès lors le nom de Marie au lieu de celui de Marguerite, qu'elle tenait de sa marraine. Ses visions et ses entretiens avec Dieu se multiplièrent. Elle a inauguré le culte du Sacré-Cœur par son petit livre: La dévotion au cœur de Jésus (publ. par le P. Crozet 1698), qui, développé par le jésuite Gallifet, est devenu le point de départ d'un culte nouveau qui a eu sa vogue. Elle s'était entaillé le nom de Jésus sur la poitrine, + 17 oct. 1690, le jour qu'elle avait fixé. Canonisée 24 juin 1864. — v. 4 Chants, dans Vert-Vert, de Gresset, Amsterdam 1748. Vie, par l'abbé Daras. ALAIN. Il y a eu plusieurs théologiens et philosophes de ce nom: Alain de Lodio (du Puy) méridional; Alain, évêque d'Auxerre, et Alain de Lille, ou de l'Isle (de Insulis), ces deux derniers pouvant bien aussi n'être qu'un seul et même personnage. L'incertitude sur l'identité jette aussi quelque confusion sur la vie. On se demande si Alain de l'Isle est né à Lille en Flandre, ou dans le Bordelais, ou dans le comtat Venaissin; on le fait même naître à Ryssel, Flandre. Il aurait été moine cistercien et aurait passé une partie de sa vie en Angleterre. Selon d'autres, il aurait enseigné la théologie à Paris, avec grand succès, et aurait cultivé la philosophie sous la forme gracieuse de la poésie, f 1203. Ses œuvres complètes ont été publiées par Ch. de Visch. Anvers 1654. Dans le nombre il faut compter l'Anti-Claudien, poème allégorique en 9 livres, dans lequel il traite des devoirs de l'homme bon et parfait; il dit que la raison peut bien par ses seules forces découvrir les vérités de l'ordre physique, mais que pour les questions religieuses elle doit se soumettre à la foi; De planctu naturœ, des soupirs de la création, où il déplore l'immoralité de son temps; De arte calholicœ fidei, 5 livres où il cherche à démontrer qu'il faut combattre les hérétiques non par la force seulement, mais par la raison, point de vue étonnant pour le 12me siècle, et en désaccord avec celui de l'Anti-Claudien; une étude, qui n'est pas sans valeur, sur l'histoire de l'Angleterre jusqu'à Henri IL Deux autres ouvrages, une Vie de saint Bernard et une Summa quadripartite réfutation en 4 livres, contre les hérétiques (cathares), les vau-dois, les juifs et les païens, qui sont publiés parmi ses œuvres, devraient plutôt être attribués à l'évêque d'Auxerre. La Summa, dédiée à Guillaume, comte de Montpellier, serait même, selon quelques-uns, l'œuvre d'Alain de Podio, Provençal, dont un traité de morale a été découvert il y a une quarantaine d'années dans les bibliothèques de France. * ALBAN ou Albain 1° Soldat romain, de Veru-lam. le l«r martyr de l'Angleterre, f 302 dans la persécution dioclétienne. 2° A. deMayence, martyr du 4™ siècle. Originaire de Namsia, il fut envoyé par Ambroise dans les Gaules où il trouva la mort. Il a porté sa tête jusqu'au lieu choisi pour sa sépulture; il n'est pas le premier qui ait fait ça. Une église lui fut élevée par Charle-magne, pour en faire le tombeau de sa femme Fastrade 805. Plus tard le couvent devint un chapitre noble, avec droit de battre monnaie. ALBE, Fernand-Alvarez (duc d'), né 1508, général espagnol sous Charles-Quint et Philippe II. Négociateur habile et militaire distingué, il fit les campagnes de Hongrie, de Tunis, d'Allemagne (Miihlberg) contre les protestants, et fut nommé 1567 gouverneur des Pays-Bas avec mission spéciale d'écraser les hérétiques. Il réussit; en 4 ans il en fit périr 18,000 sur l'échafaud. v. Hollande, Gueux. Il tomba en disgrâce à cause du mariage de son fils 1579, et f 12 décembre 1582. Granvelle regrette pour lui sa mission en Hollande. ALBER ou Aulbert, Matthieu, né à Reutlin-gen 11 déc. 1495, épousa Clara Baier 1524, f 2 déc. 1570, entouré de ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants. Il compte parmi les plus zélés réformateurs du sud de l'Allemagne. Sa jeunesse fut difficile; comme Luther, il dut chanter dans les rues pour gagner sa vie. A 18 ans il obtint à Tubingue une place qui lui permit d'étudier en échange de leçons qu'il donnait, et dès 1516, sa ville natale, sur la recommandation de Mélanchthon, lui vota une bourse pour l'achèvement de ses études. Consacré à Constance, il fut appelé comme prêtre à Reutlingen et se mit à prêcher l'Évangile, sans se rendre bien compte encore du mouvement qui l'entraînait. Il finit par être interdit; l'évêque, le pape et l'empereur lancèrent contre lui leur sentence, qui fut affichée le même jour aux portes de toutes les églises. Il se décida à comparaître à Esslingen devant le tribunal de l'empire; 68 hérésies lui étaient reprochées; il en avoua 67 et les justifia, mais il nia d'avoir parlé avec mépris de la Vierge et de l'avoir appelée une blanchisseuse. La franchise de ses explications lui gagna le cœur de ses juges qui, au bout de trois jours, le laissèrent aller. Il avait dit: « Le pardon du pape nettoie les bourses, le pardon de Christ nettoie les consciences. » Il se montra ferme dans la révolte des paysans et réussit à maintenir à Reutlingen l'ordre et la tranquillité. Malgré ses bonnes relations avec Zwingle, il resta fidèle à la doctrine des sacrements de Luther. Il fit la connaissance du grand réformateur seulement en 1536. En 39 Tubingue lui conféra le titre de docteur. Ne voulant pas accepter l'Intérim, il quitta Reutlingen le 25 juin 1548 et fut nommé pasteur, antistès et conseiller ecclésiastique à Stuttgart par les ducs Ulrich et Christophe; enfin en 63 abbé de Blaubeuren. On a de lui quelques sermons et un catéchisme. ALBERT lo célèbre philosophe scolastique, surnommé le Grand à cause de l'étendue et de la variété de ses connaissances. Né entre 1193 et 1205 à Lauingen, Souabe, de la famille des comtes de Bollstœdt, f Cologne 1280. Il étudia à Padoue et à Paris, entra 12Î21 dans l'ordre des dominicains, enseigna à Paris, fut nommé provincial de son ordre à Cologne, où il continua d'enseigner la philosophie; puis évéque de Ra-tisbonne 1260; il n'y resta que 3 ans et se hâta de venir reprendre sa cellule à Cologne, pour se consacrer exclusivement à l'étude. Il était si savant que ses contemporains lui firent, bien à tort, la réputation de sorcier qu'il a conservée jusqu'à ce jour, et lui prêtèrent une foule d'histoires merveilleuses. Ses œuvres ont été publiées par Jammy, Lyon 1651, 21 vol. fol. Son principal mérite est d'avoir fait connaître les œuvres d'Aristote, qu'il étudia sur des mss. traduits de l'arabe. Il est essentiellement scolastique; pour lui la foi est purement objective; c'est l'adhésion au symbole de l'Église; le travail de l'âme, de la conscience et de l'intelligence n'y entrent pour rien. La version de la Vulgate est seule authentique. Les pères de l'Église étaient inspirés, c'est pour cela qu'ils portent le titre de saints. Les magiciens d'Égypte ont fait de vrais miracles, mais seulement en précipitant l'action de la nature, car la verge de Moïse aurait pu tôt ou tard se changer en serpent par le seul fait de la décomposition et de la moisissure; les démons n%ont fait que hâter le procédé ordinaire. Les astres n'exercent pas une influence directe sur l'histoire, mais indirecte, en agissant sur la végétation, la température et le climat. Il se pose des questions difficiles: Celui qui a fait que Dieu soit en même temps homme, peut-il faire aussi que le noir soit blanc? Les démons sont-ils tous tombés volontairement, ou Lucifer les a-t-il entraînés ? Etait-il plus difficile à Dieu de faire le monde ou de le racheter ? On remarque cependant aussi chez Albert quelques traces de néo-platonisme, et il est probable qu'elles tiennent à ce que les œuvres d'Aristote ne lui étaient parvenues qu'en latin, et dans des traductions faites de l'arabe. En somme, s'il est vrai qu'il ait été l'un des scolastiques les plus savants de son temps, il est également vrai que ses connaissances n'étaient ni bien digérées, ni bien réglées; c'étaient des matériaux péniblement rassemblés, mais non coordonnés et par conséquent sans emploi. Ce qu'il a fait et laissé de mieux, c'est son élève Thomas d'Aquin. 2° Albert, antipape; v. Pascal II. 3° Albert, ou Albrecht; v. Albrecht. ALBIGEOIS. La secte des cathares (Ketzer), ou bonshommes, s'était rapidement répandue dans le sud de la France, en particulier dans le comté de Toulouse et dans la contrée d'Albi. Elle avait en même temps changé de nom, soit à cause de certaines transformations dans sa doctrine, soit à cause de sa prédominance numérique et de ses nombreux adhérents dans le pays. Le nom d'albigeois devint l'appellation générale de tous ceux qui s'opposaient au cléricalisme romain, et les historiens catholiques eux-mêmes travaillèrent à entretenir la confusion en comprenant sous un seul nom les sectes les plus diverses. Puy Laurens ne connaît d'ennemis que les ariens et les vaudois, ou lyonnais; pour lui les albigeois rentraient donc dans la désignation de lyonnais, et cette erreur s'est accréditée au point que Basnage lui-même la partage. Ce qui dans tous les cas rend la confusion plus facile encore, c'est que tous les livres et documents des albigeois ont été détruits par leurs ennemis et que nous ne les connaissons que par ceux qui les ont condamnés. Quelques faits cependant paraissent établis, c'est que lorsque des vaudois et des albigeois se rencontraient, ils fraternisaient, étant unis par une pensée commune; c'est que sous le nom d'albigeois se rencontraient les tendances les plus diverses, au moins quant aux chefs et docteurs, au point qu'on a cru reconnaître chez les uns des tendances manichéennes et dualistes, chez les autres l'influence gnostique, et chez la plupart un ascétisme prononcé ou inconscient. Enfin ils possédaient l'Écriture, au moins le N. T., et la tenaient en honneur; le principal reproche que leur font leurs adversaires, c'est précisément d'avoir repoussé les dogmes et les pratiques romaines, le purgatoire, les prières pour les morts, le pouvoir temporel des papes, les richesses du clergé, les ornements d'église, les statues, les images, les crucifix, le culte de Marie et des saints, la messe, la transsubstantiation, la confession obligatoire, le sacrement de la prêtrise, etc. Dans tous les temps on a vu les mêmes empiétements provoquer les mêmes résistances, et les pauliciens, les bulgares, les bogomiles, les patarins, les publicans, les albigeois, les vaudois et la Réforme, ont pu se succéder dans l'histoire sans qu'il y ait cependant entre eux d'autre lien que l'analogie de leurs tendances, et sans qu'on puisse les faire découler les uns des autres. Le clergé d'alors était d'ailleurs tellement décrié qu'il était de mode de s'en détourner avec affectation, et, quand on voulait exprimer une répugnance invincible, au lieu de la locution traditionnelle: J'aimerais mieux être un juif, on avait coutume de dire en jouant: J'aimerais mieux être un chapelain. Des causes externes et internes expliquent donc le nombre considérable d'albigeois qui se trouvaient alors dans le midi de la France, en même temps que la diversité de vues, de caractères et de personnalités qui se groupaient sous ce nom. On comprend aussi qu'il ait fallu à la papauté 50 années d'efforts, et l'emploi de toutes ses armes spirituelles et temporelles, pour venir à bout de cette protestation des consciences et pour maîtriser cette tentative de réforme. — Trois phases caractérisent la campagne entreprise par Rome contre les albigeois; la 1", qui fat la plus courte, fut celle des prédications et des excommunications; la 2®* fut la croisade, la plus meurtrière; la rétablissement de l'Inquisition, la plus cruelle et la plus odieuse. Les papes Alexandre III, Innocent III, Honoré III et Grégoire IX rivalisèrent d'ardeur dans cette lutte d'extermination. C'est une longue et lamentable histoire, dans laquelle on vit des villes de 40 et de 60.000 âmes passées au fil de l'épée, et qui ne fit pas moins d'un million de victimes; nous ne saurions la raconter en détail. C'est Alexandre III qui avait le premier excommunié Valdo et ses adhérents. Lucius III renchérissait sur lui et lançait «l'éternel anathème » 1181. Mais cela n'aboutissait à rien. Innocent III comprit qu'il y avait mieux à faire, et il envoya en France deux légats, Reinerius Saccho, et Guido le fondateur des Hospitaliers, pour stimuler, surveiller et informer. Le beau-frère du roi d'Angleterre, Raymond VI, était alors comte de Toulouse; quoique catholique, il ne voulait pas de persécution contre ses sujets albigeois; il résiste aux ordres du pape et est excommunié. Douze abbés de Cîteaux accompagnent partout les légats, et renonçant à des prédications qui ne convertissent pas, ils prêchent la croisade, sous la direction de deux nouveaux légats, cisterciens comme eux, Pierre de Castelnau (Château-neuf) et Raoul, bientôt renforcés par l'arrivée de leur abbé, le terrible Arnaud (ou Arnold) Amaury 1204. Un nouvel aide leur est donné en la personne de Folquet, troubadour converti, qu'Innocent nomme évêque de Toulouse et qui se propose d'expier aux dépens des albigeois les scandalep de sa vie passée. Mais rien ne bouge encore, ni peuples, ni princes. A ce moment viennent à passer deux Espagnols. Diégo. évêque d'Ossuna et son sous-prieur Dominique. Voyant les légats découragés par l'inutilité de leurs efforts: Allez à pied, leur disent-ils, sans argent, sans or, imitant en tout les frères apostoliques, en pauvre appareil, comme les parfaits. Eux-mêmes donnèrent l'exemple, et ils allèrent de lieu en lieu avec Raoul et Castelnau, s'entre-tenant avec les hérétiques et notant toutes les circonstances dont ils pouvaient avoir à se servir plus tard. C'était le commencement de l'Inquisition. Mais ni la parole ni les prières ne suffisant encore, il était facile d'entrevoir le moment prochain où il serait fait appel à la force brutale. Un accident trancha la question. Le légat Castelnau ayant insulté en face Raymond VI, un des gentilshommes du comte le frappa de son épée et le tua. Innocent y répondit par un cri de fureur et par l'appel à une croisade; 30.000 hommes furent bientôt sur pied contre Raymond et contre les albigeois. Raymond épouvanté fait sa paix aux conditions les plus humiliantes; il est amené presque nu à la porte de l'église de Saint-Gilles, où il est introduit par le légat qui le frappe de verges, et il s'engage à se joindre aux persécuteurs. Quant aux albigeois, ils sont massacrés sans merci. Que devons-nous faire? demandent les croisés, vêtus de noir et blanc. Nous ne pouvons pas toujours distinguer les bons et les mauvais. — Tuez-les tous, répond le légat; le Seigneur reconnaîtra ceux qui sont siens. Ainsi tombèrent successivement Béziers 1209, Carcassone. Minerve. Narbonne; et bientôt Toulouse, puis Avignon 1226, en même temps que les campagnes étaient systématiquement saccagées et détruites. avec les récoltes de l'avenir, par ces furieux qu'aveuglait le fanatisme. Après le légat cistercien, après Arnaud, le pape avait remis l'exécution de ses ordres à un ancien croisé. Simon, comte de Montfort, homme aussi féroce qu'ambitieux, et qui apporta aux malheureux persécutés le pillage, l'incendie, le viol et l'assassinat. Il périt lui-même dans le second siège de Toulouse, écrasé par un bloc lancé sur lui 1218. Son fils Amaury reprit son œuvre avec ardeur 1219, aidé par le nouveau roi de France Louis VIII, et béni par le nouveau pape Honoré III. C'était une nouvelle génération qui commençait; il ne lui restait plus beaucoup de lauriers à cueillir; elle renouvela àMarmande les massacres de Béziers, et tout fut dit, ou à peu près. Le fils de Raymond, qui avait succédé à son père, fut réduit comme lui à sauver par des lâchetés sa vie et l'ombre qui lui restait de son pouvoir. Le pays était détruit et l'Inquisition s'installa sur ses ruines, dans un château des environs de Narbonne, pour achever ce qu'une guerre de 20 ans n'avait pu faire. Dès ce moment les albigeois déclinèrent visiblement en France; ils avaient été exterminés, mais non vaincus, encore moins persuadés. Ceux qui échappèrent aux massacres, ne pouvant plus obtenir d'asile en France chez aucun des princes régnants, se dispersèrent en divers lieux: on les retrouve à la fin du 13me siècle en Italie, surtout en Calabre, en Lombardie et dans les vallées; ils étaient nombreux à Milan, ville que Mathieu Pâris appelle le refuge et le réceptacle de tous les hérétiques. On en trouve également en Espagne, en Allemagne et en Bulgarie. Ils vivaient dans une grande union, jusqu'au moment où ils se divisèrent sur la doctrine des deux principes. A la longue ils disparurent, ou se fondirent soit dans les vaudois, soit dans les sectes de la Bohême. ALBO, Joseph, rabbin juif qui vivait en Cas-tille vers 1425; auteur d'un traité fort estimé Ikaritn, c.-à-d. les éléments de la foi. En opposition à Maïmonides qui en comptait 13, il n'en compte que 3, qui selon loi résument toute la religion juive: l'existence de Dieu, la révélation et la rétribution. ALBRECHT (en franç. Albert) 1<> Apôtre de la Iivonie. Il était chanoine à Brème quand, à l'ouïe des fâcheuses nouvelles de la Baltique, son archevêque décida de l'envoyer comme missionnaire chez les Livoniens. Avec les mœurs du temps, il s'agissait d'une expédition militaire autant que religieuse, et Aibrecbt, avant de s'embarquer, visita les cours de Danemark et d'Allemagne, qui lui fournirent une flotte de 23 vaisseaux et un grand nombre de soldats. Arrivé à l'embouchure de la Dwina, il y fonde la ville de Riga, qui devait être et qui devint après quelques années le boulevard de l'Église dans ces contrées. Il remporte quelques succès militaires et en profite pour prêcher la foi; mais à chaque instant des révoltes mettent en péril la mission, et il en vient à l'idée de fonder un ordre de chevalerie, qui sera une armée permanente sous les ordres de l'évêque, v. Frères de la milice, ou de l'épée. C'était une imitation de Tordre des templiers. Dès lors et pendant de longues années la vie d'Albrecht. monotone dans son agitation, ne présente plus qu'une suite de petites batailles, interrompues par d'incessants voyages en Allemagne et à Rome, à la recherche de chevaliers et de moines. La mission est compromise par les mesquines rivalités des Russes, des Danois, des Suédois, qui contestent les droits des Allemands. Le pape lui-même ne sait plus à qui donner raison. Enfin la paix 9e fait 1224. et le pays est divisé en 5 évêchés. Aibrecbt f 1229, après un ministère laborieux et dévoué de 30 années, laissant à son frère Her-mann l'évêché de Dorpat. 2° Albrecht, fils de Jean, électeur de Brandebourg. né 1490, f 24 sept. 1545, fut nommé en 1513 archevêque de Magdebourg (à 23 ans) et en 1514 archevêque de Mayence, cumul jusqu'alors sans exemple, et que le pape n'autorisa qu'en l'obligeant à faire lui-même les frais du Pallium, le chapitre de Mayence n'étant pas en état de les supporter. C'était une somme de 30,000 ducats; la maison Fugger lui en fit l'avance, et c'est pour pouvoir la rembourser qu'il prit à ferme la vente des indulgences dont il confia l'exploitation à un certain nombre d'individus, entr'autres Tetzel. D entra en lutte avec Luther, dont il dédaigna d'ailleurs de lire les écrits, laissant, dit-il, ce soin à de plus savants. Il fut nommé cardinal à la diète d'Augs-bourg 1518, et concourut pour sa part à l'élection de Charles-Quint 28 juin 1519. Il aimait les beaux-arts, les ornements d'église, les lettres et les sciences. Il était l'ami d'Erasme et reçut chez lui Capito en visite. Ni méchant, ni vicieux, mais sans aucune espèce de convictions. Il avait fondé en 1506 l'université de Francfort-sur-l'Oder. 3° Albrecht de Brandebourg, margrave de Brandebourg, premier duc de Prusse, né 17 mai 1490, destiné de bonne heure à l'état ecclésiastique, entra le 13 févr. 1511 dans l'ordre teutonique et en fut nommé grand-maître quelques jours après, ayant à peine 21 ans. Après une courte guerre entre le roi de Pologne et la Russie 1519, bientôt suivie d'une trêve de 4 années, il vint en Allemagne et ne tarda pas à se convaincre que l'ordre avait fait son temps et que sa résurrection morale était impossible. Luther lui conseilla d'en finir avec une antiquité qui n'avait plus de sens, de se marier et de séculariser son duché. Le prédicateur Osiandçr. de Nuremberg, exerça sur lui une grande influence dans le même sens, mais ce ne fut qu'en 1525. et après s'être mis en règle avec le roi de Pologne, qu'il se décida à donner sa démission de grand-maître, à se joindre au mouvement de la réforme et à en favoriser l'introduction dans ses États, sans toutefois jamais rien faire contre les catholiques. Il épousa en 1526 Anna-Dorothée, fille du roi de Danemark. Le roi de Pologne, Sigismond, son oncle, lui donna la Prusse inférieure et le titre de duc; il le soutint aussi contre Charles-Quint qui le sommait de restituer à l'ordre les domaines de Prusse qu'il prétendait lui appartenir de droit. La jalousie d'une partie de la noblesse, les animosités cléricales, les revendications teu-toniques et impériales, un soulèvement des paysans, les sectes qui s'établirent autour de lui, assombrirent ses dernières années. Il perdit en 1547 sa femme bien-aimée et épousa en secondes noces Anne-Marie, fille du duc de Brunswick. Il défendit toujours la liberté religieuse et organisa en 1549 la ligue des princes contre l'intolérance de l'empereur; il soutint les Fr. moraves aussi longtemps qu'il le put, mais fut contraint à la fin de leur imposer la confession d'Augsbourg, ce qui en décida un grand nombre à émigrer. Avec l'âge, et dans des circonstances exceptionnellement difficiles, son énergie fléchit et il se laissa arracher par une commission polonaise le gouvernement et l'administration de son duché, dont il ne fut plus pendant quelques années que le malheureux titulaire, + le 20 mars 1568, âgé de 78 ans, après avoir régné 57 ans. C'est de lui que date réellement la Prusse actuelle. ALBRET, v. Jeanne. ALCANTARA, nom arabe, qui signifie pont, passage, et qui a été donné ainsi à plusieurs localités, en Egypte, en Algérie et ailleurs. La ville de ce nom la plus connue est située sur le Tage, en Estramadure; elle est célèbre par son beau pont de pierre construit sous Trajan. Alphonse IX, de Castille, prit cette ville sur les Maures en 1213 et la donna aux chevaliers de Calatrava, qui la remirent à leur tour à Nuno Fernandez, 3^e grand-maître de Tordre de Saint-Julien du Poirier. Les deux ordres vécurent quelque temps en bonne harmonie, mais ils se divisèrent à propos de l'élection d'un grand -maître, et les derniers venus se groupèrent sous le nom d'Ordre d'Alcantara. ordre exclusivement militaire, occupé contre les Maures, et qui compta 37 grands-maîtres; le dernier, Juan de Zuniga, donna sa démission 1495, et fut nommé archevêque de Séville et cardinal. Leur drapeau portait sur fond d'or la croix de l'ordre, les armes de Castille et Léon, et le poirier. Ils étaient soumis à la règle de saint Benoît, sous la forme cistercienne. Paul III leur permit de se marier, mais une fois seulement. Leurs vœux portaient sur trois points: Obedientia. castitas conjugalis, et conversio Morum. Le roi Joseph supprima 1808 les revenus de cet ordre, qui a été lui-même définitivement supprimé 1835. ALCUIN naquit à York, d'une famille distinguée, 726 ou 735. Élevé dans le monastère de sa ville natale, où les études étaient très soignées, il eut pour maîtres Bède-le-Vénérable, l'archevêque Egbert et le savant Aelbert. Celui-ci ayant été nommé archevêque, Alcuin lui succéda comme directeur et réussit à maintenir la haute réputation de cette école. Il fit en 766 et en 780 le voyage de Rome, et rencontrai Parme Charlemagne qui le pressa de venir s'établir en France. Il y vint en effet 782 et reçut aussitôt 3 abbayes, qui devaient assurer sa position. Dès lors il fut aussi le confident et le conseiller du monarque, son premier ministre, chargé de l'organisation du culte et de l'impulsion à donner à l'instruction publique à tous les degrés. II fonda des écoles à Paris, à Tours, à Aix-la-Cha-pelle, et dirigea lui-même l'École du Palais, destinée à l'empereur et k son entourage, et qui l'accompagnait partout où il allait, classe de conversation plus que d'enseignement méthodique, dont les auditeurs étaient les princes et les princesses de la famille, frères, sœurs, fils et filles. Pour donner une base à l'enseignement, aux maîtres et aux élèves, il s'occupa de multiplier le nombre des manuscrits, mais il fallut avant tout les restaurer, car la plupart étaient dans un état déplorable. Ce fut un de ses premiers travaux, et il s'en occupa toute sa vie. Il procéda lui-même à la revision des livres sacrés, dont il fit hommage à l'empereur, mais il ne travailla pas avec moins de zèle à la restauration des mss. de la littérature profane; il revit entre autres et copia les comédies de Térence. Enfin ses Lettres (on en possède 232) et ses nombreux ouvrages sur les sujets les plus divers, montrent combien était vaste ce génie auquel Charlemagne avait confié les branches les plus importantes de son administration. La théologie, la jurisprudence, l'astronomie, les lettres lui ont également familières et l'on reconnaît partout son influence dans les célèbres capitulaires. Charlemagne lui confia de nombreuses missions, et Alcuin s'y distingua par son tact autant que par sa modération. Mais quelle que fût l'estime que lui portait l'empereur , le voisinage d'un grand fatigue à la longue le subordonné, et Alcuin, rassasié d'honneurs, souffrant d'infirmités, sollicita la permission de se retirer de la cour et d'aller vivre dans la retraite 796. Charlemagne finit par le lui accorder et lui donna l'abbaye de Saint-Martin de Tours, une des plus riches du royaume. Ce ne fut pas une vie oisive. Alcuin rétablit la règle et l'ordre, enrichit la bibliothèque, et continua d'enseigner; il compta parmi ses auditeurs Amalaire et Raban Maur. Charles essaya plusieurs fois de le rappeler à sa cour; il eût voulu même, 800, l'emmener à Rome pour son couronnement; mais Alcuin resta inflexible, sa santé ne lui permettait plus aucun déplacement; il renonça peu à peu à toute activité, se démit de ses abbayes 801, et ne s'occupa plus que de se préparer « à paraître devant le juge éternel. * f 19 mai 804. Ses œuvres ont été publiées par Duchesne, Paris 1617, et par Froben. Ratis-bonne 1777. — II signait quelquefois Flaccus Albinus, nom de guerre qu'il avait pris à l'École du Palais, de même que Charles s'appelait David, Amalaire Symphosius, Gisla Lucie, etc. ALDE, imprimeur vénitien, un des premiers éditeurs du N. T. grec 1518 d'après le texte d'Érasme. C'est lui qui mit en relations le savant bâlois avec celui qui fut plus tard le cardinal Aléandre. ALDEGONDE, sainte, de race royale, née 630 en Hainaut, célèbre par ses vertus et ses visions, fonda le couvent de Maubeuge auquel elle légua ses biens, et f 684. ALEANDRE, Jérôme, né 13 févr. 1480 à La Mothe, sur les frontières du Frioul et de l'Is-trie, se distingua de bonne heure par sa mémoire et ses vastes connaissances dans les langues, les mathématiques, la médecine et la théologie. A Venise, les Aide le mirent en relation avec Érasme. Il passa quelque temps à la cour d'Alexandre VI. Louis XII l'appela en 1508 à Paris, comme professeur de belles-lettres, puis comme recteur de l'université. Léon X le nomma successivement secrétaire du cardinal de Médicis. bibliothécaire du Vatican, et enfin légat en Allemagne. C'est en cette qualité qu'il siégea à Worms contre Ldther 1521; il parla pendant 3 heures pour s'opposer à l'appel de Luther à la diète et pour demander que ses line* fassent brûlés. On lui attribue la rédaction de Fédit de Worms. Il combattit violemment la réforme dans les Pays-Bas et fit brûler à Bruxelles 2 moines augustins d'Anvers. Clément VII le nomma archevêque de Brindes 1524 et lui confia plusieurs missions. Fait prisonnier à Pavie à la suite de François il se racheta pour 500 écus d'or. Paul III le nomma cardinal et lenvoya une 3®«foisen Allemagne, mais sans succès, f 31 janvier 1542. — Auteur d'un Lexicon grœco-latinum, Paris 1512. ALÉGAMBA, jésuite, né 1592 à Bruxelles, t à Rome 1651, fut prof, de théol. à Gratz 1629, visita presque toute l'Europe avec son élève, le fils du prince d'Eggemberg, devint secrétaire, puis préfet de la maison professe des jésuites à Rome. On a de lui une Bibliothèque des écrivains jésuites, Anvers 1643, plus ou moins impartiale, et un catalogue des martyrs de la Société. ALEMANI; sélon les uns, confédération d'hommes appartenant à divers peuples (Aile Mânner); selon d'autres, tels que Griinm, les hommes les plus distingués, les vrais hommes. Ce nom qui, par extension, a fini par désigner toute l'Allemagne, ne s'appliquait dans l'origine qu'aux contrées, probablement parentes des Suèves, situées entre le Neckar et le lac de Constance, c.-à-d. le grand-duché de Bade, le Wurtemberg, et par moments les pays riverains, FAisace et le nord de la Suisse. Dion Cassius est le premier écrivain chez lequel on trouve ce nom; Caracalla essaya, mais sans y réussir, de soumettre à Rome les Alemani; le nom d'Ale-manicus qu'il crut pouvoir prendre consacre ses intentions, mais nullement son triomphe. La haine entre les Alemani et les Romains était si intense, que toute évangélisation venant de Rome était impossible. Vaincus à Tolbiac par les Francs, 496, les Allemani se montrèrent moins hostiles au christianisme quand il leur fut présenté par le moine irlandais Fridolin. Vers 517 on voit déjà un évêque de Constance au synode de Vindonissa ( Windisch); Fridolin fonde à Seckingen un couvent de femmes; Colomban et Gallus obtiennent de nombreuses conversions; en 750 on trouve 7 ou 8 églises dans le Wurtemberg et dans la Forêt-Noire, à Calw, Heilbronn, Hirschau, etc. Trudbert, autre irlandais, Landolin, écossais, Pirmin, et enfin Boniface travaillèrent successivement dans ces contrées et les amenèrent à la profession du christianisme. L'influence romaine, complètement nulle à l'origine, s'y fit sentir plus tard, quand l'Église éprouva le besoin de se constituer en une forte unité pour résister à ses nombreux ennemis. V. les différ. art. ALEXANDRE. L'histoire de l'Église compte un grand nombre de personnages de ce nom. saints, savants, évêques et papes. Voici d'abord la liste de ces derniers: 1° Alexandre, év. de Rome vers 109 ou 110, souffrit le martyre sous Adrien 119. On lui attribue à tort l'introduction de l'eau bénite dans l'église et l'usage de mêler de l'eau au vin de la communion; ces deux rites lui sont de beaucoup postérieurs. Sa fête est fixée au 3 mai. 2° Anselme de Baggio, né à Milan, év. de Lucques, célèbre par sa piété, élu pape sous le nom d'Alexandre II 1061 sous l'influence de Hildebrand, en concurrence avec Honoré II nommé par l'empereur. Il fit restituer au saint-siège les terres que les Normands lui avaient enlevées et protégea les juifs contre les persécutions des chrétiens. Par l'énergie avec laquelle il combattit la simonie et s'opposa au divorce d'Henri IV, il se montra le digne prédécesseur d'Hildebrand. f 21 avril 1073. 3° Alexandre III. Roland Rainuce, de Sienne, 1159-81, monta sur le siège pontifical dans des circonstances difficiles. Adrien IV venait de se brouiller avec l'empereur Frédéric Barberousse, qui, pour soutenir les droits du pouvoir séculier, ne suscita pas au nouveau pape moins de 4 concurrents les uns après les autres dans les personnes de Victor IV 1160, Pascal U11164, Calixte III1168. et Innocent III 1178. Les succès de l'empereur en Italie obligèrent Alexandre à se réfugier momentanément en France 1162, où il resta jusqu'en 1165. La division des modérés augmente les forces du parti hiérarchique; les Lombards, ligués dès 1164, battent à Legnano le 29 mai 1176, Frédéric qui dès lors abandonne son pape et doit se résigner à recevoir d'Alex. III, après lui avoir baisé les pieds, l'absolution la plus humiliante. Alexandre l'emporte également en Angleterre sur Henri H qui, après avoir fait mourir Becket 1170, est bientôt contraint par son peuple et par sa famille, de venir faire pénitence, nus-pieds, sur le tombeau de son ennemi nouvellement canonisé, et d'offrir son dos à la flagellation des prêtres. La force d'Alex, lui vint, d'abord de ce qu'il avait pour lui tous les ordres religieux, cisterciens, chartreux, etc.; ensuite de son alliance avec les Lombards. Dans le domaine religieux il enleva au peuple et au clergé romain tout droit d'intervention dans l'élection des papes, la réservant aux cardinaux seuls, et stipulant qu'à l'avenir celui qui aurait réuni les deux tiers des voix serait élu et que son concurrent, s'il essayait de se maintenir serait excommunié. La résidence n'est plus ecclesia, mais curia romana, c'est une cour. Il tint 3™ concile de Latran, 11™ écu-ménique, enleva aux évêques le droit de canonisation, comme appartenant aux causes majeures, introduisit l'usage des monitoires, porta à 7 le nombre des sacrements, et peut être considéré comme le véritable fondateur de l'inquisition, qu'il fit fonctionner activement dans le midi de la France, + 30 août 1181, aimé et respecté. 4° Alexandre IV; Rinaldi, comte de Segna, évêque d'Ostie et de Velletri, pape de 1254-61. Il se laissa gouverner par ses flatteurs, prodigua les dispenses, protégea les ordres mendiants, publia en leur faveur sa bulle De Sancto amore 1256, établit des inquisiteurs en France à la demande de saint Louis 1255, succomba dans la lutte des guelfes et des gibelins et dut s enfuir à Viterbe; obtint quelques succès en Allemagne où il prit parti naturellement contre Con-radin, et donna moyennant finances la couronne de Sicile à Henri III d'Angleterre, qui n'eut plus qu'à la conquérir et n'y réussit pas. Il travailla à l'union des églises grecque et latine, mais sans succès, f à Viterbe 1261. 5° Alexandre V; Pierre Philargi, né à Candie, pauvre mendiant qui n'avait connu ni père, ni mère, élevé dans son ordre par un cor-delier franciscain, étudia à Oxford et à Paris; nommé archev. de Milan par Galeas Visconti, cardinal par Innocent VIL il prit part au concile de Pise 1409 qui maintint la supériorité des conciles sur les papes, et après que Grégoire XII et Benoît XIII eurent été destitués comme hérétiques, schismatiques et parjures, il fut élu à leur place par les cardinaux réunis; il avait 70 ans. Il aimait beaucoup la bonne chère, et tenait à plaire à chacun, ce qui l'empêcha de travailler à la réformation de l'Église, comme il avait juré de le faire. Il dit de lui-même: J'étais un riche évêque, je suis devenu un cardinal moyen, et finalement un pauvre pape. Il congédia les membres du concile, 7 avril 1409, et dominé ou mené par Balthazar Cossa (Jean XXIII) il favorisa tous les abus au lieu de les détruire; il multiplia les charges afin de pouvoir en donner beaucoup aux franciscains ses protégés. Les deux papes qu'il avait évincés se relevèrent à l'aide de leurs partisans. L'Église se trouva un moment avec trois papes. Alex, mourut bientôt après à Bologne 1410, empoisonné selon toute apparence par son ami Cossa, qui fut son successeur. 6° Alexandre VI; Rodrigue-Alex. Borgia, Espagnol, né à Valence, neveu de Calixte III, successivement archev. de Valence, cardinal-évêque de Porto 1455. et vice-chancelier; un des hommes les plus corrompus qui aient occupé le trône pontifical. Après la mort d'Innocent V1H. 1492, il se fit nommer pape à force d'argent. Débauché dès sa jeunesse, il avait eu d'une dame romaine nommée Rose Vanozza cinq bâtards, dont 4 fils: Louis, César, Jean, Gottfried, et une fille, la fameuse Lucrèce On assure que cette dame eut encore quatre maris, dont trois au moins furent assassinés par elle. On a accusé Alexandre d'avoir eu des relations incestueuses avec sa fille, de même que son fils César, mais la preuve matérielle manque; c'est déjà trop qu'on ait pu l'en soupçonner, que ses ennemis de Naples l'en aient accusé et que le peuple l'ait cru. Sa vie fut une suite de débauches et d'empoisonnements. Son but unique fut de bien établir et d'enrichir sa nombreuse famille, et surtout son fils César, le plus grand des scélérats, l'idéal de Machiavel, dont on a dit qu'il ne donnait d'audience qu'à son bourreau. Sous ce pape, tout Rome craignait d'être assassiné. Il eut affaire à Charles VIII et à Louis XII, rois de France; malheureux avec le premier et obligé de se cacher, il eut le bonheur de contracter avec le second une alliance à la faveur de laquelle il réussit à dépouiller les princes voisins et à agrandir ses États. On a dit de lui qu'il foula aux pieds toutes les lois divines et humaines. Sa fin fut digne de sa vie; il avait invité à dîner Adrien de Corneto, l'un des plus riches cardinaux de sa cour, et il comptait s'en débarrasser par le poison; le cuisinier, gagné par le cardinal, servit au pape le plat destiné à sa victime, et Alex, mourut presque aussitôt, 18 août 1503. Le fait est contesté, mais vraisemblable (Vie, par Burchard 1697. par Gordon en anglais 1729; trad. franç. 1732. etc.). 7° Alexandre VII; Fabio Chigi, de Sienne, né 1599, pape 8 avril 1655. + 22 mai 1667. Nommé sous l'influence d'un parti indépendant, dit l'Escadron volant, en opposition aux influences étrangères qui avaient fait les précédentes élections, Chigi s'était montré l'ennemi des abus et bien décidé à combattre le népotisme. Ces belles intentions ne durèrent pas un an. Rusé et dissimulé, d'un esprit médiocre et inconstant, incapable de persévérer dans une entreprise de longue haleine, il avait cependant bien débuté, et fait concevoir des espérances qu'il ne devait pas réaliser. Envoyé comme légat à Munster pour les négociations de la paix, il avait fait preuve d'intelligence et Innocent X avait pu lui confier d'autres missions importantes. Pendant son séjour en Allemagne, il avait cependant formé le projet d'embrasser le protestantisme; mais il en fut détourné par l'exemple de son frère, empoisonné à Lyon pour l'avoir fait; il fut affermi dans ses craintives et prudentes dispositions par son élévation au cardinalat. La première année de son pontificat en fut aussi la plus sage et la plus heureuse; il embellit Rome, réforma quelques abus, baptisa un prince marocain, reçut l'abjuration de la reine Christine (qui lui causa plus tard beaucoup d'ennuis), confirma les décisions de ses deux prédécesseurs contre les 5 prétendues affirmations de Jansénius et prescrivit le fameux formulaire; tout cela en 1656. Mais il tomba bientôt entre les mains des Jésuites et dès lors tout changea; d'ascète il tourna au sybaritisme; le p. Oliva lui fit croire que c'était un péché à loi de ne pas prendre soin de sa famille, et il se mit à donner des places à ses frères, à ses neveux et à ses cousins; il fît faire les magnifiques colonnades de la place Saint-Pierre, et se lança dans la poésie (Philomathi labores juve-*ile$n Paris 1656). La garde corse ayant insulté à Rame l'ambassadeur de France, duc de Cré-qui, Louis XIV exigea et obtint d'Alex, que cette garde fût cassée et qu'une pyramide fût élevée à l'endroit même où avait eu lieu l'offense, avec une inscription constatant l'outrage H sa réparation; ce monument disparut cependant quelques années plus tard avec le consentement de Louis XIV. Alex, a canonisé François de Sales et l'Espagnol Thomas de Villa-Nova. 8« Alexandre VIII; Pierre Ottoboni, né 4610, élu le 6 oct. 1689, f 1 fév. 1691. 11 était de Venise et prodigua des secours d'argent à cette ville contre les Turcs. Agé de 80 ans quand il monta sur le siège, il laissa, par sa criminelle indolence, retomber l'Église au point où elle en était avant son prédécesseur, Innocent XI. Il vida les caisses publiques en cadeaux à ses parents. Il acheta la bibliothèque de la reine Christine et la réunit à celle du Vatican. 11 résista aux demandes de la France qui réclamait pour ses ambassadeurs et pour leur palais le droit d'asile et la franchise de l'exterritorialité; la France céda sur ce point et abandonna en outre Avignon. Malgré tant de condescendance, et quoiqu'il dût en partie à la France son élévation, le caractère papal était si fort chez Alex, qu'il publia une bulle contre les 4 art. de l'assemblée du clergé de 1682, relatifs aux libertés de l'Église gallicane et disgracia les prélats qui avaient fait partie de cette assemblée. Quoique ennemi des jansénistes il se montra indépendant vis-à-vis des jésuites, et condamna 1690 la doctrine du p. Bougot sur le « péché philosophique. » Voici maintenant les noms d'autres Alexandre qui, sans être papes, n'en ont pas moins joué un certain rôle dans l'histoire: |0 Evêque de Jérusalem, f en prison à Césa-rée sous Décius, vers 251. 2o Evêq. et patriarche d'Alexandrie en 312 ou 313; il succéda à Aquila ou Achilles; il est connu surtout par le zèle avec lequel il combattit les erreurs d'Arius. Il lui écrivit pour l'engager à se rétracter et, sur son refus, rassembla en 321 à Alexandrie un concile d'une centaine d'évéq. d'Égypte et de Lydie, où Arius fut excommunié. Constantin ayant essayé d'intervenir, mais sans succès, convoqua en 325 un concile à Nicée; Alexandre, avec son diacre Athanase, y joua un rôle prépondérant, mais il n'y survécut que quelques mois, f 326. Il écrivit de pombreuses lettres sur la question; une a été conservée par Théodoret. 3® Patriarche de Constantinople pendant les troubles ariens 317-340. Il vota les résolutions du concile de Nicée et les défendit toujours courageusement. Arius ayant réussi, à l'aide des semi-ariens, à obtenir sa rentrée dans l'Église, grâce à un symbole équivoque qu'il jura, et l'empereur voulant contraindre le patriarche à recevoir à la communion un homme que celui-ci en jugeait indigne, le pieux Alexandre vivement troublé demanda à Dieu de le retirer de ce monde, lui ou Arius. Arius mourut subitement la veille du jour fixé pour sa réintégration. Un grand éloge d'Alexandre a été fait par Grégoire de Naziance, quand il monta sur le siège de Constantinople. 4° Alexandre, év. d'Hiérapolis et primat de la province d'Euphrate, fut délégué 431 au concile d'Ephèse par Jean d'Antioche qui s'excusa de ne pouvoir s'y rendre lui-même. Alexandre tenait pour Nestorius, et quand celui-ci écrivit à Théodose pour demander un nouveau concile sans les évêques égyptiens, il signa cette lettre avec 8 autres évêques. Il ne voulut avoir aucun rapport avec Cyrille. Il en appela aussi au pape Sixte III. Son caractère inquiet finit par le faire destituer; l'empereur l'envoya en exil à Fa-mothis, Égypte. Il avait du talent, comme le prouvent 23 lettres de lui, et un Traité sur; Ce que le Christ a apporté de nouveau dans le monde. 5<> Alexandre de Haies (Halesius), ainsi nommé d'un couvent du comté de Glocester, où il fit ses études, et où il fut nommé archidiacre. Il enseigna avec succès la philosophie scolasti-que à Paris et mérita le surnom de docteur irréfragable. f 1245. Il était entré chez les fr. mineurs en 1222. Un des premiers qui aient su mettre à profit les œuvres d'Aristote, traduites par les Arabes, il inaugura en quelque sorte la seconde période de la scolastique et composa une Summa theologica et un Comment, des sentences de P. Lombard, qui ont été plusieurs fois réimprimés. On y reconnaît aussi l'influence de l'esprit franciscain dans la manière dont il traite de l'Immaculée Conception de Marie, et surtout dans l'éloge qu'il fait des frères mendiants et même de la mendicité. 6* Alexandre Natalis,ou Noël; v. Natalis. 7° Alexandre Netcsky, le saint; fils du grand-duc Jaroslaw II; né 1218 à Wladimir. Après la mort de son frère, et bien qu'âgé de 20 ans seulement, il fut appelé au gouvernement du duché de Nowogorod que les Mongols n'avaient pas encore envahi. Il remporta en 1241 de brillantes victoires sur les Suédois, les Danois et les chevaliers teutoniques. Son père étant mort 1247 il hérita du grand-duché de Kiew, vainquit les Tartares, affranchit la Moscovie du tribut qu'elle payait aux successeurs de Gengiskhan. et régna avec tant de sagesse que la reconnaissance populaire le mit au nombre des saints. Il mourut le 14 nov. 1263; dans les dernières années de sa vie, il avait revêtu le cilice et la robe des moines. Le pape Innocent IV avait essayé à plusieurs reprises de l'attirer à la foi romaine 1246 et 1248, mais il resta fidèle aux traditions de l'Église grecque et fonda plusieurs évêchés. Sa mort fut un deuil universel. Pierre-le-Grand fit élever un couvent à son honneur 1715 à l'endroit où il avait remporté sa plus grande victoire, à Saint-Pétersbourg; Catherine I fonda l'ordre d'Alexandre Newsky, et tous les czars jusqu'à Nicolas ont célébré sa fête en grande pompe. 8° Alexandre, Aies. ou de Alès, né à Edimbourg 23 avril 1500, chanoine de Saint-André, attiré par la réforme, fut mis en prison et réussit à s'enfuir en Allemagne 1532, où il fit la connaissance de Luther et de Mélanchthon. Rappelé par Henri VIII qui le nomma prof, de théol. à Cambridge 1535, on le trouva trop avancé. Il revint à Londres où il exerça la médecine pendant quelques années, puis il retourna en Allemagne où il se fixa définitivement, d'abord à Francfort - s.-0., ensuite à Leipsic où il f 17 mars 1565. Sa tournure d'esprit conciliante et scientifique le mirent surtout en rapports avec Mélanchthon. Il traduisit en latin, à la demande de Cran mer, le Common Prayer Book, et publia divers ouvrages, en-tr'autres une Epistola sur le devoir des laïques de lire la Bible 1533. 9o V. Lambert 3<>. ALEXANDRIE. Une tradition rapportée par par Eusèbe, dit que cette ville célèbre, la plus grande de l'empire après Rome, déjà peuplée de Juifs nombreux, grâce à la tolérance des Ptolémée d'abord, puis des Romains, et centre d'un grand mouvement intellectuel, fut évan-gélisée par saint Marc, qui y aurait fondé une église considérable. La chose est possible, mais n'est pas établie, et pendant longtemps les auteurs qui parlent de l'église de Carthage ne disent rien de celle d'Alexandrie. C'est seulement à la fin du 2™« siècle que l'on voit l'Évangile s'établir et les églises se multiplier dans la Basse-Égypte, et Alexandrie en particulier prendre un développement, acquérir une influence, et devenir un centre important pour l'histoire de la vie chrétienne. Les sciences sacrées qui y étaient cultivées avec succès depuis des siècles, et qui avaient spécialement pour objet l'A. T., devaient favoriser les progrès du christianisme dans ces contrées, et concourir à transformer l'école d'Alexandrie en lui donnant une direction nouvelle. C'est ce qui arriva, et sans parler d'Athénagore dont quelques-uns font un des premiers catéchèses d'Alexandrie, on peut faire remonter au moins à Pantène, vers 180, la fondation définitive de cette école qui pendant deux siècles, devait rendre tant de services à la chrétienté. Pantène q. v. eut pour élève, puis pour collègue, et enfin pour successeur Clément, à la fois professeur et écrivain distingué; puis Origène, et après lui Denys et Héraclès. Ce fut la belle époque. Dès lors Eusèbe mentionne encore les noms d'Achil-las, de Pierius, de Théognoste et de Sérapion; peut-être aussi faut-il compter parmi ces maîtres l'évêque et martyr Pierre, le moine Ma-caire, et enfin Arius lui-même. L'aveugle, mais savant et pieux Didyme. aurait aussi rempli les fonctions de catéchiste pendant le long espace de 340-395, et relevé pour un temps la réputation de cette école un moment compromise par les controverses origénistes. et qui devait l'être bientôt encore par les discussions nestoriennes et monophysites. La destination première de l'école catéchéti-que d'Al. avait été sans doute d'instruire les païens. Il n'y avait probablement d'abord qu'un seul catéchiste chargé d'enseigner les éléments de la foi chrétienne aux néophytes, et peut-être aux enfants des chrétiens. Mais on sentit bientôt aussi le besoin d'avoir un homme instruit et habile, qui pût défendre la foi contre les attaques et les subtilités de la philosophie. De là à une institution capable de former des pasteurs il n'y avait qu'un pas, et il fut rapidement franchi; aussi l'on peut considérer cette école comme la première pépinière des missions chrétiennes. Elle évangélisa directement les abords immédiats de l'Égypte, puis l'Arabie, l'Éthiopie et les Indfes. Si l'Égypte, avant le christianisme, avait été déjà la terre des merveilles, elle ne cessa pas sous l'influence chrétienne d'être encore la terre des hautes recherches, et la pensée humaine ne cessa d'y élaborer des systèmes. Un syncrétisme platoni-sant, qui rappelle celui de Philon, se glissa dans l'Église et, en développant à quelques égards le sentiment religieux, exerça une fâcheuse influence sur l'enseignement proprement dit. Deux courants distincts se dessinèrent: l'un évangé-lique, représenté par Origène et Clément, par Dénys, Athanase et Cyrille, qui relevait en Christ le côté divin, même dans les exagérations de l'eutychianisme; l'autre relâché et fantaisiste, tel qu'il apparaît dans le gnosticisme, chez les docètes, les sabelliens et les ariens, qui sont des produits purs de l'Égypte. On trouve chez Eusèbe les noms des évêq. d'Alex, et des détails sur l'école et les catéchistes; et chez Denys l'histoire des souffrances de cette église pendant les persécutions de Décius, de Valérien et de Dioclétien. ALEXIENS, société religieuse qui vers 1300 s'était formée à Anvers pour s'occuper des devoirs à remplir envers les malades, les pauvres et les morts. Ils tiraient leur nom de leur patron, Alexius, fils d'un riche sénateur romain, qui vivait au 5me siècle dans une pauvreté volontaire, qui mourut sur le Mont Aventin, et dont les os furent découverts en 1216. Ils s'appelaient aussi cellitede cella, tombe, parce qu'ils enterraient les morts. Enfin, plus communément, on les désignait sous le nom de Lollards, de lollen murmurer, parler ou chanter à voix basse. Leur costume était noir, et les femmes avaient été surnommées les sœurs noires: mais ils ne s'étaient affiliés à aucun ordre, probablement à cause du discrédit dans lequel étaient tombés à cette époque, à cause de leur inconduite, la plupart des ordres religieux. Leur prétention de vivre ^ part, en laïques pieux, leur attira des ennemis; ils furent calomniés; un chanoine de Liège 1348 les traite de vagabonds, et peut-être que dans le nombre il y avait un mélange de bons et de mauvais. On les confondit aussi avec les Begghards, et il ne fallut rien moins qu'une bulle de Grégoire XI, 1377, pour assurer leur tranquillité. ALEXIUS, v. Alexiens. ALFRED, justement surnommé le Grand (proprement jElf-rœd> conseiller des elfes), né 849, 6®« roi de la dynastie saxonne d'Angleterre, succéda à son père Ethelwolf et à ses deux frères aînés Ethelbert et Ethelred. Désireux de s'instruire, il apprit à lire de bonne heure et fit, très jeune encore le voyage de Rome avec son père qui allait demander la bénédiction de Léon IV. C'était l'époque des invasions danoises et l'Angleterre fut plus d'une fois à la veille d'une complète invasion. Alfred avait 22 ans quand il monta sur le trône 871. Vainqueur d'abord il ne tarda pas à être défait et il dut s'enfuir; il passa quelque temps chez un berger comme simple valet et garda les troupeaux. Plus tard, déguisé en ménestrel, il pénétra avec sa harpe jusque dans le camp et dans la tente de Gothrum, chef de l'armée ennemie, et suffisamment éclairé par ses observations il reprit l'offensive et défit les Danois. Il fut modéré dans sa victoire, fit grâce aux prisonniers et leur céda une partie du pays sotfs la seule condition, acceptée par eux, qu'ils embrasseraient le christianisme. Il employa dès lors 15 années de paix à réorganiser l'administration, à développer l'instruction publique, à relever les églises et les monastères pillés, détruits, incendiés par les Danois, et à réformer le culte et le clergé lui-même, qui avaient beaucoup souffert au point de vue religieux de l'absence de tout gouvernement régulier. En 893 une nouvelle expédition tentée par Hastings. avec 250 voiles, faillit de nouveau tout compromettre, mais Alfred fondit sur les ennemis avec la rapidité de la foudre et par la hardiesse de ses manœuvres déjoua une tentative menaçante dont les suites auraient pu être fatales. Le pays jouit dès lors d'un repos durable et Alfred put consacrer ses dernières années aux travaux paisibles de la civilisation. Il f 28 oct. 901, âgé de 51 ans, après en avoir régné 29. D'une santé délicate. habituellement malade, sujet à des évanouissements inexpliqués, Alfred fit face à tout à force d'énergie morale. Musicien, poète, savant, passionné des arts de la paix, il avait en même temps le génie militaire et le courage du soldat. On l'a souvent comparé au roi David. C'est un des souverains qui ont laissé dans l'histoire de l'Angleterre les traces les plus profondes et les plus bénies. On lui doit l'université d'Oxford 872 et les trois grandes halles bâties à l'honneur « des trois personnes de la divinité. « Il fit venir de l'étranger des hommes savants et pieux, Grimbald, moine de Reims. Jean, ci-devant abbé de laNouvelle-Corbie. etc. Il étudiait lui-même avec son ami Asser, évêque de Saint-David; à l'âge de 38 ans il se mit à apprendre le latin et fit des progrès rapides. L'étude des saintes Écritures l'absorbait au point qu'il se faisait quelquefois réveiller la nuit pour élever son âme à Dieu pendant que le silence régnait autour de lui. Il gagna le cœur de ses ennemis par sa générosité, quand il renvoya à Hastings les prisonniers qu'il lui avait faits, ajoutant « qu'il ne faisait pas la guerre à des femmes, ni à des chrétiens. » Quant à son peuple il fit tout pour le relever, l'instruire et le moraliser, et cet homme dont le règne fut difficile, dont la santé était chancelante, qui n'a pas livré moins de 56 batailles rangées, qui a étendu le commerce de l'Angleterre jusqu'aux Indes, qui s'occupa de tous les détails de la vie publique, cet homme extraordinaire a encore trouvé le temps d'écrire ou de traduire lui-même. pour les écoles ou pour l'Église un grand nombre d'ouvrages, parmi lesquels il faut citer: un Code, publié à Londres 1658; les Consolations de la philosophie, de Boèce, Londres 1829; Hist, ecclés. des Anglo-Saxons, de Bède, Cambridge 1722; des extraits de l'Histoire, d'Orose, avec plusieurs chapitres originaux, entr'autres une description géographique et ethnographiques de l'Allemagne; l'Instruction pastorale de Grégoire-le-Grand, qu'il fit envoyer à tous les évêques, et dont on connaît encore 3 ex. dont un, parfaitement conservé, à la Bibliothèque de Cambridge; un recueil de Proverbes et une traduction des Fables d'Ésope lui sont également attribués, mais sans preuves suffisantes; une traduction des Psaumes de David, inachevée; enfin son Testament, conservé dans sa Vie, écrite par Asser. On y trouve entre autres cette phrase qui caractérise à la fois l'anglais et le chrétien: Je désire que mon peuple reste toujours aussi libre que le sont ses pensées. ALGIERI, Pomponio, de Nôle, près Naples, étudiant à Padoue, converti de bonne heure, se fit avec enthousiasme l'apôtre de la doctrine évangélique. Dénoncé puis arrêté à Padoue, il répondit avec clarté et fermeté à tous les interrogatoires, et au bout de quelques mois fut transféré à Venise. Après de vains efforts pour l'amener à se rétracter, les juges, quoique à regret, le condamnèrent aux galères; mais ce n'était pas assez pour Délia Casa. Paul IV qui venait de monter sur le trône, obtint qu'on lui livrât l'hérétique, dont la fermeté pendant une longue détention avait fait l'admiration de l'Italie, et le martyr peu après son arrivée fut envoyé au bûcher, vers la fin de 1555. Il subit son supplice comme il subit son cachot, avec une joyeuse sérénité, s'étonnant lui-même et rendant grâce à Dieu, de ce qu'il pouvait trouver t tant de paix et de douceur dans la gueule du dragon. • ALLATIUS, Léon, natif de Chios, né 1586, f à Rome 1669; jésuite, professeur au collège des Grecs à Rome, bibliothécaire du Vatican 1661; auteur de plusieurs ouvrages d'une érudition un peu lourde, notamment sur les rapports des églises d'Orient et d'Occident. ALLEMAGNE. Après avoir été longtemps une simple expression géographique, réunissant au cœur de l'Europe des peuples divers sans autre unité que leur position centrale et les rudiments d'une langue encore peu formée, la patrie d'Arminius se développant de siècle en siècle et se constituant fortement au moyen âge sous les Hohenstaufen, est arrivée par Luther au sentiment de l'unité morale et a fini de nos jours par réaliser l'unité politique. Il n'y a donc pas d'histoire ecclésiastique pour l'Allemagne prise dans son ensemble, ni quant aux missions, ni quant au mouvement religieux, quoiqu'il ait été considérable, et c'est aux articles spéciaux d'hommes ou de villes qu'on trouvera les indications principales. Ici quelques lignes seulement de statistique. La population de l'empire étant d'environ 43 millions d'âmes, se décompose en 26 millions de protestants, 15 millions de catholiques, plus de 500,000 juife et cent mille dissidents divers, grecs, mennonites, wes-leyens, etc. Dans la plupart des États qui forment partie de l'empire, la majorité est protestante; elle est catholique en Bavière, dans le duché de Bade, et dans rAlsace-Lorraine. Les protestants sont en majorité luthériens ou unis. Il y a une lutte incessante entre le gouvernement civil et le clergé romain qui revendique une autorité absolue dans son domaine, ce domaine devant comprendre les écoles, les mariages, les cimetières, etc. Il y a lutte enfin contre les juifs, qui ont accaparé par leur travail une grande partie de la fortune publique et qui disposent des journaux les plus importants. Le rationalisme et le socialisme rongent l'Allemagne et menacent son avenir; mais les chrétiens n'oublient pas leur devoir; de nombreuses sociétés religieuses, des pasteurs, des professeurs, des hommes d'État éminents, de simples laïques, combattent avec énergie l'incrédulité matérialiste, dont le triomphe serait la fin de la société. ALLEMAND (cardinal Louis d'), archev. d'Arles, le seul de son rang qui, au concile de Bâle, défendit avec énergie les droits du concile contre les empiétements de Rome; il resta à Bâle après que les partisans du pape eurent décidé de s'en aller 1437. Homme de talent et sans reproche, peut-être ambitieux. ALLEN 1°, ou Alan, ou Allyn, Guillaume, né à Rossai, Lancaster, 1532, sous Henri VIII, fréquenta l'université d'Oxford sous Édouard VI, 1547, au moment où l'archev. Cranmer donnait à l'Église anglicane sa nouvelle constitution. Il se montra hostile à la réforme, salua avec joie la réaction qui se produisit sous Marie et profita des bonnes dispositions de cette reine pour se faire donner des places honorifiques et lucratives; il fut nommé chanoine d'York 1558. Cela changea sous Élisabeth et Allen consacra toutes ses forces à la défense du catholicisme romain. Il s'enfuit d'abord à Louvain 1560. où il passa 5 années, écrivant des brochures de controverse. Il revint en Angleterre 1565 et passa 3 ans, caché aux environs d'Oxford, intriguant contre la religion de son pays; découvert en 1568 il s'enfuit de nouveau, vint à Malines d'abord, puis à Douai où il fonda un collège anglais qui réussit parfaitement, mais qu'il fallut transférer à Reims 1578, la reine en ayant interdit la fréquentation à ses sujets. Le pape le chargea de fonder à Rome et à Madrid des institutions analogues. Allen continua d'écrire, et déclara dans une de ses brochures, que des parents qui deviennent hérétiques perdent leurs droits naturels sur leurs enfants, de même qu'un souverain perd toute son autorité du moment où il renie la foi. Il justifie le meurtre d'un tyran, provoque le passage à l'ennemi de Stanley à Deventer, fait des vœux pour Philippe II et son Armada, obtient du roi d'Espagne une des riches abbayes de Naples, et de Sixte V le ch* peau de cardinal 1587. Il publie à Anvers en 1588un pamphlet injurieux contre Élisabeth,destiné à être distribué aux soldats espagnols quand lis débarqueront. L'expédition ayant échoué, on détruisit toute l'édition et il est aujourd'hui assez difficile d'en trouver un ex. Philippe lai donna l'archevêché de Matines avec résidence à Rome. Une lettre de lui, de 1593, dans laquelle il se réjouit de la tolérance accordée aux catholiques, et sa f survenue en 1594 et attribuée au poison, ont été exploitées en sa faveur, comme s'il fût revenu à des sentiments plus humains et un peu plus patriotiques; c'est beaucoup dire; sa cause étant perdue, il était naturel qu'il se réjouit d'avoir au moins la tolérance. Guillaume A., philanthrope distingué, né 29 août 1770 à Londres, + 30 déc. 1843, quaker. industriel, visita 8 fois le continent pour plaider les causes auxquelles il s'intéressait, visita Oberlin et l'emp. Alexandre, fonda des écoles populaires, des caisses d'épargne, des pénitenciers, des colonies agricoles, intervint en faveur des Vaudois, des Grecs et des Irlandais. — Vie, par de Félice. ALLIANCE 1° Sainte Alliance, nom sous lequel la Russie, l'Autriche et la Prusse signèrent à Paris, le 26 sept. 1815. après la seconde abdication de Napoléon, un traité auquel adhérèrent ensuite presque tous les souverains de l'Europe, et qui avait pour but de garantir aux rois leur autorité, et à l'Europe la paix et la religion. Il n'était guère question des peuples. Elle fut appelée sainte à cause des sentiments de sérieux chrétien et de piété qui l'avaient inspirée aux contractants et notamment à l'emp. Alexandre. 2° Alliance évangélique. Vaste association religieuse fondée en Angleterre en 1846 dans le but d'unir sur un terrain commun les chrétiens souvent divisés par des questions secondaires, d'église ou de doctrine, et de provoquer au besoin une action commune en faveur de la liberté de conscience. Elle a envoyé des députations pour cet objet à Madrid, à Stockholm, à Constantinople et à Saint-Pétersbourg. Elle a à des intervalles réguliers, tous les 4 ou 5 ans environ une Assemblée générale à laquelle sont convoqués des délégués des différentes sections; ainsi à Londres 1851, à Paris 1855, à Berlin 1857, à Genève 1861, à La Haye 1867, à New-York 1873. Des rapports sont lus sur la situation générale des différentes églises et sur leurs besoins. Un des résultats immédiats les plus clairs de cette société a été de diminuer considérablement le nombre des controverses et tout au moins d'en adoucir le caractère. AlAAXj Pierre, savant controversiste français, né 1641 à Alençon où son père était pasteur, fut appelé à Charenton, après avoir desservi d'abord une égtise de Normandie (ou de Champagne). Il succédait à Daillé et travailla avec àll Claude à une nouvelle version de la Bible. A la Révocation il dut s'enfuir en Angleterre où Jaques II lui permit de fonder une église française du rit anglican; en 1690 il fut nommé chanoine de Salisbury, et les universités d'Oxford et de Cambridge lui conférèrent le titre de docteur. Il était versé dans toutes les sciences, et le clergé d'Angl. le chargea d écrire une Hist. des Conciles; cet ouvrage, qui devait avoir 7 vol. f°. n'a jamais paru. Il f à Londres 1717. Agé de 76 ans. Il a beaucoup écrit, en latin, en français et en anglais, sur l'histoire, la controverse et même la prophétie; ses œuvres sont rares et avaient surtout le mérite de l'actualité. Deux ouvrages, sur les vaudois. et sur les albigeois, ont de la valeur, mais il attribue aux vaudois une origine apostolique, et il confond trop les albigeois avec leurs devanciers des Vallées. Son fils devint doyen d'Ely 1734. Le nom d'Allix existe encore en Angleterre. ALMACHIUS. saint espagnol (?), moine, lapidé 403 à Rome, parce qu'il protesta contre un combat de gladiateurs et voulut s'y opposer; 1er janv. des bollandistes. ALOGES. ou Alogiens, secte de l'Asie Mineure, vivant à la fin du 2""* siècle, connue seulement par Épiphanes. Ils rejetaient la doctrine du Paraclet et celle du Logos (Verbe), comme conduisant au gnosticisme (de là leur nom qui signifie sans Logos, mais qu'on peut traduire aussi par sans logique). Ils rejetaient par conséquent l'Évangile de Jean, ainsi que le chiliasme et la perpétuité des charismes. ALOYS, ou Louis, de Gonzague. né près de Mantoue 1568, de la famille des princes de Cas-tiglione; distingué dès son enfance par la piété et la rigueur de ses mœurs; il entra 1587 dans l'ordre des jésuites et + 1591 à Rome, victime de son dévouement pendant une épidémie. Déclaré bienheureux par Grégoire XV 1621, il fut canonisé par Benoît XIII 1726. ALSTED, Jean-Henri, né 1388, prof, à Her-born, puis à Wissembourg où il f 1638. Il représenta l'église de Nassau au synode de Dor-drecht 1618-1619. Son érudition était immense. Il a publié une Encyclopédie universelle en 2 vol. f°, et une Encyclopédie philosophique; en outre, divers traités: sur la Chronologie, la Messe, le Règne de mille ans qui doit commencer en 1694, etc. On lui a reproché de s'être parfois copié lui-même, ce qui à la rigueur est pardonnable, mais surtout d'avoir copié les autres, notamment Casaubon; il ne faut cependant pas exagérer la gravité de ces emprunts. ALTENSTEIN (Charles, baron de Stein d'), né à Ansbach 7 oct. 1770, f 14 mai 1840, exerça en Prusse une grande influence comme ministre des cultes, de la médecine et de l'instruction publique. Après avoir étudié à Erlan- 8 33 Alt gen, où il avait reçu déjà des impressions religieuses, il entra dans l'administration dès 1799, se retira à Konigsberg en 1806 après les malheurs de son pays, et s'occupa, avec le baron de Stein, de son relèvement. Il remplaça Stein en 1808 comme ministre des finances, fut en 1813 gouverneur de Silésie, et fut chargé en 1817 du ministère difficile auquel il consacra les dernières années de sa vie. C'est lui qui dans sa loi de 1819 décréta l'instruction primaire obligatoire. Il releva les hautes études à Bonn et à Berlin où il appela Hegel. Au milieu des crises qui menacèrent plus d'une fois sa position, il ne cessa d'avoir en vue le relèvement de la piété, et il pensait, comme son ami Stein, que tout ce que l'on peut faire pour l'éducation d'un peuple n'est rien, si l'on n y joint un esprit religieux. Il rencontra surtout des difficultés de la part des catholiques. C'était un esprit lucide, un caractère énergique, un travailleur infatigable et un homme modeste. ALTHAMMER, André, né 1498 f 1564, un des premiers prédicateurs de la Réforme à Ans-bach, conseiller intime du margrave Georges de Brandebourg; prit part à la dispute de Berne sur les sacrements 1528, et au colloque de Nuremberg 1539; homme fort instruit, auteur d'un catéchisme encore estimé et d'un essai de conciliation des passages de l'Écriture qui semblent se contredire. ALT1NG. Jean-Henri, théologien réformé, né à Embden 1583, fit l'éducation de plusieurs jeunes princes, dont un devint roi de Bohême. En 1627 il fut nommé prof, de théol. à Groningue. où il t 1644- — S°u fils Jaques, né à Heidel-berg 1618, versé dans les langues orientales, succéda à Gomar pour l'hébreu à Groningue 1643, et aussi pour la théologie 1667. f 1697. Ses œuvres, concernant surtout la langue hébraïque, ont été publiées à Amsterdam en 5 vol. fol. 1687. ALUMNEUM, collège ou séminaire, destiné à former et à préparer des jeunes gens pour la carrière ecclésiastique. L'admission des élèves suppose déjà leurs aptitudes et leur ferme résolution de se consacrer au service de l'Église, et dans plusieurs endroits ils sont astreints à prêter un serment d'entrée. Les élèves portent le nom iïalumnats. AMALA1RE, surnommé Symphosius, né en Austrasie, diacre, prêtre à Metz, abbé de Horn-bach, chef de l'École du palais, homme de confiance de Louis-le-Débonnaire, f 837. Il a écrit un grand Traité des offices ecclésiastiques en 4 livres, important pour la connaissance dn culte à cette époque; une Règle des chanoines, et plusieurs lettres. Il se complaît un peu trop dans une symbolique exagérée, cherchant le sens exact des moindres pièces du vêtement ecclésiastique, mais c'était dans le goût du temps. Il n'entendait la présence réelle que dans le sens spirituel ad vivificandam animant. Il a écrit contre Agobard et contre ses tentatives de réforme du chant sacré. AMALRI, dit Sanglar, natif de Montpellier, chef des protestants pendant les guerres de religion, se distingua par sa belle défense d'Agde 1562. de Montpellier 1567 et de Sommières 1573. Fait prisonnier dans une reconnaissance, il fut pendu par les catholiques 1575 et sa tête promenée au bout d'une pique. AMALRIC 1° Philosophe et théologien du 12ra<> siècle, né à Bène, près Chartres. Il porte aussi le nom d'Amaury. Il enseignait la théologie à Paris et compta un grand nombre de disciples. Il avait puisé dans les écrits de Scot Erigène une sorte de panthéisme mystique pour lequel il fut condamné par l'université de Paris 1204. Il fit le voyage de Rome et en appela à Innocent Ul, mais celui-ci confirma la sentence 1207, et Amalric de retour à Paris dut se rétracter publiquement. Il f 1209, de chagrin, dit-on. Un synode réuni à Paris condamna ses disciples; 12 furent brûlés, et 4 emmurés. Lui-même, malgré sa rétractation, fut exhumé, ses os brûlés et ses cendres jetées au vent. Le synode défendit en outre l'étude des œuvres d'Erigène. Le concile de Latran 1215 confirma toutes ses sentences. 2° Amalric, Arnaud, abbé de Citeaux, choisi par Innocent UI pour prêcher la croisade contre les albigeois 1204. Il rassembla jusqu'à 500,000 hommes sous les ordres de Montfort, et commit tant de cruautés au siège de Béziers qu'il dût être révoqué 1209. Il fut nommé archev. de Narbonne 1212, et passa ensuite en Espagne où il fit la guerre aux Maures. Il a écrit Thist. de cette expédition, + 1225. AMAND 1° évêque et natif de Bordeaux, renommé pour son zèle, sa vigilance et sa sainteté; vivait au commencement du 5m<> siècle. Jérôme nous a conservé des fragments intéressants d'une Lettre de lui. 2° Apôtre de la Belgique. Né à Nantes vers 590, et chassé de la Gaule par Dagobert, qu'il avait censuré à cause de ses désordres; il se rendit d'abord comme missionnaire sur les bords du Danube et chez les Slaves 626, mais repoussé par ces populations, il accepta l'appel de saint Eloi qui l'envoyait chez les Frisons; se fixa d'abord à Gandavum (Gand), avec l'appui de Dagoberty mais il renonça bientôt à cette protection, et recourant à la douceur, il obtint de grands succès malgré certaines intempérances de zèle; il bâtit des églises et des couvents, remua toutes les Flandres, devint évéq. de Mœstriclit, et f 675, très âgé. On lui prêta des miracles, même de son vivant, entre autres d'avoir ressuscité un pendu, ce qu'il nia toujours. AMBOISE (Conjuration d'), complot ourdi à Nantes le l«r févr. 1560. par les protestants exaspérés de Tasservissement de la royauté par les Guises, et des nombreux supplices infligés à leurs coreligionnaires. Blâmé par Coiigny et par Calvin, ce complot qui avait pour chef muet le prince de Condé et pour chef avoué le seigneur de la Renaudie, fut secrètement dénoncé aux Guises, qui emmenèrent le roi de Blois à Am-boise. La Renaudie n'en poursuivit pas moins son projet, mais il fut vaincu et périt en combattant; ses partisans furent massacrés, de nombreuses exécutions eurent lieu et de lâches atrocités ajoutèrent à la haine que les Guises ne cessaient d'amasser contre eux. Beaucoup de nobles eurent la tête tranchée dans la cour du château. AMBON. mot grec, employé dans l'antiquité chrétienne pour désigner une espèce de tribune ou destrade, élevée de quelques pieds et placée au milieu de l'église, capable de recevoir une cinquantaine de personnes, chantres ou lecteurs. Les prédicateurs, et même les évêq. s'y plaçaient aussi quelquefois pour être mieux entendus du public. A mesure que les églises devenaient plus grandes, ce qui n'était d'abord que l'exception devint la règle; vers le 13ra« siècle il y avait des ambons partout; ils se modifièrent suivant les besoins, et on finit par en faire les chaires et les lutrins. AMBROISE 1° un des pères les plus remarquables de l'Église latine, né à Trêves vers 340, pendant que son père était gouverneur des Gaules. Venu à Rome, il s'y distingua bientôt dans les arts et les sciences, et fut nommé gouverneur de la Ligurie, 370. Il résidait à Milan lorsqu'à la mort de l'èvêque de cette ville, les divers partis entrèrent en lutte pour le choix de son successeur. Ambroise eut assez d'influence pour rétablir la paix, mais comme on ne pouvait se mettre d'accord sur la nomination de Tévêque, une voix d'enfant s'écria: Ambroise èvêque ! Les partis, charmés de ses vertus et de ses talents, furent frappés de ce mot et s'unirent pour le prier d'accepter l'épiscopat, 374. Effrayé de la grandeur de la tâche, il refusa d'abord; le peuple insista, et le gouverneur, pour échapper à ses instances, s'enfuit de nuit. Mais s'étant égaré, il se retrouva le lendemain en face de Milan; prenant cela pour un avis céleste, il accepta enfin. Il n'était cependant pas encore chrétien; il n'était que catéchumène; en une semaine il fut baptisé, ordonné prêtre et consacré èvêque. Dès lors il s'adonna entièrement aux soins de son troupeau, remplissant en personne toutes ses fonctions, prêchant régulièrement, recevant tout le monde, les plus petits comme les plus grands, donnant l'exemple des vertus et de l'austérité, et composant en même temps des écrits sur divers sujets à l'ordre du jour. Au moment de son élection, il avait distribué tous ses biens à l'Église et aux pauvres, et il vivait avec la plus grande simplicité. Aimé de son troupeau, entraînant par sa prédication onctueuse et oratoire, il lit le plus grand bien autour de lui. 11 joua aussi un rôle dans la polémique contre les païens et dans la politique. En 381 ou 383 Maxime, gouverneur des Gaules, lit assassiner Gratien, emp. d'occident, usurpa le trône et marcha sur l'Italie pour la soumettre. Ambroise alla à sa rencontre et négocia pour le dissuader de franchir les Alpes. Son éloquence obtint gain de cause au point que Maxime l'accusa de l'avoir ensorcelé. A ce moment cependant le paganisme relevait la tête; le rhéteur Symniaque reçut la mission de plaider sa cause et d'obtenir du sénat le rétablissement de la statue de la Victoire. Ce fut encore Ambroise qui réfuta son plaidoyer. Dans les querelles ariennes, il fut au côté de l'orthodoxie. Il entra même en lutte à ce sujet avec la cour impériale et a\ec Justine, mère et tutrice de Valentinien II, à laquelle il refusa tout, même « une église sur tant. » Il montra une fermeté inébranlable: menaces, voies de fait, condamnation à l'exil, rien ne put l'intimider, il resta maître de la situation. Ce fut à cette occasion qu'il établit pour ses fidèles et dans son église qu'on voulait lui enlever de force, le chanl antiphonique auquel il donna son nom. En 387. nouvelle interxention auprès de Maxime. Celui-ci ayant franchi les Alpes, fut battu par Théo-dose; Ambroise réussit à arrêter l'effusion du sang. Il eut aussi l'occasion de montrer son intrépidité et sa fermeté, en s'attaquant à Théo-dose-le-Grand lui-même. Celui-ci avait livré la ville de Thessalonique à la discrétion de ses soldats; 7000 habitants, dit-on, furent massacrés. Ambroise écrivit à l'empereur pour le blâmer de sa conduite et l'exhorter à la repen-tance. Théodose vint cependant se présenter sur le seuil du sanctuaire pour prendre part à l'eucharistie, mais Ambroise lui barra le passage, en déclarant qu'il ne lui donnerait la communion qu'après qu'il se serait soumis publiquement à la pénitence et aurait reçu l'absolution. Théodose, lorsqu'il revit plus tard Nectaire, patriarche de Constantinople, lui dit: Ambroise m'a appris ce que doit être un èvêque. En 392. nouvelle réaction païenne, qui dura 27 mois. Ambroise la combattit vivement, et Théodose vainquit par ses armes Eugène, l'empereur païen. Il f en 397 et fut enseveli à Milan. A la fois savant et orateur, il a laissé un grand nombre d'ouvrages remarquables par le style, l'élégance et l'entraînement; des sermons, des traités, des lettres où se trouvent des morceaux de la plus haute éloquence, des travaux sur l'Écriture sainte, des livres de morale et de théologie, des oraisons funèbres, en particulier celles de Théodose-le-Grand et de Valentinien, des hymnes, etc. C'est à tort peut-être qu'on lui a attribué le Te Deum, dont les paroles sont de saint Augustin; mais le Detis creatoromnium est bien de lui. On a traduit en français un de ses principaux ouvrages, le De offkiis ministro-rum Dei. Il avait organisé à Milan une liturgie particulière avec une échelle musicale appropriée au chant d'église, qui reçut le nom de rif ambi-osien en opposition au rit romain, et dont l'église de Milan se sert encore aujourd'hui (v. Marcillac, Hist. de la musique), il piraît avoir eu un don exceptionnel de persuasion. Il prêcha l'ascétisme et la virginité perpétuelle; on accourait d'Afrique po ir l'entendre, et les mères, à Milan, enfermaient leurs filles de peur qu'elles ne fussent entraînées au célibat si elles entendaient la parj!e persuasive de leur évê-que. Son traité de la Virginité compte parmi s*s œuvres les mieux travaillées. Sa haute renommée lui valut la visite de souverains étrangers. chrétiens ou barbares, qui venaient de loin pour le voir. H. B. 2° Ambroise, de l'ordre des camaldules, né 1386 à Portico, prés Florence, &bbe général de son ordre depuis 1431, se distingua par ses essais de réformes intérieures, et comme légat d'Eugène IV à Bâle 1433. Il s'occupa aussi de réconcilier l'Église grecque avec l'Église latine, et publia plusieurs ouvrages en grec et en latin. Il était profondément dévoué à la papauté. AMBROSIASTER; nom sous lequel on désigne l'auteur inconnu d'un Commentaire sur les 13 Épitres de Paul, qui se trouve dans l'édition bénédictine des œuvres d'Ambroise. mais que Ion a plusieurs motifs d'attribuer à d'autres qu'à l'évêque de Milan. Ce commentaire anonyme a été écrit du temps de Damase, et peut-éire par le diacre Hilairede Rome, quoique cette hypothèse soulève aussi quelques difficultés de doctrine. AMBROSIEN, chant et rit; v. Ambroise. AMBROSIENXE (Bibliothèque), fonde* au 17^ siècle à Milan, par le cardinal Fréd. Bor-romée. et nommée ainsi en l'honneur de l'évê-que patron de la ville. AMESILÎS, Guillaume, né 1576, théologien anglais, étudia à Cambridge sous Perkins. Puritain zélé, il dut renoncer à se faire une position dans sa patrie, et se rendit en Hollande, où il fut successivement aumônier militaire à La Haye, membre influent du synode de Dordrecht (les États généraux lui votèrent 4 fl. par jour, pour qu'il pût vivre à Dordrecht et assister de conseils le président du Synode), inspecteur des étudiants boursiers d'Amsterdam et de Leyde, professeur à Franeker, et enfin prédicateur à Rotterdam. Il f 1633 dans cette dernière ville peu après son arrivée, des suites d'une inondation. Il a écrit de nombreux ouvrages, dont la Medulla theologica est le principal; d'autres sur le sabbat, la conscience, les rapports de la métaphysique et de la morale avec la théolopie^ des comment, sur les Psaumes et les Ép. de Pierre, ainsi que plusieurs discours et des traités de controverse. Œuvres compl. en latin, Amsterdam 1658, 5 vol. in-42. AMIS (les), 1° v. Quakers. 2° Amis des lumières, v. Lumières. 3° Les amis d» Dieu, v. Nicolas 10*. A M MIEN-M ARCELLIX, auteur d'une Histoire de Rome de Nerva à Valens, 91-378. en 31 livres, dont les 13 premiers sont perdus. Ceux qui restent commencent à l'an 333 et comprennent l'histoire de l'emp. Julien et de ses successeurs, c.-à-d. les événements dont Amrnien a été le contemporain. Grec de naissance, ayant fait de fortes études, il entra dans l'armée sous Constantin, accompagna Julien dans la guerre contre les Perses, et visita tour à tour, comme soldat. l'Orient et l'Occident. Quand il prit sa retraite il se fixa à Rome et se remit à ses études de prédilection, f vers 410 so is Théodose. Dans son Histoire il fait preuve d'un grand sens politique, d'une grande tolérance et de beaucoup de modération. Il touche à l'histoire ecclésiastique par les détails qu'il donne sur Julien, sur l'église de Rome et sur les luttes ariennes. Longtemps on a cru qu'il était chrétien, mais cette idée est aujourd'hui presque gènéralem. abandonnée; rien ne prouve qu'il ait été baptisé, ni qu'il ait fait une profession de foi chrétienne, bien qu'il s'intéresse à l'Église et qu'il semble prendre parti pour l'orthodoxie contre l'aria-nisme. Mais il n'était plus païen; il admet l'action d une divinité supérieure qui dirige les événements, et il se rapproche d'Hérodote et surtout de Sophocle par les tendances monothéistes qui percent dans ses récits. AMMON, Christophe-Fréd. (d'). 1766-1849. prof, à Erlangen et à Gottingue, puis prédicateur de la cour à Dresde, a publié des sermons et quelques ouvrages de dogmatique d un rationalisme vulgaire. Par ses talents il a pu exercer une certaine influence, mais il n'a pas servi la cause protestante. Il niait les miracles et les prophéties. AMOLO, ou Amulo, disciple d'Agobard, et dès 840 son successeur à l'archevêché de Lyon: f 832. Il honora l'Église par ses lumières et son caractère et combattit les superstitions, comme beaucoup d'autres évêques de l'époque carlo-vingienne. Son livre contre les Juifs, faussement attribué à Raban Maur, ne vaut pas son écrit sur les Reliques. Il prit parti contre Godescalc au sujet de la prédestination, et pour mieux le réfuter, lui prêta des idées qui n'étaient pas les siennes ou qu il exagéra. AMORTISATION ou Amortissement (lois d'). On désigne sous le nom de mainmorte des biens qui passent d'un propriétaire personnel entre les mains d'un propriétaire impersonnel, collectif, et qui sortent ainsi de la circulation. Ce sont surtout les établissements religieux, églises, ordres, couvents, qui sont susceptibles de posséder de cette manière, soit par acquisitions, soit par dons ou héritages. Dans ces conditions les propriétés sont soustraites pour longtemps, si ce n'est pour toujours, à différents impôts, tels que le droit de mutation, sans même parler du privilège dont ont joui pendant des siècles* dans différents pays, les biens ecclésiastiques, d'être exemptés de tout impôt. Les inconvénients d'un pareil ordre de choses ont fini par se faire sentir, là surtout où la richesse foncière de l'Église atteignait et dépassait certaines bornes. En France, à l'époque de la Révolution, le clergé possédait le tiers du pays; dans plusieurs États de l'Allemagne, il en possédait la moitié. Il résultait de là que les impôts pesaient toujours plus lourdement sur ceux qui étaient moins riches, et sous l'influence du mécontentement général, les gouvernements ont été amenés à faire ce qu'ils auraient dû faire par simple esprit de justice; ils ont édicté des lois spéciales sur les biens de mainmorte, lois qui varient naturellement suivant les pays; tantôt faisant payer un droit de mutation à une époque déterminée, alors même qu'il n'y a pas de mutation; tantôt prélevant un droit sur les revenus; tantôt réservant aux pauvres un quart des legs fait aux établissements religieux, tantôt et c'est le cas presque partout où il y a eu résistance, en rattachant au domaine public des propriétés dont l'origine est équivoque, dont l'usage a été détourné de sa destination première, ou qui sont exploitées d'une façon défectueuse. Il n'est aucun pays en Europe qui n'ait dû recourir à des lots de ce genre; l'Espagne même a dû par ses nombreuses incamérations ou amortisations, remédier au tort immense que lui causait la mainmorte. Cette opération s'appelle ordinairement sécularisation, parce qu'elle rend au siècle, au monde, des valeurs qui en avaient été distraites. AMPHILOQUE, rhéteur et avocat de Cappa-doce; puis ascète et solitaire, nommé évêque d lconieet métropolitain deLycaonie vers 375. prit part au 2®* concile de Constantinople 381. se montra l'adversaire résolu des ariens et obtint de Théodose que les discussions publiques sur les points relatifs à la nature de Christ fussent interdites, f vers 392. La plupart des écrits publiés sous son nom, Paris 1644, sont inauthentiques, sauf peut-être une lettre synodale en faveur de la doctrine de la Trinité. AMPOULE (Sainte-). On désigne sous ce notn (amplum vas, ou ampla olla) une fiole sacrée que les anges apportèrent à saint Rémi pour le sacre de Clovis, la fiole ordinaire ayant manqué pour une raison quelconque. C'est Hincmar de Reims qui le premier, trois siècles après l'événement, s'est amusé à raconter cette légende. L'ampoule n'en a pas moins été regardée dès lors comme authentique, et son huile intarrissable a servi au sacre des rois de France, jusqu'au moment où Ruhl, représentant du peuple la brisa, en 1793, quand il aurait dû la conserver soigneusement pour la mettre dans le musée des superstitions du moyen âge. Elle se retrouva intacte en 1824, comme elle s'était retrouvée en 1179, après une éelipse de 600 ans. AMSDORF (Nicolas d'); né près de Wilrzen le 3 déc. 1483, d'une bonne famille. Parent de Staupitz par sa mère, il se destina de bonne heure à l'état ecclésiastique, étudia d'abord à Leipsic, et fut en 1502 un des premiers inscrits à l'université de Witlenberg qui venait d'être fondée. Grande capacité de travail, profonde piété, esprit de prière, dévouement à la vérité, volonté de fer, il avait tout ce qu'il fallait pour devenir un des piliers de la Réforme, et il mérita d'être appelé un secoud Luther, aussi bien par ses adversaires que par ses amis. Il fut dès 1517 un des plus fervents disciples du Réformateur, l'appuya dans sa thèse, l'accompagna à Worms et à la Wartbourg; et après avoir quelque temps professé à Wittenberg, il devint successivement pasteur à Magdebourg, puis évêque de ISaumbourg-Zeitz. Son caractère impétueux le fit vers la fin de sa \ie îomber en disgrâce auprès des princes, dont il combattit sans relâche le penchant aux compromis. Dans sa lutte contre les antinomiens, il alla jusqu'à dire que les bonnes œuvres pouvaient être dangereuses pour le salut, f 14 mai 1565. AMUN, cénobite égyptien, ami et contemporain de saint Antoine. A22 ans ilépousaune jeune fille noble, mais en prenant l'un et l'autre l'engagement de vivre dans la chasteté; elle f au bout de 18 ans de cette espèce de mariage, et il se retira dans les déserts de la Hte-Égypte où, avec saint Antoine, ils fondèrent un nouveau couvent. AMYRAUT. Moïse, né à Bourgueil, Tou-raine, en sept. 1596, la même année et dans la même province que Descartes. Il appartenait à une famille honorable. Son père l'envoya d'abord à Poitiers faire ses études de droit; il y fut reçu licencié à l'âge de 20 ans, mais la lecture de l'Institution de Calvin le décida à entrer dans le ministère. Il se rendit donc à Sau-mur, où il étudia sous Caméron, fut nommé pasteur à Saint-Aignan, Maine, puis en 1626 à Saumur en remplacement de Daillé nommé à (!harenton (Rouen et Tours appelaient Amyraut dans le même moment). En 1631 il fut délégué au synode de Charenton, qui le chargea avec François de Montauban de Rambanlt, ancien de Gap, de présenter à Louis XIII les plaintes des églises sur les infractions à l'édit de Nantes. Il refusa, malgré l'insistance de Richelieu, de se conformer au cérémonial qui voulait que les députés des églises parlassent au roi à genoux, et sa harangue plut si bien au cardinal-ministre que celui-ci, comme témoignage d'estime, le consulta sur son projet d'union des deux Églises. Amyraut fut nommé professeur en 1633, en même temps que L. Cappel et Jos. de La Place, et se trouva dès lors engagé dans une série de luttes auxquelles on donna beaucoup plus d'importance que la question n'en méritait. Prouvant, comme Caméron, qu'on avait outré la doctrine de la prédestination, il essaya d'en adoucir les angles et de se porter comme médiateur entre les arminiens et les gomaristes, en appuyant toutefois dans le sens orthodoxe. Mais les souvenirs de Dordrecht étaient encore trop récents pour permettre aucun compromis, et Amyraut fut regardé comme suspect par l'école de Sedan, et par les hommes les plus marquants de l'Église, A. Rivet, Spannheim, Heidegger, Du Moulin, Jurieu. etc. Sa théorie, connue sous le nom d'Universalisme hypothétique. et contre laquelle en 1675. c.-à-d. onze ans après sa mort, fut rédigée la formule du Consensus, revenait à dire que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés, que tous peuvent l'être par la foi en J.-C.; que Dieu ne refuse à personne le pouvoir de croire, mais que s'il donne à quelques-uns la grâce et le secours nécessaires pour cela, il ne les donne pas à tous, de sorte que ceux qui sont perdus le sont par leur faute, sans pouvoir accuser Dieu de les avoir exclus du salut. On le voit, c'est bien subtil. Amyraut et son ami le pasteur Testard, de Blois, furent dénoncés comme penchant vers le pélagianisme et l'arminianisme, et le synode d'Alençon 1637 fut nanti de plaintes venues surtout du dehors, notamment de Leyde et de Genève. Le synode, dont la majorité ne saisissait probablement pas bien la question, accepta les explications d'Amyraut et de Testard et se borna à leur recommander la prudence, en imposant aux deux partis le silence sur ces problèmes. Même solution à Charenton 1641 et 1645. Peu à peu cependant les idées d'Amyraut firent leur chemin, et malgré les 1856 pages que Spannheim écrivit contre lui sur la grâce universelle, Guill. Riwt, Vincent de la Rochelle, Du Moulin lui-même se réconcilièrent avec lui; le synode de Loudun 1659 lui rendit tout honneur, et lui confia la publication de la Discipline des églises réformées. +8 janv. 1664. D'un caractère ferme et bienveillant, et d'une charité inépuisable, il était estimé et aimé de tous, et si le procureur général lui retira par un arrêt le titre de docteur en théologie (comme à tous les ministres), il ne put lui ôter la considération dont il jouit auprès de Richelieu, de Maza-rin, et de plusieurs notabilités militaires ou de robe du parti catholique. Amyraut a beaucoup écrit et dans toutes les branches de la théologie, sermons, dissertations, commentaires, controverse, etc. Son principal ouvrage est un traité de la Morale chrétienne, premier essai d'un système complet; Saumur, 1652. 6 vol. in-8°. ANABAPTISTES (rebaptiseurs), désignation inexacte des chrétiens qui, plus ou moins nombreux à diverses époques, refusaient le baptême aux enfants, le regardant comme nul aussi longtemps que la foi ne le justifiait pas; en conséquence ils rebaptisaient ceux qui étaient convertis, n'admettant pas que leur premier baptême eût aucune valeur. C'est à l'époque de la Réformation qu'ils se constituèrent en parti distinct. A côté de vues très justes, ils avaient des tendances mystiques exagérées qui obligèrent les réformateurs à les combattre. Ils voyaient dans la Réforme une œuvre manquée, qui s'était arrêtée à moitié chemin; le respect de la Parole leur paraissait être le culte de la lettre; l'appui de l'autorité temporelle était pour eux l'alliance de Christ et de Bélial; dans la modération et les ménagements dont on usait envers les faibles, ils ne voyaient qu'une coupable complicité. L'Église étant l'assemblage des saints, ils se constituèrent peu à peu, tout naturellement, en une société spirituelle, sur le modèle de l'Église apostolique. Ils eurent des apôtres, ils eurent la communauté des biens, et la misère des temps leur ayant procuré de nombreux disciples parmi ceux qui n'avaient pas le nécessaire, ils se trouvèrent engagés dans la guerre des paysans 1520, sous la conduite de Thomas Mttnzer et de ses amis, et succombèrent avec eux comme parti, lorsque les princes eurent étouffé cette révolte. On a peine à comprendre les inconséquences dont ils se rendirent coupables; ils avaient commencé par l'esprit, ils finirent par la chair; ils condamnaient la guerre et ils firent la guerre; le pillage, le meurtre, la débauche déshonorèrent leurs armées, et Luther les stigmatisa avec la plus grande énergie. Purifiés par l'épreuve, les anabaptistes d'Allemagne renoncèrent à des alliances contre nature et redevinrent ce qu'ils étaient à l'origine, un parti exclusivement religieux, représentant au sein de la Réforme le progrès et la spiritualité. Le Palatinat leur offrit un refuge, pendant qu'ailleurs on continua de les persécuter jusqu'à la mort; ils souffrirent le martyre avec courage, l'n ancien prêtre, amené à la connaissance de TÉvangile par la lecture des écrits de Luther et de Bueer, Menno Simons, exerça sur les sectaires trop fanatisés une salutaire influence, et s'il calma un enthousiasme malsain, il contribua d'autant plus à convertir des âmes et à fonder de nouvelles congrégations. Les églises se multiplièrent. grâce à son zèle vraiment apostolique, et elles finirent par prendre, du nom de leur fondateur, le nom de mennonites, moins compromis que celui d'anabaptistes. C'est sur-ton t dans le nord de l'Allemagne et dans les Pays-Bas qu'elles s'établirent. Un mouvement semblable s'était produit en Suisse, sous la direction de Hubmeier, mais ses excès le perdirent, et Zwingle, qui s'était montré un moment indécis sur la question du baptême des enfants, rompit avec les novateurs. Des discussions publiques, suivant la vieille coutume, tournèrent contre les anabaptistes et paralysèrent leur progrès. En Moravie le parti, soutenu par la noblesse, obtint quelques succès, mais le gouvernement, poussé par les prêtres, persécuta de telle sorte les adhérents des idées nouvelles, qu'ils durent bientôt se disperser et s'enfuir. L'Angleterre d'abord, puis les États-Unis, reçurent un grand nombre de proscrits, et l'anabap-tisroe transporté sur ces terres libres y prospéra. y fit de nombreux prosélytes, mais s'y modifia dans un sens plus spirituel et plus modéré. V. Baptistes, Menno, Jean de Leyde, etc. ANACHORÈTES (grec: ceux qui se retirent), nom que l'on donna dès les premiers siècles du christianisme à ceux qui abandonnaient le roonde pour travailler à leur sanctification, et qui s'enfuyaient dans les déserts pour y vivre loin des habitations. On peut ranger les prophètes Élie et Élisée, ainsi que Jean-Baptiste, dans cette catégorie. Les persécutions des empereurs firent éclater beaucoup de vocations semblables. Ils demeuraient dans des cavernes de montagnes, pratiquaient l'abstinence, et même s'infligeaient des macérations exagérées pour dompter la chair. Quelques-uns restaient exposés longtemps à la neige et au froid; d'autres s'imposaient pendant des années un silence absolu, s'interdisant même la prière à haute voix; quelques-uns se privaient pendant un long temps de «ommeil ou de nourriture, ou tenaient leurs mains élevées vers le ciel, ou restaient debout sur une colonne, etc. Plusieurs ont eu leurs légendes. L'Inde possède de même ses fakirs. Mais si l'on s'en tient aux anachotëtes, ascètes, ermites ou solitaires plus sérieux, on en voit qui, dans des temps de trouble, ont momentanément abandonné la vie solitaire pour venir exercer sur le monde l'influence de leur caractère ou de leur parole. Télesphore en 128 et saint Denis en 259 furent même élevés au pontificat; Marcion se fit anachorète, quand il quitta l'Église. Un grand nombre sortirent de leurs retraites pour rappeler aux peuples et aux princes leurs devoirs. Julien Sabba fut appelé par Acacius en 370, pour combattre l'arianisme. Thraates parut devant Valens et fit des miracles. Le stylite Daniel, poussé par l'Esprit, vint en 476 à Constantinople pour défendre la foi contre l'empereur Basilisque, qui refusa d'abord de le recevoir et finit par tomber à ses pieds. Les anachorètes forment la transition à la vie monacale; ils se réunirent d'abord dans de petites cabanes isolées, avec une chapelle centrale, et peu à peu s'entendirent pour n'avoir qu'une seule maison avec une règle intérieure très sévère. La première laura (communauté) connue fut fondée en 340 par Chariton à Pharan, non loin de la mer Morte; puis une autre par Eu-thyme, près de Jérusalem, vers 400; puis saint Saba, Quiriacus et d'autres suivirent cet exemple. Cependant la vie solitaire continua d'avoir ses adhérents, et Cassien les place au-dessus des moines vivant en commun. Le Mont Athos renferme encore aujourd'hui des uns et des autres. Le concile de Trull. 692, ordonne que celui qui veut être anachorète fasse d'abord un stage dans un couvent. Plusieurs fondateurs d'ordres ont commencé par être anachorètes, et un couvent du Dauphiné avait coutume de désigner le meilleur de ses membres, pour qu'il vécût solitaire et qu'il se consacrât exclusivement à la prière. — v. Bolteau, Hist. monast. d'Orient; Hélyot, Hist. des ordres monast. ANACLET 1° ou simplement Clet, grec d'Athènes, disciple de Pierre et successeur de Linus, d'après Irénée; de Clément, d'après saint Augustin; de Clet, d'après saint Jérôme. Donc complètement inconnu (78 à 91). Son martyre est fixé au 26 avril. Hégisippe nomme un Annenclet qui aurait été év. de Rome de 80 à 93. 2° Anaclet II, ou Pierre de Léon, élu pape en 1130, par une partie des cardinaux en concurrence avec Innocent II, fut reconnu par Rome et l'Italie et soutenu par Roger, roi de Sicile, tandis que son rival était reconnu par le reste de la chrétienté. Il fut excommunié par le concile de Pise, 1134, et f 1138. Ses partisans le remplacèrent par Victor IV, qui ne joua aucun rôle. ANAGNOSTE, v. Lecteurs. ANAPHORA, portion de la liturgie qui, chez les grecs, répond au canon de la Messe des latins, c'est-à-dire au moment de la consécration des espèces. On désignait aussi sous ce nom le volume qui renfermait la liturgie d&4a Cène. ANASTASE 1er io pape romain 368-402, combattit les donatistes et se prononça contre Rufin dans les luttes de celui-ci contre saint Jérôme. Il condamna Origène au point de vue dogmatique. Homme pieux, il appelle les Églises chrétiennes des membres de son propre corps; il veut qu'on écoute debout la lecture de l'Évangile dans le culte liturgique, et s'oppose à la consécration ecclésiastique de personnes atteintes de difformités. Le culte des saints commence à poindre. Il réconcilie les orientaux avec l'église de Rome. 2° Anastase II, romain 496-98. Après avoir adhéré d'abord à la condamnation d'Acace, dans une lettre adressée à son homonyme l'empereur Anastase le Silentiaire, il parut plus tard vouloir revenir en arrière, mais il mourut avant d'avoir pu retirer le décret lancé par ses prédécesseurs contre le patriarche eutychien de Constantinople. Il salua avec joie la conversion de Clovis et lui écrivit pour l'engager à agir de telle sorte que l'église de Rome n'eût jamais qu'à se réjouir de cet événement. 3° Anastase Hl, 911-13. pape sous l'ignoble gouvernement des Théodora et deMarrouzia; il subordonne à l'archevêché de Brème celui de Cologne, dont le titulaire a concouru à détacher la Lorraine de l'Allemagne. 4° Anastase IV, 1153-54. lit sa cour à Frédéric 1er. en reconnaissant Wichmann, l'évê-que de Magdebourg. que son prédécesseur n'avait pas voulu reconnaître. Il se montra charitable dans une grande famine, restaura le Panthéon et a écrit un ouvrage sur la Trinité. 5<> Cénobite, connu sous le nom d'Anastase le Sinaïte, qui fut élu évêque et patriarche d'Antioche, fut ensuite banni 572 et f 599. D'autres moines de ce nom et de ce surnom moururent en 606, 609 et 678; on ne sait auquel attribuer quelques ouvrages, d'ailleurs sans grande valeur. 6° Prêtre de Constantinople, ami de Nesto-rius, né 478, le premier qui nia dans un sermon. que Marie fût la mère de Dieu. 7o Persan qui. sous le nom de Magundat, servit dans les troupes de Cosroès. Après sa conversion il prêcha l'Évangile en Assyrie et fut martyrisé 628. 8° Moine, abbé d'un couvent romain et bibliothécaire, fut envoyé par Louis II au concile écuménique de Constantinople 869, dont il traduisit les actes en latin. Il a écrit une Hist. ecclésiastiq. et un Liber Pontificalis, ou Vie des papes jusqu'à Nicolas I«r. f 886. ANASTASIE, fille d'un père païen et d'une mère chrétienne, fut élevée dans la foi, mais son père la contraignit d'épouser un païen qui lui interdit tous rapports avec ses coreligionnaires. Après la mort de son mari, elle consacra toute sa fortune au bien de l'Église, et fut brûlée pendant la persécution de Dioclétien en Illy-rie 304. Les bollandistes fixent au 25 déc. le jour de sa mort. ANATHÊME. Les écrivains classiques donnent à ce mot le sens de: offert, présenté à Dieu. Dans le N. T. il s'y joint l'idée de sacrifice: retranché, mis à part, sacrifié. C'était le retranchement de l'Église, l'excommunication, peine tout ecclésiastique, mais qui pouvait entraîner des châtiments et même la malédiction divine. Le mot passa dans ce sens dans le langage ecclésiastique, les conciles d'Elvire 303 et de Laodicée 357 l'emploient pour frapper des délits religieux; celui de Nicée 325 prononce l'anathème contre les propagateurs des doctrines ariennes, et dès ce moment il fut employé couramment dans les sentences des papes et des conciles, jusqu'au concile de Trente et jusqu'au Syllabus. ANATOLE lo théologien du 3®e siècle, né à Alexandrie de parents chrétiens, était disciple d'Origène. Il avait montré dans sa prédication des talents rares, et obtint les plus grands succès. Nommé évêque de Laodicée en 269, il pro- • pagea hors de l'Egypte les idées d'Origène. On a de lui un traité sur l'époque où il faut célébrer la Pâques, et dix livres sur l'arithmétique. 2<> Un autre Anatole, aussi d'Alexandrie, nommé patriarche de Constantinople 449 sous Théodose. Il entre en rivalité avec Léon-le-Grand, et convoque en 450 le concile de Chal-cédoine où. après avoir condamné l'eutychia-nisme, il fait déclarer son siège patriarcal l'égal de celui de Rouie, malgré les évêques d'Alexandrie et d'Antioche et les légats du pape. Léon menace deux fois Anatole de l'excommunier, mais sur les instances de l'euip. Marcien et sur les explications d'Anatole qui se lava du reproche d'ambition, la chose n'eut pas de suite. Anatole f 458. ANCIENS v. Presbytériens. ANCILLON. célèbre famille protestante, née française, que les persécutions chassèrent en Allemagne où elle finit par se naturaliser. 1° Son chef était président à mortier et sacrifia sa charge à ses convictions religieuses. 2° Son fils Georgin fut un des fondateurs de l'église de Metz, il eut pour fils 3° Abraham, « habile en droit. • et celui-ci à son tour fut père de 4<> David Ancillon, né à Metz 1617, étudia d'abord chez les jésuites, ne pouvant le faire ailleurs; vint à Genève 1633 sous Spanheim, Diodati et Tronchin; nommé pasteur à Meaux 1641, où il épousa Marie Macaire de Paris, et où il se lit comme homifieet comme prédicateur une excellente réputation; puis 1653 à Metz, où il resta jusqu'à la révocation 1685. Il dut alors partir, abandonnant au pillage sa riche bibliothèque; fut nommé à Hanau. où il passa un an, puis à Potsdam où le graud-duc électeur Frédéric- Guillaume l'accueillit avec un affectueux respect. Nommé pasteur à Berlin, il travailla jusqu'à la fin, eut la joie de voir ses enfants établis autour de lui, et + âgé de 75 ans, 1692. On a de lui une Vie de Farel, quelques traités et quelques sermons, ainsi que des Mélanges sur toutes sortes de sujets, publiés par son fils Charles et fort appréciés de Bayle. 5* Charles, son fils, né 28 juillet 1659 à Metz, f à Berlin le 5 juillet 1715; fit ses études de droit à Marbourg, Genève et Paris, plaida contre Louvois la cause des proscrits lors de la Révocation, et suivit sa famille à Berlin, où il fut nommé juge et directeur de la colonie française, puis juge supérieur, conseiller de cour et de lé-gation^ enfin historiographe de Frédéric Ier. Il a écrit trois ouvrages sur la Révocation, une Hist. des réfugiés en Brandebourg, une Hist. de Soliman II, un Éloge de Danckelmann, des Mélanges en souvenir de son père, et quelques autres traités sur différents sujets. Il se recommande par la pensée plus que par le style. 6* Louis-Frédéric, petit-fils de Charles, f le 13 juin 1814, âgé de 70 ans, pasteur, membre de la Soc. royale de Berlin, auteur de quelques Oraisons funèbres, éloges et dissertations. 7° Jean-Pierre-Frédéric, né 30 avril 1767, 119 avril 1837; fils du précédent. Après avoir achevé ses études universitaires sous les yeux de son père, il visita quelque temps Genève, puis Paris, au moment où la Révolution commençait. Nommé pasteur du Werder à Berlin, admis dans l'intimité du prince Henri, d'une éloquence entraînante, il vit sa réputation grandir d'année en année. Mais son aptitude pour les sciences historiques et pour la philosophie devait lui donner une autre célébrité. Il était déjà, depuis 1791, professeur d'histoire à l'Académie militaire; en 1796 il publiait des Considérations sur la philosophie de l'histoire; en 18(M une Iutrod. à l'Hist. des révolutions du système de l'Europe; puis des Mélanges de politique et de littérature. En 1803 il fut nommé historiographe de la Prusse; en 1810 précep-tenr du prince royal (et de l'empereur actuel, Guillaume; puis conseiller à l'Instruction publique et aux affaires étrangères; enfin en 1834 ministre en remplacement du comte de Bernstorff. Son influence dans les conseils fut bientôt prépondérante. Comme caractère il resta modeste, affectueux, un peu faible et toujours très conservateur. Ses principaux ouvrages de politique, de littérature et de philosophie ont été réuuis en une édition en 4 vol. Paris 1832. 8® David, frère de Charles (5°), second fils de David (è°), né à Metz le 2 févr. 1670. f à Berlin le 16 nov. 1723, de la gravelle. Il étudiait à Genève quand son père fut forcé de quitter Metz; il le rejoignit bientôt à Berlin, où il témoigna le désir d'entrer dans l'armée, mais le Grand-Électeur l'en détourna, pourvut à l'achèvement de ses études, le donna en 1689 à son père comme collègue et le nomma son successeur eu 1692. Le jeune ministre avait tout ce qu'il faut pour réussir comme prédicateur, et il réussit. Il fut en outre chargé de plusieurs missions diplomatiques en Hollande, en Angleterre, en Suisse, en Pologne, en Autriche, et finalement à Neuchâtel: il s'en acquitta dignement, et sans jamais oublier qu'il était avant tout un ministre de l'Évangile. Il avait épousé Susanne Meus-nier, de Paris; il en eut douze filles et cinq fils, dont l'aîné fut directeur de l'Hôtel de Refuge; le second, Manassé, pasteur à Prentzlow; le troisième, Alexandre, pasteur à Kônigsberg. 9° Joseph, frère de David (4°), né 1626, avocat, l'orgueil du barreau, eut sa carrière brisée par la Révocation. C est au péril de sa vie qu'il rejoignit son frère à Berlin, où il fut nommé juge supérieur des colonies françaises, et conseiller de cour et de revision. Il est regardé comme le fondateur des justices françaises dans le Brandebourg, v. Haag. — On peut juger par cette seule famille de la perte immense que causa à la France la criminelle folie du vieux roi, et le nom de Metz qui reparait si souvent dans cette biographie appelle bien des réflexions. ANDERSON, ou Andreœ, Laurence, né 1480, favorisa l'introduction de la Réforme en Suède, fut chancelier sous Gustave Wasa, mais fut condamné à mort sous prétexte de conspiration, v. Petersen. Le roi lui fit grâce de la vie. mais lui retira ses emplois, f 1552. ANDRÉ, lo notable protestant du Pont-de-Montvert, persécuté, traqué dans les bois 1685; découvert et tué par les dragons, il mourut en pardonnant à son meurtrier. L'abbé du Chaila s'empara de sa maison et en fit pendant plus de 15 ans le cachot de ceux qu'il ne réussissait pas à convertir. Une attaque de cette maison, la nuit du 24 au 25 juillet 1702, fut le signal de la guerre des Camisards. Cette maison exisle encore et sert aujourd'hui d'auberge. — 2° v. Moser. — 3° v. Sarto. ANDRE^E, 1° v. Anderson.— 2° Jacques Andréa*, né 25 mars 1528, à Waiblingen, Wurtemberg, f 7 janvier 1590 à Tubingen, où il était professeur et chancelier de l'université, fut un des hommes les plus actifs et les plus décidés de son temps. Fils d'un maréchal (d'où on l'appelait quelquefois Schmidlin), il fit ses études aux frais de la ville à Stuttgart et à Tu-bingue; nommé diacre à Stuttgart à l'âge de 18 ans, il fut chargé de nombreuses missions en France et à l'étranger; écrivit plus de 150 traités ou brochures, presque tous de polémique, qui jettent un jour intéressant sur l'état religieux de l'époque, et prit une part importante à la rédaction de la formule de Concorde q. v. Il fut en correspondance avec Calvin, en relations personnelles avec Bèze, et jouit de la confiance de plusieurs princes; l'emp. Maximilien lui-même lui témoigna une grande estime. Sa lin fut paisible et confiante. 3° Jean-Valentin, né à Herrenberg 17 août 1586, f à Stuttgart 27 juin 1654; petit-fils du précédent, fils de Jean, pasteur à Herrenberg. Ses études achevées, il visita comme précepteur de jeunes nobles, l'Allemagne, la Suisse, la France et l'Italie, puis passa encore quelques années à Tubingue dans l'enseignement. Son premier poste de pasteur fut Baihingen 1614, oïi il passa 6 ans; il fut appelé ensuite à Calw 1620, où il vit toutes les horreurs de la guerre tle Trente ans, la ville incendiée, sa bibliothèque détruite, la population presque anéantie, lui-même complètement ruiné. En 1639 il vint à Stuttgart comme prédicateur de la cour, et fut nommé prélat en 1654. C'était un homme ardent, plein de sens et d'esprit, versé dans tou~ tes les littératures; avec cela bon et dévoué au soulagement de toutes les misères, et qui, pendant la peste de Calw, soignait les malades, ensevelissait les morts et adoptait les orphelins. Herder l'a délini: Une belle âme, comme on en voit peu; et Spener a dit: Si je pouvais ressusciter quelqu'un, c'est Val. Andréa? que je choisirais. pour le bien de l'Église. Il a laissé plus de 100 écrits, en prose et en vers, la plupart peu considérables, mais dont quelques-uns ont fait sensation; entre autres: Menippus, ou une centaine de dialogues satiriques, contre l'orthodoxie morte; Alethœa exul, dans lequel il défend la philosophie et les sciences naturelles contre leurs détracteurs et contre la tendance cabalistique et les excès du mysticisme. Mais sps deux principaux livres sont sa Fama fra-ternitatis. et Judiciorum de fraternitate Rosa-ceœ crucis chaos, 1619, que plusieurs ont pris au sérieux, et qui ne furent qu'une innocente mystification. Il y fait intervenir les 7 sages de la Grèce, Sénèque et Caton, qui exposent successivement leurs vues sur les meilleurs moyens k employer pour le bonheur et l'amélioration morale de l'humanité: ainsi, le partage des biens, la suppression des monnaies d'or et d'argent, la suppression du fer, avec plus juste répartition des emplois publics, etc. Enfin, sur la proposition des sages d'Europe, on décide de s'en tenir aii Code de fraternité qu'un certain Christian, rose-croix, qui fit au 14m<> siècle le pèlerinage du Saint Sépulcre, rapporta de la Terre Sainte, avec une collection de formules magiques. Mais qu'est-ce que c'était que ce contrat d'alliance? Où se trouvait-il? On le chercha partout, sans s'apercevoir que l'auteur avait voulu se moquer des superstitions existantes, et sans comprendre les allusions qu'il avait faites à la Bible comme seule règle de la vie et seule garantie de bonheur. Quoiqu'il eût gardé l'anonyme, on le soupçonna d'être l'auteur de ces écrits, et on l'accusa d'avoir voulu restaurer l'ordre des Rose-croix. ANE (fête de 1'), célébrée au moyen âge dans plusieurs églises. C'était plutôt un divertissement. où les prêtres et le peuple s'amusaient à braire les différentes parties de l'office, au lieu de les chanter. Un âne y représentait tour à tour l'ânesse de Balaam ou la fuite de l'enfant Jésus en Égypte. Cette cérémonie profane fut supprimée par le parlement. ANGELA, ou Angèle, v. Merici. ANGÉLIQUE (la mère), de son vrai nom Jac-queline-Marie Arnauld, née 1591, f 6 août 1661, fille d'Antoine Arnauld q. v. et abbesse de Port-Royal q. v. Aussi distinguée par ses talents qne par ses vertus. Auteur de Lettres, de Mémoires et de Conférences. ANGÉLIQUES (ordre des), fondé 1530 par Louise Torrelli, comtesse de Guastalla, déjà deux fois veuve à 25 ans. Les religieuses s'engageaient à vivre dans la pureté des anges (de là leur nom; on les appelait aussi Guastallines, d'après leur fondatrice). Elles furent reconnues en 1534 par Paul III, rattachées à la règle de saint Augustin, soumises aux barnabites de Milan, mais sans être obligées à la vie cloîtrée. Elles accompagnaient dans leurs missions les religieux barnabites; aussi, malgré leurs vêtements grossiers, leur croix de bois sur la poitrine, leur corde autour du cou, elles furent bientôt compromises, et pour en finir avec ces scandales, elles furent tenues d'entrer dans des couvents et d'y rester. ANGILBRET, un des conseillers et secrétaire de Charlemagne, auteur de quelques poésies et de documents sur l'abbaye de Saint-Riquier, où il se retira et dont il devint abbé. Il était de la Neustrie et avait été le premier conseiller de Pépin, roi d'Italie. Ami d'Alcuin. f 814. ANG1LRAM, év. de Metz 768-91, abbé deSe-nones (bénédictins), appelé dès 789 au titre d'archevêque, purement honorifique, car Metz n'était pas une métropole. On lui attribue la continuation de la Chronique de Frédegaire jusqu'en 796, année de sa mort; mais il est surtout connu en droit canon par des chapitres ajoutés aux fausses décrétâtes et qui portent son nom. C'est pendant les luttes de Hincmar de Reims contre son neveu de Laon, que ces statuts ecclésiastiques apparaissent pour la première fois sous le nom d'Angilram; il en existe deux éditions; la 2** paraît seule authentique; elle aurait été remise le 19 sept. 785 à Angilram par le pape Adrien lui-même, lors de son procès relatif à la résidence. ANGLETERRE. On comprend historiquement sons ce nom, à moins de désignation spéciale contraire, l'ensemble des Iles Britanniques. Des témoignages fort nombreux établissent que le christianisme y fut introduit dès les premiers temps de l'Église, et au 6me siècle on voit ces îles former le centre principal des missions du moyen âge. Les Triades welches, le livre de Gil-das-le-Sage, et l'histoire de Bède-le-Vénérable, sont utiles à consulter pour l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne. Une légende, ou une tradition rapporte que lorsque Caractacus. prince breton, vaincu par Claude, fut amené prisonnier à Rome, il y fut converti, ainsi que son père, par l'apôtre Paul (vers 53), et que lorsqu'il leur fut permis de retourner en Angleterre, ils y devinrent les premiers prédicateurs de l'Évangile. Vers 180, on trouve Lucius qui fonde â Llandaff la première église chrétienne. Des persécutions éclatent vers 303, et l'on cite les noms de trois martyrs, Alban, Jules et Aaron. Au concile d'Arles, on compte déjà 3 évêq. bretons. Le moine irlandais, Pélage. date de 400; l'Irlande est appelée l'Ile des saints. Mais les pirates Anglo-Saxons détruisent presque en entier l'œuvre de l'Évangile. Augustin, avec quelques moines, l'y ramène en 600, mais les Danois viennent encore une fois fouler aux pieds ce champ des missions, et ce n'est qu'après l'an 1000, sous les règnes de Suénon et de Canut-le-Grand qu'on peut considérer l'île comme décidément conquise à la foi chrétienne. C'est Guillaume le Conquérant, 1066, qui, en mettant fin aux rivalités des différentes familles royales, constitua l'Angleterre dans les conditions d'unité qu'elle a gardées dès lors. Mais pendant longtemps deux courants différents se firent sentir dans la direction de l'Église, l'un représentant l'indépendance nationale, l'autre la soumission à Rome. Les fidèles au nom d#e la foi, les rois au nom de leurs droits, résistèrent aux empiétements ultramontains, mais Jean-sans-terre dut se soumettre à Innocent III, 1213, et ses successeurs ne purent recouvrer que par une lutte incessante, quelques parcelles de leurs prérogatives, jusqu'au moment où la dynastie desTudor, en la personne de Henri VIII, proclama la Réforme, qui ne consista d'abord qu'à faire passer entre les mains du roi l'autorité du pape. Comme acte politique, cette revendication de liberté fut hautement acclamée, mais le côté religieux de la Réforme ne prévalut que lentement et Henri VIII fut plutôt le persécuteur que le protecteur de l'Église. Son fils Édouard VI. chrétien vivant, prit la Réforme au sérieux, mais il mourut jeune et laissa le trône à sa sœur, Marie-la-Sanguinaire. qui ralluma les bûchers et releva les échafauds; Latimer, Ridley, Cranmer, Saunders, Bradfort, Leafe, Elisabeth Folkes, et des centaines d'autres, furent brûlés par ses ordres, pendant que Wishart, Hamilton et un grand nombre de martyrs étaient suppliciés en Ecosse. Sa sœur Elisabeth. fille d'Anna Boleyn, lui succéda, 1558, et s >n avènement fit toutes choses nouvelles. C'est à cette grande reine qu'on peut rattacher le triomphe définitif de la réforme en Angleterre, dans les conditions modérées qu'elle a adoptées. L'esprit catholique essaya sans doute plus d'une fois, par ruse ou par force, de reprendre ses positions; il faillit réussir au 17me siècle, grâce aux Stuart, Jacques 1er et Charles 1er, mais l'opinion publique se souleva et le protectorat de Cromwell mit fin à ces velléités de réaction. Les Stuart rappelés s'étant montrés incorrigibles, furent remplacés, 1689, par la maison d'Orange qui avait donné des preuves éclatantes de son attachement aux doctrines de la Réforme. L'Église anglicane demeura la religion nationale officielle, mais la liberté de culte fut accordée aux églises indépendantes, sauf à l'égl. catholique dont on avait trop éprouvé la puissance d'intrigues; ce n'est qu'en 1829 qu'elle est rentrée dans le droit commun. Déjà avant Henri VIII, sous l'influence des écrits de Wicleff et de Luther, le besoin d'une réforme se faisait vivement sentir. Tynda1,Bilney et d'autres, venaient de traduire le N. T., et leurs adeptes se multipliaient. Le roi et le cardinal Wolsey,son favori, se montrèrent hostiles à ce mouvement et persécutèrent les fidèles. Mais en dépit de toutes les prohibitions, la Bible circula et fit son œuvre habituelle. Quand le roi proclama sa réforme, il mécontenta les catholiques, mais il ne contenta pas ceux qui demandaient une réforme plus complète et plus évangélique et qui auraient voulu purifier l'Eglise de tous ses restes de catholicisme. De là le nom de Puritains qui leur fut donné; on les appela aussi Non-conformistes à cause de leur refus de se soumettre à l'Acte d'uniformité de 1562, qui prétendait couler toutes les croyances et les cérémonies dans un même moule. Lrts uns restèrent dans l'Église pour travailler à sa régénération, les autres se constituèrent en Églises indépendantes et furent affreusement persécutés. En Écosse ils prirent le nom de Covenantaires q. v., et le 24 août 1560 un parlement libre réuni à Édimbourg, abolit l'autorité papale, révoqua les lois portées contre la religion réformée, et déclara le presbytérianisme la religion nationale. ANGLICANE (Église). Au moment oii la Réforme se produisait avec le plus d'éclat sur le continent, et oti le besoin d'une réforme se faisait le plus vivement sentir en Angleterre, l'attachement du peuple à son église traditionnelle était encore assez puissant pour que l'on pût douter du succès d'un mouvement religieux. Déjà plusieurs avaient payé de leur vie leur tentative, lorsque le roi et plusieurs membres de la noblesse, sous l'influence de leurs passions, rompirent avec le pape et avec l'Église romaine; Henri VIII, parce que le pape s'opposa à son divorce avec Catherine d'Aragon; les nobles, par déférence pour les caprices du souverain, et parce qu'ils comptaient s enrichir des dépouilles des couvents et des abbayes. Telle fut l'origine extérieure et matérielle de cette Église qui. sans rompre avec l'Eglise universelle, prit le nom de nationale, ou anglicane, par opposition au nom de romaine qui rappelait des traditions, une histoire, et surtout une dépendance dont elle voulait s'affranchir. Ce fut donc avant tout, dans son principe, une œuvre politique. Mais il ne suffisait pas de rompre, il fallait réorganiser, et pour justifier la mesure qu'il avait prise, le roi (lut la colorer de quelques réformes, mais le moins nombreuses possible. 11 avait à tenir compte à la fois des vœux de ceux qui demandaient une réforme, et de l'opposition de ceux qui n'en voulaient point. De là le caractère de compromis qui frappe dans la constitution de cette Église. L'archev. Cranmer, qui devait périr plus tard sous Marie, fut un de ceux qui prirent la part personnelle la plus active à la réforme, pendant que le roi et ses amis s'occupaient surtout de s'approprier les biens des (160) couvents. dont les revenus seuls dépassaient le chiffre de huit millions. Après quelques alternatives de prospérité sous Edouard, de persécutions sanglantes sous Marie. l'Église anglicane fut définitivement constituée sous Élisabeth, mais sans être cependant acceptée de tous; les puritains et les presbytériens ne cessèrent de demander des réformes plus radicales. L'Église anglicane compte environ 25 millions d'adhérents, dont 15 dans les Trois-royaumes; les autres sont disséminés dans le Canada, aux États-Unis, aux Indes, et partout où flotte le drapeau britannique. 11 est toutefois difficile d'en affirmer le nombre exact. En Angleterre même, la moitié de la population est anglicane; l'autre moitié se compose de dissidents sous toutes les formes. depuis les baptistes jusqu'aux catholiques. Riîunie à l'État, salariée et privilégiée, dans la plupart des colonies anglaises, cette Église est indépendante dans d'autres et vit de contributions volontaires. Ses principaux livres de piété sont: un Catéchisme, extrêmement court, clair et précis, qui part de l'idée que l'enfant a été baptisé; le Livre des Homélies, ou sermons, que l'on attribue généralement à Cranmer. mais auquel d'autres ont travaillé, notamment Latimer et Ridley. et qui devait suppléer dans le temps à l'ignorance des prédicateurs ou à leur pénurie; les XXXIX articles, et le Prayer-Book ou recueil liturgique. Les 39 articles furent rédigés * d'abord par Cranmer, avec l'aide de Ridley, en 1551; il y en avait primitivement 42; ils furent publiés en latin et en anglais en 1553. Une revision eut lieu en 1562, en latin; c'est alors qu'ils furent réduits à 39. En 1571 ils furent votés par les deux chambres en latin et en anglais. Les originaux, signés par les membres du parlement périrent dans l'incendie de Londrest mais l'exactitude du texte n'a jamais été contestée. Ce document, plus bref que la plupart des confessions de foi protestantes, se rapproche le plus, pour la doctrine, de celles de l'Eglise réformée, au point qu'on a cru y reconnaître l'influence de Calvin; pour le Canon des Écritures, pour le baptême et pour la confession, elle se rapprocherait cependant davantage de Luther, et les arminiens eux-mêmes y trouvent des articles qu'ils peuvent signer; de sorte que si la réforme anglaise a été un compromis entr* le passé et le présent, on peut dire que les 39 articles sont un compromis entre les diverses tendances protestantes. Quant au Book of Com-mon Prayer, c'est le manuel liturgique de l'Église anglicane; il renferme les chants, les prières, les lectures et toute l'ordonnance du culte; on le lit dans les familles, chacun l'apporte au temple pour pouvoir suivre et même réciter les prières avec le ministre. Il fut rédigé en i548 par Cranmer et quelques autres théologiens, sur la base des anciennes liturgies de Bangor, York. Salisbury, et avec l'aide des travaux de Bucer et de Mélanchthon. L'acte d'uniformité lui donna force de loi 1549. Quelques changements y furent introduits en 1552; d'autres en 160\ et en 1662. Ce livre est la fidèle expression de la foi de l'Église; on y trouve des traces d'uni-versalisme. des restes du catholicisme, et parfois l'empreinte de passions politiques. On pourrait croire que l'attachement des Anglais pour ce volume dût nuire à leur respect pour la Bible, mais les faits sont là pour établir le contraire, et aucun peuple n'a fait pour la propagation de l'Écriture autant que l'Angleterre. L'Église anglicane a conservé l'épiscopaL comme plusieurs autres Églises protestantes, les moraves, les wesleyens, les luthériens en certains endroits, mais en insistant plus que les autres sur l'idée de la succession apostolique, ce qui la rapproche du catholicisme. Elle reconnaît, avec une foule de subdivisions, trois ordres principaux dans l'Église, les évêques, les pasteurs et les diacres; il y a en outre des chanoines pour le service des cathédrales, des doyens et des archidiacres. Les évêques siègent a la chambre des lords comme barons du royaume. L'archevêque de Cantorbéry a le titre de primat; il est le premier pair et membre du Conseil privé; les évêques l'assistent comme employés. doyen, chancelier, etc. C'est lui qui a le privilège de couronner le roi, l'archevêque d'ïork vient en second, et couronne l'épouse da roi. II est également membre dti Conseil privé. L'un et l'antre passent avant les ducs. I/>s évêques suivent immédiatement les vicomtes. Les prélats irlandais sont lords tour k tour, chaque fois un archevêque et 3 évêq. Les évê-qaes des colonies peuvent être nommés directement par les ar^hevêq., sans l'intervention de la couronne, mais leur titre ne vaut que dans te colonies. Celui de Jérusalem est nommé alternativement par la reine d'Angleterre et par roi de Prusse. On a dit de l'Église anglicane, que sa doctrine était protestante et ses formes catholiques. Ce contraste explique les nombreuses sécessions qui ont eu lieu dans son sein k diverses époques, tantôt dans le sens d'un protestantisme plus arcentué. tantôt, et de nos jours surtout, dans U sens du catholicisme. On distingue en fait, sinon officiellement, trois pnrtis dans l'Église d'Angleterre: la Low church, qui est plus protestante. plus évangélique, moins attachée aux formes; la Broad church, ou Église large, qui tient surtout à l'établissement comme tel. k l'ap-pii de l'État, k ses richesses et k ses privilèges, et qui est assez latitudinaire en matière de doctrine; enfin la High church, la haute Église, qui attacha une plus grande importance aux termes catholiques du culte qu'à son caractère évangélique; elle accentue l'épiscopat. la succession apostolique, les sacrements, le rituel, (lette dernière tendance a toujours existé, mais elle a pris un développement extraordinaire de-pois environ 40 ans sons l'influence du Dr Pu-s*y; elle est connue sous les différents noms de pméime d'après son plus ardent défenseur; de trwtarianisme, k cause des « Traités pour le temps » par lesquels elle se révéla d'abord; de rituali&me. à cause de son penchant pour les manifestations extérieures et les cérémonies du culte, cierges en plein midi, processions, prières pour les morts, etc. Le résultat le plus net de ce mouvement a été la conversion franche au catholicisme de quelques-uns de ceux qui s'étaient laissé entraîner sur cette pente. Posey n'a pas abjuré, mais plusieurs de ses collaborateurs. Les protestants ont essayé de réagir contre ce danger; malheureusement, avec tout son appareil de fonctionnaires, l'Église anglicane ne possède aucune autorité réelle, le souverain n'étant que le chef nominal et politique de l'Église, les archevêques n'ayant aucune compétence en dehors de leurs diocèses, chaque évêque ne relevant que de lui-même, et les pasteurs ou recteurs jouissant d'une assez grande indépendance relative. La législation qui règle les rapports de l'Église avec l'État est si compliquée, que des sentences rendues par des évêques sont restées à l'état de lettre morte. Des conférences fraternelles, mais sans caractère officiel, ont réuni, sous la présidence de l'ar-chevêq. de Cantorbiry. jusqu'à 76 prélats; des résolutions générales ont été prises, et quoiqu'elles n'aient pas force de loi, elles sont de nature k fortifier les rapports des églises entre elles. D'autres conférences ont eu lieu entre des ministres et des prélats anglicans et des dignitaires de l'Église grecque, tendant k établir des communications entre ces deux grandes branches de la société chrétienne. Les revenus de l'Égl. anglicane s'élèvent k plus de cent millions de francs, il répartir entre 18.000 ministres, 25 évêques et 2 arehev. L'ar-chev. de Cantorbéry reçoit à lui seul 375,000 fr. et possède le patronage de 177 bénéfices. Mais si la richesse est un moyen d'influence, elle présente aussi bien des dangers, dont le moindre est de faire du ministère une profession lucrative et une carrière. En Irlande l'Église a cessé depuis le 1er janvier 1871. et grâce ît M. Gladstone, d'être unie à l'État. Elle comptait 2 archev. (Armagh et Dublin). 10 évêques et 2000 ministres, pour environ 600.000 anglicans. Les revenus étaient de plus de 15 millions (en capital 400 millions). Cette somme a été diminuée de moitié; le reste a été affecté k des établissements de charité, et l'Église a reçu la liberté en échange de ses privilèges. Sa seconde gloire, a dit M. Gladstone, sera plus grande que sa première. ANHALT. petite principauté allemande, enclavée dans la Prusse, et datant de 1211. A l'époque de la Réformation, l'abbesse Elisabeth de Weyda fit venir Etienne Molitor 1521. qui prêcha hardiment l'Évangile et mit lin à bien des abus. Il fut puissammeut secondé par le noble et généreux prince Wolfgang, et ensuite par le* trois grands frères, les princes Jean, Georges et Joachim. Ce dernier hérita des enfants de ses frères, mais après lui la principauté se partagea en 4 branches, Dessau. Bernbourg, Kœ-then et Zerbst. Wolfgang, qui appartenait à une première branche, fut l'intime ami de Luther; il protesta à Spire 1529, signa la confession de foi d'Augsbourg 1530, pleura au lit de mort de Luther, et resta fidèle jusqu'à la fin, ■f 1566 ANICET, H ®e évêque de Rome, 157-168, martyr sous Marc-Aurèle. C'est pendant son pontificat que la différence qui existait entre l'Église d'Orient et celle d'Occident sur le jour où l'on célébrait la Pâque, attira pour la première fois l'attention; v. Polycarpe. Ces deux hommes, animés d'une vraie piété, n'en restèrent pas moins, malgré cette divergence, en communion fraternelle et célébrèrent ensemble la sainte Cène, Polycarpe se conformant dans cette circonstance aux habitudes de l'endroit où il se trouvait, tout en maintenant le mode oriental comme seul apostolique. ANNATES. On appelait ainsi la redevance que payaient au pape les évêques nouvellement élus. Peu à peu on les a confondus avec les servitia communia, les présents offerts au con-sécrateur par le consacré. Comme en définitive tout remonte au pape, les deux offrandes ont fini souvent par n'en faire plus qu'une. Les annates payables directement au pape représentaient en moyenne un semestre de traitement; les servitia, payables aux évêques, une année entière. Plusieurs fois les conciles eurent à s'occuper de la question des annates qui avaient donné lieu à de nombreux abus, notamment le concile de Bâle. L'usage prévalut peu à peu de négocier avec le pape et de lui offrir une somme ronde, un peu inférieure au revenu réel de la place. Un décret du parlement les a supprimées en France 1789. ANNE, v. Comnène. ANNEAU du pêcheur. Chaque évêque, en entrant en charge, reçoit un anneau, symbole de son mariage avec l'Église. Le pape reçoit un anneau semblable, sur lequel est gravée la pêche miraculeuse de saint Pierre. ANNIVERSAIRES. Dès le second siècle les églises se mirent à solenniser les anniversaires de la mort des martyrs. L'usage s'étendit et les familles célébrèrent le souvenir de la mort de leurs membres. De là les fêtes des saints, et les riches offrandes faites en ces occasions. Comme les riches seuls pouvaient faire d'abondantes aumônes aussi multipliées, on institua pour les pauvres la Fête des Morts, ou de Toutes-Ames, le 2 nov., et l'on y rattacha l'idée de messes pour délivrer les morts du purgatoire. ANSBACH, margraviat des environs de Nuremberg, embrassa de bonne heure la Réforme sous l'influence de Casimir f 1527, qui demandait seulement que l'Évangile fût prêché, et laissant subsister d'ailleurs toutes les cérémonies catholiques. Son frère Georges, qui lui succéda, se montra plus énergique, rompit avec toutes les traditions romaines et résista même à l'empereur. Il fit partie de la ligue de Smal-calde. f 4343. ANSCHAR. v. Ansgar. ANSÉG1SE io fils de l'évêque Arnulf, de Metz, 7'ûs siècle, et père de Pépin d'Héristal. — — 2o d'une famille noble de Bourgogne, élevé dans un couvent des environs de Lyon, passa dans le diocèse de Rouen, où il avait un parent abbé, se fit moine vers 787. devint successivement abbé de Saint-Germer de Flay 807, de Luxeuil 817 et de Fontenelle 823. Charlemagne l'appela à sa cour à Aix-la-ChapeHe, le nomma intendant de ses bâtiments sous Eginhardt, et lui confia diverses missions difficiles, notamment en Espagne. Outre plusieurs écrits de théologie qu'il fit faire par ses moines, on lui doit le premier recueil des capitulaires de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire, en 4 livres, 827. Ce volume a fait sa réputation, f 20 juill. 833. — 3° Inconnu jusqu'en 870 on voit alors un Anségise abbé de Saint-Michel, ambassadeur à Rome pour le compte de Charles-le-Chauve. Ayant obtenu de Jean VIII qu'il couronnât Charles empereur 875, il reçut l'archevêché de Sens et devint l'instrument le plus actif de la papauté contre le clergé français et le conseiller intime du roi. Jean VIII le nomma 876 primat de l'Église franque et vicaire général du siège apostolique, en dépit des archevêques et de Hincmar en particulier, qui écrivit contre lui et ne voulut le reconnaître que comme métropolitain. Il ne jouit qu'un an de ses dignités, car Charles qui la lui avait procurée mourut l'année suivante. Au sacre de Louis-le-Bègue il n'apparaît que comme simple archevêque, et au concile de Troyes 878 l'arch. de Reims a de nouveau le pas sur lui. f 25 nov. 882. On inscrivit sur sa tombe Primus Gallorum papa, mais aucun de ses successeurs ne revendiqua ce titre. — 4° Évêque de Troyes entre 925 et 959, partit plusieurs fois contre les Normands, fut chassé de son diocèse en 959, le recouvra, grâce à l'arche v. de Cologne, et par ses connaissances lui donna les reliques de saint Patrocle. ANSELME 1° savant et pieux théologien du 11m® siècle, surnommé de Cantorbéry, du nom de son archevêché. Né 1033 à Aoste, d'une famille lombarde illustre, il voulut de bonne heure entrer dans la vie monastique, mais son père l'en détourna et le lança dans le monde. Redevenu libre après plusieurs années de dissipation, il se rendit au couvent du Bec, Normandie, pour y étudier, s'y fit recevoir moine à l'âge de 27 ans, en fut nommé successivement prieur, puis abbé 1078; fit, dans l'intérêt de son couvent, plusieurs voyages en Angleterre, pendant lesquels il forma d'aimables et hautes relations, et gagna l'estime de Guillaume I^ dans les choses temporelles, comme il possédait celle de Grégoire VII en matières spirituelles. Appelé, lors d'un nouveau voyage, à l'archevêché de Cantorbéry, il n'accepta, après de longues hésitations, que parce qu'il s'agissait de défendre les droits de l'Église contre l'arbitraire tyrannique de Guillaume II. Mais bientôt il dut s'enfuir, passa quelques années en exil, tantôt à Rome et aux environs, tantôt à Lyon, employant ses loisirs forcés à la composition de traités de théologie sur les sujets les plus importants de la foi, et maintenant toujours l'autorité absolue du pape et du clergé en fait de doctrine. Henri W le rappela à la mort de son frère, mais Anselme ayant refusé le serment 1103, dut de nouveau reprendre le chemin de l'exil jusqu'au moment où, par un commun accord, le roi renonça à son droit d'investiture par la crosse et l'anneau, et le pape Pascal 11 céda sur la question du serment. Dès lors Anselme ne cessa de jouir de la confiance la plus absolue de son souverain qui, une fois même, pendant une absence prolongée, lui confia la régence du royaume. Mais tout en soccupant des prérogatives et des droits de l'Église et spécialement de l'Église d'Angleterre dont il défendit l'indépendance vis-à-vis du pape lui-même, il travailla à la réformer dans ses laïques et dans son clergé; il fit observer surtout le célibat ecclésiastique et la discipline des mœurs dans les couvents. Son activité s'étendait sur les trois royaumes et même au delà, mais les soucis*matériels et administratifs ne l'empêchèrent jamais de mettre la piété personnelle au-dessus de tout le reste. Sa vie était rigoureusement ascétique. Il f à l'âge de 75 ans, 26 avril 4109. — On l'a souvent comparé a saint Augustin. Il est généralement considéré comme le père de la scolastique et l'initiateur de ce mouvement des esprits qui pendant plusieurs siècles réagit seul en Occident contre la torpeur dont la pression romaine menaçait les consciences et les intelligences. Ses principaux ou>rages sont: un Dialogue sur la grammaire; un Monologue sur Dieu: Cur Deus homo (pourquoi Dieu s'est-il fait homme?), traité sur la rtdemption; un Traité sur la foi, ou l'Incarnation du Verbe; un sur la Procession du Saint-Esprit, des Méditations, des Prières, des Lettres, etc. Foncièrement catholique et prêtre, il s'élevait au-dessus des préjugés de son Église et de son temps, même quand il les partageait, v. Ch. Rémusat, Anselme, etc. 2° Evêque de Havelberg, envoyé à Constan-tinople par Lothaire II, 1135, connu surtout par sa tentative pour amener un rapprochement entre les Églises grecque et latine. Sa controverse avec Nicétas, archev. de Nicomédie, est aussi remarquable par la modération de la forme que par la vigueur des arguments. Il la rédigea 1145 sur la demande d'Eugène III, à Rome, et fait aux Grecs d'importantes concessions. 3* Anselme de Laon, étudia au Bec sous le grand Anselme, puis à Paris. Il ouvrit ensuite dans sa ville natale une école qui devint célèbre et compta Abélard parmi ses disciples. Archidiacre, il refusa plus d'une fois les fonctions épiscopales, pour pouvoir se livrer tout entier à l'enseignement, f 1117. Il est surnommé l'Éco-iâtre et aussi le Docteur des docteurs. Sa Vul-gate interlignée a donné une fâcheuse direction à l'exégèse du moyen âge. AKSGAR, ou An*cAar(=Oscar?) l'apôtre du Jiord, né 801 dans le nord de la France d'une famille distinguée, étudia au couvent de Corvey (Corbie), Picardie, et se consacra de bonne heure à l'œuvre des missions. Parti en 826 pour le Jutland. avec son ami Autbert et avec Harald, l'ancien roi du Hadeby (Schleswig), il dut en 829 renoncer à tout espoir de succès immédiat. Il se rendit en Suède sur l'appel d'Eric Bjôrn, roi du pays, et après bien des vicissitudes et des dangers, il arriva à Birka 830; il y fut accueilli les bras ouverts, et un grand nombre. nobles ou esclaves, se convertirent à sa voix. Dans une diète présidée par l'emp. Louis 831, il fut nommé archev. de Hambourg, se rendit à Rome, et fut confirmé en cette qualité 834 par Grégoire IV. Ebbo de Reims lui donna pour coadjuteur un sien neveu, Gautbert, qui fut sacré èvêque de Suède, et pendant quelques années la mission parût prospérer. La plus grande partie du Holstein professait le christianisme, quoique les îles danoises, sous l'intluence du roi Gorm, restassent les ennemies de la nouvelle foi. Mais les rois du Jutland et de la Suède s'unirent pour une descente sur les côtes du continent, pillèrent tout, jusqu'à Paris, et ruinèrent Hambourg; l'église, le couvent, la bibliothèque d'Ansgar. furent livrés aux flammes et son troupeau dispersé ou réduit en esclavage, 845. Lui-même trouva un refuge à 3 milles de là. Les pirates persécutèrent aussi les chrétiens de Suède; Nidhart fut tué; Gautbert emprisonné, puis exilé. Tout était à refaire. Ansgar se remit à l'œuvre avec courage 847; il fut placé 850 à la tête des évêchés réunis de Brème et de Hambourg et reprit ses missions dans le nord. Le missionnaire Ardgar et le gouverneur Hérigar f 852. obtinrent des succès considérables, et Ansgar, chargé d'une mission de l'emp. Louis, vint avec son ami Rimbert (qui fut plus tard son historien), traiter lui-même avec le roi Olaf des conditions de la nouvelle église. Il y installa Erimbert et ses compagnons et repartit 856 pour son vaste diocèse. Il s'occupa de former des ouvriers fidèles et capables, combattit jusqu'à la fin le commerce des esclaves, en racheta un grand nombre, s'occupa des pauvres, des malades, des étrangers, et mérita par son activité, non moins que par son humilité et son désintéressement, d'être mis au rang des saints, f à Brème le 3 févr. 865. Sa vie se passa dans les austérités de la règle de saint Benoit; il ne se nourrissait que de pain et d'eau, et travailla de ses mains à faire des filets, aussi longtemps qu'il le put. La tradition lui prêta des miracles, mais il dit lui-même: « Si j'étais digne que Dieu fît pour moi un miracle, je lui demanderais de faire de moi un homme parfait. » La principale église de Brème porte encore aujourd'hui le nom de saint Anschar. ANSO. moine du couvent de Lobbes (Lau-biensis). en fut l'abbé entre 776 et 800, et maintint les droits de son couvent qui ne tomba qu'en 889 sous la présidence de l'évêque de Liège. Il a écrit plusieurs biographies, qui ont uté utilisées par les bollandistes ou reproduites par Mabillon. C'était un homme intègre et actif, mais il n'a guère de valeur scientifique. ANTÈRE, ou Anthère, pape inconnu, 235; mis à mort après un mois de règne, dit la légende, parce qu'il voulait qu'on fit un recueil des Actes des martyrs. ANTHIME. v. Agapet 1<>. ANTHROPOMORPHISME. On désigne sous ce nom tout essai de représenter Dieu sous une forme humaine, comme étant limité dans l'espace, ayant un extérieur, des dimensions, une ressemblance, des traits, des organes, des yeux, des bras, une bouche, etc. L'esprit de l'homme, incapable de contempler ce qui n'a pas de formes, donne involontairement à Dieu certaines formes, les siennes; mais ce même esprit redresse naturellement ce qu'il y a de faux dans cette représentation de la pensée et convient qu'il n'y a là qu'une simple adaptation à la faiblesse de sa nature. Il en est de même de l'an-thropopathisme, assimilation de Dieu à l'homme quant au sentiment, comme si Dieu était susceptible de jalousie, de colère, de vengeance, de repentir, etc. Les religions païennes sont toutes tombées dans ce double excès; le judaïsme et le christianisme l'ont évité au point de vue de l'enseignement et comme dogme, et c'est d'une manière tout à fait symbolique qu'ils emploient le langage de l'anthropomorphisme pour faire comprendre la relation de Dieu avec l'homme par l'analogie des choses connues. S'il y a erreur dogmatique à donner à Dieu, esprit pur, une forme quelconque, l'Écriture autorise par son langage une assimilation purement symbolique et de convention. Une secte d'anthropo-morphites fit quelque bruit au siècle; ils s'appelaient aussi Audiens, du nom d'Audi us leur chef, prêtre sévère et intègre de la Mésopotamie, qui flagella un clergé corrompu; ayant été maltraité par des prêtres, il sortit de l'église avec quelques amis, se fit consacrer évêque et fut exilé par l'empereur en Scvthie où il continua de prêcher jusqu'à sa f 372. Il s'appuyait de divers passages de l'A. T., pris à la lettre, et notamment de Gen. 4, 26, pour attribuer à Dieu la forme humaine. La secte, laborieuse et pure, mais tournant à l'exagération, s'éteignit au ome siècle. ANTIDICOMARIANITES. Epiphanes appelle ainsi ceux qui, vers la fin du 4®* siècle, et sans former une secte à part, niaient la virginité perpétuelle de Marie et commençaient une sorte de réaction contre le culte de la Vierge. Ils n'étaient pas nombreux, parce que la mariolatrie n'existait encore qu'en germe. Ils eurent pour adversaires les Collyridiens, qui adoraient la Vierge et lui offraient des gâteaux, ou collyres: petite secte arabe, qui dura peu. ANTIENNE, v. Antiphones. ANTILÉGOMÈNES. C'est ainsi qu'Eusèbe, dans un fragment qui n'est pas très clair, désigne certains écrits apostoliques, reconnus comme tels par le plus grand nombre d'églises et d'écrivains, mais contestés, ou plutôt non connus de l'universalité. C'étaient 2 Pierre, 2 ou 3 Jean, Jaques et Jude, que leur caractère ou leur peu d'étendue, peut-être aussi leur contenu, avait empêché d'être aussi répandues que les autres. S'il les oppose aux Homologoumènes, reconnus de tous, il les oppose aussi aux No-tha, aux illégitimes, inauthentiques, édifiants peut-être, mais non apostoliques, tels que le Pasteur d'Hermas, les Actes de Paul, les Constitutions apostoliques, et aux écrits mauvais, entièrement rejetés, comme les faux évangiles de Pierre, de Thomas, les Actes d'André, etc. ANTINOMIANISME (opposition à la loi). Plusieurs assertions de Luther et de Mélanchton. exagérées dans la forme, contre la valeur de la loi de Moïse, contre l'A. T., et contre les bonnes œuvres, poussèrent Agricola à exagérer davantage encore, et à établir une contradiction dogmatique là où il n'y avait à l'origine qu'une succession et un développement historique. Au lieu de voir dans l'Évangile l'accomplissement de la loi, il voulut y voir son entière abolition. 11 insista sur la justification par la foi seule, et quand il entendit, 1527, les deux réformateurs, dans leurs visites d'églises, recommander aux pasteurs la lecture, l'explication et l'observation des 10 commandements, il protesta contre ce qu'il appelait une chute, leur rappela leurs pro près paroles et leur reprocha leur inconséquence. Dans une conférence tenue à Torgau, décembre 1527, on s'expliqua, Agricola maintenant que la foi doit précéder la repentance. et les réformateurs concédant que sous le nom de repentance on peut comprendre aussi la foi. Le calme succéda momentanément à la guerre, mais comme Mélanchthon l'écrivit à Jonas, Agricola paraissait plutôt vaincu que persuadé. La dispute éclata de nouveau en 1537 à l'occasion de thèses, d'ailleurs modérées et fraternelles, qu'il publia en arrivant à Wittenberg pour y enseigner comme professeur. Mais si les thèses étaient modérées, les développements en étaient passionnés. Luther y répondit par quatre conférences, plus tard suivies d'une cinquième 1559, dans laquelle il malmena Agricola en l'assimilant à MUnzer. Mais Agricola fut appelé à Berlin comme prédicateur de la cour par le duc de Brandebourg, qui travailla et réussit à réconcilier les deux amis, déc. 1540. Après la f de Luther, Flacius essaya de ranimer le débat, mais Agricola n'y prêta pas les mains. Ses ennemis renouvelèrent leurs attaques en 1562, à propos d'un sermon sur Luc 7, 37-49, mais encore sans succès. D'autres prêchèrent après lui l'antinomianisme, Amsdorf, Otton de Nordhau-sen, jusqu'au moment où la Formule de Concorde les réduisit au silence, en établissant que la loi est faite pour réveiller les consciences, et qne l'Évangile qui peut les réveiller aussi, doit en même temps les consoler en les amenant à la foi. Le protestantisme était d'autant plus obligé de combattre l'antinom, que ses adversaires ne se faisaient pas faute de lui reprocher de mépriser les bonnes œuvres. Du reste l'antin. qui n'est qne l'exagération de la doctrine évangéli-que sur l'affranchissement du chrétien, a été de tous les temps. Il y a eu des antinomiens chez les pins fervents comme chez les plus relâchés; les baptistes anglais de 1689 penchaient vers Fantinomianisme, et aujourd'hui encore plusieurs sectes en sont atteintes. Leur grande erreur est d'opposer la Loi à l'Évangile, quand l'Évangile fait le contraire. Cette question, en théorie, peut n'être parfois qu'une dispute de mots entre chrétiens qui s'entendent au fond; dans la pratique elle peut avoir de dangereuses conséquences. ANTIOCHE, v. Dict. Bibl. Cette ville célèbre. située sur l'Oronte en Syrie, devint de bonne heure comme une seconde capitale de la chrétienté, et servit de centre aux fidèles après que Jérusalem eut été détruite. Elle eut en outre l'avantage, comme métropole, d'être plus libre dans ses allures et dégagée de l'influence judaïsante. Elle compta parmi ses évêques Ignace et Chrysostome et vit plusieurs conciles se réunir dans ses murs; en 252 contre les no-vatiens, trois au sujet de Paul de Samosate, un en 341 au sujet des controverses ariennes (qui confirma les décrets de Nicée, moins le mot homoousias), etc. Ses théologiens, dans les discussions monophysites, s'appliquèrent à trouver un moyen terme, en distinguant les deux natu-res, mais sans les séparer. L'invasion de l'islamisme mit fin, 637, à l'influence qu'Antioche exerçait sur la chrétienté. A l'époque des croisades, Boëmond de Tarente s'en fit une principauté. Antioche est peut-être après Jérusalem et Damas la ville qui a été le plus souvent détruite et qui a le plus souffert de la peste, de la famine, de l'épée, du feu et des tremblements de terre; l'un des derniers et des plus violents a eu lieu le 13 août 1821 et a complété l'œuvre des siècles. Antakieh ne compte plus guère aujourd'hui que 8 à 10,000 habitants. — On désigne sous le nom d'École d'Antioche, ou plus exactement École de Syrie, une école célèbre, fondée au commencement du 4^6 siècle à Antioche et qui ne tarda pas à former autour d'elle en Syrie d'autres institutions semblables, notamment à Edesse. C'étaient des théologiens qui se livraient avec zèle à l'étude des saints Livres, et dont la tendance exégétique était également éloignée d'un littéralisme étroit et de la manie allégorique de certains commentateurs. Une critique indépendante et la distinction des deux natures en Christ caractérisent surtout cette école, dont Dorothée et Lucien furent les chefs, et qui compta parmi ses disciples Théodore d'Héraclée, Eusèbe d'Emèse, Cyrille de Jérusalem, Apollinaire de Laodicée, Ephrem d'Edesse, Diodore de Tarse, enfin Chrysostome, Théodore de Mopsueste et même Kestorius. Il faut distinguer encore dans l'histoire de l'Église une autre Antioche, sur le Méandre, en Carie; résidence épiscopale, où se réunirent en 365 et 378 deux synodes relatifs à l'aria -nisme. ANTIPHONES, chants alternés, ou double chœur, dont le second reproduisait comme un écho, mais dans un autre ton, ce qu'avait chanté le premier. C'est de là probablement que s'est formé le mot d'antienne. On attribue d'ordinaire à Ambroise l'introduction des antiphones, mais à tort. Ce mode était plus ancien, déjà connu des Grecs, et presque certainement des Hébreux, comme l'indique le contenu de plusieurs psaumes. Ambroise le réforma, le régularisa, et le vulgarisa. Il ne faut pas confondre les antiphones avec les répons; quoique l'effet musical fût quelquefois le même, le sens ne l'était pas; l'un était une répétition de la pensée, l'autre en était le complément. ANTITACTES, nom commun à plusieurs sectes gnostiques, basilidiens, valentiniens, etc. ainsi qu'aux carpocrates qui, regardant la matière comme la source de tout mal, ne pensaient pas pouvoir mieux lui témoigner leur mépris qu'en tuant le corps par tous les excès possibles et en foulant aux pieds, sciemment et volontairement, la loi qui était l'œuvre du démiurge, pour bien constater que leur esprit était au-dessus de la chair. ANTITRINITAIRES, v. Unitaires. ANTOINE, !• célèbre religieux qui fut, après Paul de Thèbes, l'initiateur de la vie monastique. Né 251 à Coma, d'une riche famille de la Thébaïde, il ne reçut qu'une culture incomplète, sa tendance contemplative l'ayant toujours dé^ tourné de l'étude du grec. Mais il goûtait la Parole de Dieu et savait même la lire dans le grand livre de la nature. Ayant entendu un jour l'histoire du jeune homme riche, il se dépouilla de tous ses biens et n'en garda que ce qui lui était strictement nécessaire pour vivre, lui et sa sœur. Une autre fois il entend ces paroles: Ne vous 4 inquiétez de rien; il se décide alors à se dépouiller de ce qui lui reste, confie sa sœur à une association de jeunes chrétiennes, et va s'établir seul en face de la maison paternelle, vivant de son travail et donnant aux pauvres le surplus de ce qu'il gagnait. Mais cette espèce d'oisiveté relative avait ses dangers et toutes les tentations l'assaillirent, sans parler môme de l'orgueil spirituel. Il se vit entouré de dénions sous diverses formes et se battit avec eux. Il crut remédier au mal par plus d'ascétisme encore et se retira dans une grotte solitaire au pied d'un rocher, où il pratiqua un jeûne excessif, mais les démons l'y maltraitèrent tellement qu'on le rapporta presque mort dans son village. Il vécut ensuite dix ans dans les ruines d'un vieux château de montagne, ou de saines occupations mirent fin au règne des démons. Il était devenu le conducteur spirituel d'un grand nombre de jeunes ascètes, dont les cellules peuplaient le désert autour de lui, et l'on accourait de tous côtés pour l'honorer ou pour le consulter. Il reculait toujours plus avant dans le désert, mais la foule l'y suivait, on lui amenait des malades pour qu'il les guérit et il prêchait avec force. Dans les occasions solennelles et importantes il reparaissait dans le monde; on le vit en 311 à Alexandrie, lors des persécutions de Maximin, exhortant les fidèles à persévérer; puis en 325 il apparut de nouveau pour combattre l'arianisme. Sa présence produisait toujours un grand effet. Respecté des païens, et même honoré des empereurs, il f 356 à l'âge de 105 ans, n'ayant cessé de croître en renoncement à lui-même et en humilité. Ne nous affligeons pas de nos fautes, disait-il, comme si nous n'étions pas rachetés, mais soyons toujours joyeux, afin que le Malin qui nous fait broncher s'enfuie. Sévère envers lui-même, il était indulgent pour les autres. Avant de mourir il ordonna de tenir secret le lieu de sa sépulture, pour enlever tout prétexte à une recherche superstitieuse de ses restes. On a de lui 7 lettres, une Règle et des Sermons. Plusieurs de ses disciples fondèrent des couvents en Libye et dans la Haute-Égypte; l'un d'eux, Hilarion de Tamata, en fonda un à Gaza en Palestine. La vie monastique, importation de l'Orient, était décidément installée dans l'Église chrétienne. — La vie d'Antoine a été écrite par Athanase, qui a reproduit sans les discuter les faits et les légendes qu'il avait recueillis, s'en rapportant peut-être au sens critique de ses lecteurs pour faire la part du réel et de l'imaginaire, de l'objectif et du subjectif, dans la description des luttes du saint contre les démons; il est possible cependant qu'il ait admis lui-même la réalité de ces combats. 2o Antoine, dit de Padoue, parce que ses reliques sont conservées dans cette ville, est l'un des plus illustres successeurs de François d'Assise. Né à Lisbonne 1195 de parents nobles, il reçut une éducation distinguée et se fit religieux dès l'âge de 15 ans. Après une tentative man-quée pour l'évangélisation des Maures d'Afrique, il fut poussé par une tempête en Italie où il se fit bientôt remarquer par sa science comme théologien et par ses talents comme prédicateur. La légende porte même que les poissons se dressaient près du rivage pour l'entendre. Successivement professeur à Bologne, Toulouse, Montpellier et Padoue, il finit par se vouer uniquement à la prédication. Il s'opposa à l'adoucissement de la règle de saint François, que le second général de l'ordre, Élie, damandait d'accord avec un certain nombre de custodes. Provincial de la Romagne, il renonça à ces fonctions dans ses dernières années et f Padoue 1231. Il a laissé quelques sermons et une Concord. morale de la Bible, de peu de valeur. 3° Antoine de Lebrixa, Andalousie. 4444-1522, littérateur espagnol, un des plus utiles collaborateurs de la Bible polyglotte du cardinal Ximénès. 4° Antoine (Marc-) de Dominù, né 1556 à Arbe, Dalmatie; de la famille des Théobald de Plaisance, étudia chez les jésuites de Padoue et fut employé par eux comme professeur de mathématiques et de philosophie. On dit même qu'en dépit du cardinal Aldobrandini, il se lit secrètement recevoir membre de l'ordre. Il fut nommé évêque de Segni, archev. de Spalatro, primat de Dalmatie, par l'influence du cardinal Borghèse, qui désirait l'éloigner de Rome où il était trop intime avec plusieurs grandes dames. Les négociations entre Rome et Venise l'amenèrent à étudier de plus près l'histoire de la constitution de l'Église. La rencontre qu'il fit de deux Anglais, lui inspira des doutes sur les doctrines de Rome. Assez mal reçu par le pape, censuré par l'inquisition, il partit pour l'Angleterre, où il publia une brochure latine, avec l'exposé de tout ce qu'il ne croyait pas: sacrifice de la messe, transsubstantiation, purgatoire, confession, culte des reliques, etc. Il abjura 1616 dans la cathédrale de Saint-Paul, et Jaques 1er lui donna de riches bénéfices. Toutefois on ne se fiait pas à lui. L'archevêque de York étant mort, il postula la place 1618, et ne l'ayant pas obtenue, il quitta l'Angleterre. Il se refit catholique en traversant Bruxelles, dut faire pénitence à Saint-Pierre de Rome, la corde au cou, reçut l'absolution après de rudes épreuves, mais resta toujours suspect d'indifférentisme ecclésiastique. Arrêté de nouveau 1623 pour quelques paroles imprudentes, il fut enfermé au château Saint-Ange, où il f 1624, vraisemblablement assassiné. Son corps fut traîné dans les rues, brûlé par le bourreau, et ses cendres jetées dans le Tibre. On a de lui un Traité de la république chrétienne, contre le pape; une édition anglaise de FHist. du conc. de Trente, de Sarpi; quelques opuscules, et un curieux traité de 1611 De radiis visu* et lucis, dans lequel, au milieu de beaucoup d'erreurs, il émet le premier une juste explication de l'arc-en-ciel. 5° L'ordre de Saint-Antoine. Vers 1070 sévissait en France une maladie que le peuple avait baptisée du nom de Feu sacré (sacer mor-bus), ou feu de Saint-Antoine. Plus tard, un gentilhomme du Dauphiné, Gaston, voyant son fils atteint de ce mal, se rendit en pèlerinage à Saint-Didier, près Vienne, Provence, où l'on conservait les reliques du saint (?), et fit vœu, si son fils se rétablissait, de consacrer au saint toute sa fortune pour la fondation d'un ordre spécialement chargé de soigner ce genre de maladies. L'enfant guérit, le père tint sa promesse, ouvrit un hôpital, obtint le concours de huit compagnons, fut autorisé par Innocent III à bâtir une église 1208; Honoré III leur permit de prononcer des vœux 1228, et Boniface VIII les reconnut comme chanoines réguliers sous la règle de saint Augustin. Ils portaient une robe noire, semée de T bleu de ciel, cf. Ezéch. 9, 4, et une petite clochette au cou lorsqu'ils faisaient la quête. Le peuple leur offrait chaque année un cochon, animal que l'on croyait, à cause de ses rapports avec les démons (Matt. 8), être plus particulièrement consacré à saint Antoine. L'ordre se répandit en Allemagne, en France et en Italie; mais à l'époque de la Réformation il était tombé en un complet discrédit; il se fondit au 45"* siècle dans l'ordre de Malte et fut supprimé avec lui, 1789. ANTONIENS, pelite secte bernoise, ainsi nommée d'après son fondateur Antoine Unternâhrer, né 1761 dans l'Entlibuch, Lucerne, et élevé catholique. De marmiton il voulut devenir peintre; puis menuisier, marchand ambulant, médecin. enfin théologien. Il se prenait pour une seconde incarnation de Dieu, s'établit à Amsol-dingen près de Thoune, 1799, prêcha toutes les libertés, enseigna que le seul mal était de distinguer entre le bien et le mal; que le seul bien était l'amour, surtout l'amour des femmes, composa une quinzaine de brochures, la plupart anonymes, se fit mettre plusieurs fois en prison ou exiler, et f à Berne 1824. Il avait réuni autour de lui quelques disciples, surtout dans les cantons de Berne, Lucerne. Argovie et Zurich, mais la secte lui survécut peu. ANTCKNIN 1° le Pieux, né à Lanuvium l'an 36, adopté par Adrien, et son successeur au trône 138-161, fut un des meilleurs empereurs romains, et mérita d'être surnommé le Père de la patrie. Il disait qu'il aimait mieux sauver un citoyen que voir périr mille ennemis. Les chrétiens eurent aussi part aux douceurs de son règne, quoique le fanatisme des prêtres réussit encore parfois à faire parmi eux de nouvelles victimes, entre autres l'év. Publius d'Athènes. Il les défendit dans un décret remarquable contre l'absurde imputation d'être responsables des fléaux publics, tremblements de terre, inondations, famines, etc. C'est vers la fin de son règne que parut l'Apologie de Justin martyr. II eut pour successeur Marc-Aurèle. 2® Antonin, né 1389, dominicain 1405, bientôt prieur, puis vicaire-général, s'occupa de réformes, travailla au concile de Florence 1439 à la réunion avec les grecs, fut nommé arche v. de cette ville en 1446 et f 1459. Canonisé 1523. Distingué par son intelligence et par sa largeur d'esprit, il ne le fut pas moins par son caractère et sa générosité. On a de lui un Manuel de théologie morale, une Summa confessionalis, et un Abrégé d'histoire où il reconnaît entre autres que la donation de Constantin n'est pas à l'abri de toute contestation. 3° v. Marc-Aurèle. APELLÈS, v. Marcion. APHTHARTODOCÈTES, ceux qui enseignaient l'incorruptibilité du corps de rChrist. une des nombreuses sectes issues du monophy-sitisme; on les nommait aussi julianistes, du nom de Julien, évêque d'Halicarnasse, qui avait suggéré cette idée. L'emp. Justinien I les déclara orthodoxes, mais sa f 565 mit fin à la secte et à la controverse. APION, Égyptien de l'oasis, qui passe pour un Alexandrin parce qu'il étudia à Alexandrie sous Apollonius ,et Didyme. Il vint à Rome et enseigna sous Tibère, Caligula et Claude. C'était un fort travailleur, versé dans la littérature grecque, éloquent, bon dialecticien, mais très vaniteux. Il se vantait d'assurer l'immortalité de ceux à qui il dédiait ses livres, et tous sont perdus, il n'en reste que des fragments conservés pour la plupart dans les écrits de ses adversaires. Son livre contre les juifs a provoqué la réfutation de Josèphe contra Apionem, qui seule a sauvé son nom de l'oubli. Il avait aussi écrit sur Homère, et une Hist. d'Égypte. APOCRISAIRES, délégués officiels des patriarches auprès des empereurs, et leurs intermédiaires naturels pour les communications et présentations, depuis l'époque où les empereurs devenus chrétiens se crurent le droit d'intervenir dans les questions d'organisation ecclésiastique. L'év. de Rome eut lui-même son apocri-saire à Constantinople pendant un aertain temps. APOLINAIRE, Claude, évêque d'Hiérapolis en Égypte, contemporain de Méliton, apolo-gète et adversaire du montanisme, 160-80; écrivain fécond, d'une belle culture hellénique. De tous ses ouvrages qui furent fort répandus: aux Grecs, aux Juifs, de la Vérité, de ia Piété, Apologie adressée à Marc-Aurèle, il ne reste plus que des fragments incomplets. Comme il est fait mention dans l'Apologie de la pluie accordée à la Légion foudroyante, et qui sauva l'armée de Marc-Aurèle, 174, l'Apologie est nécessairement postérieure à cette date. APOLLINAIRE 1<> VAncien, né à Alexandrie de parents païens, vers la fin du 3n»e siècle. D'abord rhéteur et grammairien, il embrassa le christianisme. Après avoir professé à Béryte et à Laodicée, il fut ordonné prêtre dans cette dernière ville et s'y maria. Ses relations avec des rhéteurs païens le firent exclure de l'Église, mais il ne tarda pas à y être réintégré après avoir fait pénitence. Il écrivit de nombreux ouvrages en vers et en prose, qui presque tous sont perdus. 2® le Jeune, fils du précédent, né à Laodicée, surpassa son père. Il enseigna successivement à Béryte et à Laodicée, puis fut diacre dans cette dernière ville 335. Ses rapports avec le rhéteur païen Libanius et avec Epiphane le firent exclure de l'Église comme son père, mais il fut bientôt réintégré comme lui. Plus tard il eut encore des démêlés avec son évêque à propos de ses relations avec Athanase. Apollinaire avait pris une part active à la rédaction du Symbole de Nicée. Quand l'arianisme triompha, il partagea la disgrâce d'Athanase, mais cela dura peu. En 362 il fut nommé évêque de Laodicée. Julien l'Apostat était alors sur le trône, et avait enlevé aux chrétiens le droit d'enseigner dans les écoles de grammaire et de rhétorique; pour subvenir à cet inconvénient, les deux Apollinaire écrivirent des livres élémentaires, des Dialogues, des Hymnes, des Odes, etc. sur des sujets d'histoire sainte ou des sujets profanes à l'usage des écoles. Sozomène compare ces œuvres aux chants d'Homère. Plus tard, niant qu'il y eût rien d'humain dans l'âme de Christ, il fut accusé de sabellianisme et condamné par plusieurs conciles, notamment par celui de Rome 381. Il mourut fort avancé en âge, vers 390. Littérateur, poète, savant et éloquent, instruit en hébreu, Apollinaire écrivit beaucoup, entre autres des ouvrages d'exégèse. De toutes ses œuvres il ne reste qu'une Interprétation des Psaumes, en vers, et une tragédie, le Christ souffrant (Paris 1552 et 1580). 3° Sidoine Apollinaire, auteur et poète latin, né 431 à Lyon, d'une des principales familles de cette ville. Il se destina d'abord à la carrière militaire, fut en grande faveur à Rome et protégé par l'empereur Avitus son beau-père, ainsi que par Majorien et Anthémius; devint successivement préfet du prétoire, patrice, sénateur, et remplit en plusieurs circonstances les fonctions d'ambassadeur. En 472, quoique laïque et marié, il fut nommé évêque de Clermont-Fer-rand; après avoir refusé quelque temps, il se décida cependant à accepter. En 475 les Goths attaquèrent Clermont; Sidoine se resouvint de ses talents militaires et les mit vaillamment an service de la ville, qui cependant fut prise et détruite, f entre 482 et 488. Il a laissé 9 livres de Lettres, précieuses pour la connaissance des mœurs ecclésiastiques du temps, et 24 poëmes, panégyriques, épithalames, etc. Ses œuvres ont été trad., assez mal. par Sauvigny, 1786, et mieux plus tard, 1836, par Grégoire et Col-lombet. H. B. APOLLONIA, vierge; diaconesse; probablement d'un certain âge, qui souffrit le martyre 249 à Alexandrie pendant les persécutions de Décius. Connue par une lettre de Denys à Fabien d'Antioche. Elle reçut tant de soufflets et si violents, que ses dents tombèrent. Puis conduite devant le bûcher, on la menaça de l'y jeter, si elle ne maudissait pas son Christ. Après avoir paru se recueillir quelques instants, elle se leva et se précipita elle-même dans le feu. Il est probable qu'elle redoutait des outrages pires que (a mort. Quelques écrivains ont voulu établir par cet exemple, qu'il était permis aux chrétiens de se soustraire aux supplices par le suicide dans les temps de persécution. Augustin croit au contraire qu'Apollonia a pu agir ainsi par une impulsion secrète de l'Esprit, sans que cela puisse faire règle pour d'autres. L'exemple de Samson ne prouve pas davantage. Les catholiques invoquent Apollonia, ou sainte Apolline, contre les maux de dents. APOLLONIUS 1° de Thyane, mage, philosophe et thaumaturge célèbre de la fin du 1er siè-cle, né à Thyane en Cappadoce, de la secte de Pythagore, voyagea beaucoup, visita l'Euphrate, Babylone et les Indes, puis la Grèce et l'Italie, s'instruisant partout, arrachant à chaque peuple quelques parcelles de vérité. Il faisait des cures merveilleuses, et on lui attribuait le don de seconde vue. Chassé de Rome par Néron, il retourna en Orient, se lia avec Vespasien, ouvrit à Éphèse une école pythagoricienne, et l'on raconte qu'il s'interrompit au milieu d'une de ses leçons pour dire: t Courage, Stephanus, tue le tyran. • C'était le moment même où Domi-tien périssait à Rome. Il f à Éphèse en 97 dans un âge avancé. Son ami fidèle Damis a écrit ses mémoires, qui ne parurent d'ailleurs, par les soins du sophiste Flav. Philostrate, qu'un siècle plus tard, singulièrement ornés de fables et de commentaires incroyables, et certainement dans une intention polémique. Son ascétisme, se» connaissances prodigieuses, ses actes, les persécutions qu'il eut à subir, sa doctrine, sa mort même, qui est plutôt décrite comme une assomption, sont racontés de manière à établir forcément un parallèle avec Jésus-Christ. Baur a voulu y voir un premier essai de syncrétisme, comme si le rhéteur païen avait voulu établir qu'il y a du bien dans toutes les religions, et des grands hommes chez les païens comme chez les chrétiens. Rieckher pense au contraire qu'il y a eu là une attaque indirecte contre le christianisme, et que l'auteur s'est proposé en glorifiant Apollonius de détourner de Christ l'attention des masses en leur présentant le spectacle d'un païen possédant toutes les vertus et tous les pouvoirs. 2° Écrivain du 2"* siècle, qui écrivit contre le montanisme; cité par Eusèbe et par Jérôme. 3° Sénateur distingué, respecté des chrétiens de Rome à cause de sa culture scientifique et philosophique, prononça un discours en leur faveur devant le sénat, et f 186 martyr sous l'empereur Commode. APOLOGÈTES, Apologétique, Apologie.—Dès les premiers temps du christianisme, la doctrine et les faits chrétiens ont été un signe auquel le monde devait contredire, Luc 2, 34. On l'a attaqué dans son berceau, on l'a poursuivi jusqu'à la croix, et pour cette guerre impie toutes les armes ont paru bonnes, la violence et le mensonge, la moquerie et la raison. De bonne heure aussi les disciples comprirent que c'était leur devoir de défendre leur foi et d'en aflBrmer les motifs. Le mot dont se sert saint Paul Act. 22, i, signifie défense; il se retrouve 22, 16. et ailleurs comme verbe dans le même sens. C'est le même mot aussi qui est employé Luc 12, 11. 21, 14 pour: se défendre devant les tribunaux. Enfin l'apôtre recommande aux fidèles 1 Pier. 3, 15 d'être prêts « pour toute apologie. » Dans un sens les chrétiens doivent donc être tous des apologètes, mais il est clair aussi que cette tâche incombe plus particulièrement à ceux que leurs dons, leurs talents et leur position a davantage qualifiés pour cela. Le mot d'Apologie désigne la défense proprement dite, par parole ou par écrit, et celui d'Apologétique désigne la science qui expose les principes d'après lesquels, suivant les temps et les circonstances, la défense doit être entreprise et conduite. La défense dépendra naturellement toujours du genre des attaques; il pourra même survenir tel cas où le chrétien se rappellera qu'il ne faut pas jeter les perles devant les pourceaux; mais en général la réponse est un devoir. Les premiers chrétiens n'y ont pas manqué, et comme les accusations étaient politiques et entraînaient après elles des persécutions, la défense le fut de même, et s'appliqua à prouver le caractère inoffensif des chrétiens et leur soumission aux lois. Plus tard on attaqua le côté moral du christianisme et ses principes; les calomnies abondèrent; il fallut les repousser. Il fallait se défendre tantôt contre les juifs, tantôt contre les païens et chaque fois le point de vue changeant, la défense devait se placer sur un terrain différent. Vis-à-vis des juifs en particulier, il fallait prouver que le Christ était bien le Messie annoncé par l'A. T., et les apologètes dépassèrent parfois le but par une exégèse pressurée et par l'abus de l'interprétation allégorique. Il reste peu de chose des exégètes de la primitive Église. Eusèbe cite une Adresse de Quadratus et d'Aristide à Adrien; des fragments de Miltiade, Méliton de Sardes et Claude Apolinaire sous Marc-Aurèle. L'époque d'An-tonin-le-Pieux fut féconde en écrits de ce genre; ainsi les deux Apologies de Justin Martyr, Tatien le Syrien, Athénagore, Théophile d'Antioche, Hermias; en Occident Tertullien, Minutius Félix, Cyprien; en Afrique Arnobe et Lactance. Plus tard le côté scientifique commence à prévaloir; Origène répond à Celse, Mé-thodius à Porphyre, Eusèbe de Césarée à Hié-roclès. L'apostasie de Julien amène dans la lice Cyrille d'Alexandrie et Grégoire de Naziance. Puis viennent Théodoret, Augustin, Orose; au 9m© siècle Agobard de Lyon, au 13m® Raymond Martin; puis Anselme, Savonarole, Vivès, jusqu'au moment où la Réformation, en créant un esprit nouveau, imprime à l'apologétique un nouveau caractère, dont Duplessis-Mornay. Amyraut, Grotius, Pascal sont les représentants les plus remarquables. Aux 17et 18™* siècles les déistes, les naturalistes, les philosophes, les libres-penseurs, sont combattus en Angleterre par Boyle, Richard Baxter, Clarke, Locke, Le-land, Lardner, Addison. etc.; en France par A. Turretin, Abbadie, Guénée, Jaquelot, Ver-net, Bonnet et même Rousseau. De nos jours enfin les attaques les plus diverses ont été repoussées par des hommes et par des arguments également divers et de valeurs bien différentes, depuis Châteaubriand jusqu'à Erskine, Chal-mers, Sack, Schleiermacher, Tholuck, Bruch, Frayssinous et Vinet. — Le nom d'apologètes est cependant employé d'une manière plus spéciale en parlant des pères des premiers siècles, v. Viguié. APOSTASIE, abandon de la foi, du latin apostatare, violer, transgresser. Délit purement ecclésiastique, qui se punissait naturellement par l'excommunication, et quelquefois suivant les temps et Jes circonstances, exposait le délinquant à des peines plus graves et plus matérielles, de la part soit de l'Église, soit même de l'État. Les catholiques romains donnent aussi le nom d'apostats (a supererogatione) aux religieux qui abandonnent leur ordre sans autorisation et aux prêtres qui rentrent dans la vie laïque (Talleyrand, etc.) L'apostasie a fide (de la foi) a toujours été considérée comme la plus grave, et dans les premiers temps de l'Église, elle l'était en effet par son caractère, le reniement public du nom de Christ, et par ses conséquences, le retranchement définitif de la communion de l'Église, au moins jusqu'à l'article de la mort. 6n comprend qu'à une époque de persécutions, l'attention fût davantage éveillée sur ce point; les païens tenaient à constater avec éclat leur victoire, et l'Église ne tenait pas moins à constater sa réprobation; le nom d'Apostat était ainsi devenu une injure. Les passages de l'Écriture qui se rapportent à ce sujet sont surtout Hébr. 3,12. 6,4-9.10,26-29. Pier. 22, 15-21. Luc 12, 9. 2 Jean 9. On distinguait ceux qui. devenus chrétiens, retournaient au judaïsme, et ceux qui retombaient dans le paganisme; on distinguait aussi ceux qui désavouaient le Livre, ceux qui sacrifiaient aux idoles, et ceux qui allaient jusqu'à maudire Jésus-Christ... mais on comprend que ces nuances dans l'apostasie dépendaient beaucoup plus des bourreaux que des victimes. De grandes controverses eurent lieu, surtout au 3m<> siècle, sur la conduite à tenir avec les apostats, qu'on appelait alors fajm,les tombés; de nos jours, et dans les pays dits chrétiens, l'apostasie n'a plus de raisons pour s'afficher, ni par conséquent l'excommunication pour sévir; il n'y a guère que l'Église catholique qui recoure encore de temps en temps à ce procédé, et seulement contre des prêtres qui l'abandonnent, ou contre des gouvernements qui compromettent ses intérêts. mais même alors l'excommunication n'a pas de suites fâcheuses, à moins que l'Église ne soit maitresse absolue. L'Écriture sainte annonce pour les derniers temps une apostasie finale et générale, l'abandon de la foi par ceux mêmes qui en auront conservé les apparences, et le triomphe momentané d'une incrédulité prodigieuse sous le règne de l'Antéchrist. APOSTOLIQUE (Symbole), ou Credo. Vénéré dans l'ancienne Église au point qu'Ambroise et Rufin lui assignent pour auteur, sinon Jésus-Christ lui-même, du moins les douze apôtres, ce vieux document de la foi chrétienne s'est formé peu à peu. Il eut pour point de départ la formule du baptême, la foi aux trois personnes de la Trinité, et il se développa au fur et à mesure que le besjin s'en faisait sentir, soit comme explication, soit dans un intérêt polémique au point de vue des questions contemporaines. C'était la règle de la foi; les pères la reproduisent souvent, mais avec de nombreuses variantes. L'art, relatif à la Rémission des péchés y est introduit en vue des lapsi qu'un parti trop rigoureux refusait de réadmettre dans l'Église. D'autres articles visent les gnostiques. On croit que c'est saint Augustin qui rédigea le Credo sous sa forme actuelle, sauf la Descente aux enfers et la Communion des Saints, qui n'y furent insérés que plus tard, vers la fin du 5®« siècle, v. Viguié, Coquerel et Nicolas. Incomplet, quant à la valeur de la Bible et à l'œuvre rédemptrice de J.-C.,ce symbole est admis par l'Église catholique et par la plupart des EgL protestantes comme le résumé le plus ancien et le plus authentique des affirmations et de la foi chrétiennes. APOSTOLIQUES (Canons). On entendait par là d'une manière générale les règles laissées par les apôtres, telles qu'on les trouve dans leurs écrits et dans la tradition; puis, dans un sens plus restreint certains recueils, ou collections^ où ces règles étaient récapitulées. L'un de ces recueils, comprenant 85 règles, est spécialement désigné sous ce nom, tantôt à part, tantôt comme appendice des Constitutions apostoliques. Il est cité pour la première fois dans les actes du concile de Constantinople 394, puis à Éphèse 431 et à Chalcédoine 451. Il était généralement reconnu à la fin du 5me siècle. L'Église grecque l'admet comme authentique, et Jean de Damas n'est pas loin de lui donner la même autorité qu'aux écrits de Paul. L'Église d'Occident n'a reconnu comme apostoliques que les 50 premières de ces règles, et encore difficilement. Ces canons forment un corps à peu près complet de discipline ecclésiastique, à l'usage du clergé. On a lieu de croire que c'est en Syrie que la collection s'est formée. D'autres collections, plus anonymes encore et postérieures, jouissent d'une beaucoup moins grande autorité. APOSTOLIQUES (Constitutions), en grec Didascnlia, enseignements; recueil de maximes et de directions ecclésiastiques, en huit livres; n'est mentionné pour la première fois d'une manière positive que par Epiphane. vers 400; une fois dès le dernier des canons apostoliques, plusieurs fois dès le 6m« et le siècle. Ce recueil n'a jamais été reconnu dans l'Église d'Occident, surtout à cause des interpolations dont il fourmille. L'Église grecque a été moins difficile, mais c'est dans l'Église épiscopale d'Angleterre qu'il a trouvé, avec quelques réserves, le plus de faveur. Stapleton, Pearson, Whiston le font remonter, les uns aux apôtres, sinon à J.-C. lui-même, les autres à Clément de Rome, et presque tous le regardent comme antérieur au concile de Nicée. Les six premiers livres, d'après Rothe, forment un tout et constituent la base du recueil; ils auraient été écrits par un judéo-chrétien, peut-être un ébionite, en Syrie, vers la fin du 3*ne siècle. Le 7 me livre formerait également un tout distinct; il donne des directions pour la vie chrétienne et l'action de grâces; on y trouve quelques traces de sabellia-nisme, qui mettraient sa composition entre 300 et 325. Enfin le 8™ livre, qui a pu dans l'origine servir de rituel aux évêques, renferme divers formulaires liturgiques, et le style en est plus précis, plus bref, que celui des livres précédents: les chap. 4 et suiv. se retrouvent à part dans plusieurs mss. sous le titre de: Directions des saints apôtres touchant l'ordination, par Hippolyte (évêque vers la fin du 2m« siècle). Mais il est difficile de dire si l'auteur des Constitutions s'est approprié l'ouvrage d'Hippolyte, ou si c'est au contraire un extrait du 8®« livre qu'on a publié plus tard en le plaçant sous le patronage d'Hippolyte. On possède, en plus ou inoins bon état, des versions syriaques, arabes et éthiopiennes des premiers livres des Constitutions. La meilleure édition est celle de Cotelerius, Amsterdam, 1724. APOSTOLIQUES (Frères), secte de la fin du 13m« siècle. Elle prit naissance dans la Haute-Italie, et resta inoffensive aussi longtemps que l'Église s'abstint de la persécuter. Gérard Sega-relli son fondateur, était d'Alzano. près Parme, et ouvrier. Mécontent de tout ce qu'il voyait dans le monde et dans l'Église, et probablement aussi mauvais ouvrier, il voulut entrer dans l'ordre des franciscains, mais fut refusé. Un tableau, qui représentait les apôtres nu-pieds et nu-tête, le frappa et il se décida à imiter la vie pauvre des premiers disciples; il réussit même à s'adjoindre quelques compagnons, et dès 1260, ayant liquidé le peu qu'il avait, il se mit à parcourir le pays en prêchant la repentance. L'évêque de Parme le fit arrêter en 1280, mais n'ayant rien trouvé d'hérétique en lui, il se contenta de le faire surveiller comme maniaque; en 1286 il le bannit de son diocèse. Honoré IV interdit toutes les réunions qui ne seraient pas spécialement autorisées, et Nicolas IV. 1290, renouvela cette défense. De ce moment date l'opposition avouée de Segarelli contre la hiérarchie et contre Rome qu'il traite de Babylone; le pauvre homme n'était pas de taille à lutter. Arrêté en 1294, il ne put se sauver qu'en se rétractant: il fut brûlé comme relaps en 1300. Son œuvre fut continuée parDolcino, q. v., intelligence beaucoup supérieure, et survécut même à ce dernier, puisqu'on voit des synodes les condamner, à Lavaur, Provence 1368, et Narbonne 1374. Cette secte, qui avait une tendance plutôt morale que théologique, s'allia plusieurs fois avec les fraticelles et les béghards; des manifestations du même genre sont fréquentes au moyen APOTRES (Symbole des), v. Apostoliq. APPEL, moyen de droit accepté dans l'Église catholique, avec effet suspensif. C'est en 347, au concile de Sardique, et sur la proposition des évôques Osius et Gaudence, qu'il fut décidé pour la ire fois qu'un évêque condamné pourrait en appeler au primat de Rome. Cette décision ne fut cependant pas admise généralement. En 404 la faculté d'appel fut restreinte aux causes majeures, mais étendue en ce sens que ce n'étaient pas les évêques seuls qui avaient le droit d'en appeler, mais toutes les personnes qui se croyaient lésées. Plusieurs passages du faux Isidore établissent que les évêq. peuvent en appeler au pape pour tout; qu'ils ne peuvent être jugés que par le pape et non par des tribunaux épiscopaux pour les choses graves; que les actions intentées contre les évêques, à propos de quoi que ce soit, grave ou non grave, ne peuvent être jugées que par le pape; enfin, qu'il peut être fait appel au pape par tout le monde et à propos de n'importe quelle cause; en un mot, que si le pape n'était pas nécessairement le juge dans toutes les causes, il était certainement le juge en dernier ressort. Ce fut la règle dès le 12®* siècle; Alexandre III et Innocent III la confirmèrent et la développèrent. Aussi le nombre des appels à Rome alla tellement en augmentant, que l'excès amena une réaction; les conciles de Constance et de Bâle s'appliquèrent à restreindre les cas d'appel, sans diminuer l'autorité du saint-siège, et le concile de Trente a nettement fixé la législation moderne sur ce point en décidant: d'abord, qu'il n'y aurait recours à Rome que pour des sentences rendues, et non pour des causes pendantes; puis qu'il n'y aurait appel que pour des questions graves, causœ majores; le reste devait être jugé par les évêques, par des légats ou par des tribunaux ecclésiastiques provinciaux. Ce sont les prétentions du moyen âge, mais régularisées. Mais les États de l'Europe, catholiques aussi bien que protestants, ont depuis longtemps, et même avant l'empereur Joseph, mis fin à cet ordre de choses en établissant leurs tribunaux civils et nationaux et en interdisant tout appel à Rome. Aujourd'hui ces appels n'ont plus de valeur légale et n'ont de signification que celle que leur donnent volontairement ceux qui y recourent. — VAppel comme d'abus, qui date de saint Louis, est le recours au roi ou au parlement contre une sentence ecclésiastique; il n'a pas de sanction et n'est qu'on simple désaveu sans portée. APPELANTS, v. Acceptants. APPROBATION de livres. Le concile de Trente, reproduisant un décret du 5® de Latran 1512. a décidé que, sous peine d'amende et d'excommunication, aucun livre de théologie ne serait imprimé sans l'autorisation de l'évêque du diocèse. Cette règle subsiste encore et a été étendue à tous les livres sans distinction. Les religieux des différents ordres doivent soumettre leurs livres à leur général. L'autorisation est toujours indiquée sur le titre de l'ouvrage. Il y a à Rome un Conseil d'approbation, comme il y a une Congrégation de l'Index. Les Églises protestantes n'ont rien de pareil. AQUAVIVA (ou Acquaviva), Claude, né en octobre 1543, fils du prince Jean-Antoine Aquaviva, duc d'Atri, et d'Isabelle Spinelli; élu le 19 février 1581 général des jésuites. D'un caractère souple mais énergique, il vit son ordre atteindre à sa plus haute prospérité matérielle, en même temps qu'il présida au commencement de sa décadence morale. La discorde était à l'intérieur. L'Espagnol Mariana soutenait la doctrine du régicide. Il combattait aussi la tyrannie du général et des supérieurs de l'ordre. Aquaviva le condamna en défendant toute discussion sur le meurtre des tyrans. Les missions étrangères s'étendirent considérablement sous son administration, mais sans rien produire de durable. Il eut à se défendre contre les franciscains et les dominicains, et en vint à bout à force d'habileté, d'intrigues et de persévérance. On a de lui l'ordonnance dite Ratio studiorum. où il régla les études, f 1615. AQUILA Gaspard (français Aigle), né 7 août 1488 à Augsbourg, dont son père, Léonard Ad-ler, patricien, était syndic. Après de bonnes études il parcourut l'Italie pour voir ses hommes célèbres, rencontra Érasme à Berne et se lia avec lui. Nommé prédicateur à Berne, il n'y resta pas longtemps. En 1514 il est à Leipsic, en 1515 il acèompagne comme aumônier l'armée de son ami François de Sickingen; en 1516 il est nommé curé de Jenga, près d'Augsbourg et se marie. Il prêche bientôt les doctrines de Luther, et il expie cette double hardiesse par 6 mois de cachot. Condamné à mort il est sauvé par l'intercession de la sœur de Charles-Quint, Marie reine de Hongrie, mais il doit s'enfuir, laissant tout ce qu'il possède. Il s'établit d'abord à Wittenberg, puis à Eisenach et à Saalfeld. Il compte parmi les meilleurs amis de Luther, qui dit de lui: Quand toute la Bible serait perdue, je la retrouverais chez Aquila. Il assiste en 1530 à la diète d'Augsbourg. Plus tard il écrit très vivement contre l'Intérim, et Charles-Quint promet 5000 écus à qui le lui livrera mort ou vif. Il passe ses dernières années à Saalfeld et +12 nov. 1560.11 s'était remarié 1539 et eut 4 fils qui embrassèrent tous le ministère évangélique. Il a laissé sune vingtaine d'écrits, courts, mais substantiels, entre autres 11 Sermons pour les enfants. AQUILÉE, ville d'Illyrie. située au N. de l'Adriatique, près des lagunes deMarano; compte à peine auj. 1600 hab. Elle eut de bonne heure son évêque, et celui-ci ne cessa de revendiquer ses droits de patriarche contre les prétentions de l'év. de Rome. Pour avoir la paix, et pour exercer au moins l'une de ses prérogatives. Honoré l*r consacra l'évêque d'Aquilée patriarche de Grado, petite île où il s'était réfugié lors de l'invasion des Lombards en Italie 568. En 1451 le patriarcat fut transféré à Venise, et enfin 1751 supprimé et remplacé par les deux archevêchés d'Udine et de Gôrtz. — Trois conciles furent réunis à Aquilée: le premier le 3 sept. 381, dirigé par Ambroise, déposa Palladius, év. d'Illyrie, et Secundinus, prêtre, comme convaincus d'arianisme; le second, 698, se prononça contre la condamnation des Trois chapitres, q. v.. et ne fut pas reconnu par l'Église; le troisième, 1409, convoqué par Grégoire XII, anathéma-tisa ses deux rivaux. Benoît et Alexandre V, ce qui n'empêcha pas ce dernier d'être élu pape à l'unanimité par le concile de Pise. Le symbole d'Aquilée se distingue des autres par l'addition des mots invisibili et impassibili qui terminent le premier article; c'était une protestation énergique contre les patripassiens qui, ne voyant dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit que des manifestations différentes du Dieu unique, semblaient admettre que le Père avait été vu en chair et avait souffert. Il renferme aussi les mots descendit ad inferna, qui ne se trouvent pas dans les symboles des trois premiers siècles. AQUIN, v. Thomas. ARABIE. Sauf la mention de Gai. 1,17. qui a donné lieu à plusieurs légendes, on n'a sur le christianisme en Arabie que fort peu de détails. Vers l'an 200 un chef arabe demanda à Deme-trius, év. d'Alexandrie, de lui donner Origène pour l'instruire dans la religion chrétienne. Eu 244, au synode de Bostra, Origène ramène à la foi Bérylle, évéq. de Bostra, qui s'en était écarté; d'après Eusèbe il y avait encore plusieurs autres évêques dans la contrée. En 250 nouveau voyage d'Origène; il va combattre les hérétiques Arabiens, secte qui prétendait que l'àme meurt avec le corps, mais pour ressusciter avec lui. Sous les empereurs chrétiens plusieurs tentatives de missions furent faites pour évan-géliser l'Arabie; Constance y envoya Ananes Théjphile, mais sans grand succès. Plus tard on y trouve des nestoriens et des monophysites. L'avènement de l'islamisme mit fin à l'existence des églises chrétiennes, et jusqu'à ce jour les efforts des missionnaires et des sociétés religieuses n'ont abouti à aucun résultat. ARABIENS, v, l'art, précédent. ARBA KANNEPHOTH, c.-à-d. les quatre coins; pièce d'étoffe carrée que les juifs d'aujourd'hui portent au-dessus de la chemise sur l'épaule, avec des franges de laine bleue aux quatre extrémités. Cet usage, qui se rattache à Nomb. 15, 38.39 a pour but de rappeler à celui qui l'observe, les commandements de Dieu. ARCHÉOLOGIE. On appelle ainsi, ou Antiquités chrétiennes, le tableau de l'Église primi tive, considérée dans tes divers éléments de son existence, c'est-à-dire l'exposition de l'ensemble de ce qui constituait la vie des premiers chrétiens, les principes, les développements, les résultats de cette vie. Par archéol., les Grecs entendaient les faits et l'histoire, aussi bien que les institutions (v. Platon, Hippias), tandis que l'archol. chrétienne s'en tient aux institutions seules, à la vie intérieure; elle est sans doute le tableau du christianisme primitif, mais dans un sens elle devrait être le tableau du christianisme de nos jours. Elle comprend quatre branches ou éléments principaux: l<> les personnes des premiers chrétiens, les membres de l'Église; 2° l'organisation de ces membres en société; 3° le culte que les chrétiens ainsi réunis rendaient à Dieu; 4<> la vie religieuse, ou les mœurs qui se développaient au sein de cette association. L'histoire s'occupe de ces faits; la tâche de l'archéol. est de les grouper, de réunir en un seul faisceau tous les éléments épars qui se trouvent çà et là dans l'Église, de développer ce que l'histoire ne fait qu'esquisser, et de montrer ainsi la manière d'être de l'Église primitive. Le point oti commence l'archéol. chrétienne est facile à déterminer; c'est le commencement du christianisme lui-même, mais on n'est pas d'accord sur le point où elle finit; Walch l'arrête à Constantin, d'autres à Grégoire 1er, Grégoire VII, et plus bas encore. La première de ces dates est aussi la plus naturelle, parce que lorsque l'Église commença à dominer il s'y introduisit tant de choses impures que son caractère en fut altéré. Il faut distinguer, même dans l'Église primitive, l'époque apostolique proprement dite et celle qui suivit immédiatement, et qui fut marquée par une prompte dégénération, sous l'influence de peuples ou d'individualités prononcées. Comme sources, consulter les écrits des pères, les actes de conciles, les monuments, les monnaies, les inscriptions, notamment celles des catacombes. V. aussi Bingham, Orig. ecclésiast. Londres 1708, Halle 1722; Cave. Primit. Chris-tianity; Nicolaï, Antiq. eccle*.; Augusti, Denk-wûrdigkeiten; Mamachii, Orig. et Antiq. christ, lib. XX; Fleury, Mœurs des chrétiens; Nean-der, Guericke. etc. ARCHEVÊQUE, v. évêque. ARCHICHAPELAIN. Le grec archi, qui indique une prééminence, se trouve en tête d'un certain nombre de mots composés dont il accentue la signification. Ici nous avons le chapelain par excellence, titre donné au principal des ecclésiastiques attachés à la cour un peu nomade des anciens rois francs. Entre eux tous ils formaient la Chapelle du roi, et leur chef, complètement indépendant de Rome, jouissait de toutes les prérogatives d'un prélat, en même temps qu'il exerçait sur les affaires politiques une influence qui n'était pas à dédaigner. Plus d'une fois il joignit à ses fonctions celles d'archichan-celier. Le roi revêtait ordinairement de cette charge un archevêque. A partir du 13™* siècle les archichapelains furent remplacés par les aumôniers. q. v. ARCHIDIACRES et archiprêtres. A partir du 4m« siècle, on trouve dans presque tous les diocèses ces deux assistants de l'évêque, le premier chargé surtout de l'administration extérieure, le second du service religieux et du personnel ecclésiastique. Le premier, l'archidiacre* par la multiplicité de ses fonctions, et aussi par leur nature, maniement des fonds, président des diacres et du clergé inférieur, inspecteur des études, surveillant des aspirants à la prêtrise, acquit de bonne heure une grande influence et s'éleva au-dessus de tous les prêtres du diocèse, Tarchiprêtre compris. À mesure que l'Église s'étendit, le nombre des desservants de tous grades allant croissant, l'évêque multiplia ses représentants, la hiérarchie se compliqua, il y eut des chapitres pour les cathédrales, et les archiprêtres de la campagne devinrent les doyens d'aujourd'hui. ARCHIMANDRITE (chef, ou surveillant du troupeau), titre qui apparaît dès le 5™ siècle pour désigner les supérieurs des couvents. II est employé surtout dans l'Église grecque, mais pas exclusivement. Il s'appliquait aussi quelquefois aux prélats. ARCHITECTURE. Presque tous les peuples ont eu des monuments religieux, destinés soit à honorer la divinité, soit à rassembler les fidèles, et ces monuments ont plus ou moins reflété par leurs formes et leur disposition le caractère de la religion à laquelle ils étaient destinés. On peut dire en général qu'ils révèlent une civilisation. L'Inde a taillé ses temples dans le flanc des montagnes et les a ornés de figures fantastiques colossales. L'Égypte les fait immenses, dominant l'horizon, regardant vers le Nil, avec des avenues de sphynx, de lourdes colonnades et de mystérieux hiéroglyphes. Les Phéniciens, pour leur Moloch et leur Bahal, n'avaient guère que des autels en plein champ; s'ils avaient des édifices spéciaux à Tyr ou à Sidon. l'on ne connaît rien de leur style. Pour les Hébreux monothéistes, il n'y avait qu'un seul temple, et il était magnifique par son architecture et par les matériaux qui avaient servi à sa construction sous Salomon. Les Grecs, plus artistes, eurent les premiers l'idée du goût, du beau, des justes proportions, et ils se distinguèrent surtout par la disposition de leurs portiques, la grâce de leurs colonnes et la beauté humaine de leurs dieux, qu'on admire dans leurs trois ordres, dorique, ionique et corinthien; leurs temples étaient presque des musées. Les Romains les imitèrent, mais en copistes intelligents, et ils inventèrent les arcades et la voûte plein - cintre. Qnand le christianisme arriva, religion en esprit et en vérité, il ne sentit pas d'abord le besoin d'avoir des édifices spéciaux, et d'ailleurs ses disciples n'en auraient eu ni le droit, ni les moyens. Ils sont eux-mêmes des temples vivants, disait Origène d'après saint Paul. Partout où ils étaient réunis, ils pouvaient célébrer leur culte: dans une chambre haute, dans une maison sans apparence, au bord de la mer ou de la rivière, dans une caverne. A Rome et à Naples les catacombes servirent de temples pendant les persécutions, et les tombeaux des martyrs furent l'autel. Depuis Constantin les choses changèrent et les disciples du Crucifié purent élever autel contre autel. Ce qu'il leur fallait, c'était moins un sanctuaire et une habitation pour la divinité qu'un lieu de réunion pour la communauté; ni les temples grecs, ni celui des Hébreux, ne pouvaient leur suffire; la synagogue répondait davantage à leurs besoins, ainsi que la basilique romaine avec ses quatre murs, son portique sur la rue, sa tribune et son espace central. Ce fut la forme qu'on choisit, mais en la couvrant, à Rome d'une charpente en bois, à Bysance d'une voûte, et en l'éclairant de fenêtres percées dans le mur d'enceinte. Si les églises construites à Constantinople, Damas, Jérusalem et Bethlèhem. conservèrent la forme d'un rectangle, cependant le Style bysantin rechercha plutôt la forme concentrique, octogone ou ronde, avec une voûte en coupole, comme Sainte-Sophie qui en est le type le plus remarquable. Plus tard les coupoles se multiplièrent, ainsi que les ornements intérieurs, dorures et mosaïques, et le sanctuaire, icanostasis, fut séparé de l'enceinte sacrée. En Occident on conserva plus longtemps le style de la basilique, mais une fois qu'on s'en fut écarté, on alla de changement en changement, et l'architecture porta aux différentes époques le cachet de la théologie. Il y eut d'abord le style latin, le moins éloigné de la basilique, avec nef, abside, sacristies latérales, autel au-dessus d'une crypte souterraine, chœur pour les chantres, ambons pour les lecteurs, baptistère, transepts ou nef transversale pour agrandir l'édifice; la décoration est riche; tout est en marbre ou en pierre, la charpente des plafonds seule est en bois, mais cachée sous de brillantes peintures où l'or abonde. Le style roman date de la fin du 10*"® siècle; il est beaucoup plus varié et compte plusieurs écoles, lombarde, pisane, sicilienne, auvergnate; les moines se font architectes; à côté de la nef centrale on élève des nefs latérales; il y a quelquefois deux transepts et l'égl. affecte la forme d'une croix de Lorraine; les murs sont consolidés par des contreforts extérieurs, le clocher est réuni au corps de l'église; la voûte est en pierre pour mettre l'édifice à l'abri du feu. Ce style est un peu lourd, il est sombre. Le style gothique, ou ogival, qui surgit au 12me siècle dans l'Ile-de-France, le remplace avantageusement. et devient bientôt populaire; les architectes laïques et les francs-maçons en font leur affaire, et ne se gênent pas, à l'occasion, pour faire la satire de l'Église dans les sculptures qui doivent l'embellir. L'arc en ogive sert de base aux voûtes, les piliers sont moins larges, les fenêtres plus grandes, de belles rosaces ornent les portails d'entrée et donnent une lumière que des vitraux coloriés tamisent heureusement. Mais déjà la décadence se fait sentir au 15*ne siècle, et Brunelleschi, à Florence, inaugure un style nouveau, dit de la Renaissance, qui combine l'art antique et les traditions chrétiennes, et qui, par le luxe des matériaux et par le génie des Michel-Ange et des Bramante, réussit pendant un siècle à se faire pardonner ses inconséquences. L'ornementation intérieure et les fresques, la voûte en berceau et la double coupole, en sont les traits caractéristiques, mais le style lui-même varie beaucoup suivant les pays et se montre dans les détails plus que dans l'ensemble. Saint-Pierre de Rome, Saint-Paul de Londres, les Invalides et le Panthéon de Paris, en sont les principaux spécimens. Le 19m* siècle, qui n'a pas d'idéal, n'a pas d'architecture spéciale, ou plutôt il emploie tous les styles et les combine, sans avoir rien inventé de neuf, du moins comme architecture religieuse. Il a fait à Paris la Madeleine comme un temple grec, >ainte-Clotilde comme une église gothique, et la Trinité en style Renaissance. Le protestantisme n'a pas d'architecture, et ses temples, simples et sévères, sont faits en vue de l'acoustique plutôt que de la beauté; cependant quelques églises modernes ont des prétentions artistiques, et les styles roman, gothique et Renaissance ont quelques représentants. ARCHONTIQUE, secte gnostique détachée des valentiniens, connue par Epiphane et Augustin. Selon eux, l'univers se compose de 7 cieux qui ont pour mère Photine, la lumière incréée. Zabaoth, le créateur de la tenv, archonte inférieur, a été le père de Caïn et d'Abel et les a enflammés d'une passion incestueuse pour leur sœur. Seth et ses 7 fils échappèrent à son influence, et ont laissé à la secte les livres sur lesquels se fondent leurs croyances. Ils rejettent la résurrection. ARCIMBOLI. Jean-Angèle, fils d'un sénateur de Milan, docteur en droit, fut envoyé 1517 en Suède comme protonotaire apostolique par Léon X pour prêcher le commerce des indulgences. La Scandinavie était alors, depuis le traité de Calmar 1398, réunie sous le sceptre du Danemark, impatiemment supporté par le parti national suédois. Arcimboli obtint de Christian 11 l'autorisation de faire son commerce en Suède; il s'était donné pour un fort partisan de l'union, mais en Suède il se joignit au parti national et s'attira la colère du roi. Il dut revenir à Rome où. après une disgrâce de quelques années, il fut nommé év. de Novare 1525. ar-chev. de Milan 1550. + 1855. ARETIUS, Benoît, théologien bernois, étudia à Marbourg où il devint professeur, revint à Berne, professeur au gymnase 1549, en théologie 1563, f 1574. Auteur de plusieurs ouvrages: Tkeotogiœ problemata, Genev. 1579, très retimé; Examen theologicum, qui a eu 6 éditions en 14 ans; divers Comment, sur le N. T.. le Pentateuq., les Psaumes. Il a aussi écrit une Flore des Alp. bern., un Comment, sur Pindare, une histoire justificative de la condamnation de Gentilis, et un traité contre les Catabaptistes de Pologne. ARIANISME, Ariens, v. Arius. ARISTIDE, philosophe chrétien, natif d'Athènes. Il n'est connu que par la fameuse Apologie qu'il adressa à Adrien pendant une persécution, 125. C'est après avoir reçu cette Apologie que l'empereur fit paraître un édit en vertu duquel il était défendu de se porter contre un chrétien à des voies de fait sans avoir obtenu contre lui une condamnation légale. Cet ouvrage, qui ne nous est pas parvenu, paraît avoir été écrit dans un style éloquent et spirituel. AWUS, célèbre hérésiarque du 4m<> siècle, naquit vers 270 dans la Lybie cyrénaïque. La vie de cet homme remarquable se lie étroitement à ses opinions et aux progrès qu'il leur fit laire. de telle sorte qu'en dehors des discussions théologiques qu'il souleva, nous ne savons presque rien de lui. Taille avantageuse, figure maigre, pâle, imposante, chevelure abondante, maintien grave; abord gracieux, affable et prévenant; sa conversation était douce et agréable, fine et vive à la fois, ses mœurs austères; il avait une grande connaissance de tous les auteurs profanes et ecclésiastiques; intelligence prodigieuse, talent rare et penchant prononcé pour la dialectique et la controverse. Il fut successivement diacre et prêtre à Alexandrie. A la mortd'Achillas. son évêque, il espérait lui succéder, mais Alexandre l'emporta, 313. Arius avait sur la nature de Jésus des opinions particulières. Selon lui, la seconde personne de la Trinité n'était point éternelle, mais elle avait été créée par la première, tirée du néant, par conséquent sujette à faiblir et à changer. Ces idées qu'il prêchait avec succès et ouvertement dans la ville et les campagnes, trouvèrent d'énergiques adversaires dans Alexandre et Athanase. Deux fois Arius fut cité à comparaître devant son évêque et le clergé d'Alexandrie, mais on ne put le convaincre d'erreur ni lui faire rien rétracter. Alexandre n'ayant pu le ramener, ni par la persuasion, ni par la discussion, le fit condamner lui et 15 de ses partisans par un concile réuni à Alexandrie. 320. Arius, chassé de l'Église et de la ville, alla travailler ailleurs: le nombre de ses partisans, subjugués par la puissance de sa parole, augmentait de jour en jour. Il gagna même à ses opinions des évêques influents, entre autres Eusèbe de Nicomédie. Eu-sèbe réunit un concile en Rithynie, qui cassa les décisions de celui d'Alexandrie et réhabilita Arius. Celui-ci, qui conservait à Alexandrie des partisans, se créait de jour en jour de nouvelles relations. Grand acharnement et grand déploiement d'activité de part et d'autre; bientôt tout l'Orient fut divisé. L'empereur Constantin s'émut de tant de bruit et envoya Hosius en Asie pour examiner la querelle. Le rapport d'Hosius fut défavorable à Arius et aux ariens. Arius continuait à se défendre vaillamment; une émeute éclata même à Alexandrie, où les ariens, qu'on voulait opprimer, brisèrent les statues de l'empereur. L'Orient tout entier était en feu. Ce fut pour apaiser cet incendie théologique que se réunit, en juin 325, le premier concile œcuménique, à Nicée; plus de 300 évêques s'y étaient rendus, l'empereur en était le chef. Arius y vint avec ses partisans. On y voit aussi Athanase, le plus ferme boulevard de l'orthodoxie, champion aussi ardent qu'habile et expérimenté. Mais il trouva dans Arius un athlète de sa force. Avant d'ouvrir les sessions du concile, on tint des conférences particulières, où l'on discuta longtemps. Arius soutint avec fermeté ses idées: Christ, disait-il, est bien l'une des trois personnes de la Trinité, mais il n'a ni l'éternité, ni l'identité de substance avec (ePère. On ne put rien lui faire rétracter. Le concile lui présenta successivement plusieurs confessions de foi, en lui demandant de les signer; il les rejeta toutes en tant qu'elles impliquaient la coéternité et la consubstantialité du Père et du Fils. Il comptait parmi ses partisans les deux Eusèbe, celui de Nicomédie et celui de Césarée; mais les ariens étaient en minorité et l'empereur était contre eux. Après de longs débats contradictoires et une défense savante, Arius et s?s opinions furent anathématisés. Eones, Ce-cilius et lui furent relégués en Illyrie; trois mois après Eusèbe et Théognis dans les Gaules. Un édit de Constantin ordonna de brûler ses écrits et menaça de mort ceux qui les cacheraient ou les conserveraient. Arius ne baissa pas la tête; il travailla de loin à rendre la victoire à son parti: il y réussit, grâce à l'appui de Constance, sœur de Constantin et veuve de Li-cinius. En 328 il fut rétabli dans ses fonctions de prêtre à Alexandrie. Athanase, son ancien adversaire, patriarche dans cette dernière ville, refusa de le recevoir. Nouveaux débats, nouvelles discussions. Arius proteste de son attachement à TÉcriture et à la doctrine du Père, du Saint-Esprit et du Fils par qui toutes choses ont été faites. Enfin en 335. deux conciles, réunis à Tyr et à Jérusalem à l'occasion de la consécration du Saint-Sépulcre condamnent Athanase, et réhabilitent Arius. La querelle continua cependant, et en 336 le pieux Alexandre, patriarche de Constantinople, reçut l'ordre de Constantin, d'admettre Arius dans son Église; il refusa d'abord, mais Arius souleva le peuple qui l'écouta avec enthousiasme et l'accompagna en foule vers la cathédrale. Alors Alexandre se jeta à genoux demandant à Dieu un miracle: Seigneur, disait-il, ne permets pas que ton héritage soit livré à l'opprobre, ne souffre pas qu'il soit souillé par la présence de l'hérésiarque. Il préférait mourir. Le lendemain matin, dimanche, Arius fut saisi tout à coup de douleurs violentes, et mourut 336. Le bruit courut qu'il avait été empoisonné, mais ce peut n'être qu'une calomnie de parti. De tous les écrits d'Arius il ne nous est rien parvenu. Sa tendance ne succomba pas avec lui; il avait de trop puissantes racines soit dans l'esprit du siècle, soit dans le nombre et les talents de ses adhérents. Les ariens furent le parti prédominant de l'Église et de l'État pendant assez longtemps. Mais, puissants par leur union, ils s'affaiblirent par des dissensions intérieures. Les ariens, les semi-ariens, les eu-nomiens (ariens outrés, disciples d'Eunomius) se disputaient la prééminence entre eux et contre les orthodoxes. En vain les nouveaux maîtres de l'empire, Osthrogoths, Visigoths, Lombards, Vandales, Burgondes,etc.. embrassèrent-ils l'arianisme; au 5ra* siècle déjà le parti, devenu plutôt politique, était presque ruiné; il disparut à la fin du 6me, sous la pression de l'unité romaine, mais pour renaître à diverses époques et sous diverses formes, qui chaque fois réduisaient à de plus petites proportions le chef de l'Église et le Sauveur des chrétiens. H. B. ARLES, quelque temps la résidence de Constantin, a vu quatre conciles; celui de 314, qui confirma la condamnation des donatistes prononcée au concile de Rome 313 et rétablit l'évêque Cécilien; il condamna aussi en 22 canons plusieurs abus de discipline ecclésiastique; celui de 353, convoqué par Constance, qui prit parti pour les ariens et condamna Athanase; celui de 452 qui reproduisit en partie les décisions du conc. de Nicée, et celui de 475 qui se prononça pour le semi-pélagianisme. ARMÉNIE, Arméniens. Bien que ses limites n'aient jamais été bien définies et que son territoire ait souvent varié, on désigne sous le nom général d'Arménie le haut plateau compris entre la mer Noire et la mer Caspienne, le Taurus et le Caucase; la montagne la plus connue est l'Ararat; ses principales villes, Erzeroûm, Kars, Van, Erivan. Climat varié, neiges éternelles sur les plus hautes cimes, printemps perpétuel dans ses riches vallées. C'est là que prennent leur source l'Euphrate, le Tigre, l'Araxe et le Cyrus. L'A. T. y place l'Éden des premiers hommes. Les Juifs des dix tribus s'y trouvaient en grand nombre à l'époque de la captivité de Babylone, et bien peu profitèrent de l'édit de Cyrus pour retourner dans leur pays. — L'Évangile fut introduit de bonne heure en Arménie par Abgare, roi d'Edesse, q. v. Ce qui est plus sûr, c'est que l'Évangile était connu dans cette contrée au 2"^ siècle, mais il ne s'y établit définitivement qu'au 4rae, grâce à la conversion de Grégoire, prêtre païen, qui devint l'instrument d'un grand réveil et mérita d'être appelé l'Illuminateur. Les Arméniens firent d'abord partie de l'Église orthodoxe d'Orient, mais ils rejetèrent les décrets du concile de Chalcédoin* 451, qui ne leur paraissaient pas affirmer assez clairement la divinité de J.-C„ et dans un synode tenu à Walashapat, penchant vers les doctrines monophysites ou eutychianisme, ils se constituèrent en église séparée. Souvent persécutés, soit par l'Église d'Orient, soit surtout par les mahométans, les Arméniens se sont toujours distingués par leur culture théologique et littéraire; ils ont eu de riches et importantes imprimeries à Venise, Vienne, Moscou et Ispahau. Ils possèdent encore aujourd'hui plusieurs journaux, et recherchent volontiers des relations avec les autres églises. Sauf la nuance indiquée, leur doctrine est strictement orthodoxe orientale. Il en est de même de leur culte; ils admettent 7 sacrements, la transubstantiation, le culte de la Vierge et des saints. Ils comptent 9 degrés dans le sacerdoce; leurs prêtres se forment soit à Tiflis, soit dans les couvents; ils sont en général peu payés. Le principal revenu du patriarche consiste dans la fabrication et la vente de l'huile sainte. Le patriarche porte le nom de Catholicos (universel) et réside au pied de l'Ararat dans le riche couvent d'Eschmiatzin. Il a pour aide un grand vicaire et, depuis 1802, un conseil composé de 5 ou 6 dignitaires, évêques ou wartabeds (docteurs). Eschmiatzin étant dans les États russes, l'empereur est le protecteur naturel des Arméniens, c.-à-d. qu'il agrée le patriarche élu par les délégués de l'Église; le patriarche à son tour nomme les évêques. Il a sous sa juridiction les patriarches arméniens de Constantinople et de Jérusalem. Le* couvents sont nombreux; outre celui d'Esch-miatzin, riche en livres, manuscrits et reliques, il faut nommer celui de Jérusalem. Les Arméniens sont an nombre d'environ cinq millions; leur vie religieuse est déchue; ils retiennent les formes et les cérémonies, mais ils ne connaissent presque pas la Bible. Un réveil s'est manifesté chez eux il y a quelques années et plusieurs milliers se sont convertis au protestantisme. On appelle Arméniens-Unis ceux qui se sont dès 1439 rattachés à l'Église de Rome; ils ont un archevêque à Lemberg, Autriche; à Venise, un couvent fameux, celui de Saint-Lazare, de l'ordre des méchitaristes, qui possède une vaste imprimerie. Ils sont 46,000 en Turquie, dont la moitié à Constantinople. — v. S. Martin, Mémoires hist. sur l'Arménie, 2 vol. Paris 1819, et plusieurs livraisons du Mag. des missions de Bile. ARMINIANISME, Arminius. On désigne sous ce nom une tendance théologique qui se fit jour vers la fin du 16™ siècle, et qui d'abord très modérée, finit par s'accentuer davantage et dépassa de beaucoup les intentions de celui qui avait commencé le mouvement. Jacques Arminius. on Harmensen, ou Hermanns, né 1560 à Oudewater sur l'Yssel, Hollande, fils d'un coutelier, perdit son père de bonne heure, mais fut encouragé par de nombreux amis à continuer ses études à Utrecht, Marbourg, Rotterdam et Leyde. H visita ensuite Genève où il entendit Bèze, et Rome où il crut reconnaître le mystère d'iniquité. Disciple de P. la Ramée, il fut accueilli avec défiance à Genève; il fut plus heureux à Bâle où la faculté lui offrit le titre de docteur en théologie; il n'avait que 22 ans et fut assez modeste pour refuser. En 1583 il fut nommé pasteur à Amsterdam, et en 1603 professeur à Leyde. f 19 oct. 1609. C'est à Amsterdam qu'il émit pour la première fois en public ses opinions infralapsaires, par opposition aux sapralapsaires qui soutiennent que Dieu, même avant la chute, a destiné les uns au bonheur, les autres au malheur éternel, non par la prescience de ce qu'ils deviendraient, mais par un acte libre de sa volonté souveraine. Il crut pouvoir adoucir ce qu'il y avait de trop absolu dans les doctrines d'Augustin, de Gottschalk et de Calvin, tout en restant dans les limites du catéch. de Heidelberg, de la confession de foi hollandaise, de Bèze et de Zwingle. Deux fois il fut appelé à donner des explications en conseil sur des sermons qu'il avait prononcés, sur Rom. 7, 14. et Rom. 9, et ses explications forent jugées satisfaisantes, sans cependant le blanchir entièrement aux yeux de ses adversaires. Une conférence avec son futur collègue Gomar constata qu'il repoussait le pélagianisme; mais en 1604 les difficultés recommencèrent, Arminius ayant dit qu'il fallait se garder non seulement du pélagianisme. mais aussi du manichéisme et d'autres erreurs semblables qui | aboutissaient à faire Dieu auteur du mal et du péché. Un synode en 1606, puis une conférence entre Arminius et Gomar 1608, n'amenèrent aucun résultat. L'année d'après le savant uni-versaliste était retiré de ce monde. Ses œuvres compl. ont paru à Leyde 1629; sa Vie a été écrite par Gaspard Brandt, avec des notes de Mosheim. La doctrine d'Arminius ne différait de celle de Calvin et des Églises réformées en général que sur le seul point que nous avons indiqué: il ne niait pas l'élection, mais il niait qu'elle fût inconditionnelle et absolue; il maintenait la liberté de l'homme et sa responsabilité; il estimait que J.-C. est mort pour tous, que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. La prédestination était seulement un acte de la prescience de Dieu, qui savait à l'avance quels seraient ceux qui croiraient. Les disciples d'Arminius, ou prétendus tels, qui prirent son nom pour drapeau, allèrent beaucoup plus loin que lui et le compromirent par leurs excès. A peine il était mort qu'ils se constituèrent en secte ou société religieuse distincte. Ils attaquèrent la valeur des livres symboliques, firent alliance avec le socinianisme, et peu à peu glissèrent dans la politique et devinrent un parti. En 1610 ils adressèrent aux États de Hollande une remontrance en 5 articles (de là leur nom de Remontrants) où ils exposaient leurs vues sur la grâce; en 1611 ils y ajoutaient comme supplément que les régénérés peuvent perdre la grâce de Dieu. En somme ils ne s'éloignaient pas beaucoup d'une orthodoxie mitigée. Leurs adversaires répondirent par une contre-remontrance, et comme les passions populaires s'en mêlaient, les États défendirent 1614 toute discussion sur ce sujet. Le synode de Dordrecht (13 nov. 1618 — 9 mai 1619) trancha toutes les questions contre les arminiens, rejeta leurs 5 propositions, déposa plus de 200 pasteurs et précisa les bases dogmatiques de l'Église de Hollande. Il provoqua indirectement l'emprisonnement de Grotius et l'exécution de Olden Barnevelt. Les remontrants destitués, presque tous pasteurs à Amsterdam ou aux environs, publièrent un mémoire pour se justifier de toute participation à un complot contre le prince-stathouder Maurice de Nassau. Ce mémoire et la publication des Actes du synode de Dordrecht 1620 adoucirent en leur faveur l'autorité, et à l'avènement d'Henri, frère de Maurice 1625, ils furent d'abord tolérés, puis 1630 officiellement autorisés à s'établir en Hollande partout où ils voudraient. Ils en profitèrent pour avoir à Amsterdam et à Rotterdam des églises et des écoles, mais la tolérance leur fut aussi fatale que la persécution leur avait été favorable. Quant à ceux qui avaient préféré quitter le pays en 1621, ils avaient trouvé dans le Schleswig un prince bienveillant qui leur avait permis de s'établir dans ses États; ils se bâtirent une ville qu'ils appelèrent Fridrichstadt, du nom de leur protecteur, et dans laquelle se trouve encore aujourd'hui une petite communauté arminienne. Parmi les représentants les plus autorisés de cette tendance, il faut nommer Épiscopius 1583-1643, Curcellaeus f 1645, Hugo Grotius, Lim-borch 1633-1714, Cattenburgh f 1737, Jean le Clerc 1657-1736, Wettstein f 1754, etc. ARNÀULD, ou Arnaud, Arnaut, Arnold, nom qui revient souvent, et avec des orthographes différentes, dans l'histoire de l'Église chrétienne. Les jésuites veulent le faire dériver du grec arnoumai, renier; ce n'est pas très spirituel. 1<> Arnold ou Arnaud de Brescia, né vers 1100 probablement, dans la ville dont il a gardé le nom. Il embrassa de bonne heure la carrière ecclésiastique et remplit dans sa ville natale les modestes fonctions de lecteur. D'une intelligence vive, d'une éloquence impétueuse, originale, d'un caractère élevé, d'un dévouement absolu à ce qu'il regarde comme la vérité, il avait l'esprit tourné vers la pratique plutôt que vers la spéculation. Jeune encore il vint en France, où il suivit les leçons d'Abélard. à Saint-Denis d'abord, puis à Nogent et dans les solitudes du Paraclet, et l'influence du maître fut grande sur ses disciples. De retour en Jtalie, Arnold revêtit le costume monastique et se jeta avec ardeur dans la lutte que lui imposaient les désordres du clergé. Il combattit par la parole et par la plume. Ses écrits malheureusement sont perdus; Innocent II les fit brûler, et il n'est plus possible de reconstituer d'une manière sûre l'ensemble des doctrines et le système dont Arnold fut le représentant. On sait seulement qu'il voulait le retour aux œuvres et à la vie de la primitive Église. Ses discours passionnés, tombant au cœur d'une multitude inflammable, trouvèrent un écho dans la population de Brescia et des environs; la guerre civile éclata; une faction nombreuse, dirigée par Rebaldus et Persicus, s'insurgea contre l'évêque Manfred, et celui-ci recourut auprès du concile de Latran qui était assemblé 1139. Sans parler de ses doctrines, Innocent II condamna Arnold, le bannit et lui imposa le silence. Contraint de s'expatrier de nouveau. Arnold passe une seconde fois les Alpes, il revient en France, à temps pour assister au synode de Sens, juin 1140, où Abélard et saint Bernard doivent se rencontrer; mais Abélard a vieilli (stat magni nominis umbra), et au moment de la lutte, malgré la présence d'Arnold, il se dérobe en en appelant à Rome. Les deux amis ne se verront plus; un rescrit du pape, juillet 1140, ordonne qu'ils seront enfermés séparément dans deux maisons religieuses, mais Abélard trouva l'hospitalité à Cluny, chez Pierre-le-Vénérable, et Arnold réussit à se sauver en Suisse. Il prêche à Zurich, où il obtient de grands succès. Saint Bernard alarmé le dénonce à l'évêque de Constance, mais le légat du pape, Gui de Castello, le futur Célestin II, ancien élève d'Abélard, lui assure un asile. A son tour Gui reçoit une lettre menaçante de saint Bernard, et le proscrit disparaît pour quelques années. Il finit, vers 1146, par retourner à Brescia, et même à Rome, « avec une armée de Suisses, » dit un de ses historiens par trop fantaisiste. Pendant son absence la lutte avait continué entre les papes et le peuple de Rome, et Eugène III avait dû se réfugier en France. Arnold a de puissants amis; si ses doctrines sont peu populaires et mai comprises, le fait politique de son opposition lui crée de nombreux adhérents. 11 rêve la restauration de l'ancienne Rome et son indépendance comme ville; le sénat et le peuple seuls seront les maîtres; le pape conservera son pouvoir spirituel. Adrien IV, 1155, refuse de sanctionner le nouvel ordre de choses, et se retire à Orvieto d'où il excommunie Arnold et lance l'interdit sur Rome. Les Romains épouvantés, voyant approcher le terrible Frédéric I«r, Bar-berousse, abandonnent Arnold qui doit quitter la ville et se mettre en sûreté dans un château de la Campanie. Adrien obtient de Frédéric la promesse qu'il lui fera livrer l'agitateur, et Frédéric qui désire être sacré par le pape tient sa promesse. Sans bruit, avant le jour, par crainte du peuple, Arnold est conduit à la Porta del popolo où il est pendu, puis son corps brûlé et ses cendres jetées au Tibre. Un moment après, ses amis accourent en armes pour le délivrer, mais trop tard; on leur avait laissé ignorer le moment de l'exécution. — On a cherché à expliquer les doctrines d'Arnold par l'influence d'Abélard (Néander); d'autres, par ses rapports avec les albigeôis, les cathares, les vaudois (Buheus et Léger); d'autres enfin y voient un mélange de mysticisme panthéiste, ou dualiste, qu'ils rattachent à l'ancien gnosti-cisme (Raumer, Hurter). Toutes ces hypothèses sont de trop; Arnold était homme à juger par lui-même, et ce que l'on connaît de ses opinions s'explique par le fait seul des abus qui régnaient de son temps. Il voyait dans de trop grandes richesses la source de la corruption du clergé; il ne regardait comme prêtre que celui qui justifiait sa prédication par sa vie; il voulait séparer les pouvoirs temporel et spirituel; il insistait enfin sur l'inutilité du baptême et de l'eucharistie sans la conversion du cœur. — v. Othon de Freysingen, fragments; quelques fragments de saint Bernard; Muratori; Gui bal, A. de Bresce et les Hohenstaufen. Son nom est aussi lun des plus populaires de l'Italie; Nico-linien a fait un draine, Tantardini de Milan lui a élevé une statue, Brescia et Rome ont honoré sa mémoire. Le nom d'Arnoldistes, mentionné dans un décret de Lucius III, 1184, et dans un décret de l'empereur, désigne moins peut-être une secte proprement dite, que les tendances antihiérarchiques si nombreuses qui se manifestèrent au moyen âge, surtout au nord de l'Italie. Sans doute Arnold laissa quelques disciples, mais ils ne s'organisèrent pas et durèrent peu. Nicolas Arnold, né en Pologne 17 déc. 1618, f 15 octobre 1680 à Franeker, où il était pasteur et professeur. Successeur de Cocceius, il a publié les œuvres de Maccovius et écrit lui-même divers ouvrages contre le millénium de Gomenius, qui devait commencer en 1672, contre le papisme et contre le socinianisme. 3o Gottfried Arnold. né 1665 en Saxe, à An-naberg où son père était maître d'école, fit de bonnes études à Wittenberg, se lia à Dresde avec Spener, 1689, fut un piétiste ardent, se jeta dans le mysticisme, grâce aux œuvres de Bœhme, combattit le mariage comme incompatible avec la sagesse supérieure (sophia), se maria, \700, fut un séparatiste décidé, se calma avec làge, fut successivement précepteur, professeur à Giessen. prédicateur de la cour à All-staedt, historiographe de Frédéric l«r, enfin pasteur et inspecteur à Werben, puis à Perleberg, où il t 1714. Malgré la mobilité de son caractère et ses fréquents changements d'opinion, il s'était concilié le respect et l'estime par sa droiture de conscience et par sa piété. Il a publié de nombreux ouvrages historiques, mystiques, polémiques et d'édification. Alb. Knapp en a réimprimé quelques-uns, avec une vie d'Arnold, Stuttgart 1845. Les Arnaud de France. Famille noble d'Auvergne, originaire de Provence, établie à Paris vers 1547, en majorité protestante. 1» Antoine, f 1585, auditeur à la Chambre des comptes. Il eut un fils d'un premier mariage, et en secondes noces onze enfants, dont 7 fils et 4 filles. L'aîné de ceux-ci, également 2o Antoine, né 5 août 1560, f 29 déc. 1619, avocat au parlement de Paris, d'un désintéressement rare, d'une éloquence passionnée, se fit une réputation européenne par le discours qu'il prononça le 12 juillet 1594 pour l'université de Paris contre les jésuites. En 1602 il adressa un Mémoire au roi. plusieurs fois réimprimé dès lors, pour empêcher le rappel de cette redoutable Compagnie. On a de lui un grand nombre de brochures politiques. Il eut 20 ou 22 enfants, qui paraissent tous, et peut-être lui-même aussi, avoir laissé la réforme pour le jansénisme, entre autres Jaqueline, la célèbre abbesse de Port-Royal, Robert Arnaud d'Andilly, Henri, èvêque d'Angers, etc. Le plus célèbre et le plus jeune des 20, s'appelait aussi 3° Antoine; c'est celui que les jansénistes ont surnommé le grand Arnaud. Né le 6 février 1612, il étudia d'abord le droit, puis, sous l'influence de Saint-Cyran, la théologie, fut reçu prêtre 1641, et docteur en Sorbonne 1643. Il se fit connaître de bonne heure par son livre De la fréquente Communion, qui eut bientôt sept éditions, livre d'édification, qui était en même temps une déclaration de guerre aux jésuites et à leur manière expéditive de simplifier la confession et la communion. Il veut que les actes religieux soient accomplis sérieusement. Ce n'était pas beaucoup; c'en était trop cependant pour les confesseurs jésuites. Le clergé de France se divisa à ce sujet; les uns prirent parti pour, les autres contre, et les sermons du carême furent une mêlée où l'on faillit en venir aux mains. Les jésuites en appelèrent au pape; la reine Anne voulait livrer Arnaud à Rome, le parlement s'y opposa au nom des libertés gallicanes; la reine persista et Arnaud n'échappa à ce voyage qu'en se cachant. Dans la querelle sur la grâce, 11 prit parti pour Jansénius et publia deux Apologies de cet èvêque 1644 et 45; en 1655, une Lettre à une personne de qualité (le duc de la Rochefoucault-Liancourt). La Sorbonne, où les jésuites, alliés aux thomistes, aux dominicains, aux semi-pélagiens, formaient la majorité, le censura et prononça son exclusion, 31 janvier 1656; 80 docteurs sortirent avec lui. Ce fut à cette occasion que Pascal écrivit ses Provinciales. Arnaud s'enferma à Port-Royal, où il resta 12 ans avec Lancelot, Nicole, Pascal, écrivant, seul ou avec ses amis, ces ouvrages de théologie, de morale, de grammaire, de physique et autres, qui ont fait de Port-Royal un centre littéraire et philosophique si brillant. Il prit une grande part à la traduction du N. T., édit. de Mons, v. Saci. En 1668, lors de la paix dite de Clément XI, le nonce et le roi le prièrent de mettre sa plume d'or au service de l'Église en écrivant contre les réformés. I)e là ses deux volumes et ses deux éditions sur la Perpétuité de la foi, où il s'appuie sur les droits de la prescription pour prouver que l'Église catholique est la véritable. L'argument laissait à désirer. Il faut dire à la décharge d'Arnauld qu'il n'a écrit que le 1er chapitre de cet ouvrage, dont le reste appartient à Nicole. Les jésuites, pour lui nuire, affectèrent de dédaigner ce volume, en entravèrent la circulation, et firent un grand éloge de la réfutation que Claude lui opposa. Peu encouragé, Arnauld cessa momentanément d'écrire contre les reformés, d'autant plus que la persécution sévissait contre eux cruellement. Devenu suspect il se cacha à Paris, mais se sentant entouré d'espions, sachant ses correspondances ouvertes, il s'enfuit sous un déguisement le 18 juin 1679, à l'âge de 68 ans, et se retira à Bruxelles où il passa ses 15 dernières années. Il fut en correspondance avec Leibnitz qu'il espérait convertir; il attaqua la doctrine de Mallebran-che sur la providence, la grâce et la vision en Dieu 1683; il eut de vifs démêlés avec le ministre Jurieu qui ne le ménagea guère. Il était cartésien et eut le malheur, en philosophie comme en religion, de représenter des tendances qui ne pouvaient plaire aux esprits extrêmes. Il fut mal avec les protestants, sans pouvoir se concilier les catholiques; son neveu, le marquis de Pomponne, dut le prévenir qu'on ferait tout pour s'emparer de sa personne et qu'il ne serait en sûreté qu'à Amsterdam. 11 ne cessa de réclamer les libertés de l'Église, l'autorité des conciles et la lecture de la Bible en langue vulgaire. Il écrivit d'Utrecht contre « Guillaume d'Orange, le nouvel Absalon, Hérode et Cromwell. • Plusieurs cardinaux lui fournirent des matériaux pour son livre: Morale pratique des jésuites. Le compagnon dévoué de ses dernières années, depuis 1685. fut le pèreQuesnel; il mourut dans ses bras le 8 août 1694, après une courte maladie. âgé de 82 !/i ans: « ainsi délivré, dit-il, de son double exil. » Son cœur fut porté à Port-Royal; son corps conservé dans l'égl. de ^inte-Catherine, à Bruxelles. Il est à regretter que l'amour "de la discussion l'ait entraîné trop loin; c'était une maladie de son esprit. Vers la fin de sa vie, Nicole lui exprimant son besoin de se reposer après tant de luttes: Hé ! lui répondit Arnaud, n'aurez-vous pas toute l'éternité pour vous reposer ! — Il a énormément écrit, mais rien de saillant. Ses ouvrages, au nombre de 320, avec ses lettres, des préfaces et des introductions, forment 135 volumes. On les a réunis en 48 tomes 4°, Lausanne 1773-83. 4° Robert A. d'Andilly, frère aîné du précédent, 1589-1674, gentilhomme de cour, ne se servit de son crédit que pour faire le bien. A 55 ans il se retira à Port-Royal. On a de lui une trad. de Josèphe, des Confessions de saint Augustin, des OEuvres de sainte Thérèse, etc. Son fils, marquis de Pomponne, fut ministre de Louis XIV. 5° etc. Plusieurs pasteurs de ce nom. un à La Rochelle vers 1650, deux au synode d'Alen-çon 1637, un à Montaren 1603, un au Désert, pendu 1718, et d'autres. V. la France prot. ARNAUD, Henri, pasteur et colonel des vaudois, né vers 1640 aux environs de Die, Dau-phiné; il quitta son pays pour se soustraire aux persécutions iniques de Louis XIV, se battit courageusement contre Catinat lors des Pâques piémontaises de 1688, accompagna les Vaudois dans leur exil 1686/87, présida à leur rentrée 89. Pasteur et modérateur-adjoint en 1692, il fut obligé de nouveau de quitter les Vallées par suite du décret du 1er juillet 1698, qui en bannissait tous les habitants d'origine étrangère. II se retira en Allemagne, et fut d'abord pasteur à Dttrmentz. Les circonstances lui ayant permis de reprendre du service dans les Vallées, on le retrouve 1706 pasteur de Saint-Jean. En 1707 il est à Londres, où Van Somer fait et grave son portrait. Étant revenu dans les Vallées, il est exilé de nouveau en 1709. Guillaume III l'engagea à venir à sa cour et lui offrit un brevet de colonel, mais Arnaud préféra retourner en Allemagne où la reine Anne lui fit une pension de 226 L. st. (5650 fr.). f 1721 à Schfin-berg, à 80 ans. Il a écrit La glorieuse rentrée des vaudois MDCCX, devenu très rare, réimpr. 1845 à Neuchâtel, avec préf. de Fréd. de Rou-gemont. ARNDT, Jean, auteur d'un livre célèbre et justement populaire, intitulé Le vrai christianisme. Spener disait de lui: Sans doute Luther lui est supérieur par l'étendue de l'œuvre que Dieu lui a donnée à faire, mais Arndt le suit de bien près, et je ne suis pas sûr que par ses écrits il ne soit pas destiné à une œuvre également importante. Arndt naquit 1555 à Ballen-stœdt, Anhalt; étudia àHelmstedt, en 1577 àWit-tenberg; vint de là à Strasbourg, puis à Bâle, 1579, où il suivit les cours de morale et de médecine de Tbéod. Zwinger, célèbre médecin chrétien. Rentré dans son pays, il fut successivement pasteur à Badeborn, Quedlimbourg 1590, Brunswick 1599; il publie en 1605 le premier livre de son Vrai christianisme, qui est accueilli partout avec enthousiasme, excepté par ses collègues de Brunswick. Il combat dans ce livre la foi morte, la sèche scolastique, même orthodoxe; il veut réveiller les étudiants et les prédicateurs, et que le chrétien puisse dire en réalité: Ce n'est plus moi qui vit, c'est Christ qui vit en moi. En 1608 il donne la fin de son manuscrit à son ami et fils spirituel Gerhard, publie 1609 l'ouvrage entier, passe à Eisleben, et enfin 1611 à Zell, comme prédicateur de la cour et surintendant. Son activité, prédications, visites d'églises. furent bénies non seulement pour sa paroisse, mais pour tout le Lunebourg, comme ses livres pour toute l'Allemagne, f 1621. Il eut toujours une grande prédilection pour les écrits mystiques d'A'Kempis, Tauler et Staupitz. ARNO, évêque et premier archev. de Salz-bourg, entre 785 et 800. Il était de la famille des Freysingen, et se consacra à l'Église encore eufant 758, diacre et prêtre 778, abbé de Saint-Amand, Belgique, 782, et grand ami d'Alçuin. Après l'incorporation de la Bavière à l'empire des Francs 788, il se concilia la faveur de Char-lemagne, et fut employé par lui soit pour des missions à Rome, soit pour la conversion des Slaves et des Avares. C'est Léon III qui érigea Sakbourg en métropole de la Bavière. Arno est plus d'une fois délégué (missus) de l'empereur pour des intérêts temporels. Il assiste au testament de Charles et au concile de Mayence 813; il n'assiste pas à celui d'Aix-la-Chapelle pour la réforme des ordres religieux 817, et Louis lai eu communique par écrit les résolutions, f 821. ARiNOBE 1° VAncien, célèbre apologiste chrétien de l'Afrique proconsulaire occidentale, né à Sicque en Numidie, vers le milieu du 3me siècle, de parents païens. Il enseigna assez longtemps la rhétorique et la grammaire, combattit le christianisme et s'acquit une réputation considérable comme savant et orateur. D'ûn esprit enclin à la superstition, il était travaillé intérieurement par le sentiment qu'il faisait fausse route; il hésita longtemps avant d'embrasser le christianisme; enfin il se décida. Comme il avait combattu les chrétiens publiquement, son évêque exigea, avant de l'admettre au baptême, qu'il fit un acte public de conversion. C'est alors, qu'au milieu des persécutions dioclétien-nes, 304, il écrivit une profession éclatante de sa foi:VII Livre» contre les païens: Disputationes adœriw gentiles. On ne sait s'il fut ecclésiastique; quelques-uns l'ont cru, mais sans preuve. Son style est dur, inégal, obscur souvent, mais parfois aussi agréable, élégant et énergique. Il a de fines railleries et des attaques virulentes contre le polythéisme et contre ceux qui le soutiennent par des allégories; en général il cite peu les saintes Écritures; on lui reproche des subtilités et des idées étranges sur l'origine du mal, qu'il rapporte à un être inférieur à Dieu. D eut pour disciple Lac tance. î° le Jeune, théologien du 5m« siècle, dont on ne connaît ni le lieu, ni la date de naissance, ni la vie. Il écrivit un Comment, sur les Psaume qu'on a faussement attribué au précédent, et qui renferme une attaque assez forte contre Augustin. ARNOLD 1° de Bresce, etc., v. Arnaud. — 2° Geoffroy, né 1666 en Saxe, étudia la théol. à Wittenberg. entra 1689 en relation avec Spe-ner, fut prof, un an à Giessen et occupa successivement plusieurs places de pasteur, refusa de signer la formule de Concorde, fut banni de Saxe et nommé pasteur à Terleberg, il y f 1714. Auteur de divers ouvrages mystiq. et historiq.. cantiq. et sermons qui lui ont valu une réputation méritée. » Thomas, né 13 juin 1795, f juin 1842. Élève d'Oxford, théologien anglais, prédicateur et pédagogue distingué, a fait de Rugby une école chrétienne. A publié une édition de Thucydide, une Hist. romaine, 5 vol. de Sermons, une brochure sur la conscience chrétienne, une Étude sur l'interprét. des Écritures, etc. H tenait rÉgl. et l'État comme deux domaines devant se confondre l'un dans l'autre, et réclamait l'école chrétienne et un gouvernement chrétien. — Son fils Matthew est connu surtout comme publiciste éminent. ARNOLDI, Barthélémy, d'Using, moine au-gustin, professeur de philosophie et de théologie à Erfurt, un des maîtres de Luther, l'approuva dans ses débuts, mais trouva qu'il allait trop loin. Il assista à la diète d'Augsbourg 1530 et f à Erfurt 1532. A laissé de nombreux ouvrages. ARNULPH 1° évêque de Metz 614, avait été jusque-là laïque et marié, majordome à la cour franque d'Austrie. Quand il entra dans les ordres, sa femme prit le voile à Trêves. Leur fils Anségis épousa Begga, fille de Pépin, dont il eut Pépin d'Héristal. Après avoir siégé dans les conseils de Clotaire et de Dagobert, il sollicita sa retraite 625, et se rendit au couvent de Re-miremont. Vosges, où il f 641. — 2° v. Jean 12<>. ARSÈNE lo diacre romain, très instruit et distingué, recommandé par Damase à Théodose pour l'éducation de son fils Arcadius. Mais le jeune prince, faible et méchant, irrité de devoir se tenir debout devant son maître assis, lui jura une haine mortelle, et celui-ci dut s'enfuir dans les déserts de l'Égypte, où il atteignit jusqu'à 95, quelques-uns disent même 120 ans. f 445. 2° Moine de Nicée, solitaire du mont Athos, enfin patriarche de Constantinople, chargé par Théodore Lascaris II de la tutelle de son fils Jean 1255/59, excommunia l'usurpateur Michel Paléologue, qui à son tour le fit déposer et bannir par un synode convoqué à Constantinople. Il f 1267 dans une île de la Propontide; Michel se fit relever de son excommunication en 1268, mais Arsène conserva beaucoup d'adhérents dans le clergé grec et fut canonisé 1312. ARTÉMON, vivait à Rome à la fin du 2*e siècle, et soutenait que Jésus n'était qu'un homme; il admettait cependant sa naissance surnaturelle et sa parfaite sainteté. ASCÈTES, ascétisme. Mot grec d'origine, qui signifie exercice et qui s'employait spécialement en parlant des athlètes. Dans le langage chrétien il s'appliqua aux exercices spirituels. Clément d'Alex, donne ce nom aux hommes de l'A. T. qui menaient une vie austère. Peu à peu il se dit des personnes, hommes ou femmes, qui s'imposaient des privations physiques dans la pensée d'affranchir l'esprit; il finit par désigner surtout les religieux, les moines et la vie monastique. ASCHE, rabbin célèbre, un des principaux rédacteurs du Talmud, enseignait à Sura, Eu- 5 phrate. et f 427. Il eut pour successeurs Àbina et José, qui mirent la dernière main à l'œuvre et l'ont laissée telle qu'elle est aujourd'hui. Il avait divisé son travail en 60 parts, dont chacune devait être achevée dans l'espace d'un semestre. ASGIDAS, v. Théodore. ASILE, v. Asyle. ASINAIRES (les), proprement les adorateurs, ou les disciples de l'âne, sobriquet donné d'abord aux juifs, puis aux chrétiens, à la suite d'une caricature où, d'après le rapport de Ter-tulien, le Dieu des chrétiens était représenté sous l'image d'un homme à oreilles d'âne, ayant un sabot au pied, un livre à la main et revêtu d'une toge. Tacite raconte aussi que les juifs adoraient un âne, Hist. Y. 4., par confusion avec l'urne à deux anses qui renfermait la manne. ASSEBOURG, Rosemonde-Juliane (d'j, demoiselle allemande, née 1672 d'une famille noble des environs de Magdebourg. Célèbre par sa piété, elle déclara en 1691 que dès sa 7™« année elle avait eu de temps en temps, et surtout pendant ses prières, des visions merveilleuses, et qu'elle avait reçu de Dieu de grandes révélations relatives à l'état glorieux de l'Égl. future et au Millenium. Le surintendant Petersen la recueillit dans sa maison, l'admira, fit valoir ses révélations dans un livre intitulé Species facti; mais l'un et l'autre furent bannis 1692 sur la plainte du clergé, et Ton n'entendit plus parler de la visionnaire. Leibnitz, qui l'avait connue, rend hommage à son caractère. ASSEMANI, famille de savants qui ont rendu de grands services à la littérature orientale et ecclésiastique; ils étaient maronites, originaires du Liban; plusieurs ont étudié au collège des maronites à Rome, et sans renoncer à leurs traditions orientales, ils se sont développés dans l'esprit de l'occident. Les plus célèbres sont: io Joseph Simon, docteur en théol., chanoine de Saint-Pierre à Rome, référendaire du pape, custode de la bibliothèque du Vatican, travailleur infatigable, qui a ouvert la voie aux études sur l'histoire des églises de Syrie. Clément XI l'envoya en orient 1715 pour se procurer des manuscrits; il en trouva beaucoup en Égypte, moins à Damas, et il allait partir pour la Mésopotamie, quand il fut rappelé. Il rentra à Rome 1717 avec 150 manuscrits de valeur, et le pape fut si content de son travail qu'il résolut de lui confier une seconde mission, mais il ne parait pas qu'il y ait été donné suite. Il retourna cependant en Syrie en 1735, avec de grosses sommes d'argent, mais sans autre mission que de venir en aide aux catholiques du Liban, maltraités par les Turcs, et de fournir aux maronites les moyens de se construire un nouveau couvent. Il présida en 1736, comme légat du pape, un synode convoqué par le patriarche maronite Jean-Pierre de Gaza, dont il rédigea les délibérations en arabe et les traduisit ensuite en latin. Il n'oublia pas ses collections, recueillit plus de 2000 vieilles médailles et pièces de monnaie, une quantité de manuscrits et sur des plaques de cuivre le texte des privilèges que Domitien avait octroyés aux Égyptiens. Au bout de 3 ans il revint à Rome, et c'est à cette occasion qu'il fut nommé custode, ou gardien de la Bibliothèque qu'il avait enrichie 1730. Le 18 févr. 1740 il fut chargé de faire le discours qui précède d'ordinaire l'élection d'un pape et il recommanda aux cardinaux de choisir un homme à la fois savant, sage et pieux, f 31 janvier 1768. Son principal ouvrage est la Bibtioth. orientait* Clementino-Vaticana, 3 vol. f», 1719-1728 qui contient l'histoire des écrivains syriens, orthodoxes et monophysites. celle des nestoriens, et des détails sur l'hist. de l'Église dans les différents pays de l'orient, depuis l'Arabie jusqu'en Chine. Abrégé par Pfeif-fer, Erlangen 1776. Il a écrit aussi une Grammaire arabe, une Chronique orientale, et commencé sous le titre de Kalendaria ecclesiœ universœ une œuvre digne des bollandistes, renfermant l'histoire de tous les saints de l'orient et de l'occident, dont il n'a paru que 6 vol. 4® comprenant seulement les Slaves et les Grecs. Il publia aussi les œuvres d'Ephrem Sy-rus, et fut aidé dans ce travail d'abord par Pietro Benedetti, puis par son cousin Evode. 2° Joseph Aloys, frère du précédent; prof, de langues orientales au collège de Rome, f 9 févr. 1789. Connu surtout par son Codex liturgicus Ecclesiœ unit?., 13 vol. 4°, ouvrage inachevé, Rome 1749-1766. 3° Etienne-Evode, cousin des précédents, ar-chev. titulaire d'Apamée, Syrie, possédant les plus riches prébendes de l'Italie; orientaliste distingué, jiommé membre correspondant de la Société royale britannique des sciences, concourut avec son parent Joseph Simon à la publication des œuvres d'Ephrem, écrivit les Actes des saints martyrs de l'orient, une Histoire des persécutions romaines, la description d'un certain nombre de mss., et surtout fit un catalog. des mss. orientaux de la biblioth. Mediceo-Lauren-tine. 4° Simon, de la même famille, né en Syrie 1752. f Padoue 1821, a écrit un Essai sur les Arabes avant Mahomet, un Catalogue des mss. orientaux du comte de Nani, et quelques ouvrages sur la littérature orientale. ASTÉRIUS 1° disciple de Lucien, l'un des écrivains qui furent le plus habiles à défendre l'arianisme. f 330. 2<> Évêque d'Amasie, d»ns le Pont, t surnommé Philalèthe, ami de la vérité. On a peu de détails sur sa vie; tout ce que Ton sait, c'est qu'il lut un vaillant défenseur de l'orthodoxie. Presque inconnu jusqu'au i7m« siècle, il prit place tout à coup parmi les orateurs les plus remarquables de son temps, grâce à la découverte de 5 de ses sermons; on en trouva plus tard d'autres encore, dont quelques-uns préchés au concile deNicée, et une dizaine de morceaux inachevés, entre autres un éloge d'Étienne, qu'on a cru longtemps l'œuvre de Proclus, patr. de Constantinople. On lui a attribué à tort plusieurs autres écrits. Il parait avoir joui d'une grande considération en orient. Trad. par Mau-croix et l'abbé Bellegarde. ASTRUC, Jean, 1684-1766, médecin, fils d'un pasteur français, du Languedoc, qui avait abjuré à la suite des persécutions. Il était habile comme médecin et fut attaché au service d'Auguste de Pologne et de Louis XV. puis prof, à Paris. Connu surtout par ses Conjectures sur la Genèse et les documents dont Moïse s'est servi pour la rédiger. ASYLE, endroit inviolable, placé sous la protection d'une puissance supérieure. Chez tous les peuples on a considéré comme tels les lieux consacrés au culte. H y avait là un préjugé populaire, qui fut partout sanctionné par les lois et qui était un frein salutaire contre l'arbitraire, la vengeance et la passion. La loi de Moïse avait ses villes de refuge pour les meurtriers involontaires. Les Grecs et les Romains avaient aussi leurs temples et leurs autels, qui protégeaient ceux qui leur demandaient un refuge. Là où Dieu était, s'arrêtait le pouvoir des hommes et leur droit de juger. Les temples chrétiens bénéficièrent de ces traditions, et les empereurs les réglèrent, tantôt pour les étendre, tantôt pour les restreindre. Théodose II et Honoré, 414 assimilèrent au crime de lèse-majesté la violation du droit d'asyle. Théodose II étendit même ce droit aux parvis, aux cours, aux cellules, aux jardins des temples, à tout ce qui était compris dans l'enceinte des murailles extérieures, 431. Léon I®"1, tout en confirmant ce décret 466, ajouta que le droit d'asyle ne pouvait pas suspendre l'action de la justice. Justinien refusa de l'étendre aux meurtriers et aux adultères. L'Église a toujours regardé comme son devoir de défendre ceux qui recherchaient sa protection. Le concile de Sardique 347 et celui d'Orange 441, ont posé en principe que ceux qui cherchaient un asyle dans les temples ne pouvaient pas être livrés. Le concile d'Orléans 511 confère les mêmes droits à la demeure de l'évéque. Le concile de Tolède 681 décide que les abords des églises, jusqu'à 30 pas, sont également inviolables, et Jean VIII donne à ces 30 pas l'autorité de son nom. Nicolas II. 1059, dit même que pour les grandes églises il faut compter quarante pas. L'Allemagne exclut du droit d'asyle les criminels, et plusieurs papes firent de même. Innocent IU 1200, Grégoire IX 1234, Martin V 1418, Jules II 1504. Le conc. de Trente maintint le principe, mais dès lors, dans la pratique, les rois et les papes le restreignirent de plus en plus, et la loi Siccard, Turin 9 avril 1850, Ta complètement supprimé, avec cette seule réserve que, vu la sainteté du lieu, l'arrestation des criminels doit se faire avec le plus de convenance possible. ATHANASE, patriarche d'Alexandrie, le plus illustre des docteurs de l'Église grecque, et peut-être le plus grand des pères de l'Église, né vers 296 à Alexandrie. Il reçut une éducation libérale et chrétienne, et montra de bonne heure les dispositions les plus remarquables. Il fut reçu dans la maison d'Alexandre, plus tard patriarche, qui le dirigea dans ses études et le nomma son secrétaire. Puis il alla quelque temps vivre avec saint Antoine et retourna à Alexandrie. Nommé successivement sous-diacre 319, puis diacre, il était à l'âge de 20 ans le confident et le conseiller de son évêque Alexandre. Il eut pour collègue Arius dont il dévoila l'hérésie, et en 325 il alla comme simple prêtre au concile de Nicée, où il fut le défenseur le plus puissant de l'orthodoxie. Son talent et son éloquence frappèrent les pères d'admiration, et c'est à lui qu'on doit en grande partie la rédaction du Symbole de Nicèe et la condamnation d'Arius. Un rôle aussi considérable soutenu victorieusement par un jeune prêtre, ne pouvait manquer d'attirer sur lui l'attention publique; aussi lorsque Alexandre mourut, 326, il le désigna comme son successeur au patriarchat. Ce vœu fut approuvé à l'unanimité par le peuple et le clergé. Toutefois Athanase ne tarda pas à trouver des ennemis. Les ariens, qui ne lui pardonnèrent jamais la condamnation de leur chef et de leurs doctrines, s'unirent aux mélé-ciens pour l'accuser, le diffamer et le calomnier auprès de Constantin. Celui-ci reconnut la fausseté de toutes ces accusations, mais travaillé sourdement par les ennemis d'Athanase et par sa sœur mourante, il cita le patriarche devant les conciles de Césarée 334, où il refusa de comparaître, de Tyr et de Jérusalem 335, où il trouva des juges fortement prévenus contre lui; mais il se défendit avec tant d'habileté et de talent qu'il confondit ses calomniateurs. Cependant il ne réussit pas complètement. Ce dernier concile, placé sous diverses influences, prononça l'exil contre lui et il dut se retirer dans les Gaules, à Trêves. Mais cet exil qui dura deux ans, fut pour lui une sorte de triomphe. En 337 Constantin mourut; Athanase fut rappelé à Alexandrie l'année suivante par Constance. De toutes parts on accourait sur son passage, et à son entrée à Alexandrie il fut reçu avec un enthousiasme indescriptible. Il ne resta pas longtemps en repos. Accusé d'immoralité et de crimes, il fut déclaré coupable par un concile de 90 évêques ariens réunis à Antioche et de nouveau exilé pendânt 7 ans; un concile de 100 évêques convoqué à Alexandrie le déclara innocent. Les ariens en appelèrent à Rome; le pape Jules et 50 évêques se prononcèrent en faveur d'Athanase et leur verdict fut confirmé au concile deSardique par 300 évêques d'orient et d'occident. 347. Athanase fut reçu à Alexandrie au milieu des mêmes scènes touchantes qui avaient signalé son premier retour, 348. Bientôt l'emp. Constance, dont l'arianisme avait été modéré par son frère Constant, resta seul au pouvoir. Deux conciles ariens se réunirent sous son patronage à Arles, 353, et à Milan 355, et déposèrent Athanase; il y eut contre lui un renouvellement d'animosité et d'acharnement. Mais le courage du vaillant évêque grandissait avec l'imminence du péril. Il refuse cette fois de partir; le gouverneur d'Alexandrie reçoit l'ordre de le chasser par la force et tandis qu'Athanase officie tranquillement dans l'église, 5,000 soldats apparaissent et le cernent tout à coup; on presse l'évêque de s'échapper, il refuse, ses amis l'entourent, le saisissent et le dérobent aux regards des soldats. Exilé et fugitif pour la troisième fois, le patriarche d'Alexandrie va rejoindre les moines d'Égypte. On le poursuit, on le cherche, les solitaires le cachent et se laissent torturer et massacrer plutôt que de dénoncer le lieu de sa retraite. Enfin, pour les sauver et les débarrasser de sa redoutable présence, Athanase partit et se retira dans les déserts inhabités de l'Égypte, où il resta avec un seul serviteur. Ce troisième exil dura 6 ans pendant lesquels le courageux défenseur de la foi nicéenne composa un grand nombre d'écrits. En 361 Julien l'Apostat monta sur le trône et rappela tous les évêques chassés par son prédécesseur. Athanase revint donc à Alexandrie et sa prédication convertit un si grand nombre d'ariens et d'idolâtres, que les prêtres païens écrivirent à Julien, lui déclarant que si Athanase restait plus longtemps à Alexandrie, on n'y verrait bientôt plus aucun adorateur des dieux. Julien envoya donc l'ordre de chasser l'évêque de la ville, et le gouverneur apposta sur les routes des assassins pour le massacrer. Athanase venait de s'embarquer sur le Nil pour se rendre dans la Thébaïde; tout à coup il change de résolution, il ne quittera pas Alexandrie: Non, dit-il, je veux leur montrer que Celui qui est avec moi est plus fort que ceux qui me persécutent; et il ordonne courageusement à ses rameurs de retourner en arrière. Bientôt ils croisent les assassins envoyés à sa poursuite. Ceux-ci leur demandent s'ils ne l'ont pas vu: Il est tout près, répond Athanase; vous n'avez qu'à bien ramer. Le patriarche rentre à Alexandrie, mais à la prière dés siens il reste caché dans les environs jusqu'à la mort de Julien, qui le tira de ce nouvel exil. Rappelé par Jovien, il fut de nouveau banni par Valens; toutefois il ne partit pas, mais se retira simplement dans les tombeaux, où il demeura 4 mois; au bout de ce temps, Valens effrayé du mécontentement populaire, se décida à le rappeler 367. Dès lors, Athanase, après la vie la plus tourmentée et la plus agitée, resta en possession paisible de son siège jusqu'à sa mort, 373. Il avait été évêque 46 ans; il en avait passé 20 en exil, en sept différentes condamnations. Petit de taille, et d'un extérieur peu remarquable, mais doué de talents hors ligne, Athanase avait un esprit vif, un jugement solide, des connais* sances étendues et une rare éloquence. Cœur généreux, intrépide et bon, ce géant de vie et de foi s'était acquis l'affection sans bornes de son troupeau. La Bletterie le considère comme le plus grand homme de son siècle et peut-être de l'Église. Il a laissé de nombreux ouvrages de controverse, d'histoire, de morale et d'édification; le plus considérable est peut-être son Apologie à l'emp. Constance; on cite encore son Épître aux solitaires, sa Lettre circulaire aux évêques, ses 7 homélies, etc. Fort jeune il avait écrit déjà son traité de l'Incarnation du Verbe, résumé de la doctrine chrétienne. Son style n'est pas toujours élégant, mais il est clair et entraînant. Les auteurs qui lui succédèrent ont souvent puisé dans ses écrits. H. B. Quant au Symbole d'Athanase, dit aussi le symbole Quicunque parce qu'il commence par les mots Quicunque vult salvus esse, il ne mérite le nom d'Athanase que dans le même sens et de la même manière que le Symbole des apôtres mérite le sien, c.-à-d. qu'il résume sa doctrine. mais sans avoir été écrit ni rédigé par lui. Les œuvres d'Athanase ne le mentionnent nulle part; plusieurs articles du symbole font allusion à des questions qui furent soulevées seulement le siècle suivant, entre autres celles relatives à la procession du Saint-Esprit; enfin il ressort de la comparaison du texte grec et *du texte latin, que ce dernier est l'original, mais où, quand, par qui a-t-il été composé? Les opinions divergent beaucoup là-dessus. Le plus probable, c'est que c'est l'œuvre de Vigile de Tapse, qui vivait au nord de l'Afrique à la fin du 5m« siècle. Gieseler cependant le place plus tard, au 7®« ou au 8™ siècle, et suppose qu'il a été composé en Espagne. Quoi qu'il en soit, c'est un magnifique document de la foi chrétienne, et il restera précieux alors même que la science théologique viendrait à formuler autrement et d'une manière moins absolue certaines doc-trines. ATHÉISME. C'est la négation de l'existence de Dieu ou des dieux; les anciens païens avaient déjà leurs athées. L'athéisme peut se présenter dans la théorie comme un système, soit affirmatif, soit négatif; dans la pratique comme une règle de vie morale et de conduite. 11 se confond nécessairement avec le matérialisme, et en admettant l'éternité de la matière, puisqu'aucune puissance intelligente n'était là pour la créer, il doit admettre aussi l'éternité du mouvement, puisqu'on ne saurait comprendre ancune cause qui l'aurait déterminé; il doit admettre enfin l'éternité de toutes les espèces, de l'homme, des animaux et des plantes, avec la seule réserve des modifications que les circonstances extérieures peuvent produire à la longue. Si l'insensé peut dire en son coeur: Il n'y a pas de Dieu, la question reste toujours de savoir s'il y a vraiment jamais eu de véritable athée, et si l'on ne doit pas plutôt comprendre sous une désignation générale et vague les conceptions les plus diverses d'un théisme inconscient ou du panthéisme. Le caractère essentiellement négatif de l'athéisme le réduit à ne pouvoir s'établir par des preuves; il n'est pas une doctrine et n'appartient par aucun côté à la philosophie. Il n'est pas davantage une morale. et il doit dans la théorie faire abstraction de h conscience; l'intérêt personnel tient lieu du devoir, chaque individu résume en lui-même le monde et la vie, tout doit se rapporter à lui comme centre unique, et l'égoïsme est la conclusion logique du système. Ce n'est que par une heureuse inconséquence que les athées peuvent valoir souvent mieux que leurs principes. ATHÉNAGORE, païen de naissance et philosophe platonicien, ou plutôt éclectique, né à Athènes au 2me siècle. Il se disposait à écrire contre les chrétiens et se mit à lire leurs livres; cette lecture fut pour lui une révélation; il abandonna le polythéisme, étant encore assez jeune, et se fit chrétien. Il ouvrit à Alexandrie une éœle dont il fut le directeur. L'époque de sa mort est inconnue. Quelques-uns le regardent, à la suite de Philippe Sidétès, comme le fondateur de l'École catéchétique d'Alexandrie, mais à tort; Eusèbe dit formellement que ce fut Pantène. On a de lui une Apologie de la religion chrétienne adressée 177 aux empereurs Mare-Aurèle et Commode, et un traité sur la Résurrection des morts. ATHOS (Mont-), montagne célèbre, qui a près de 2000® de hauteur et 115 kilom. de circonférence à la base; elle est située dans la Roumélie, à l'extrémité sud de la plus orientale des trois langues de terre qui terminent la presqu'île macédonienne. De temps immémorial, et déjà chez les Thraces, elle a été connue sous le nom de Sainte-Montagne, Monte-Santo; des souvenirs classiques s'y rattachent, ainsi que des souvenirs chrétiens, et les nombreux couvents qui s'y trouvent en recueillent soigneusement les traditions. L'histoire du Mont-Athos, longtemps mystérieuse, n'est sortie de son obscurité que vers le commencement de ce siècle, mais il reste encore bien des questions à élucider, des points à déchiffrer, sur les origines de cet immense groupement d'institutions religieuses monastiques. C'est sous Michel HI, vers 857, qu'il est fait mention pour la première fois des solitaires du Mont-Athos. Vers 960 Atha-nase-Auranias entreprend de civiliser les sauvages habitants de la contrée en les soumettant à une règle. Il prédit à Phocas la victoire sur les Sarasins et reçoit en récompense l'abbaye de Laura, la plus ancienne du pays, ou à peu près. Vers 1045 le patriarche de Constantinople donne à ces monastères une constitution, et proscrit en particulier de la minière la plus sévère la présence de femmes dans la colonie. Les grands couvents de Batipodion et de Xénophon datent probablement de cette époque. Alexis Comnène les combla de privilèges: son nom y est encore en grand honneur, et l'on assure que lui-même y a été enterré, ainsi que Zonaras son secrétaire d'État. En tout cas pendant longtemps ces couvents furent distraits de l'autorité épisco-pale et ne relevèrent que de l'empire. Les croisades décidèrent les orgueilleux moines grecs à se soumettre aux papes, et Innocent IU leur accorda sa protection, mais en les rattachant au siège de Rome. On ne comptait alors pas moins de 300 couvents, grands et petits, dans le territoire de la montagne. Les Paléologues. au XIVme siècle, revendiquèrent leurs anciens droits, placèrent les couvents sons la direction du patriarche de Constantinople et les ramenèrent de nouveau à l'Église grecque. Aujourd'hui l'on compte 21 ou 22 villages ou groupes principaux de monastères, couvents, cellules, construits la plupart au bord de la mer. ayant chacun ses limites bien déterminées, sa rade, sa pêche et son industrie, voir même une citadelle et un arsenal. Les couvents proprement dits ont l'air de forteresses, et quelques-uns sont riches et magnifiques. Le nombre des moines est d'au moins 6000. sans comptér les simples frères laïques; la plupart vivent en commun dans les monastères, mais beaucoup vivent seuls dans des ermitages simples et modestes, dans des cavernes ou dans les bois. Ces derniers, les anachorètes, les ascètes, dont la vie est plus dure, passent aussi pour être plus près de la perfection. La règle n'est pas la même dans tous les couvents. Chez les uns il y a abdication complète de toute volonté entre les mains-de l'abbé, chef, ou Igoumène. Les autres au contraire élisent chaque année une sorte de bureau et décident les questions graves en assemblée générale. Cette organisation démocratique semble même être fort ancienne, et les tentatives des empereurs n'ont jamais pu la faire disparaître entièrement. Aujourd'hui encore cette république de moines, en laissant chaque agglomération se gouverner comme elle l'entend, a pour autorité centrale, non un chef, mais un conseil renouvelé chaque année et qui se réunit dans la charmante petite ville de Karyœs, où il statue sur toutes les questions de discipline et d'administration. Les moines vivent des produits du sol, vin, huile, fruits, légumes; la pêche et diverses industries ajoutent à leurs revenus; mais comme ils ont à payer à la Porte un impôt qui varie de 25 à 100,000 fr. par année, ils ont des collecteurs à l'étranger, sur les rives du Danube, à Moscou, et jusqu'à Tiflis, dont les recettes ne sont pas à dédaigner. Ainsi préoccupés de soucis matériels, les solitaires du Mont-Athos ont perdu leurs traditions scientifiques dont ils étaient si fiers au temps de Zonaras, et ils en sont venus au point que très peu d'entre eux savent lire; ils s'en tiennent à la connaissance du dogme grec-orthodoxe, et aux légendes plus ou moins historiques de la Sain te-Montagne; ils ont aussi la passion de l'Apocalypse. Un essai fait sous Catherine II par Eugène Bul-garis, de Corfou (né en 1716), de relever l'état intellectuel de ces solitaires en fondant au milieu d'eux une maison d'éducation, n'aboutit pas. L'institut alla jusqu'à 200 élèves, mais la jalousie des ignorants suscita de telles difficultés que le patriarche Cyrille de Constantinople dut faire fermer la maison. Eugène partit, se fit une réputation en Russie par ses écrits philosophiques. mathématiques et politiques, demanda en 1774 l'expulsion des Osmans d'Europe, et f 1806 à Pétersbourg, revêtu de la dignité archiépiscopale. L'ignorance continua de régner au Mont-Athos. — De nombreux mss. et de riches peintures ont fait à cette aggrégation de monastères une réputation méritée. Cependant il ne faut pas s'en exagérer l'importance; depuis Walpole, qui en a retiré ce qu'il y avait de meilleur, les collections ont beaucoup perdu de leur valeur première. Déjà lors de la conquête de Constantinople, * les proscrits enlevèrent, pour les transporter en Occident, les mss. qui avaient la plus grande notoriété; ainsi les biblio thèques de Paris et de Moscou possèdent deux des mss. du N. T. du 6m« et du 8me siècle, en lettres onciales et majuscules, qui comptent parmi les plus importants. Il reste peu de chose en fait de mss. classiques, latins ou grecs; davantage en fait de patristique et de monuments ecclésiastiques, mais surtout liturgiques, relativement récents et de peu d'intérêt; quelques mss. de la Bible, une Septante richement ornée, des discours de Grégoire de Naziance, de J. Da-mascène, de Chrysostôme, etc. II y a aussi une collection considérable de livres appartenant à la Réforme en France. Il serait à désirer qu'on pût avoir le catalogue général de toutes ces collections, éparses dans les différents couvents. — L'abord en est relativement facile. ATTO. ou Hattan, second évêque de ce nom à Vercelli, Piémont, f 960. Il vécut dans la plus sombre période de l'Église d'occident, et ses nombreux écrits n'en méritent que plus de fixer l'attention. Outre des Lettres, des Sermons et un Comment, sur les ép. de Paul, il a laissé un Traité de morale, une Protestation contre les empiétements du pouvoir civil, et une collection de Canons qui jettent du jour sur l'état de l'Église de son temps. ATTRITION. C'est dans l'Église catholique la première forme, et la plus imparfaite, de la contrition ou repentance proprement dite; elle provient de la crainte du châtiment. C'est peu de chose, mais cela vaut mieux déjà que l'endurcissement; d'après Hilger, elle correspondrait aux terreurs de conscience des protestants. C'est un minimum, qui peut déjà conduire à la grâce. AUBERLEN, Charles-Aug., né 1824 près de Stuttgart, fils d'un instituteur, étudia à Blau-beuren et à Tubingue, et après deux suffragan-ces, dont l'une avec Hofacker, il fut appelé comme prof, de théol. à Bâle 1851, où il f 1864. Distingué comme prédicateur évangéli-que; auteur d'une Étude (trad. en fr.), sur Daniel et l'Apocalypse, et d'un ouvrage d'apologétique, inachevé: La Révélation divine. AUBERTIN, Edme, né 1595 à Chftlons-sur-Marne, pasteur à Chartres, puis à Paris 1631; connu surtout par son livre sur l'Eucharistie; 2me éd. Genève 1633. f 5 avril 1652. AUBERY, Benjamin, seigneur Du Maurier, ambassadeur en Hollande 1613, conseiller d'État 1615, s'occupa de concilier les partis au synode de Dordrecht 1617-1620, refusa de servir les desseins de Maurice et ne put sauver Barnevelt; ami de Du Plessis-Mornay et de Grotius. f 1636. Il eut onze enfants, dont 9 lui survécurent, 4 fils et 5 filles, presque tous distingués par leurs talents et leur caractère, mais dont un abjura. | AUBIGNÉ (d') lo Théodore-Agrippa, né à Saint-Maury, près de Pons, le 8 févr. 1552, + à Genève 29 avril 1630, l'un des plus illustres champions de la Réforme, fils de Jean, seigneur de Brie, Saintonge, lequel descendait des d'Au-bigny d'Anjou, ce qui lui fit donner par quelques-uns le nom de d'Aubigny, au lieu de d'Au-bigné. Sa mère était Catherine de PEstang. Jean fut un des chefs de la conjuration d'Amboise, et il fat si irrité de l'exécution de ses amis qu*il fit le serment solennel de les venger. Il ne s'y épargna pas, mais la mort l'enleva 4563, avant qu'il eût pu tenir son serment. Le jeune Théodore montra de bonne heure les meilleures dispositions pour l'étude; à 6 ans il lisait le français, le latin, le grec et l'hébreu; à 7 Vi ans il traduisait le Criton de Platon. Après la mort de son père, son curateur l'envoya à Genève, où son esprit lui valut la faveur de Bèze, mais son indiscipline les rigueurs de ses professeurs. D s'enfuit à Lyon, où sa misère devint telle qu'il fut sur le point de se suicider. Dès 1567, âgé de 16 ans, il voulut s'enrôler dans les guerres de religion, mais son tuteur l'en empêcha; ce ne fut qu'en 1568 qu'il réussit à s'évader, presque nu, et en 1574 seulement qu'il entra au service du roi de Navarre, d'abord comme éeuyer on aide de camp, plus tard comme maréchal de camp, comme gouverneur d'Oleron et de Maillerais, enfin comme vice-amiral des côtes du Poitou, de la Saintonge et de Bretagne. Il gagna tous ses grades à la pointe de l'èpée et sur les champs de bataille, par son courage indomptable, la sûreté de son coup d'œil, ses talents stratégiques, et par un dévouement k toute épreuve, qui ne fut jamais bien apprécié ni récompensé. Il avait la parole trop sarcastique et trop hardie. Après les batailles de Jonsac, de Jarnac et de Cognac, il se rendit à Paris, et il aurait péri avec tant d'autres à la Saint-Barthélémy s'il n'eût dû s'enfuir à la suite d'un duel où il avait servi de témoin. Il avait reçu douze blessures au service d'Henri IV, lorsqu'il se brouilla pour la première fois avec ce léger et capricienx monarque, dont il n'avait pas voulu servir les illégitimes amours, 1577. Il se réconcilia cependant avec lui pour la guerre dite des Amonreux, épousa en 1583 Suzanne de Lézav, se brouilla de nouveau à La Rochelle avec Henri à cause de « toutes ses picoteries, » et se retira pour 6 mois dans ses terres. Il reprit du service en 1590, assista au combat d'Arqués, aux denx sièges de Paris, à la bataille d'Ivry,au siège de Rouen, mais quitta définitivement la cour pour plusieurs années après l'abjuration d'Henri IV. En 1596 il jura l'Union protestante à Loudun, et se montra dans les assemblées de Vendôme, Saumur et Chatellerault, parmi les trois ou quatre t qui s'affrontèrent le plus hardiment » avec les députés du roi. En 1600 il discuta pendant 5 heures avec l'évêque d'Évreux, devant plus de 400 personnes de marque des deux religions, et composa à cette occasion un traité De di$$idii$ Patrum (des contradictions des pères) qui est malheureusement perdu. Il s'opposa au projet d'accord entre les deux religions, que le roi avait préparé, et réussit à le faire échouer; il avait entrevu le piège, et acculé le cardinal Du Perron au pied du mur. Lors des affaires de la succession de Clèves et de Juliers, il fut chargé de diriger une expédition au cœur même de l'Espagne; il prit congé du roi 1610; il ne devait plus le revoir. A son retour la reine était régente; d'Aubigné l'assura, au nom des églises, de leur parfaite soumission à la régence, « étant d'une religion en laquelle personne ne pouvait les dispenser de la subjec-tion qu'on doit aux rois selon la Parole de Dieu, » ce qui fit dresser les oreilles au p. Cot-ton. L'exemple d'Henri IV avait trouvé des imitateurs; un grand nombre d'apostasies se produisirent par les soins de la reine et de La Varenne; quelques ministres même furent enlevés par la contagion. D'Aubigné resta fidèle, et prononça 1615 k Nîmes le serment d'union, mais après le traité de Loudun, qui fut « comme une foire publique de perfidies et de lâchetés, il se démit de toutes ses fonctions et partit pour Genève, où il arriva, non sans peine et sans périls, le I sept. 1620. Il y fut reçu avec de grands honneurs, banquets, etc., ainsi qu'à Berne et k Bâle, deux villes pour les fortifications desquelles il fut consulté et écouté. L'ambassadeur de France en Suisse lui suscita des difficultés de toute nature, mais ne put empêcher son mariage avec Renée Burlamachi. Il passa ses dernière* années paisiblement à Genève et s'éteignit dans sa 80m« année; il fut enterré dans le cloître de la cathédrale. — Parmi ses ouvrages, outre le De dimdiis dont il a été parlé, il faut nommer le Printemps (publié par Ch. Read), la tragédie de Circé, auj. perdue; les Tragiques, long poème satirique de 9000 vers, en 7 livres, plein de vigueur, mais médiocre comme œuvre d'art; la Confession cathol. du Sr de Saucy, qui abjura deux fois, mordante satire; les Aventures du baron Fœneste, où il met en scène le duc d'Alençon, mignon d'Henri III; son Hist. universelle de 1550-1601, très hardie, mais plus française qu'universelle; son autobiographie, Hist. secrète de Théod.-A. d'Aubigné, et divers autres ouvrages moins considérables. 2° Constant d'A., son fils aîné, fils de Su-sanne de Lézay, né 1584, f 1645 k la Martinique, déshonora son nom par ses dépenses, ses débauches et ses trahisons. Devenu catholique, il obtint du pape un bref qui lui permettait « d'assister au prêche et de participer à la Cène des Réformés, » de manière k pouvoir surprendre leurs secrets et trahir son père; il prononça même le serment d'union à Nîmes 1615. II livra à Schomberg ce qu'il avait appris du gouvernement anglais quant à l'expédition do La Rochelle, et son père le voua dès lors k l'exécration de sa famille et rompit pour toujours avec lui. Après avoir tué sa première femme, Anne Mansaud, il épousa le 27 oct. 1627, Jeanne de Cardillac, avec laquelle il par-tit 1639 pour la Martinique, où il joua et perdit tout ce qu'il possédait. 11 fut père de Charles, gouverneur du Berry, et de Françoise, née le 27 nov. 1635, qui devint plus tard la marquise de Main tenon et la femme de Scarron. Constant mourut dans la misère vers 1645. 3° Nathan d'A., fils cadet, illégitime, de Théodore, et de dame Jaquette Chayer, né 1600 à Nancray, Gâtinais, vint à Genève 1620, fut reçu médecin à Fribourg en Brisgau 1626, épousa Claire Palissari 1621, puis Anne Crespin en secondes noces 1632, fut appelé au conseil des CC. 11 f 1669, laissant plusieurs enfants, dont un fils, Tite, né à Genève 1634, exerça la médecine, et un autre, Samuel, fut successivement pasteur à Renan, Bévillars et Val de Tavan-nes; + 1710. Nathan a écrit quelques traités sur la chimie, v. Notice sur la famille Dubois 1883. C'est par les femmes que s'est conservée à Genève et à Vevey la descendance de Nathan, dans les familles Dubois, Merle, etc. AUDIENS, Audius, v. Anthropomorphisme. AUGER, Édouard, jésuite, né 1515 à Alle-man, près de Troyes, commença sa carrière à Rome comme garçon de cuisine dans un couvent de jésuites et fut admis dans l'ordre par Ignace lui-même. De retour en France, il se distingua par son zèle à convertir les protestants, combattit Viret, tomba entre les mains du baron des Adrets, mais réussit, grâce aux pasteurs, à avoir la vie sauve, et devint confesseur d'Henri III. Les ligueurs le forcèrent à quitter la France, f à Côme 1591. Auteur du Catéchisme français 1563. AUGIER, pasteur à Châlons-sur-Marne 1685, abjura sous le coup des menaces de l'Éditde révocation, et pour ne pas se voir séparé de sa femme et de ses 4 enfants. Mais à peine libre il se regarda comme dégagé d'une promesse arrachée par la violence. Il se réfugia à Berlin où il donna « des marques d'un repentir fort édifiant. » Il fut nommé pasteur à Halle 1688. AUGSBOURG, ville de Bavière, ancienne cité impériale jusqu'en 1806, célèbre dans l'histoire ecclésiastique par les événements importants dont elle a été le témoin: Diète d'Augsbourg. En suite de la protestation des princes allemands à la diète de Spire, le 20 avril 1529, l'empereur fut amené à convoquer une nouvelle diète à Augsbourg, mais dans l'intervalle il avait fait la paix avec la France et s'était réconcilié avec Clément VII, s'engageant & réprimer le mouvement réformateur en Allemagne. Il avait été couronné empereur et roi de Lombardie, à Bologne, par le pape lui-même, le 24 févr. 1530, et n'était guère bien disposé en faveur des protestants. Cependant il convoqua les princes le 21 janvier pour le 8 avril, insistant beaucoup plus dans sa lettre de convocation sur la question des Turcs qui venaient de menacer Vienne, que sur la question religieuse. L'électeur Jean de Saxe chargea Luther, Jonas, Bugenhagen et Mélanch-thon de rédiger les points de doctrine et de foi sur lesquels il importait le plus de fixer l'attention de la diète. En réalité c'est Mélanchthon qui fit seul ce travail, en s'aidant des conseils de ses amis. Il l'intitula Apologie; mais l'histoire en a appelé le résumé La Confession de foi d'Augsbourg. L'électeur partit le 3 avril avec plusieurs princes et une suite de 160 personnes. Ils arrivèrent le 16 à Cobourg, où l'électeur laissa Luther en arrière, soit par égard pour l'empereur, soit qu'il redoutât l'éloquence passionnée du réformateur, soit plutôt qu'il craignît pour ses jours. L'empereur n'arriva que le 15 juin; la Fête-Dieu avait lieu le 16, les princes protestants refusèrent de se joindre â la procession. La diète s'ouvrit le 20 par une messe; les princes y assistèrent, mais ne s'agenouillèrent pas. Les ambassadeurs d'Autriche et de Carinthie furent entendus les premiers sur la question turque. Quant à l'Apologie, rédigée en allemand et en latin, et déjà signée à double par les princes évangéliques (Jean de Saxe, Georges de Brandebourg, Ernest de Lttnebourg, Philippe de Hesse, Jean-Frédéric de Saxe. François de Lttnebourg, Wolfgang d'Anhalt, et les magistrats de Nuremberg et de Reutlingen), le parti catholique fit tout pour en obtenir le simple dépôt et pour en empêcher la lecture. Les princes ayant insisté à trois reprises, Charles leur accorda leur demande, mais à condition qu'on ne lirait que le texte latin; nouvelle discussion, les princes voulant au contraire que leur déclaration fût lue en allemand. On finit par le leur accorder, mais en transférant l'assemblée de la grande salle de l'Hôtel de ville dans une petite chapelle qui ne pouvait contenir que 200 personnes. C'est le samedi 25 juin à 4 h. que le Dr Christian Bayer commença sa lecture, au nom de l'électeur de Saxe, et d'une voix si haute et si distincte qu'il put se faire entendre de tous ceux qui se pressaient dans la cour et aux abords de la chapelle. La lecture dura deux heures, et produisit une immense impression. Après avoir rappelé l'autorité des SS. Écritures et la tradition des premiers siècles, le mémoire établissait que les protestants étaient les seuls vrais catholiques. Les signataires animés d'un esprit de paix et désireux, comme l'empereur, de travailler à maintenir la concorde dans le pays, se déclaraient disposés à remettre leur travail pour être examiné soit par la présente, soit par une future diète, ou, si Ion préférait, par « un concile général, libre et chrétien, t Le document se terminait par an exposé en 21 articles de la doctrine évangélique, sans affectation de formules théoloffiques, et par 7 articles relatifs aux abus de l'Eglise romaine. Le prince Albert de Mayence reçut l'exemplaire allemand; l'empereur prit l'exemplaire latin et l'emporta avec lui à Bruxelles. Ces deux exemplaires ont disparu. L'empereur dit qu'il l'examinerait, et que provisoirement il en interdisait l'impression; mais une copie inexacte en ayant été publiée quelques jours après, les princes durent, avant que la diète se séparât, en publier le texte authentique. Les théologiens catholiques en présentèrent le 12 juillet à l'empereur une réfutation, mais conçue en termes si violents que celui-ci la déchira en morceaux; de 280 feuillets il n'en échappa que 12. Une autre Confutation, rédigée en grec et en latin, plus modérée de forme, fut lue le 3 août, mais si faible de fonds qu'on n'osa pas en communiquer le texte aux évangé-liques; elle fut imprimée en allemand 1572, en latin 1573. Érasme, qu'on avait consulté dans l'intervalle, avait conseillé aux catholiques, et notamment au cardinal Campegio, de céder sur le célibat des prêtres, les vœux monastiques et la communion sous les deux espèces. L'empereur, se réservant toute décision ultérieure, décida que provisoirement les États évangéliques devaient rester soumis à la foi romaine. Mais cette décision resta sans effet; les princes protestèrent; Philippe de Hesse partit le 6 août, impatienté; ceux qui restèrent jusqu'à la dernière session, 29 nov., ne firent aucune concession et s'ils n'obtinrent aucun résultat matériel, ils eurent le double avantage, d'abord d'avoir affermi leur position, en se faisant mieux connaître, puis d'avoir acquis dans la Confession et dans l'Apologie deux livres symboliques, qui, avec les catéchismes de Luther, forment aujourd'hui encore la base et le point de ralliement des églises luthériennes. Intérim d'Augsbourg. Le concile de Trente ayant été convoqué par le pape et placé sous sa direction immédiate, il ne pouvait être reconnu par les protestants; moins encore après qu'il eut été transféré à Bologne, mars 1547. L'empereur dut renoncer à l'espoir qu'il avait de voir ce concile amener une pacification des esprits, et les princes protestants ayant déclaré à la diète d'Augsbourg, sept. 1547, qu'ils s'en remettaient à lui du soin de maintenir l'ordre et de fixer un mode de vivre jusqu'à la réunion d'un concile indépendant du pape, Charles, après avoir consulté des ecclésiastiques des deox cultes, publia le 15 mai 1548, sous le nom d'Intérim d'Augsbourg, une ordonnance en 26 articles, faisant la part de chacun et par conséquent ne pouvant satisfaire ni l'un, ni l'autre. Les protestants étaient plus ou moins sacrifiés; cependant on leur accordait le mariage des prêtres, la communion sous les deux espèces, et la jouissance des églises et biens ecclésiastiques dont ils étaient en possession. Quant aux catholiques, ils en voulaient à l'empereur de ces concessions, et surtout du droit qu'il s'était arrogé de trancher des questions religieuses. Plusieurs princes évangéliques se soumirent à l'Intérim, quoique à regret; les autres s'y refusèrent, et l'empereur essaya de la force pour les contraindre. Les troupes impériales occupèrent les provinces et les villes récalcitrantes, et un grand nombre de pasteurs durent s'enfuir, plus de 400 dans les seules provinces du nord. Le peuple se moquait de l'Intérim, où il trouvait l'anagramme de mentiri; d'autres l'appelaient interitus; à Magdebourg on prêchait que l'homme ne serait sauvé ni par intérim ni par exterim, mais par la Parole de Dieu seule. Les princes protestants ajoutaient que, si on laissait faire, on les obligerait bientôt à apprendre aussi l'espagnol. Aussi, malgré les rigueurs impériales, l'opposition fut assez forte de part et d'autre, protestants et catholiques, pour que l'Intérim n'ait pas été partout scrupuleusement respecté. Paix d'Augsbourg, ou 2 '^ paix de religion. Fatigué de luttes où son autorité temporelle s'était montrée impuissante, et n'entrevoyant aucun moyen de réduire les princes évangéliques, Charles-Quint pressé par les Français, comme Ferdinand l'était par les Turcs, finit par comprendre que ce qu'il avait de mieux à faire, c'était de ne pas diviser son royaume, et de laisser à tous les princes leur liberté en matière de religion. Il s'y décida à la diète qui s'ouvrit le 5 févr. 1555. La position des princes était devenue moralement plus forte: ils avaient pour eux le temps et le fait accompli; ils avaient avec eux les populations; la question d'un concile était abandonnée; il ne restait plus qu'à régler certains détails relatifs aux propriétés ecclésiastiques, et elles furent réglées dans le sens de la possession. Le décret de liberté, mais pour les catholiques et pour les évangéliques seuls, prit la date du 25 sept., et malgré plusieurs réserves, il fut salué par les protestants comme un grand bienfait: il accordait ce que Luther avait demandé dès le commencement à la conférence de Leipzig, l'indépendance vis-à-vis du pape et des conciles. AUGURIUS, v. Fructuosus. AUGUSTI, Jean-Christian-Wilhelm, né 1772 à Eschenberg, petit-fils d'un prosélyte juif, prof, à Iéna, à Breslau et à Bonn, f 1841. Théologien fécond, auteur d'une Archéologie chrét., et d'une Hist. des dogmes. Sans être strictement orthodoxe, il a des instincts conservateurs et ne s'écarte guère du dogme et de la liturgie admis par l'égl. du pays. AUGUSTIN 1° Aurelius Augustinus, sans contredit le pins illustre des pères de l'Église latine, supérieur à son maître Ambroise, par l'étendue de ses connaissances et la profondeur de son esprit; à saint Jérôme par son double caractère théologique et philosophique; à Gré-goire-le-Grand, parce que c'est son génie chrétien qui Ta formé. Il apparaît au moyen âge comme le père de la théologie scolastique, et il est également réclamé par l'école mystique. L'Église latine le révère comme son plus grand docteur, et les églises évangéliques le regardent comme un des leurs. Luther fut en quelque sorte son disciple immédiat, et le jansénisme est né sous son influence. Il a l'énergie de Tertul-lien, le zèle et la prudence de Cyprien, ses deux prédécesseurs sur la terre d'Afrique. Augustin naquit le 15 nov. 354, à Tagaste en Numidie, d'un père païen, Patricius, qui lui légua un caractère passionné, et d'une mère chrétienne, Monique, pour laquelle il conserva toute sa vie le plus tendre respect. L'orgueil et l'amour des plaisirs furent de bonne heure les dangers de son âme ardente; l'étude, avec la perspective de devenir un illustre rhéteur, fut un autre piège; les voluptés de Carthage et du culte d'Astarté, lui furent fatales. A 19 ans il était père, et dans le pieux sentiment des devoirs que lui imposait cette paternité irrégulière, il nomma son fils Adéodat (donné de Dieu = Diodati, Théodore, Dorothée, etc.). De ce moment aussi il devint plus sérieux; il chercha la sagesse, non seulement celle de l'intelligence, mais celle qui régit la vie et qui garde le cœur. Le manichéisme le séduisit d abord par ses fallacieuses promesses et par son caractère esthétique; mais il en vit bientôt le fond, et l'immoralité des initiés le détourna de la doctrine. Il espérait trouver dans le néo-platonisme plus de paix; il devint idéaliste, mais là aussi il ne rencontra que le vide; il se sentait sans force dans la lutte de l'esprit contre la chair. Il passa 11 ans dans cet état, faisant les expériences que saint Paul raconte Rom. 7, jusqu'à ce qu'enfin il comprit le besoin qu'il avait d'un Rédempteur. Les souvenirs de sa jeunesse et les prières de sa mère l'amenèrent à sentir ses péchés et à se donner à Jésus-Christ. Après avoir successivement enseigné la rhétorique à Tagaste et à Carthage, il se rendit par Rome à Milan où il entendit Ambroise. Un de ses compatriotes, Simplicien, lui raconta la conversion d'un ami, le platonicien Victorin; un soldat, Pontitien, lui raconta la vie d'Antoine-le-solitaire; des voix d'enfants qui criaient ou chantaient: Prends et lis! tout concourut à tourner ses pensées vers l'étude des Écritures; il devint catéchumène, et à l'âge de 33 ans, à Pâques 387, il fut baptisé par Ambroise, ainsi qu'Alypius son ami d'enfance et son jeune fils Adéodat. Il passa ensuite 10 mois à Rome, où il perdit sa mère, puis retourna en Afrique après avoir vendu ses biens au profit des pauvres. Il y vécut dans les environs de Tagaste avec quelques jeunes amis, s'adonnant à la prière, au jeûne et à la méditation. Consacré prêtre en 391 malgré sa résistance, il fut bientôt appelé, à la suite d'une prédication de son évêque Valère, à partager avec lui les fonctions épiscopales, et en 395 il lui succéda définitivement à Hippone. Il continua sa vie ascétique, vivant avec les jeunes chrétiens qu'il préparait au saint ministère, écrivant, prêchant, improvisant d'ordinaire pour répondre aux besoins du moment, et il fut l'instrument d'un grand nombre de conversions, de celle entre autres d'un marchand manichéen. En 396 il avait désigné Héraclius pour son successeur, mais il vécut encore 33 ans, et f à Hippone le 28 août 430, âgé de 76 ans, pendant que la ville était assiégée par les Vandales. Il a énormément écrit; il avait déjà commencé à Milan, et il continua jusqu'à la fin. Outre ses ouvrages polémiques contre les donatistes, les manichéens et les pélagiens, on a de lui des Lettres, des Sermons, de nombreux Commentaires, des Traités sur la grâce et le libre arbitre, qui l'ont fait surnommer le Docteur de la grâce; la Cité de Dieu, qui est son chef-d'œuvre, et ses Confessions, son livre le plus populaire, dans lequel il raconte ses luttes, ses péchés, ses doutes et l'histoire de sa conversion. Les bénédictins ont publié ses Œuvres complètes en 10 vol. fl>. Paris, 1679; les frères Gaume les ont réimprimées en 11 vol. grand 8°, Paris 1835-40. Plusieurs ouvrages ont été publiés à part, entre autres les Confessions, par Arnaud d'Andilly. Sa Vie a été écrite par son jeune ami Possidius, plus tard par Tillemont. Rome et Pavie se disputent l'honneur de posséder ses restes. La corruption de l'homme et l'influence sanctifiante de Dieu sont les idées dominantes de la dogmatique d'Augustin. Cependant il faut distinguer en lui deux périodes. Dans la première il avait devant lui les manichéens, et il crut devoir accorder quelque chose à l'activité de l'homme; il établit qu'il dépend de la volonté de l'homme de se rendre propre par la foi à recevoir la grâce divine, ou de se soustraire à cette grâce par la résistance et l'incrédulité; la prédestination ne serait autre chose que la prescience de Dieu. Dans la seconde, 396-430, il se fit un changement intime dans sa théologie; il reconnut que la foi est purement l'œuvre de Dieu et de cette opération irrésistible quœ ita $uadet ut persuadait, qui conseille de telle sorte qu'elle persuade. C'est dans ce sens qu'il s'exprima aux deux conciles d'Afrique, Carthage 412 et Milève où le pélagiamsme fut condamné. 2° Augustin, apôtre de l'Angleterre, fut envoyé de Rome par Grégoire, avec Laurent, Pierre et une quarantaine d'autres missionnaires, pour évangéliser ce pays encore barbare et dont ils ne comprenaient pas même la langue. Ils arrivèrent en Angleterre en 597, et après avoir surmonté les premiers découragements, ils annoncèrent rÉvangile au roi saxon, Ethelbert, qni leur répondit: Vos paroles sont belles, mais entièrement nouvelles, et avant de croire, nous devons d'abord examiner. Il leur permit de s'installer à Doroborn (Cantorbéry), lieu de sa résidence, il mit à leur disposition une ancienne chapelle qui s'y trouvait, et bientôt beaucoup d'âmes se convertirent. Le roi lui-même se fit baptiser, et son exemple, sans qu'il exerçât (Tailleurs aucune pression sur son peuple, trouva de nombreux imitateurs; Grégoire parle de dix mille qui auraient été baptisés le jour de NoSl. De retour en France, Aug. reçut de l'archevêq. d'Arles la consécration épiscopale, et envoya deux de ses collègues à Grégoire pour lui donner des détails sur l'œuvre. Grégoire, répondit par Penvoi de nouveaux collaborateurs, de moines et de livres, Bibles ou fragments du N. T. Augustin fut nommé primat de l'Angleterre, consacra plusieurs évêques et fixa son 9iège à Cantorbéry. Grégoire avait donné à ses missionnaires l'excellent conseil de ne pas trop s'astreindre au culte et aux rites romains, mais il avait maintenu la hiérarchie et Aug. alla plus loin encore dans cette voie. Il désirait réunir les nouveaux chrétiens avec les anciens bretons; une première conférence eut lieu, mais n'aboutit pas. Un concile fut ensuite convoqué sur la frontière du Wessex, mais il fut sans succès encore, parce que lorsque les évêques de l'ancienne église bretonne se présentèrent, Aug. les reçut assis, au lieu de se lever pour leur faire honneur; ils se retirèrent blessés; Aug. les poursuivit de paroles violentes et leur déclara la guerre, t laissant sa succession à Laurent. AUGUSTINS (les). Ordre de religieux mendiants, qui prétendent remonter à Augustin lui-même et à la société de jeunes ascètes qu'il avait réunis à Tagaste et qu'il continua de protéger quand il fut devenu èvêque. Cette origine est très improbable. C'est au 12me siècle qu'ils apparaissent pour la lr« fois; Innocent IV, le 17 janv. 1244 leur donne la règle dite de saint Augustin; Alexandre IV, en 1256, réunit en un seul corps les religieux qui suivaient à peu près la même règle et leur donna Lanfranc pour général et le cardinal Richard pour protecteur. Le costume était noir. L'ordre finit par compter jusqu'à 42 provinces, 2000 couvents et 30,000 membres. Entre autres privilèges que leur concédèrent les papes, il faut compter celui de fournir le sacristain de la chapelle papale. Les au-gustins ont produit quelques saints qui ont été canonisés; c'est aussi de leur sein qu'est sorti Martin Luther. En 1574, Thomas de Jésus rétablit en Portugal la rigueur de l'ordre, et donna naissance aux augustins déchaussés qui se répandirent en Espagne, en France, en Italie, et même au Japon. Les principaux couvents des augustins étaient celui de Rome, fondé 1483 par l'archev. de Rouen, et celui des Grands-Augustins (ou Vieux-Aug.) fondé à Paris 1259. Les Augustines sont des religieuses qui disent remonter à Perpétua, la sœur de saint Augustin, et suivre la règle donnée par ce père. Elles se consacrent au soin des malades et au service des hôpitaux. Leur plus ancien couvent fut fondé à Venise 1177 lors du séjour d'Alexandre III; la princesse Julie, fille de Frédéric I*', en fut la première abbesse. Elles se subdivisent en plusieurs sous-ordres: augustines déchaussées, sœurs de la Recollection, de Saint-Thomas de Villeneuve, etc. AUMONIER, Aumônerie. Charge que l'on trouve, dès le 13^6 siècle, à la cour des rois de France; il y avait tantôt un, tantôt plusieurs aumôniers, chargés de distribuer les libéralités du monarque. Au 15*n« siècle, le grand aumônier était Jean de Bely, èvêque d'Angers. Tout le clergé de la cour lui était soumis; il avait en outre à donner son préavis sur la repourvue des évêchés et des bénéfices vacants, ce qui lui assurait une grande influence. Ces fonctions furent supprimées à la Révolution. AURELIEN, Lucius Domitius, emp. romain 270, f 275 assassiné. Toujours en guerre, il prit Palmyre et enchaîna Zénobie à son char de triomphe. D'abord favorable aux chrétiens, il finit par rendre contre eux de sévères édits. AURELIUS de Carthage, d'abord diacre dans cette ville, en fut nommé archevêque en 388. Il était ami d'Augustin, et sur ses conseils, réunit en 412 un concile à Carthage contre les do-natistes. Ce fut aussi dans ce concile que, pour la première fois, le pélagianisme fut condamné dans la personne de Célestius, disciple de Pé-lage. En 416 Aurélius réunit un nouveau concile où Pélage lui-même fut condamné, f 423, entouré du respect et de la considération des siens. AURÉOLE, v. Nimbe. AURIFABER, l'édite^ des Propos de table de Luther, s'appelait Goldschmidt, Jean, né 1519, il étudia à Wittenberg, se montra toujours ardent luthérien, et f 1575 pasteur à Erfurt. AUSTRALIE, v. Polynésie. AUTBERT, moine qui accompagna Anschar dans sa mission en Danemark, vers 826, mais qui dut bientôt se retirer pour cause de santé, 829. Il mourut peu après au couvent de la Nouvelle-Corbie. AUTEL, sorte de table originairement destinée aux sacrifices, et qui se retrouve parmi les objets du culte dans tous les temps depuis Abel, et dans tous les pays. On l'élevait souvent en plein air, et il consacrait ainsi la colline ou le bois où il était dressé; de là les hauts*lieux et les bosquets païens de TA. T. Il était fait quelquefois de terre gazonnée; chez les Hébreux, de pierres brutes; plus tard et notamment dans l'Église primitive (2me et 3m* siècles) de bois, plus ou moins ornementé. L'Église latine, à dater de Constantin, fit ses autels en marbre; l'Église grecque continua de les avoir en bois. La forme en était d'ordinaire carrée, forme symbolique chez tous les peuples; cependant quelquefois ronde, chez les Grecs et les Romains. Les autels sont le plus souvent fixes, trop considérables pour être transportés; quelquefois mobiles et portatifs, suivant les besoins. En occident il pouvait y avoir dans une même église 3 ou 4 autels; chez les grecs, un seul; et si pour une fête ou pour une cérémonie, il en fallait plus d'un, on se servait iïantimenses (remplaçant la table), espèce de drap consacré, qu'on étendait sur une table et qui avait le don de la transformer momentanément en autel. L'ornement de ces objets du culte se trouvait soit dans leur architecture, soit dans la matière dont ils étaient faits, soit dans les statuettes, crucifix, lustres, calices, tapis, dont ils étaient couverts; enfin dans les tableaux dont ils étaient entourés. Chez les chrétiens, le vendredi-saint tous ces ornements disparaissent ou sont recouverts d'un drap noir. Les anglicans et surtout les luthériens ont seuls, parmi les protestants, conservé le symbole de l'autel, qui n'est autre chose d'ailleurs que ce qu'on appelle en général la Table de communion. Les catholiques y voient un autel véritable sur lequel les prêtres offrent le sacrifice de la messe. Des reliques sont souvent enfermées dans leurs châsses, au-dessous ou dans l'intérieur de l'autel. On appelle maitre-autel celui qui est placé dans le chœur, et l'on a donné le nom d'autels privilégiés à ceux où il est permis de célébrer la messe des morts les jours où l'on ne peut la dire aux autres autels. AUTO-DA-FÉ, mot espagnol qui signifie Acte de foi. C'est ainsi que le clergé espagnol d'abord, puis le peuple, appelaient l'exécution solennelle des sentences prononcées par l'inquisition contre les hérétiques condamnés au supplice du feu. Ces affreux spectacles, habituellement précédés d'un sermon, avaient lieu en général le dimanche au lever du soleil; ils étaient encore plus courus que les combats de taureaux; la cour et le peuple les recherchaient avidement. Après le service à l'église, les malheureux qui n'avaient pas abjuré étaient livrés au bras séculier, revêtus de robes et de bonnets jaunes couleur soufre, ornés de diables noirs et de flammes , dits sanbénito, et conduits au lieu de l'exécution sur des ânes ou accompagnés d'al-guazils. Les hurlements des victimes étaient couverts par les applaudissements de la foule. Ce gente de fêtes a cessé à la fin du siècle dernier, mais l'Espagne actuelle en porte encore le châtiment et le portera probablement toujours. Les autodafés du Portugal, de l'Italie et de la France différaient de ceux de l'Espagne par certains détails; en tout cas ils furent moins nombreux et ne se sont pas fait la même réputation. AUTRICHE. Ce petit archiduché qui a fini par devenir un grand empire, au point qu'il a pu prendre pour devise les cinq voyelles et les traduire en latin par Austriœ Est Imperare Orbi Universo ( A l'Autriche il appartient de commander au monde entier), a eu l'heureuse fortune de s'agrandir par des alliances et non par des conquêtes. De là cet alexandrin: Bell* garant aUi, ta, îclix Aastria, nube ! (Que d'autres guerroient; toi, l'heureuse Autriche, épouse!). On verra aux articles spéciaux ce qui concerne les divers pays de cette puissante monarchie. Nous nous bornons ici à quelques indications de statistique religieuse. La population totale de l'empire étant de 36 millions d'habitants, elle se décompose en 24 millions de cathol. latins, 4 millions de cath. grecs-unis, 3,400,000 protestants, dont à peu près les deux tiers sont réformés; 3 millions de grecs-orientaux, 1,276,000 israélites. On compte dans l'empire 11 archevêchés et 41 évêchés. Un concordat du 18 août 1855 règle les rapports de l'Église avec l'État, mais tous les cultes jouissent d'une certaine liberté, surtout depuis 1867. AUXENCE, deux noms compromis dans les controverses ariennes. 1° Cappadocien, nommé évêque de Milan en remplacement de l'orthodoxe Denis exilé par Constance 355. Les orthodoxes ayant repris le dessus sous Damase 369, condamnèrent i'arianisme dans un concile, mais n'osèrent pas prononcer l'anathème contre le protégé de Valentinien Ier. Il garda son siège jusqu'à sa f 374, et fut remplacé par Ambroise. 2° Scythe d'origine, nommé Mercurin, appelé à l'évêché de Milan par Justine, veuve de Valentinien 1er et tutrice de Valentinien II. Elle exigea d'Ambroise, à Pâques 385, qu'il cédât une de ses églises à Mercurin et envoya des soldats pour l'y contraindre, mais sans succès. En 386, édit impérial proclamant I'arianisme religion de l'État, et peine de mort contre ceux qui résisteraient. Ambroise résista et le peuple avec lui. Là-dessus Mercurin, qui avait pris le nom épiscopal d'Auxence, invita Ambroise à une discussion qui aurait lieu au château avec l'empereur pour juge. La ruse était trop grossière; Ambroise évita de se constituer prisonnier et répondit qu'en matière de foi c'était aux conciles et non aux empereurs de décider. Dès lors il ne fut plus question de ce faux évêque et Justine dut abandonner son projet. AVE MARIA. « Je te salue, Marie, » Luc 1, 28. Cette salutation de l'ange à Marie est devenue, à une époque relativement moderne, la prière la plus populaire de l'Église catholique. (Test dans la moitié du il1* siècle que Pierre Damiani cite pour la ire fois le fait isolé d'un prêtre qui récitait tous les jours la salutation tout entière. Bientôt on se contenta des deux premiers mots. Odon, évêque de Paris, la recommanda vers 1196 avec le Pater et le Credo comme exercice journalier. Au 13me siècle elle devint une règle générale, et les Vaudois refusèrent de s'y soumettre en faisant observer que ce n'était pas une prière. A la formule primitive on ajouta peu à peu les mots de Luc 1,42, puis d'autres pour donner un sens à la salutation. L'ave forme la base de la dévotion du rosaire. Depuis la fin du 15®e siècle, les prédicateurs prirent l'habitude de prononcer un Ave après l exorde; sous Louis XIV c'était même devenu la règle et l'on en voulut à Fénelon d'avoir tenté de s'en dispenser. La répétition d'un certain nombre d'ave est devenue une pénitence. ÀVENT, latin adventus, approche, arrivée. On appelle ainsi les 4 semaines qui précèdent Noël. La plus ancienne mention de cet usage ecclésiastique se trouve dans 2 sermons de César d'Arelate, f 542, et dans un décret du concile de Lerida 524 qui interdit les mariages pendant le carême et l'aven t. Le synode de Tours 367 imposa le jeûne aux moines pendant ces fêtes de préparation, et le synode de Mâcon 581 l'ordonna aux laïques, au moins 3 fois par semaine (lundi, mercr., vend.). On supprima même le Gloria dans la messe, et l'on se demanda si l'on ne ferait pas bien de supprimer aussi les orgues. Il fallut un arrêté spécial du saint-siège, 15 avril 1753, pour rassurer à cet égard les consciences timorées. Les images sont voilées, les autels et les murailles sont recouverts de tentures violettes, couleur du deuil ecclésiastique. Le rose n'est admis que le dernier dimanche de l'A vent. Pendant longtemps en France l'A vent a duré 40 jours; il commençait le 11 nov. avec la Saint-Martin. Chez les grecs et dans le rite ambrosien il commence le 14. Aujourd'hui c'est, dans l'Égl. catholiq., le dimanche après la Saint-André (dO nov.) qu'il est censé commencer; chez les luthériens, de même; les anglicans jeûnent à partir du 13 déc. AVICENNE (Abou-Ibn-Sina), célèbre philos, et médecin arabe; né vers 980 à Chiraz, Perse, étudia à Bokhara, se fit une immense réputation en Asie, fut vizir et médecin de plusieurs princes, étudia Aristote l'un des premiers, composa plusieurs ouvrages de logique, métaphysique, médecine, et f 1037 à Hamadan, épuisé à la fois de travail et de débauches. On l'appelle l'Hip-pocrate et l'Aristote des Arabes. OEuvr. publ., Venise 1483/95. Rome 1593. Paris 1658. AVIGNON, chef-1. du dép. de Vaucluse, célèbre par la beauté de ses sites et la douceur de son climat. Fondée par les Phocéens 539 av. C., c'était une espèce de république sous les comtes de Toulouse et de Provence; elle perdit son indépendance lors des guerres des albigeois et finit par devenir la propriété de Philippe-le-Bel, puis de Charles d'Anjou. A la suite du conflit de Boniface VIII et de Philippe-le-Bel, Clément V, pour complaire au roi de France, transporta momentanément son siège de Rome à Avignon 1305, sans prévoir que cet exil de la papauté durera 72 ans, jusqu'à 1377, et sera traité de captivité babylonienne par les écrivains subséquents. Sept papes s'y succédèrent. Clément V, Jean XXH, Benoît XII, Clément VI (qui acheta le comtat d'Avignon à la comtesse de Provence Jeanne de Sicile 1348), Innocent VI, Urbain V qui essaya un moment de retourner à Rome, et Grégoire XI qui, sous l'influence de Catherine de Sienne et pour ne pas perdre ses possessions, ramena la papauté au lieu de son origine. Mais un schisme nouveau ne tarde pas à éclater, et les antipapes trouvent dans Avignon un centre naturel qui a déjà ses palais et ses traditions; Benoît XIII s'y fit assiéger. — La vie des papes d'Avignon fut facile et voluptueuse et contribua à discréditer le système aux yeux de la chrétienté. Pétrarque appelle Avignon la 3me Babylone et le 5«ne labyrinthe. Il y eut plusieurs conciles dans cette ville; les plus connus sont ceux de 1326 et 1337. Après leur départ, les papes administrèrent Avignon par des légats; Louis XIV s'en empara 1662 pour se venger de l'offense faite par Alexandre VII à son ambassadeur, le duc de Créqui, mais il la rendit à la paix de Pise 1663. Elle fut définitivement réunie à la France en 1791. AVIS (ordre d'). Ordre militaire religieux fondé 1146 à Coïmbre par des particuliers, organisé 1162 par Alphonse 1er. Après la prise d'Evora 1165, le roi chargea les chevaliers de cet ordre de la défense de la ville et Alphonse II leur céda en outre 1181 la ville d'Avis; de là les différents noms de Nouvelle Milice, Ordre d'Evora, ordre d'Avis. Innocent III 1204 confirma ses statuts religieux, qu'avait élaborés Jean Civita, abbé de Citeaux. C'est contre les Maures que l'ordre s'était formé; il contribua puissamment à leur expulsion et fut réuni 1213 à celui de Calatrava. Depuis 1789 il est devenu exclusivement militaire, et les vœux religieux qui étaient tombés en désuétude depuis longtemps, surtout celui de chasteté, furent abolis. AVIT ou Avitus 1® Flavius Avitus, né dans les Gaules, proclamé empereur romain après la mort de Maxime 455, ne régna que 4 mois. Battu à Plaisance il n'échappa à la mort qu'en recevant les ordres, fut fait évéq. de Plaisance, et f 456 dans un voyage qu'il fit pour se rendre en Auvergne. Beau-père de Sidoine Apollinaire. 2° Sextus Alcimus Ecditius, savant et pieux arche v. de Vienne, Dauphiné, neveu du précédent, sacré 490, f le 5 févr. 525; d'une famille gallo-romaine considérable; également distingué par son activité pratique et par ses travaux littéraires. Dans une conférence qui eut lieu 499 avec les théologiens ariens, il défendit la doctrine orthodoxe et gagna la confiance de Gondebaud, qui se serait probablement prononcé pour la foi évangélique, si Clovis ne l'avait pas déshonorée par ses œuvres. Le fils et successeur de Gondebaud, Sigismond, 515, avait répudié l'arianisme, et convoqua un concile à Épaone 517, qui se tint sous la présidence d'Avitus, et où furent prises plusieurs mesures contre les dérèglements du clergé. Avitus est connu par 80 Lettres à différents rois francs et burgondes, à des évêques des Gaules, de Milan, de Constantinople, de Jérusalem, etc. 11 résista aux prétentions des évéq. de Rome. Le jésuite Sirmond a publié plusieurs fragments de ses Homélies. Enfin, comme poète, Avitus a laissé, en vers hexamètres, un poème en 5 chants: la Création, la Chute, le Déluge, la mer Rouge, et une Ép. sur la chasteté; ses vers sont très supérieurs à sa prose. — OEuvr. publ. par Sirmond, Paris 1643. 3° Abbé de Micy, près Orléans, sous Clovis; fils d'un laboureur et d'une femme qui était venue d'Austrasie en mendiant. Il prédit à Clodo-mirsa fin prochaine, s'il faisait périr Sigismond de Bourgogne. AVOCAT, préfet laïque chargé de défendre les intérêts temporels de l'Église. Le droit général était que l'intéressé lui-même défendît sa cause par tous les moyens, et au besoin par les armes. Mais s'il s'agissait d'une personne incapable de se défendre, femme, enfant, vieillard, malade, elle pouvait recourir à un défenseur, qui était d'ordinaire son plus proche parent. L'Église avait droit à un privilège du même genre et choisissait volontiers un seigneur voisin du lieu où se débattaient ses intérêts, et ces seigneurs parlaient au nom de leur roi; mais il résultait aussi de cette protection accordée une espèce de patronage, et par conséquent une dépendance qui n'était pas toujours du goût des protégés; à la longue il fallut régler les droits et les honoraires des protecteurs, et l'on voit, au 12me siècle, un arrêt portant que l'avocat, outre le serment de fidélité du roi, devra prêter à l'abbé d'un couvent le triple serment de se contenter du tiers des revenus, de ne se foire remplacer par personne sans autorisation, de ne point faire de concessions, et de se tenir toujours au service de l'abbé avec 12 hommes et 12 chevaux. Les avocats des couvents et des églises devinrent peu à peu les patrons, et le droit de patronage s'introduisit ainsi dans l'Église comme la récompense de services rendus ou à rendre. — On appelle avocats de Dieu et du diable les orateurs chargés de faire valoir, dans les questions de canonisation, les arguments pour et contre. AZYMITES. Du grec zumè fermenté et azumé, non fermenté, non levé, qui s'appliquait surtout au pain, le patriarche grec Michel Cerularius avait fait au ll^e siècle le nom d'azymites, pour désigner les chrétiens occidentaux qui communiaient avec du pain sans levain, de même que les arméniens et les maronites. Cette question, bien secondaire, contribua pour beaucoup au schisme des Églises grecque et laline. B BAADER, François, né 27 mars 1765 à Munich, étudia la médecine et la minéralogie, visita l'Angleterre 1792 à 1796, et fut à son retour nommé conseiller des mines en Bavière, puis président du conseil jusqu'en 1820; en 1826 prof, de philos, et de théol. spéculative à Munich. Il avait été appelé en 1822 à Péters-bourg, mais cette affaire n'eut pas de suites, f 23 mars 1841. Un des premiers philos, de l'Allemagne, B. était spiritualiste, catholique et mystique. Il avait étudié Rousseau, dont le déisme lui avait paru insuffisant; puis Kant, qu'il trouvait trop subjectif. Il leur préféra saint Martin, Bœhme, Paracelse, Thomas d'Aquin, Jacobi, Schelling, mais il ne s'attacha exclusivement à aucun. Il n'admettait pas qu'il y eût contradiction entre la nature et la foi; il voit dans l'homme l'intermédiaire entre le créateur et la création, mais l'homme ayant péché, c'est Jésus-Christ qui l'a remplacé comme intermédiaire. Il n'aimait ni Luther, ni le protestantisme; mais il ne regardait pas la papauté comme essentielle dans le catholicisme; il combattit les prétentions romaines et les indulgences, demandait la communion sous les deux espèces, et sympathisait avec l'Église grecque. En politique il était conservateur, mais éclairé; il demanda aux monarques alliés la reconstitution de la Pologne libre, et voyait une union possible et désirable entre la politique et la religion. OEuvr. compl. publ. par Hoffmann, 16 vol. Leipsig 1851-1860. BAANES, v. Pauliciens. BÀBYLAS, év. d'Antioche vers 237, f 231 en prison, par suite des mauvais traitements qu'il aurait snbis sons Décius. Chrysostôme raconte qu'il refusa l'entrée de l'église à un empereur, il ne dit pas lequel, à cause de ses crimes, et que le monarque, ému de cette courageuse fidélité, se convertit. Aucun autre historien ne mentionne ce fait. BACCANARI, ou plutôt Paccanari, Tyrolien des environs de Trente, fils de parents pauvres, qui, après avoir essayé de plusieurs métiers, soldat, commerçant, montreur de curiosités, entreprit de relever sous une autre forme et Mus un autre nom l'ordre des jésuites supprimé en 1773. Il s'aboucha avec Pie VI à Florence, obtint pour lui et ses 12 compagnons les privilèges dont il avait besoin, se rendit 1799 à Rome pour protéger les élèves de la Propagande, dont la république française venait de fermer le collège et fut emprisonné au château Saint-Ange. Remis en liberté il se rendit à Vienne pour tâcher de fusionner sa société avec celle du Cœur de Jésus, mais l'œuvre périclita; la discorde s'y mit, les couvents refusèrent l'obéissance à Baccanari, et en 1814 les membres survivants, quittant le nom de baccanaris-tes, ou de pères de la foi, se firent recetoir tout simplement dans l'ordre des jésuites qui venait d'être rétabli. BACH, Jean-Sébastien, né 21 mars 1685 à Eisenach, d'une famille qui avait dû quitter la Hongrie pour cause de religion, et qui, dans l'espace de 2 siècles, a fourni plus de 200 musiciens distingués, peut être considéré comme un des pères de la musique sacrée moderne. Orphelin de bonne heure il fut élevé par un oncle qui l'initia aux principes de l'orgue et du clavecin. Il fut successivement organiste, chantre et maître de chapelle à Arnstadt, Mulhouse, Weimar, Anhalt-Côthen et Leipsig. f 30 juill. 1730, aveugle et après une douloureuse maladie. Marié 2 fois il eut 20 enfants, dont 11 fils, tous excellents musiciens. Il a énormément écrit, et dans presque tous les genres; il a rajeuni le style fugué, et l'a même appliqué au choral; il a beaucoup de mélodie, mais elle se penl presque dans l'ensemble harmonique. Ses principales œuvres sont une composition pour lafête commémorative de la Confession d'Augsbourg 1730, ses deux Passions, l'une sur saint Jean, l'autre sur saint Mathieu, ses Hymnes et Cantates, et ses Messes dont l'une en si mineur est peut-être son chef-d'œuvre. Célèbre de son vivant, au point que les souverains se disputaient ses visites, il fut un moment presque oublié après sa mort, et c'est en partie à Mozart, et à une visite que celui-ci fit à Leipsig en 1789, que sont dues la découverte de ses grandes compositions d'église et la renommée dont il jouit aujourd'hui comme chef d'école. BACON lo Roger Bacon, né 1214 à Ilchester, Sommerset, f 1294, l'une des plus grandes lumières du moyen âge. Après avoir étudié à Oxford et à Paris, il fut frappé du vice fondamental de l'étude des sciences et entreprit de réagir en leur donnant pour base l'observation et l'expérience. Il se livra au travail avec ardeur, acquit bientôt une instruction supérieure dans tous les domaines, mathématiques, physique, optique, géographie, grammaire, astronomie, chronologie, histoire, logique, médecine, métaphysique, théologie. Il ne reculait devant aucun idéal à poursuivre, et dans les questions religieuses il peut être considéré déjà comme un des précurseurs de la Réforme par la place qu'il donnait à la Bible et par sa méthode d'interprétation. Son génie, aidé de son travail et de ses études, lui fit faire d'étonnantes décou -vertes; dès 1267 il avait demandé la réforme dn calendrier. On lui attribue aussi la découverte de la poudre, des verres à grossir, du télescope, de la pompe à air, d'une substance combustible analogue au phosphore. Il avait compris la puissance de la vapeur et entrevu des vaisseaux et des voitures marchant avec la plus grande rapidité sans hommes ni bêtes pour les traîner. Il n'aimait pas Aristote, dont il ne connaissait d'ailleurs que des éditions fort mauvaises: « Si je le pouvais, disait-il, je ferais brûler tous ces livres. » Par ses critiques sur le texte altéré de la Vulgate, il provoqua la revision qui en fut faite par Hugo de Saint-Chair. Il paya cependant son tribut aux erreurs de son temps; il croyait à l'alchimie et à l'astrologie, à l'influence des astres et de leurs conjonctions. L'histoire de ce grand génie fut ce qu'elle devait être dans un siècle de ténèbres. Moine, il appartenait à l'ordre des franciscains, et sa science prodigieuse le fit surnommer le Docteur admirable. Mais il s'était fait des envieux par sa gloire, et des ennemis par ses protestations contre le relâchement des mœurs du clergé, On l'accusa, injustement, de sorcellerie; il fut condamné et passa de nombreuses années en prison. Clément IV qui l'avait en grande estime lui rendit la liberté, mais après la mort de ce pape il fut de nouveau arrêté, et enfermé à Paris dans la prison du couvent des franciscains, où il passa de nouveau 10 années, sans que Nicolas IV daignât entendre ses requêtes. Il fallut l'intervention de quelques nobles pour le délivrer; il se hâta de quitter la France et termina ses dernières années à Oxford. Son prin -cipal ouvrage est VOpus Majus qu'il composa et adressa à Clément IV pour lui exposer toute sa doctrine et se justifier ainsi des imputations calomnieuses dont on avait essayé de le noircir. II le refondit sous le titre d'Opus Minus, puis une troisième fois sous celui d'Opus Tertium. Ses autres ouvrages, sur le Secret de la nature, la Vieillesse, le Miroir d'alchimie, l'Éloge de l'Écriture sainte, ont moins de valeur. 2° François Bacon, grand chancelier d'Angleterre, baron de Vérulam et vicomte de Saint-Alban, n'appartient qu'indirectement à l'hist. ecclésiastique. Né 1561, f 1626, il se fit remarquer de bonne heure par la précocité de son génie, entra dans la diplomatie où il fournit une courte mais brillante carrière, s'attacha malheureusement au sort de Jacques I et de Buckingham, dont il favorisa les folles prodigalités, fut condamné par le parlement et vécut dès lors dans la retraite, se consacrant tout entier à ses études philosophiques et littéraires. Il était frappé comme son homonyme, de la méthode déplorable employée pour l'étude des sciences physiques et naturelles, et il travailla k substituer l'observation aux inductions syl-logistiques, les choses aux mots et les réalités aux divagations. Il fut ainsi le réformateur de la philosophie expérimentale. Ses principales idées sont exposées dans son Novum Organum 1620, De dignitate et augmentis scientiarum 1605, Sylva sylvarum 1627, etc. dont l'ensemble devait former un vaste ouvrage, resté inachevé, nommé Instauratio magna. Il existe en français plusieurs éditions et traductions de ses œuvres, par Lassalle, Bouillet, Lorquet, J. de Maistre, etc. BADE, ou Baden, grand duché de l'empire d'Allemagne, dont les limites actuelles sont nettement déterminées, mais qui anciennement, par suite d'alliances, de mariages, de morcellement et d'annexions, variait en étendue, se limitant au simple margraviat de Bade, ou s'étendant de Constance à Strasbourg, de la vallée du Neckar au Palatinat. D'une manière générale, c'est le pays des anciens Allemani, évangélisé vers les 7™e et 8me siècles par Frido-lin, Trudprat et Pirmin. Les Zâhringen y élevèrent au 13me siècle la cathédrale de Fribourg. Les universités de Heidelberg 1386 et de Fribourg 1456 exercèrent une grande influence sur la culture intellectuelle du pays. Tauler et Suso le réveillèrent par leurs puissantes prédications et le préparèrent à la Réforme. Jérôme de Prague enseignait 1406 à Heidelberg avec une franchise qui préludait à son rôle de réformateur-martyr, et bientôt l'on voit apparaître les noms de Reuchlin, d'Agricola, Capiton, Mélanchthon, Bucer, etc. Luther se fit entendre en avril 1518, et dès 1520 la Réforme pouvait être regardée comme accomplie. Les évêques de Spire, Wttrz-bourg et Mayence firent naturellement ce qu'ils purent pour l'entraver; 2000 volumes évangéli-ques furent brûlés à Fribourg par la main du bourreau, mais à Constance la population résista, même aux ordres de l'empereur; elle abolit le célibat des prêtres et renvoya son évêque en 1525, pendant qu'à Fribourg on noyait froidement le pa&teur Spengler parce qu'il prêchait l'Évangile. Plusieurs villes de Bade se joignirent en 1529 à la protestation de la diète de Spire, et renouvelèrent leurs démarches à Augs-bourg 1530. La moitié du pays avait embrassé la Réforme; les persécutions de 1548-55 rédui-sèrent ce nombre de près d'un tiers; puis vinrent les disputes confessionnelles entre les luthériens et la réforme helvétique. Enfin le rationalisme officiellement enseigné par le vieux Paulus acheva l'œuvre, et le protestantisme n'eut plus que le bruit de vivre. Une conférence eut lieu en 1821 sons les auspices du grand-duc Louis, qui réunit les deux confessions en une seule par un Acte d'union en plusieurs articles. Quelques professeurs, Umbreit, Ullmann, Ro-the; quelques pasteurs, Mann, Frômmel, Bey-schlag, Plitt, maintinrent dans l'Église le flambeau de la foi évangélique, tandis que d'autres, du dehors, essayèrent d'en ranimer l'éclat en s'organisant en sociétés évangéliques ou de mission intérieure. BADEN (Colloque de). Assemblée ecclésiastique, convoquée à Baden (Argovie), par les cantons catholiques pour mettre fin par une discussion publique aux hésitations que les premières tentatives de réforme entretenaient dans les esprits. Zurich n'y parut point, il était tout décidé; les 12 autres cantons y étaient représentés. Les délibérations s'ouvrirent le 21 mai 1526 en présence des 4 évêques suisses et d'une nombreuse et brillante assemblée. Fa-ber, le docteur Eck, et Murner de Lucerne, furent les principaux orateurs du parti catholique; Œcolampade, du côté réformé, porta presque seul tout le poids de la discussion. Haller de Berne y fut envoyé, non pour discuter, mais pour rendre compte de ce qui s'y serait passé. Le nombre des combattants et certains détails de mise en scène assurèrent la victoire des catholiques; les adhésions lui arrivaient de toutes parts et dans les moments les plus critiques. Les Articles de Bade parurent donc être la condamnation de la Réforme; cependant ils ne réussirent pas à prévaloir contre l'opinion, et bientôt Berne déclara ne pas les reconnaître. En outre le caractère équivoque de la publication qui en fut faite, la préface et les commentaires dont ils furent accompagnés, ne tardèrent pas à leur enlever tout crédit, et plusieurs, à Berne comme à Bâle, déclarèrent ne pouvoir tenir aucun compte des Actes imprimés, aussi longtemps qu'ils n'auraient pas pu les confronter avec l'original. BADER, Augustin, anabaptiste fanatique du 16®« siècle, originaire d'Augsbourg, qui se croyait le roi du règne de mille ans, 1529. Il se fit faire une couronne, un scepire et une épée, et s'établit dans les environs d'Ulm. Il fut exécuté 1530, quand on aurait dû simplement renfermer comme fou. Dans quelques notices il est appelé Weber. BADUEL, Claude, né à Nîmes, humaniste distingué, protégé par Marguerite de Valois, visita Paris, Louvain, Wittenberg et Strasbourg, fut nommé recteur du collège des Arts à Rimes, 1540, mais soupçonné de luthéranisme, il dut s'enfuir et vint à Genève 1551, où il travailla avec R. Estienne, fut reçu bourgeois, pasteur à Russin et Vandœuvres, et enfin prof, de philos, et mathématiq. f 1561. Auteur d'une vingtaine d'écrits et dissert, latins. — Son fils Paul fut pasteur à Bergerac. BAGNOUENS, v. Cathares. BAHRDT, Ch.-Fréd., né 1741, théologien érudit, mais superficiel et sans convictions, étudia à Leipzig sous Crusius, dont l'orthodoxie dépassait la Bible et tous les symboles; il fit l'orthodoxe avec lui et fut nommé catéchète, puis suppléant de son père qui était prof, de dogmatique. II ne manquait pas d'une certaine faconde, et pendant quelque temps il eut des auditeurs; mais il eut aussi des aventures, et menacé d'une recherche en paternité, il donna sa démission 1768, et se lança en plein dans le rationalisme le plus grossier. Il occupa successivement plusieurs places à Erfurt, Giessen, Marschlins (Grisons, Suisse), Durckheim, etc. Mais renvoyé de partout à cause de son caractère, de ses extravagances, de ses doctrines ou de ses mœurs, il finit par se fixer à Halle 1779, où Se m 1er lui fit obtenir une pension de 200 ècus, à condition qu'il se tînt tranquille. Mais tout alla de mal en pis. Non content de faire de la littérature et des conférences, sur Tacite, Ju-vénal, la métaphysique et la morale, il ouvrit une taverne dans la banlieue de Halle, et après avoir enseigné la morale le matin, il allait le soir tenir le cabaret avec sa servante (sa femme, dont il était séparé, vivait toujours). Cela dura dix ans; il finit par être compromis dans une bande d'escrocs, écrivit une comédie contre le roi (rÉdit de religion), fut mis en prison, et peu d^ temps après avoir été relâché, f 1792 d'une konteuse maladie. Ses principaux ouvrages sont: un Essai de dogmat. bibliq., Nouv. révélation de Dieu, Profession de foi, Almanach des hérétiques, enfin une Autobiographie, mélange de mensonge et de cynisme. Tholuck lui a consacré quelques pages. BAIUS, v. Bay (de). BALDAQUIN (de Baldak, un des noms de la ville de Babylone au moyen âge); étoffe précieuse pour tapis ou vêtements. On désignait ainsi 1° le ciel dont on recouvrait le trône du maître-autel dans les grandes solennités, pour le préserver de la poussière; 2<> le ciel ou dais portatif dont on se sert dans les processions, pour honorer le sacrement et le protéger contre les intempéries de l'air ou contre le soleil. BALDE 1û ou BaUli, savant italien, abbé de Guastalla, né 1553, f 1617, connu par ses travaux sur les sciences, et par un poème sur la navigation. 2° Jean-Jacques B., l'Horace de son temps, né à Ensisheim, près Colmar 1603. Fils de parents pauvres, il fut élevé à Ingolstadt, où il étudia le droit et obtint de brillants succès. Ayant en vain cherché à toucher le cœur d'une jeune boulangère, il fut surpris, pendant qu'il lui donnait une dernière sérénade, par le son des cloches d'un couvent voisin. Une pensée le frappa: Voilà des hommes qui se lèvent la nuit pour chanter les louanges de Dieu, et moi je perds mes nuits à rechercher l'amour d'une pauvre créature mortelle ! Assez chanté comme ça, brisons la mandoline! Et il entra dans l'ordre des jésuites le 1er juillet 1624. Il ne tarda pas à se faire une grande réputation, d'abord comme professeur à Ingolstadt, puis comme prédicateur de la cour à Munich 1638-1648. Mais éprouvé dans sa santé, il dut chercher un climat plus doux, se rendit à Landshut et à Am-berg, où il essaya plusieurs fois de remonter en chaire; enfin à Neubourg, sur le Danube, où il passa ses 14 dernières années, et où il s'éteignit doucement le 9 août 1668, aimé et regretté de tous, même des protestants, qu'il avait aimés comme il aimait tous les hommes, enfants du même Père. C'est par ses poésies latines qu'il est surtout connu, et des juges compétents l'apprécient à l'égal d'Horace, avec plus de cœur et de profondeur. Il a fait des Odes, des Élégies, une Tragédie (la fille de Jephthé), des Éloges, des Satyres; il a chanté Wallenstein et Tilly, et critiqué les fautes politiques de la guerre de Trente ans. Son principal ouvrage, en vers élégiaques, Urania Victrix (le triomphe de l'amour divin sur les vanités humaines) 1663, lui valut une médaille d'or d'Alexandre VII à qui il l'avait dédié. Ses poésies allemandes, moins appréciées, sont aussi loin de valoir celles de Paul Gerhard. BALE, longtemps ville impériale, jusqu'au moment, 1501, où elle fut réunie à la Suisse* Elle est surtout célèbre dans l'histoire ecclésiastique par le Concile qui s'y réunit du 27 août 1431 au 7 mai 1449. Le conc. de Constance, cédant à la pression de l'opinion publique et des empereurs, avait par un décret, nommé Fréquent, tranché la question de l'autorité suprême des conciles et décidé leur périodicité. Ce double vote, dirigé surtout contre les abus de la 6 papauté, était plus dangereux encore qu'une réforme aux yeux de la curie romaine, qui fit tout pour le rendre illusoire. Elle trouva moyen de dissoudre le concile de Sienne avant qu'il eût commencé ses travaux, mais de toutes parts on réclama: les cours et les universités demandèrent que le concile eût lieu, et l'on ajouta cette fois qu'il devait se réunir dans une ville libre, hors de l'Italie, en dehors de l'influence du pape. L'indomptable soulèvement de la Bohême décida Martin V à ne pas résister plus longtemps, et peu avant sa mort il convoqua un concile écuménique à Bâle. Les évêques de la chrétienté hésitaient devant cette convocation, ne sachant s'ils devaient la prendre au sérieux. Il fallut qu'Eugène IV la renouvelât, et Julien Cesarini, cardinal saint Ange, qui tenait à une réforme, mais qui voulait aussi ramener les Hussites à l'unité de l'Église, fut chargé de l'organisation du concile. Les évêques n'arrivaient que lentement; ils se méfiaient; mais à mesure qu'ils virent s'installer à Bâle des notabilités romaines, et surtout Sigismond s'y faire représenter, ils comprirent que la chose devenait sérieuse et ils affluèrent des contrées les plus éloignées de l'Europe. Au commencement, tout alla bien, et si bien qu'Eugène envoya le 17 déc. une bulle à Cesarini pour l'engager à dissoudre le concile sous n'importe quel prétexte. Mais cette bulle se heurta contre les scrupules du cardinal, contre l'opposition du roi et contre la volonté bien arrêtée du concile lui-même, qui déclara n'être que la suite de celui de Constance, et chargé de poursuivre son œuvre. Il cita même le pape à comparaître et lui fit des conditions assez dures. Le concile avait heureusement évité le grand écueil du vote par nations, qui avait entravé les délibérations de Constance, mais il s'était compliqué d'un autre mode de discussion qui embarrassait singulièrement la marche des affaires. Il s'était partagé en quatre sections, ou délégations formées des différentes classes de dignitaires, l'une s'occupant des choses de la foi, l'autre de la réforme, une autre de la paix, la dernière des affaires courantes. Pour qu'une résolution fût valable, il fallait qu'elle fût adoptée par trois sections au moins, et proclamée en assemblée générale. Les juristes, les moines et les prélats français étaient les orateurs les plus hardis. Mais Cesarini l'emportait sur tous par la science, l'éloquence, la grâce et le désir sincère de travailler au bien de l'Église. Le pape continuait d'agir en dessous contre le concile, quoiqu'il l'eût de nouveau reconnu par une bulle du 12 oct. 1433. Le 4 janv. 1433 Procope, la terreur de la chrétienté, Rocky-zane, Episcopius et d'autres délégués de la Bohême étaient arrivés, chargés par leur pays de réclamer certaines réformes. On leur accorda quatre points principaux (Compactata), entre autres la Cène sous les deux espèces et le culte en langue vulgaire. Mais le désir de s'entendre avait amené Cesarini d'une part et Rockyzane de l'autre à se servir d'expressions vagues que, des deux côtés, l'on ne trouva pas assez précises. Les taborites protestèrent contre cet accord fallacieux, Eugène en parla avec dédain, et ses successeurs refusèrent de le ratifier. — En 1435 le concile s'occupa de réformes de détail sur les annates, les taxes, les bénéfices, les réserves des papes quant à la nomination des chanoines; autant de mesures qui blessaient la curie dans ses revenus. Mais on ne toucha pas aux questions plus graves de la moralité du clergé, des désordres monacaux, des fêtes ridicules qui se célébraient dans les églises, etc. A partir de ce moment la guerre est déclarée entre le concile et la curie atteinte dans ses moyens d'existence; le pape multiplie ses déclarations, ses menaces et ses intrigues. Cesarini lui-même et quelques hommes modérés trouvent que le concile a été trop loin. Une circonstance favorable se présente pour tourner les difficultés en déplaçant le centre des préoccupations. Les grecs s'adres-sent au pape et au concile avec le vœu que les deux Églises d'orient et d'occident arrivent à s'entendre. Ce serait une belle chose; mais les deux partis voudraient en avoir l'honneur, le concile en examinant la question, le pape en la faisant décider en Italie dans un concile spécial présidé par lui. Le 6 et le 7 mars 1437 les discussions sont montées à un tel degré de violence qu'on n'entend plus les orateurs; on en vient aux voies de fait, et les bourgeois de Bâle doivent intervenir en armes pour empêcher qu'il y ait du sang répandu. La majorité déclare alors que le concile est dissous; Cesarini quitte Bâle avec ses amis; la minorité demeure, ayant à sa tête Louis d'Allemand, cardinal-archev. d'Arles. Le pap3 appelle cette minorité une bande de Satan; le concile le déclare hérétique, le dépose solennellement 7 juillet 1439 et nomme à sa place Félix V, Amédée duc de Savoie. La Pragmatique Sanction 1438 reconnaît les décrets de Bâle comme concile écuménique, mais ne va pas jusqu'à reconnaître le nouveau pape. Il y a de l'hésitation chez les puissances. Eugène compromet sa cause par des excès de pouvoir; ses finances sont en mauvais état; il finit cependant par l'emporter, Félix n'étant pas qualifié pour lui opposer une sérieuse concurrence. Eugène f 14 févr. 1447, et ses cardinaux lui donnent pour successeur Nicolas V. Le 25 juin 1448 le concile de Bâle décide sa translation à Lausanne, où Félix résidait depuis longtemps. Puis Félix fatigué de sa papauté contestée, ayant donné sa démission à la sollicitation du roi de France, le concile, également fatigué d'une latte sans objet, reporte ses voix sur Nicolas qui a été élu à Rome et se dissout après ce dernier acte d'un semblant d'autorité. Ainsi finit cette assemblée, qui avait donné d'abord de si belles espérances; elle servit du moins à faire comprendre toujours mieux la nécessité d'une réforme, et l'impossibilité de l'obtenir par les voies régulières. — Les origines du christianisme à Bâle sont peu connues. C'est en 616 qu'on voit mentionné un premier évêque, Ragnacaire; un premier concile s'y réunit en 1061. L'université fut fondée par Pie II. La réforme n'y pénétra et ne s'y établit que lentement, sous l'influence d'OEco-lampade, Capiton, Hèdion, Pellican; Farel y prêcha en 1524, Calvin en 1536. En janvier 1529 les Conseils de la ville furent renouvelés, et 3000 protestants contre 800 catholiques décidèrent l'introduction de la Réforme. La confession de foi, rédigée par Myconius, porte quelquefois le nom de Première Conf. helvétique; elle est modérée, plutôt zwinglienne, et fut adoptée par Mulhouse. Un grand nombre de réfugiés français, entre autres plusieurs membres de la famille de Coligny, s'étant établis à Bàle, une église française y fut fondée, qui subsiste encore. Parmi les proscrits italiens on cite les noms des Curione et des Socin. BALLERINI, deux frères de Vérone, nés: Pierre le 7 septembre 1698, f 1769, Jérôme le 29 janv. 1702, élevés par les jésuites, distingués par leurs travaux ecclésiastiques, historiques, théologiques et en droit canon. Ils se complétaient l'un l'autre et leurs discussions, souvent vives, aboutissaient toujours à une entente commune. Pierre fut dès 1748 attaché comme conseiller à l'ambassade de Venise, et Benoît XIV le combla de faveurs. Ils ont publié les discours de Zénon, les œuvres de Léon-le-Grand, un traité sur les pouvoirs réciproques des papes et des conciles, et beaucoup d'autres ouvrages, dont quelques-uns sont anonymes. BALSAMON, Théodore, un des canonistes les plus connus de l'Égl. grecque, diacre à Sainte-Sophie de Constantinople, élevé 1193 au patriar-chat d'Antioche, f à la fin du 12^® siècle. Il a écrit de nombreux ouvrages sur les règlements ecclésiastiques et s'est appliqué à prouver que ce sont les Basiliques, q. v. et non la Compilation de Justinien, qui font loi et autorité chez les grecs. BALUE, Jean (La), ministre d'État sous Louis XI, né en Poitou 1421, f en Italie 1491, réussit par ses intrigues à faire abolir la Pragmatique Sanction,contre les intérêtsdu royaume; reçut le chapeau de cardinal en récompense de ses bons offices; correspondit avec les ducs de Berry et de Bourgogne, leur livrant les secrets de l'Etat; fut découvert 1469 et enfermé 11 ans dans une cage de fer, et n'obtint enfin sa liberté qu'à la sollicitation du pape. A Rome il fut comblé d'honneurs et nommé légat a latere en France 1484, mais cette mission dura peu, le légat ayant été mal reçu. BALUZE, Etienne, né à Tulle 24 nov. 1630, t Paris 28 juin 1718. Élevé pour l'étude du droit, il avait plus de goût pour les recherches historiques, et il s'y consacra dès qu'il le put, dès sa 20me année jusqu'à sa mort, s'occupant de rassembler les documents, d'en rétablir le texte authentique, de les comparer et de les publier. Son premier ouvrage, Antifrizonius, contre Frizon et ses erreurs historiques, 1652, lui fit une grande réputation. En fait de caractère ecclésiastique, il n'alla que jusqu'à la tonsure. Il eut le bonheur de trouver un Mécène en Pierre de Marca, archevêq. de Paris 1656/62. Le chancelier Le Tellier l'attacha comme chanoine à son fils l'archev. de Reims. Colbert en fit son bibliothécaire 1667-1700, et mit à sa disposition l'une des plus riches collections de livres qui existassent. Professeur de droit-canon au Collège de France depuis 1670, il en fut nommé le directeur en 1707; mais ayant fait pour le cardinal de Bouillon une Hist. généalogique de la maison d'Auvergne, dont quelques passages semblaient favoriser les prétentions des Bouillon pour ce comté, il tomba en disgrâce; Louis XIV le priva de sa chaire et de son traitement et l'exila de Paris sans aucune forme de procès ou de jugement. Il ne put revenir qu'au bout de 5 ans, après le traité d'Utrecht 1713, son innocence ayant été pleinement reconnue. Il travailla encore pendant 5 ans et fut enterré à Saint-Sulpice. — Ses principaux ouvrages sont: Les Capitulaires des rois francs, 2 vol. f° 1677, réimpr. 1780 avec des notes et additions par Chiniac; une Nouv. collect. des conciles, 1683, 1 vol. fol.; une Vie des papes d'Avignon, 1693, et des Mélanges, 7 vol. 8<>, 1678-1715. Au moment de sa mort il venait d'achever une édition des Œuvres de Cyprien. Il a publié aussi plusieurs écrits de Marc, dont il avait été le collaborateur, entre autres des Dissertations sur les libertés de l'Égl. gallicane. Le nombre de ses écrits s'élève à 45; celui de ses réimpressions à plus de 115. BAN, proclamation, bannum nuptiale. C'est Innocent III qui a le premier fixé, au 4m® concile de Latran 1215, et c'est le concile de Trente qui a établi comme règle générale, que les noms des époux devaient être proclamés publiquement du haut de la chaire 3 dimanches consécutifs. L'usage en était plus ancien; il avait primitivement pour but de recommander les fiancés aux prières des fidèles; plus tard il servit à consacrer la publicité des promesses et à mettre les intéressés en mesure d'intervenir et, s'il y avait lien, de s'opposer à des alliances de mineurs ou autres, interdites par l'Église ou par l'État. Avec l'introduction du mariage civil, les publications en chaire ont perdu presque toute signification et ne sont plus réclamées par les autorités, alors même qu'elles ont eu lieu. Les législations varient d'un pays à l'autre sur la publicité à donner aux fiançailles avant qu'il soit procédé au mariage; elles varient également sur la nature des dispenses à accorder. Le mol Ban s'emploie aussi dans le sens d'excommunication et dans celui de bannissement. BAPTISTÈRES. Jusqu'à l'avènement de Constantin on baptisait où et quand on pouvait, toujours par immersion. Mais peu à peu l'usage s'introduisit de donner à celte cérémonie une grande solennité et de réserver près des églises, puisque les catéchumènes ne pouvaient pas entrer dans les églises avant d'avoir été baptisés, des locaux spéciaux à cette destination. C'étaient dans le principe des chapelles, reliées par une galerie couverte à l'égl. proprement dite: L'év. ayant seul le droit de baptiser, comme aujourd'hui celui de confirmer, il n'y avait dans le diocèse qu'une seule église baptismale, comme il n'y a qu'une seule cathédrale. Les baptêmes se faisaient en masse les veilles de Pâques, de Pentecôte, et plus tard, de Noël. La forme du bâtiment était indiquée par sa destination; il fallait un réservoir d'eau, une piscine (du latin piscis, poisson, nom symbolique du Christ) avec un espace circulaire suffisant pour les parents et les amis du néophyte. La rotonde était ainsi naturellement indiquée comme forme, et elle avait en outre cet avantage que beaucoup de temples romains étant construits sur ce modèle, ils pouvaient être facilement aménagés pour servir de baptistères. Plus tard, par goût ou pour d'autres motifs, on choisit la forme polygonale et surtout octogone, que le cardinal Ch. Borromée regardait comme la plus parfaite de toutes, en allusion aux octaves des fêtes chrétiennes. Les principaux ornements des baptistères étaient, outre le poisson déjà nommé, une colombe d'or ou d'argent, symbole du T5aint-Esprit; un cerf altéré (Ps. 42,*1), des tableaux ou des reliefs représentant Jean-Baptiste, le baptême du Sauveur, Philippe et l'eunuque de Candace, etc. Le bassin devait être en pierre, parce que J.-C. n'est pas seulement l'eau qui vivifie, il est aussi le rocher, etc. Quand, aux 5me et ô"3© siècles, on décida de baptiser aussi les petits enfants, il fallut renoncer à bien des règles gênantes et à des prescriptions trop rigoureuses, à l'immersion, aux dates réservées, au baptême par l'évêque; les conciles résistèrent longtemps à ces innovations, mais à la lin la nécessité l'emporta, et les immenses baptistères des premiers temps (sous Damase un enfant s'y noya et son corps ne fut retrouvé qu'au bout d'une heure, Baron, Annal.) furent remplacés par de simples bassins, qui conservèrent la forme antique, ronde ou octogone, et qui furent placés d'ordinaire à l'entrée des églises pour rappeler que c'est par le baptême qu'on entre dans le royaume des cieux. Ils sont souvent fermés d'un couvercle en forme de coupole, soit à cause de la poussière, soit en vue de l'usage profane ou superstitieux qu'on en pourrait faire. L'eau lustrale, chez les catholiques du moins, ne doit pas être puisée avec la main, mais au moyen d'un goupillon, presque toujours en argent. La plupart de ces formes sont ignorées des protestants, qui n'ont conservé du baptême que sa signification primitive. BAPTISTES, secte chrétienne prolestante qui se caractérise, comme son nom l'indique, par ses vues particulières sur le baptême. S'en tenant aux textes du N.-T. et à la tradition des cinq premiers siècles, elle estime qu'il n'y a de vrai baptême que celui qui a lieu par immersion, et que le baptême ne peut être administré qu'aux croyants, par conséquent pas aux enfants. De tout temps il y a eu des docteurs soutenant ces vues, mais c'est seulement vers 1521, avec les anabaptistes, que le baptisme a pris corps comme doctrine positive, et si la secte fut détruite 1535 à cause de ses excès, quelques survivants, honnêtes, doux et laborieux, échappèrent et s'établirent en Hollande et en Angleterre, où ils réussirent à subsister, malgré les persécutions. En 1518 on trouve déjà une église baptiste organisée en Angleterre, mais c'est surtout depuis l'Acte de tolérance qu'ils se multiplièrent. Ils s'établirent aussi en Amérique et y prospérèrent. La plupart sont calvinistes stricts; ce sont les plus vivants et les plus zélés; les autres sont arminiens, et quelques-uns ariens et même sociniens. Les baptistes stricts, en particulier, comptent 6 séminaires dans le Royaume-Uni, et plus de cent mille communiants, formant 1300 églises; ils ont eu des hommes distingués, Robert Hall, le missionn. Carey, Baptist Noël, Spurgeon, etc. Aux États-Unis, partagés en plusieurs branches, ils sont plus de 3 millions et comptent plus de 8,001) congrégations. Chaque église est absolument indépendante, mais elles s'associent en général pour l'œuvre missionnaire, à laquelle elles s'intéressent vivement, et qui a obtenu de brillants succès, notamment aux Indes et dans les Antilles. Il y a quelques églises baptistes sur le continent, en Suède, Allemagne, Danemark, Suisse, France, etc.; mais trop d'autres questions graves préoccupent les esprits, pour que la question spéciale du baptisme ait jamais réussi à produire un grand mouvement, v. BainL Bennet, Roger Williams. BARBARA, ou Barbe, vierge d'une grande beauté, convertie au christianisme, chercha à convertir son père, Dioscore, mais celui-ci la dénonça, et comme les supplices les plus cruels ne réussirent pas à l'ébranler, il lui trancha lui-même la tête, et mourut ensuite frappé de la foudre. Baronius place cette histoire en Nico-médie, sous Maximin 235-38; Assemani la place à Héliopolis en Égyj^e, sous Galerius 306. On ajoute que Henri Stock, à Gorkum en Hollande, à. moitié consumé par les flammes, ayant invoqué sainte Barbara, vécut encore assez pour pouvoir recevoir le saint sacrement. Les catholiq. l'invoquent contre l'orage, la foudre et le feu. Elle est patronne des artilleurs. Sa fête est le 4 déc. BARBEROUSSE. v. Frédéric. BARBEYRAC, Jean, d'une famille noble de Béziers, fils du pasteur Antoine B. réfugié à Lausanne. Né à Béziers 15 mars 1674, il réussit à grand'peine à rejoindre à Lausanne sa famille exilée, étudia à Lausanne, Genève et Francfort-s.-O., fut nommé en 1697 prof, au collège des Réfugiés à Berlin, et renonça à la théol. pour suivre le droit et les lettres. En 1710 il fut appelé à Lausanne comme prof, d'histoire et de droit,et de 1714 à 1717 recteur de l'Académie. Il passa de là à Groningue, ayant refusé de signer la Formule du Consensus, et f 3 mars 1744, ayant perdu sa femme et sa fille unique. Il était membre de l'Acad. de Berlin. Il a laissé de nombreux ouvrages, presque tous d'érudition, entre autres des traductions de PufFendorf et de Grotius, une trad. du livre latin de Noodt sur la Liberté de conscience, un Traité de la morale des Pères de l'Église. BARCLAY lo William, né à Aberdeen, grand ami de Marie Stuart, légiste cathol., vécut en France et écrivit contre la Ligue et contre les théories démocratiques qu'elle émettait avec l'approbation du pape. Bellarmin lui répondit, f 1609. 2° Robert, d'une vieille famille écossaise, fils d'un officier qui s'était distingué dans les guerres d'Allemagne et de Suède. Né à Édin-bourg 1648 il fut envoyé pour son éducation à Paris, où le frère de sa mère le convertit au catholicisme. Le père, qui appartenait à la Société des Amis, le rappela aussitôt, et après une longue résistance, fréquentant les assemblées des quakers, Robert fut gagné à leur doctrine et devint l'un de leurs représentants les plus convaincus. H voyagea en Angleterre, en Hollande et en Allemagne, cherchant à faire des prosélytes, + 1690. Son principal ouvrage est l'Apologie de la véritable théol. chrétienne, telle que la professent ceux que par dérision on appelle Quakers (latin), dédiée à Charles H, Amsterdam 1676. Il a le mérite de présenter sous une forme systématique le spiritualisme mystique de la secte. Son ami G. Penn publia en 1692 ses œuvres complètes. BAR-COCHBA, ou Bar-Cocab, fils de l'étoile, chef juif de l'insurrection qui éclata vers 131 après C. sous Adrien, en Palestine, et qui se termina malheureusement par sa défaite et sa f 135. Il se faisait passer pour le Messie, fit quelques semblants de miracles, s'imposa par la terreur aux juifs et aux chrétiens, séduisit le célèbre rabbin Akiba, prétendit être né le jour de la destruction du temple, revendiqua pour lui la prophétie de Balaam Nomb. 24, 17., réalisa la prophétie de Marc 13, 21. 22., et après avoir attiré sur son peuple de nouveaux malheurs, il mérita d'être appelé par dérision Bar-Cosiba, fils du mensonge. BARDES ANES, v. Valentin, et Gnosticisme. BARI (Synode de), convoqué par Urbain II 1098; 183 évêques sont présents, dont Anselme de Cantorbéry, qui expose ses vues sur la Procession du Saint-Esprit; le roi Guillaume-le-Roux est presque excommunié. BARLA AM1° v. Hésychastes. 2° moine de l'ordre de saint Basile, né à Séminara, Calabre, vers 1300,t vers 1348. Étant allé en Grèce, il embrassa la religion grecque et fut en grande faveur auprès de l'empereur Andronique-le-Jeune qui lui confia plusieurs missions et le chargea de travailler à l'union des deux Églises. Mais ayant eu le malheur d'attaquer les moines du Mont-Athos qui croyaient que la lumière du Mont Tabor était la gloire incréée de Dieu, il dut repartir pour l'Italie et rentra dans le giron du catholicisme. Clément VI le nomma év. de Gé-race. Il a laissé une Biblioth. des Pères, 6 livres d'Arithmétiq. algébrique, 2 livres sur la Morale des stoïciens et un traité Contre la primauté du pape. BARLETTA, prédicateur dominicain du 15™ siècle. Il s'appelait Gabriel, mais prit peu à peu le nom de Barletta, sa ville natale. Il se fit une grande réputation, vers 1480, surtout dans le nord de l'Italie, par la vérité, la profondeur et l'originalité de ses discours, autant pour le fond que pour la forme. Il avait brisé le moule scolastique et recherchait dans la prédication le naturel, sans reculer devant le satirique, le comique et même le grotesque. On disait proverbialement que t celui qui ne sait pas barlet-ter, ne sait pas prêcher. » Patriote, il pleurait sur la grandeur éclipsée de l'Italie. Dominicain, il a combattu le dogme de l'Immaculée conception. Ses sermons, presque tous sur des sujets moraux, ont eu plus de 20 éditions. BARNABAS. L'épître connue sous le nom de cet apôtre, retrouvée seulement en 1645, moitié en grec, moitié en latin, appartient incontestablement à l'école d'Alexandrie, peut-être à un disciple de ce nom; mais, malgré le témoignage de Clément qui la cite comme étant de l'apôtre, malgré sa présence en entier dans le mss. du Sinaï, elle renferme une opposition trop vive contre le judaïsme et contient trop d'erreurs sur les cérémonies du culte pour qu'on puisse l'attribuer au compagnon de Paul, au lévite de l'Ile de Chypre. Si elle était authentique, il faudrait admettre qu'elle a été interpolée et que seuls les chap. i à 6, 13, 14 et 17 sont de l'apôtre. C'est l'opinion de Schenkel, mais même dans cette hypothèse les difficultés subsistent. Elle jouit longtemps d'un grand crédit dans l'Église. BARNABITES. Ordre religieux fondé à Milan à l'époque des guerres de François te* et de Charles-Quint contre l'immoralité croissante des armées, contre les idées nouvelles apportées par les soldats allemands et à l'occasion d'une épidémie grave qui éclata dans la ville et frappa le tiers de la population. Fondée par Antoine-Ma-rie-Zacharie, l'association fut autorisée par Clément VII, 1533, et reconnue avec privilèges par Paul III, 1535, sous le nom de congrégation de saint Paul. Ils reçurent le nom de barnabites de l'église dédiée à Barnabas, qui fut mise à leur disposition. Ils s'occupaient des missions, d'enseignement et de prédication. Ils se répandirent rapidement au dehors et fondèrent de grands collèges dans la plupart des pays de l'Europe. Aujourd'hui on ne les trouve plus guère qu'en Autriche, en Espagne et en Italie. Leur centre est à Rome. — Déjà sous Grégoire XI, 1370-78, un ordre de barnabites s'était formé, qu'Eugène IV avait reconnu comme association 1441; Ch. Borromée opéra leur fusion avec les barnabites de Milan, et Paul V 1606 confirma cette réunion. — Quant aux religieuses barnabites, v. Angéliques. BARNES, Robert, docteur en théol., s'attira la défaveur d'Henri VIII par ses tendances luthériennes, abjura des lèvres pour sortir de prison, se déclara de nouveau pour la Réforme et s'enfuit à Wittenberg 1530. Le roi s'étant à son tour prononcé contre le pape, Barnes revint, fut nommé chapelain de la cour 1535, servit d'intermédiaire pour le mariage d'Henri avec Anne de Clèves, et fut condamné comme hérétique par le parlement, à la demande du roi qui voulut se venger sur le négociateur de la lassitude que lui causait sa 5© ou 6° épouse, f 1540 sur l'échafaud. Il a laissé quelques écrits, entre autres une Vie des pontifes romains. BARNEVELDT, Jean-Olden, né à Amers-foort 1549; grand pensionnaire de Hollande, magistrat intègre, négociateur habile, eut la gloire de conclure avec l'Espagne 1609 le traité qui assurait l'indépendance de son pays. Jaloux des libertés de la république il s'opposa aux entreprises ambitieuses de Maurice de Nassau, et se vit en butte aux attaques les plus violentes. Dénoncé comme hérétique au synode de Dordrecht, il fut condamné comme arminien; cela, et l'absurde accusation d'avoir voulu livrer la Hollande aux Espagnols, suffit pour le faire condamner à mort. Il fut exécuté 13 mai 1619 et subit avec fermeté l'injuste supplice; il mourait pour la liberté. BARON ou Baronius, César, né 31 oct. 1538, à Sora, roy. de Naples, peut être considéré comme un des pères de l'histoire ecclésiastique catholique. Il étudia le droit et la théologie, vint à Rome avec son père 1557, en un moment de réaction politique et religieuse, se fît recevoir membre de la congrégation de l'Oratoire, dont il devint le général en 1593, s'adonna pour son instruction et son édification à la lecture des biographies chrétiennes et des ouvrages d'histoire ecclésiastique et finit par entreprendre le recueil auquel il a donné son nom. Il mit 30 ans à réunir ses matériaux. Pendant ce temps, chargé d'écrire une Histoire de l'Église en réponse aux Centuries de Magde-bourg, il fut plus d'une fois arraché à ses paisibles travaux par les honneurs que lui imposait la curie romaine dont il était la gloire. Il fut successivement nommé protonotaire du siège apostolique, confesseur de Clément VIII, cardinal 15 juin 1596, bibliothécaire, membre de la congrégation des rites et de la typographie du Vatican. Deux fois, après la mort de Clément VIII et après celle de Léon XI, il fut sur le point d'être nommé pape; les Espagnols firent échouer son élection, à cause de son écrit sur la Monarchie de Sicile. Il reprit joyeusement ses travaux littéraires, dormant 4 h. par jour, ne mangeant que ce qu'il faut pour vivre et f le 30 juin 1607, succombant sous le poids de ses occupations multipliées. Ses Annales eo clésiastiques, qui vont de l'an 1 à l'an 1198, sont moins une histoire qu'une chronique, une compilation et un ensemble de documents officiels; sauf quelques erreurs de chronologie et de critique, c'est un répertoire unique en son genre et que doivent consulter tous ceux qui veulent écrire l'histoire. Baronius ne fait pas de controverse directe; il s'en rapporte aux faits, qui lui semblent suffisants dès qu'ils sont établis par l'autorité de l'Église. Son ouvrage a été continué par Rainaldi et Laderchi. Anvers 1610,12 vol. f* (Le t. XI, où se trouve le traité sur la monarchie de Sicile, fut interdit par Philippe HI dans toute l'étendue de ses États). Lucques. 42 vol. fo 1738-1757. BARSUMAS lo évêq. deNisibis, v. Nestoriens. — 2° archimandrite de Syrie, chef du parti eu-tychéen parmi les moines de Syrie, l'un des souliens les plus violents de Dioscore au concile des brigands d'Éphèse 449. f 458. Les jacobites lui prêtent plusieurs miracles. BARTH, Chrétien-Gottlob, né 1799 à Stuttgart, étudia la théol. à Tubingue; pasteur à Mœtlingen, et depuis 1838 à Calw; auteur de plus de trente ouvrages populaires chrétiens, Hist. bibl. des missions, Journal pour la jeunesse, Géogr. bibl., Poésies, etc. Un des plus ardents soutiens de l'œuvre des missions et d'une Société de traités, f 1862. Chrétien èvan-gélique, il était aussi théosophe, publia des extraits de Bengel et d'OEtinger et croyait au rétablissement final. BARTHÉLEMITES 1<> Moines arméniens de l'ordre de saint Basile, accueillis à, Gènes 1307, où ils se bâtirent une église qu'ils consacrèrent à saint Barthélémy. Clément V leur permit de célébrer leur culte d'après leur rite. Ils fondèrent plusieurs couvents en Italie et prospérèrent quelque temps. Mais leur nombre étant Venu à diminuer notablement, Innocent X les supprima 1560. Clercs séculiers vivant en commun, ils tiraient leur nom de Barthélémy Holzhauser, né 1613 à Langenau, consacré prêtre 1639, puis chanoine à Salzbourg, où il fonda un ordre, ou espèce de séminaire, dont la réputation fut bientôt si solidement établie que l'év. de Coire 1644 ordonna à ses doyens de s'y faire affilier; <joe les évéques de Ratisbonne, Osnabrtlck et Mayence, 1653-1654, ne voulurent d'autres prêtres que ceux qui y avaient été élevés; que la Hongrie, l'Espagne, ta Pologne y recrutèrent également leur clergé. Le nonce à Cologne appelait les règles de Holzhauser « la moelle des canons. » Les services rendus par cet ordre lui valurent la protection de Léopold et d'Innocent XL Holzhauser f 1658, doyen et curé à Bingen. Son œuvre tenait à sa personnalité et périclita rapidement après lui; en 1795 l'ordre avait cessé d'exister. BARTHÉLÉMY 1<> Apôtre. — 2o de Bresce, prof, de droit canon à Bologne, connu surtout par ses Comment, sur le décret de Gratien 1236, et par quelques autres écrits sur le droit. — 3° Barth. de Las Casas, v. Casas. — 4° l'abbé J.-J. Barthélémy, auteur du voyage du j. Ana-charsis, 1716-1795, savant dans les langues orientales, s'est peu occupé de théologie. — 5* Barthélémy des Martyrs, célèbre év. portugais, l'un des hommes les plus pieux et les plus considérés de son temps et de son Église. Né 1514 à Lisbonne, baptisé dans l'église N. D. des Martyrs, d'où lui vient son nom. Il entra à 14 ans dans l'ordre des dominicains, fut précepteur de don Antonio, neveu du roi Jean III, fut nommé archev. de Braga 1559, se montra zélé partisan d'une réforme, soit au conc. de Trente, soit dans son diocèse; fonda un séminaire de prêtres, réunit un concile provincial 1566, ouvrit des hospices pour les malades et pour les pauvres, déploya le plus grand dévouement pendant la peste et la famine 1567-1575, et obtint de Grégoire XIII la permission de se démettre de, tous ses honneurs et fonctions 1582. Il se retira dans le couvent de Viana, et I 1590 en odeur de sainteté. Il a laissé plusieurs commentaires, un catéchisme, un Com-pendium de la vie spirituelle, les Devoirs des év. de Rome, 1727. 2 vol. f* éd. d'Inguimbert. BARTHÉLÉMY (Massacre de la Saint-). Cette exécution collective des réformés de France, précédée par les exécutions d'Amboise, par le massacre de Vassy, par la tentative contre Co-ligny, peut-être par la mort de Jeanne d'Albret et par d'autres essais criminels, fut décidée par la cour de France sous les auspices de Catherine de Médicis et de Charles IX. Elle commença dans la nuit du samedi au dimanche 24 août 1572, jour de la fête de saint Barthélémy. Parmi les complices de ce massacre se trouvaient les ducs d'Anjou et de Nevers, Henri d'Angou-lême, le maréchal de Tavannes, René de Bira-gue, Albert de Gondi, le duc de Guise, etc. Les assassins avaient pour signe de ralliement une écharpe au bras gauche et une croix blanche au chapeau. La plupart des chefs de la réforme avaient été attirés et retenus à Paris sous prétexte des noces du prince de Béarn avec la sœur du roi, Marguerite. Plusieurs d'entre eux se méfiaient des faveurs dont ils étaient comblés: les catholiques au contraire s'en irritaient; le légat du pape s'en plaignit ouvertement, et le roi dut le calmer en lui disant: • S'il m'était permis de m'expliquer davantage sur tout ce que je sais ! Dans peu le succès obligera le pape à louer mes desseins, ma piété et mon zèle ardent pour la religion. • Les massacres commencèrent dans presque toute la France le dimanche au point du jour,à Paris dès 2 h. du matin. Les têtes les plus illustres tombèrent dans cette affreuse boucherie. Coligny, Téligni, Pardail-lan, Piles, Caumont de la Force, Jean Goujon, Ramus, La Rochefoucault, Soubise, Brion, La Place, etc. Ces égorgements se prolongèrent pendant 8 jours à Paris et dans la province. Pé-réfixe, archev. de Paris, compte qu'il n'y eut pas moins de cent mille personnes ainsi assassinées; à Paris même, plus de 4000; les plus notables furent exhibés au gibet de Montfaucon, II y en aurait eu davantage encore si plusieurs commandants de province n'eussent refusé d'obéir, les uns sous prétexte qu'ils ne pouvaient croire que ce fussent les ordres du roi, d'autres alléguant qu'ils avaient sous leurs ordres des soldats, mais point de bourreaux. II est difficile de fixer exactement le nombre des victimes; les uns le réduisent à 60,000, les au-très le portent à plus de 200,000; évidemment on n'a pas osé faire la statistique de cette monstruosité inouïe dans l'histoire. Le roi de Navarre et le prince de Condé furent épargnés, comme princes du sang, ce que Philippe II regretta beaucoup. La nouvelle de ces horreurs se répandit rapidement. En France on frappa des médailles d'or et d'argent en l'honneur du roi. A Rome la joie tint du délire; on chanta des Te Deum, on tira le canon du château Saint-Ange, on alluma des feux de joie, on multiplia les glorieuses inscriptions, on frappa une médaille à l'effigie du pape, avec un ange frappant les protestants, et ces mots: Hugonotorum Strages 1572. — Une foule de questions critiques, historiques et politiques se rattachent à ce lugubre événement, une des hontes de la France et de la monarchie, qui trouva une expiation partielle dans les massacres de 1791 et de 1793. Les explications des écrivains catholiques ne réussiront jamais ni à pallier le crime, ni en atténuer les fatales conséquences. V. Qui-net, Michelet, Mignet, Soldan, de Félice, Coque-rel, Crottet, Bulletin du Prot. fir. 1856 et 1873. BARTON, Élisabeth, dite la Sainte, ou la Vierge de Kent, jeune fanatique, ou visionnaire, qui parut en Angleterre au commencement de la réformation. Née vers 1500 dans le comté de Kent, elle entra comme religieuse au couvent du Saint-Sépulcre, à Cantorbéry, et passa de bonne heure pour avoir des révélations. Son confesseur, Richard Masters, l'exploita; elle fit des miracles et la chapelle d'Aldington devint un lieu de pèlerinage. Elle reçut de Marie-Madeleine une lettre en caractères d'or, et quand il fut question du divorce d'Henri VIII, elle s'avisa de prédire qu'il perdrait sa couronne et qu'il mourrait dans l'espace de 7 mois. L'év. Jean Fisher et le chancelier Thomas Morus furent ses dupes; ce dernier cependant finit par voir clair, mais ils n'en périrent pas moins l'un et l'autre, après que Henri VIII irrité de ces intrigues catholiques eut fait arrêter, juger et condamner à mort la nonne avec ses sectateurs, Masters, etc. avril 1534. Elle avoua la supercherie et en rejeta la faute sur ses savants complices, qui avaient abusé de son état maladif pour lui dicter des paroles, qu'ils mettaient sur le compte du Saint-Esprit. BASILE lo le Grand, d'une ancienne famille chrétienne distinguée, né 329 à Césarée en Cappadoce; un des plus remarquables des pères de l'Égl. grecque. Son éducation fut confiée à un de ses parents, partisan de Grégoire Thaumaturge. Plus tard son père se chargea pendant quelque temps de son instruction, puis l'envoya successivement étudier à Césarée et à Constantinople. Ce fut dans cette dernière ville qu'il entra en relation avec le païen Libanius, qui professait pour lui la plus haute admiration. En 351, à Athènes, il reprit ses études, encore sous la dire tion de professeurs païens. Il y commença une liaison, qui dura toute sa vie, avec le célèbre Grégoire de Naziance. Il s'y lia également avec le prince Julien (plus tard J. l'Apostat) qui se prit pour lui d'une vive affection. En 356, de retour à Césarée. il se distingua comme professeur et avocat. Ce n'est qu'alors, sur les instances de sa sœur, qu'il se fit baptiser; il vendit tous ses biens et renonça au monde pour se donner à Christ. Il se retira, avec son ami Grégoire, dans une solitude sur les bords de l'Iris, Pont, et s'y livra avec lui à l'étude des saintes Écritures. Grégoire, d'un esprit plus actif et plus ardent que Basile, n'y resta pas longtemps. Basile, une fois seul, organisa la communauté monastique qui s'était groupée autour de lui dans sa propriété de la Basiliade, que Grégoire appelle une petite ville, et les règles qu'il établit servirent de modèle à presque tous les monastères de l'orient. Son éloquence attira des centaines et des milliers de chrétiens dans le silence des cloîtres. Mais il n'était pas au bout de sa carrière active. Il se mit à visiter les couvents de Syrie, de Mésopotamie et d'Égypte. Puis en 362, Eusèbe év. de Césarée, ayant besoin d'un homme éloquent et instruit, appela Basile auprès de lui, l'ordonna prêtre et le chargea de la prédication. Il y obtint de tels succès qu'Eu -sèbe jaloux lui suscita des embarras qui l'obligèrent à s'éloigner. Basile était depuis trois ans dans sa retraite auprès de Grégoire de Naziance, lorsque des dissensions s'élevèrent à Césarée; pour les apaiser on ne crut pouvoir mieux faire que de rappeler Basile. Celui-ci réussit par sa délicatesse et sa prudence à ramener la paix, et ce ne fut pas le seul service qu'il rendit. Lors d'une famine terrible, il plaida avec tant d'éloquence la cause des pauvres, que les plus riches s'empressèrent de leur venir en aide. Aussi, en 370, à la mort de l'évêque, ce fut Basile qu'on choisit pour le remplacer. Il avait contre lui plusieurs évêques du voisinage, mais il l'emporta, gr&ce à Grégoire de Naziance et à son père. Dès lors il se donna tout entier aux soins de son troupeau; l'exhorter, l'instruire, visiter les malades et les affligés, prêcher, fonder des institutions pour les malheureux, telles étaient ses occupations. Comme Ambroise de Milan et d'autres, Basile s'astreignit à un genre de vie sévère, pour pouvoir d'autant mieux venir en aide aux indigents. Et au rebours de tant d'évêques contemporains qui méritaient si bien le mot de son ami Grégoire de Naziance: « Lions auprès des petits, rampants auprès des grands, » Basile, si compatissant envers ceux qui souffraient, résistait courageusement aux injustices des puissants de la terre. C'est ainsi qu'il ne se fit nul souci de l'hostilité des évêques qui s'étaient opposés à sa nomination à Césarée; c'est ainsi qu'il résista au gouverneur de la ville, lequel, voulant épouser une femme, l'avait arrachée de force au temple où elle avait cherché un refuge contre ses obsessions. Le peuple, admirant le courage de son évêque, voulait massacrer le gouverneur, et l'aurait fait, sans l'intervention de Basile. Celui-ci eut aussi à lutter contre les hérésies d'Anus et d'Apollinaire; modéré dans ces débats, il s'attira les inimitiés de quelques orthodoxes; mais il finit par se les concilier à force de douceur et de patience. f 1er janvier 379, après 9 ans d'épisco-pat, pleuré et regretté de tous, des païens comme des chrétiens. Basile est le fondateur du plus ancien des ordres religieux, celui qui porte son nom. Il l'avait établi et organisé en 358 dans les solitudes du Pont, sur le fleuve Iris, en face d'une communauté de religieuses fondée par sa sœur. La règle qu'il y établi tétait, eo thèse générale, moins sévère que celle de Benoît en occident; il n'établit pas la perpétuité des voeux; il n'admettait les enfants qo'avec l'autorisation de leurs parents, et les esclaves avec celle de leurs maîtres; les personnes mariées ne pouvaient entrer dans la communauté qu'avec le consentement des deux conjoints; l'étude et le recueillement y étaient strictement observés; les travaux manuels, moins recommandés qu'en occident, étaient surtout ceux de l'agriculture; quant à la nourriture et aux vêtements, ils devaient être de la plus grande simplicité. Basile fit aussi une règle pour les communautés de femmes. Malheureusement l'ordre déclina pendant les ténèbres du moyen âge et Grégoire XIII dut le réformer en 1579. Plusieurs savants en sortirent, entre autres Bessarion et Barlaam. Basile a beaucoup écrit, mais plusieurs de ses ouvrages sont perdus. Ceux qui restent dénotent un talent rare. U a du charme, du coloris, de l'élégance, de l'imagination. Ses Lettres sont particulièrement intéressantes; il y en a 428; puis viennent ses Homélies (l'Hexamèron), ses traités ascétiques (Moratia), des Comment, sur les Écritures, et divers écrits contre les hérésies. H. B. 2® Basile, médecin, fut appelé par l'influence d'Eusèbe, à l'évéché d'Ancyre 336, et devint l'un des chefs des semi-ariens, qui prirent de lui le nom de basiliens. Les ariens stricts le firent déposer 360. Ses écrits, contre Marcellus d'Ancyre et sur la virginité, sont perdus. Il était instruit et éloquent. 3° Basile, év. de Séleucie en Isaurie, connu surtout par ses hésitations dans les controverses eutychiennes. Au concile de Constantino-ple 448, il fut contre Eutyches; il fut pour au concile des brigands, Éphèse 449; le concile de Chalcédoine 451 le déposa pour ce fait, mais il obtint le retrait de cette sentence en assurant qu'à Éphèse il avait dû céder à la violence. Il reste de lui 40 sermons, une Vie de Thécla et une Notice sur ses miracles; impr. Heidelberg 1596 et 1605, Paris 1622. Il n'est cependant pas sûr que les écrits sur Thécla soient de lui. 4° Basile, le Bogomile, v. Cathares. BASILIDES, gnostique célèbre, né dans le l«r siècle, vécut sous Adrien et t vers 125 ou 130. Épiphane le fait originaire de Syrie. U enseigna en Égypte et en Perse. C'est à Alexandrie qu'il se forma et qu'il conçut l'idée de son système. Isidore, son fils, chercha à le compléter par ses écrits. Sa doctrine nous est surtout connue* par Clément d'Alex., Irénée, Épi-phanes et Hippolyte, l'auteur des Philosophou-mena. A la base de son système se trouvent le dualisme et une doctrine d'émanations. Dieu et la matière sont éternels. Le Dieu suprême, ineffable, est un abîme incompréhensible; il se manifeste par 7 forces, dont 4 intellectuelles: l'esprit (noûs), le verbe, l'intelligence, la sagesse; une force effective, la force, dynamis; et 2 forces morales, la justice et la paix. Dieu et ses 7 Eont forment l'octave parfait. De ce premier royaume des esprits, il en émane un second, un peu inférieur, et ainsi de suite jusqu'au 365«ne, tous habités par des intelligences de différents degrés; notre monde a été créé par des intelligences du dernier ordre, ce qui explique la présence du mal au milieu de nous. C'est le Dieu manifesté de cette manière que Basilide explique par le symbole, ou talisman d'Abraxas, dont les lettres additionnées font 365. Du mélange de l'esprit avec la matière naquit la disharmonie, et partout « la rouille est attachée au fer. > Il n'y a rien de mort dans la nature, pas même les pierres. L'âme sera purifiée en passant successivement de la pierre dans la plante, puis dans l'homme jusqu'à Dieu. Le premier ange du 365®e ciel, VArchôn est le créateur du monde. Les créatures auraient pu s'élever jusqu'à lui, mais le Dieu souverain voulant nous élever plus haut encore et nous rapprocher de lui, le noûs s'unit au baptême dans l'homme Jésus. Quand l'archôn le vit pour la Ire fois il fut effrayé; il avait cru être le plus grand sur la terre et il voyait des hommes capables de s'unir au noûs; il les laissa librement sortir de son royaume. Tout péché doit être expié et l'homme Jésus dut mourir pour les siens. Quant à la morale, Épiphane et Irénée le font ennemi de la vertu, en lui attribuant l'abus que quelques-uns de ses disciples ont fait de sa doctrine; il semble au contraire, d'après Clément d'Alex, qu'il se faisait de la vertu un idéal très élevé, mais dont l'ascétisme n'excluait pas nécessairement le mariage. Basiiides regardait l'homme comme un petit monde, réunissant toutes les qualités et tous les défauts du grand. Mais il lui donnait trop de force pour résister au mal. Il admettait 2 états de vie intérieure, la prière avant le combat, et l'action de grâces après la victoire. Il avait rédigé un évangile, qui est perdu. Il eut beaucoup de disciples, qu'on appela basilidiens; le plus célèbre fut Marcion. BASILIENS, v. Basile. BASILIQUES io Collection d'ordonnances publiées à diverses époques par les empereurs romains et destinée d'abord à l'orient. La première fut faite par Justinien 528-535, en latin, puis traduite en grec. Les traductions et les abrégés qui en furent faits altérèrent peu à peu le texte, et il fallut aviser à une rédaction authentique. L'emp. Basile le Macédonien s'en occupa, pour fixer la législation 878; puis Léon VI le Philosophe 886 y mit la dernière main, en s'entourant de savants autorisés. Ce dernier recueil, divisé en 60 livres, comprend en outre tout le corps du droit romain, les Institutes, le Digeste, le Code, etc. On sait, mais sans autres détails, que Constantin Por-phyrogenitus fit procéder vers 911 à une nouvelle re vision. 2<> L'antiquité désigna longtemps sous ce nom, qui signifie royal, tous les monuments publics d'une étendue considérable et d'un aspect grandiose, quelle que fût d'ailleurs leur destination; ainsi les palais où se rendait la justice, les constructions couvertes destinées aux marchés et au monde des affaires. Il y en avait à Rome un grand nombre. Leur architecture était en général fort simple; à l'extérieur une longue suite de fenêtres à plein cintre; à l'intérieur deux rangées de colonnes dans le sens de la longueur; à l'extrémité un hémicycle où siégeait le président. Lorsque les chrétiens furent admis à célébrer leur culte en public, avec la protection des empereurs, ils s'emparèrent des basiliques dont la forme était appropriée à leur culte et qui n'avaient pas été profanées par l'adoration des faux dieux, et depuis le jusqu'au 9m« siècle, l'architecture chrétienne ne s'éloigna guère de ce style emprunté aux Grecs et aux Romains. L'hémicycle devint naturellement le chœur; l'espace compris entre les colonnes fut la grande nef; à droite et à gauche, les bas côtés. En souvenir de la croix on ajouta deux nefs transversales, le transept ou les croisées. Des galeries supérieures furent ajoutées, appelées travées, pour augmenter le nombre des places, plutôt que comme ornement, quoiqu'elles servent aussi à l'ornementation. En face de l'autel, les places des membres du clergé, ou presbyterium. Les néophytes non baptisés, qui n'avaient pas le droit de pénétrer dans l'église, se tenaient dehors sous le porche (atrium ou narthex), sur une petite place que l'on appelait, et que l'on appelle encore parvis, et où étaient primitivement le bénitier et le baptistère, aujourd'hui transférés à l'entrée de l'église. Au moyen âge on réserva plus particulièrement le nom de basiliques pour des églises desservies par des moines, ou pour des monuments royaux.-Aujourd'hui on l'emploie surtout en parlant de grandes cathédrales, celles de Saint-Pierre, de Saint-Paul, etc.; le mot appartient au style élevé. BASNAGE, famille noble de Normandie, qui a fourni à l'Église plusieurs illustrations: 1° Basnage, pasteur à Norwich, puis à Ca-rentan, Normandie. 2° Son fils, Benjamin Basnage, né 1580, pasteur à Carentan, représentant de sa province à la plupart des synodes de son époque. Il avait été délégué en Angleterre et en Hollande 1621 pour « avertir les pays étrangers de la persécution. > Louis XIII ne l'aimait pas et essaya, mais en vain, d'empêcher son admission à l'assemblée de La Rochelle. Modérateur au synode d'Alençon 1637, il résista énergiquement au commissaire du roi, Saint-Marc, qui voulait l'obliger à mettre en tête du cahier des plaintes les mots de religion prétendue réformée, f 1652. Il a laissé un traité: De l'état visible et invisible de l'Église, etc., contre la fable du Purgatoire. La Roch. 1612. 3° Antoine, son fils, sieur de Flottemanville, né 1610, pasteur à Bayeux 1637, arrêté 1685, emprisonné au Havre, déporté en Hollande. Nommé pasteur à Zutphen, f 1691. Il eut deux fils; François, le plus jeune, suivit la carrière des armes et f 1685; l'autre fut 4° Samuel, né à Bayeux 1638, desservit cette église avec son père jusqu'en 1685, l'accompagna en Hollande, lui succéda à Zutphen, et f 1721. Il a laissé des Exercices critico-historiques, in-4° qui sont une critique ingénieuse et savante des Annales de Baronius; des Annales politico-ecclésiastiques depuis Auguste jusqu'à Phocas, un peu diffus, mais recommandable par son exactitude; enfin une Morale théol. et politique sur les vertus et les vices de l'homme, Amst. 1703, 2 vol. in-12, où il essaie de séparer la morale de la dogmatique, sans arriver toutefois à des conclusions bien satisfaisantes; son analyse des vices et des vertus est la meilleure partie de l'ouvrage. 5° Henri, oncle du précédent, second fils de Benjamin, et frère d'Antoine; né 16 oct. 1615, t à Rouen 20 oct. 1695: avocat distingué du barreau de Rouen, généralement estimé, fut en 1677 commissaire pour les affaires de la religion, montra beaucoup de zèle, et cependant ne fut nullement inquiété lors de la Révocation. A écrit un Traité des hypothèq. et des Comment, sur les contâmes du pays et duché de Normandie. Il eut une fille qui épousa Paul Bauldri, prof, d'hist. eccl. à Utrecht, et 2 fils: 6® L'alné, Jaques, né à Rouen le 6 ou 8 août 1653, dit de Beau val, étudia la théologie successivement à Saumur, Genève et Sedan. Nommé pasteur à Rouen 1676, il fut chargé en 1679 du sermon d'ouverture du synode de Saint-Lô. En 1684 il épousa Suzanne Du Moulin, fille du pasteur de Chateaudun et petite fille du célèbre Pierre Du Moulin. Travailleur infatigable il s'occupait surtout d'études historiques et acquit bientôt la réputation d'un savant consommé. Son église ayant été supprimée en 1685, il obtint par la grâce du roi la permission de s'exiler en Hollande, où il fut nommé pasteur de Rotterdam 1691, et en 1709 pasteur de Lia Haye. II avait de grandes aptitudes comme homme d'État: l'observation est de Voltaire; il réussit dans plusieurs négociations importantes dont il fut chargé par le grand pensionnaire Heinsius, et rendit des services signalés à l'abbé Dubois 1716 quand celui-ci vint à La Haye pour y négocier le traité de la triple alliance; il en fut récompensé par la restitution de ses biens. Historiographe attitré des États-Généraux il écrivit les Annales des Provinces-Unies, 2 vol. f°, auxquelles on ne reproche que son ardent patriotisme pour la France. Il eol plusieurs fois à intervenir par ses conseils dans les affaires des religionnaires français; il blâma l'insurrection des camisards, ce qui acheva de le mettre mal avec son ancien professeur et beau-frère Jurieu. Il recommanda Antoine Court au cabinet du Palais-Royal, et adressa à ses coreligionnaires une instruction pastorale qui fut imprimée à Paris par ordre de la cour et répandue à profusion dans les prorinces. Accablé par les fatigues encore plus que par l'âge, il dut dans ses dernières années concentrer toute son activité sur ses fonctions d'historiographe et sur la correspondance qu'il entretenait avec les princes, les magistrats et les savants de toutes les parties de l'Europe, f 22 déc. 1723, ne laissant qu'une fille, mariée au conseiller de La Sarraz, et dont le petit-fils était naguère ministre d'État du roi des Pays-Bas. D'un caractère affable, généreux et plein de droiture, il fut aimé et regretté même de ceux dont il était l'adversaire politique ou religieux. Il a laissé de nombreux ouvrages, Sermons, Entretiens sur la religion, Traité de la conscience, Lettres pastorales, livres de controverse, Notes sur lfA. et le N. T. etc. Les plus considérables sont, outre les Annales des Prov.-Unies, son examen des méthodes proposées pour la réunion des protestants avec l'Égl. rom.; son Traité des préjugés, son Traité de la communion, très apprécié même des catholiq.; son Hist. deségl. réformées, Rotterd. 1690; son Hist. de l'Égl. depuis J.-C. jusqu'à présent, etc. Enfin la Biblioth. nationale de Paris possède un mss. de lui, en latin, sur la République et cité de Genève, intéressant pour l'histoire des réfugiés. V. Haag. 7<> Henri, second fils d'Henri (5°) né 7 août 1656 à Rouen, f 29 mars 1710 à La Haye; reçu avocat à 20 ans, se fit une brillante réputation à Rouen, mais dut quitter la France à la Révocation et se rendit en Hollande 1687. Il a laissé un Dictionn. universel, 3 vol. f&; un livre sur la Tolérance des religions, et plusieurs écrits polémiques, notamment contre Jurieu, avec qui il ne se réconcilia que sur son lit de mort. — La maison des Basnage est marquée par un marbre à Rouen, rue de l'Écureuil. BASTHOLM, Dr en théol. né 1740, t pasteur à Copenhague, prédicateur de la cour, et inspecteur de l'académie des cadets; auteur de plusieurs écrits sur l'histoire juive, les doctrines philosophico-religieuses des anciens peuples, l'amélioration du culte public, la religion naturelle, etc. Une certaine indécision dogmatique l'a empêché d'exercer l'influence à laquelle ses talents et son érudition lui auraient donné des droits. BATH-KOL, fille de la voix, c.-à-d. de la voix de Dieu, mode de révélation que les talmu-distes rattachent à certaines manifestations de l'A. et même du N. T. Ce serait comme l'écho d'une voix venue du ciel. Les rabbins admettent qu'entre les temps des prophètes et leur époque, il y a une différence, et que cette différence se traduit aussi et surtout par une révélation moins distincte de la volonté de Dieu; ils n'ont plus la prophétie, mais il reste encore une certaine voix, un esprit, un souffle, quelque chose d'analogue à ce qui est mentionné Deut. 4, 12. 36. 1 Rois 19, 13. Matt. 3, 17. 17, 5. On pourrait l'appeler intuition, pressentiment, seconde vue, ou voix intérieure: ce n'est plus la prophétie proprement dite, mais c'est l'accomplissement de cette parole: Dieu, ne s'est jamais laissé sans témoignage, Act. 14, 17. A chacun de comprendre quand Dieu lui parle, et de saisir les appels les plus indirects, qui peuvent être pour lui, sous une apparence fortuite, la voix du ciel. Ainsi quand Augustin entendit à Milan les enfants chanter: Prends et lis. BAUER, Bruno, né 6 septembre 1809 à Ei-senberg, Saxe-Altenbourg, fils d'un peintre sur porcelaine, étudia à Berlin où il professa quelque temps, puis fut nommé 1839 prof, extraordinaire à Bonn, où il brilla comme un des coryphées de la gauche hégélienne. Sa critique négative, dirigée en 1840 contre l'évang. de Jean9 puis contre les synoptiques, lui valut l'interdiction de continuer son enseignement. II ne voyait dans les récits bibliques que des inventions arbitraires, sans fondement et pleins de contradiction. 11 revint à Berlin en 1842, fit imprimer à Zurich en 1843 son christianisme dévoilé, qui fut poursuivi même par le gouvernement libéral de ce canton. Il s'oppose à l'émancipation des juifs, et se montre partisan en politique du système césarien. En 1850 il publie sa critique des Lettres de Paul, et va plus loin que l'école de Tubingue en niant l'authenticité de ses principales épîtres. Schwartz voit en lui la victime d'une logique enragée, f à Rixdorf 10 avril 1882, à peu près oublié de ses contemporains, qu'il méprisait.—Outre son frère Edgar, qui partageait les mêmes idées, il faut nommer encore Aurel-Reinhard-Egin B. qui, après avoir été pasteur catholique-allemand à Dresde, rentra en 1849 dans l'église protestante; auteur d'écrits populaires sur les réformateurs; et Georges-Laurent B., prof, de théol. à Altdorf et Heidelberg, rationaliste, auteur d'une Théol. de l'A. T., d'une Mythologie de l'A. et du N. T., d'Antiquités hébraïques, etc. BAUMGARTEiV, Sigismond-Jaques, né 1706 à Wollmirstâdt, f à Halle 1757, théologien allemand qui peut être considéré comme formant la transition entre l'école de Spener et de Franke et le rationalisme moderne, sans qu'on puisse toutefois lui reprocher ni hésitation, ni tergiversation, ni abandon de la foi chrétienne. Mais il maintint les droits et la nécessité de la science, contre les disciples successeurs de Spener et de Franke, qui paraissaient en faire bon marché. Élevé dans la maison de Halle, dont son père avait été directeur, il fit toute sa carrière à Halle, comme maître de latin, puis vicaire, professeur suppléant, pasteur et enfin professeur de théologie. Il obtint en cette qualité d'immenses succès et ne compta jamais moins de 3 à 400 élèves. Doué d'une grande facilité de travail et d'une vaste érudition, il a composé beaucoup d'ouvrages dont la plupart n'ont été publiés qu'après .«a mort: les 16 premiers volumes d'une Hist. univ., un abrégé de l'Hist. de l'Église, une Dogmatique chrétienne en 3 vol.; une Dissertation sur la conversion non instantanée, en réponse à quelques exagérations, etc. Sa vie a été écrite par Semler. — Son frère plus jeune, Gottlieb, 1714-1762, se distingua dans la philos, et les beaux-arts. B AUMG ARTEN - CBUSIUS, Louis - Fréd. -Ot-ton, né 31 juilL 1788 à Mersebourg, fils du pasteur et surintendant de la ville, qui avait joint à son nom celui de son beau-père. Élevé dans la crainte de Dieu, il étudia d'abord à Grimma, puis à Leipzig, où il prit ses grades comme philologue, philosophe et théologien, et fut appelé en 1812 à léna, où il parcourut une brillante carrière. Il professa sur presque toutes les branches de la théologie, sauf l'histoire ecclésiastique, et exerça une bonne influence sur le séminaire. Il écrivit en faveur de la liberté religieuse et combattit vivement le rationalisme vulgaire. 11 se rapprochait des idées de Schleier-macher, et sur plusieurs points de Schelling. Ses travaux sur l'Hist. des Dogmes ont fait époque 1832-1840. f 31 mai 1843, d'une attaque d'apoplexie, laissant plusieurs ouvrages inachevés sur Jean, les synoptiques, les Romains, etc., qui furent cependant publiés 1844 par les soins de ses collègues et de ses élèves. Hase acheva son Hist. des Dogmes 1845. Sans avoir pris une position dogmatique bien tranchée, il resta toujours sur la base de l'Évangile, comme seule puissance de Dieu à salut. BAUMGiERTNER, Augustin, ou Paumgart-ner, d'une famille noble de Bavière, né à Munich 1531, f chancelier à Landshut le 18 avril 1599; fit ses études à Ingolstadt et fut reçu docteur en droit. Il se distingua surtout au concile de Trente 1562, où il fut envoyé par l'archiduc Albert avec le jésuite Cavillon. Après avoir témoigné de tout son zèle pour la défense de l'Église catholique, il énuméra les dangers que lui faisait courir < la peste des novateurs, » et il entra dans le vif de son sujet en montrant comment les vices du clergé étaient la principale cause du succès des évangéliques. < Sur cent prêtres bavarois, une enquête récente Ta prouvé, il en est à peine 3 ou 4 qui n'aient pas de concubine, etc. » On lui répondit par des compliments et de vagues promesses; l'influence de Cavillon l'emporta au concile et dans le pays, où les jésuites regagnèrent bientôt le terrain qu'ils avaient cru perdu. BAUR, Ferd.-Christian, le chef de l'école de Tubingue, né 21 juin 1792 à Cannstadt, étudia au séminaire de Blaubeuren où il passa en 1817 comme professeur; appelé à 1826 à Tubingue comme prof, de théol., il y resta jusqu'à sa f 2 déc. 1860. D'abord disciple de Schleierma-cher, il subit peu à peu l'influence de Hegel, et après avoir défendu la révélation, la résurrection de J.-C. et les faits évangéliques, il en vint à ne plus voir dans le christianisme qu'une des formes du développement religieux de l'humanité. Dans sa Symbolique et Mythologie 1824 on voit percer déjà cette tendance à rattacher la doctrine du Christ aux religions païennes, et dans le christianisme lui-même il distingue, dès son apparition, deux courants distincts, l'un judéo-chrétien, représenté par Pierre; l'autre gnostique, représenté par Paul. De là aussi une critique de tendance, qui lui fait classer les écrits du N. T. d'après le parti auquel ils appartiennent. Mais par la force des choses le conflit cesse, la Intte prend fin; les partis s'unissent pour résister au paganisme; il se fait entre eux une conciliation, un compromis, qui devient le catholicisme vers 170, et qui plus tard sera le protestantisme. Si les 4 grandes épîtres de Paul condamnent le judaïsme, l'Apocalypse prend sa défense, et les Actes cherchent à tenir la balance égale entre les uns et les autres; d'où il résulte, selon Baur, que les Actes appartiennent à une époque plus récente. Logicien impitoyable, Baur a pu faire l'expérience qu'en religion la logique ne suffit pas- Ses disciples eux-mêmes avouent qu'il a dû forcer certains textes pour les adapter à son système historique, et après l'avoir suivi avec enthousiasme dans son travail de démolition, ils se divisèrent quand il fut question de reconstruire. On peut dire que cette école a duré de 1842 à 1857; Strauss pour sa part concourut à la discréditer en exagérant ou en précipitant ses conclusions, mais si Baur a désavoué Strauss, qui faisait de Jésus un mythe, il s'est exposé lui-même au reproche de l'avoir pour ainsi dire laissé dans l'ombre, et d'avoir donné plus d'importance aux discours de ses disciples. On n'en doit pas moins reconnaître qu'il a rendu de grands services à la science théologique en élargissant ses cadres et en lui frayant des voies nouvelles. Son principal ouvrage est l'Histoire de l'Église dans les 3 premiers siècles. Il a publié en outre une revue, Theol. Jahrbucher, one dissertation sur le Parti de Christ (1 Cor. 1,12), le Manichéisme, la Gnose chrétienne, les soi-disant Épîtres pastorales, Doctrine de la Rédemption, Doctr. de la Trinité, Recherches critiques sur les Évang. canoniques, et une foule d'autres ouvrages, sans parler de plusieurs écrits posthumes qui ont de la valeur. Parmi ses disciples on compte Zeller et Schwegler, qui l'un et l'autre finirent par abandonner la théologie. C'est le prof. Beck qui inaugura la réaction contre l'intellectualisme pur de Baur. BAVIÈRE. Cette contrée, encore presque déserte du temps de César, connue d'Auguste sous les noms de Norique et de Vindélicie, mais avec des frontières mal déterminées; peuplée au 5®e siècle de Boïes, ou Boïares, venus de Bohême, conquise par les Francs sous Dago-bert, se constitua en royaume indépendant 743 sous Odilon. Après une histoire des plus accidentées, tour à tour empire et duché, elle prit une certaine consistance homogène en 1507 sous Albert H, duc et électeur, et ne fut de nouveau érigée en royaume qu'en 1806. L'établissement du christianisme y date environ du 3m« ou du 4me siècle. Constantius y prêcha l'Évangile au commencement du 5*»©, et quand Séve-rin y arriva, vers 454. il trouva partout des temples et le culte organisé; il fut l'ange gardien de l'Église contre les barbares et contre l'arianisme. Au 8m* siècle c'est Boniface qui évangélise, et déjà de nombreux couvents et des évêchés prouvent que le christianisme a poussé de profondes racines. La Réformation fut d'abord bien accueillie du peuple, du clergé, des États du pays et du prince lui-même. Mais après la Diète de Worms, le duc Guillaume, réconcilié avec l'empereur, se tourna contre Luther et introduisit dans le pays l'inquisition avec toutes ses rigueurs; nombre de personnes furent brûlées; en quelques endroits, par humanité, on se contenta de les noyer; à Munich 29 d'un coup. Si quelques parties de la Bavière durent attendre le 19me siècle pour avoir un peu de liberté religieuse, certaines villes, comme Nuremberg. Augsbourg, Ratisbonne, Spire, furent plus privilégiées et adoptèrent la réforme, en tout ou partie, avec l'agrément ou par la protection spéciale des princes évangéliques. En 1549 le duc Guillaume appela les jésuites à son aide. Son successeur, Albert V, 1550-79, se montra d'abord assez modéré; il aurait voulu une réforme et appuya à Trente la communion sous les deux espèces et le mariage des prêtres, mais ne l'ayant pas obtenue il s'inclina devant les décrets du concile et devint un des plus ardents persécuteurs des protestants; il introduisit l'inquisition malgré les protestations des États du pays. Maximitien II obtint de l'empereur, après la guerre de Trente ans, le titre d'électeur, comme récompense de l'énergie qu'il avait déployée contre la réforme. Sous les princes suivants il y eut des alternatives de rigueur et de tolérance, jusqu'à ce qu'enfin, sous • Joseph II et le ministère de Monpélar la tolérance devint la règle, et qu'en 1818 la charte consacra les droits des protestants, tout en leur refusant le titre d'évangéliques. La Constitution actuelle de l'Eglise reconnaît le roi comme èvêque suprême, avec un synode général et des synodes diocésains. Erlangen possède une faculté de théologie protestante qui a parfois brillé d'un vif éclat. BAVON, ou Bav, ermite, patron de la ville de Gand, + vers 650, avait mené d'abord une vie mondaine. Ayant reconnu plus tard un homme qu'il avait fait vendre comme esclave, il n'eut de repos que lorsque cet homme eut consenti à le punir de son crime en le battant, et en le faisant Conduire en prison après lui avoir rasé la tête. BAXTER, Richard, né à Rowdon, Shrop-shire, le 12 nov. 1615, + à Londres le 8 déc. 1691; auteur du Repos éternel des saints, du Pasteur réformé, d'un Appel aux inconvertis, et de divers autres ouvrages. Son éducation fut incomplète, par suite de sa pauvreté et de sa mauvaise santé. Pasteur à Kidderminster 1640, il se joignit, malgré son affection pour la famille royale, à l'armée parlementaire et devint 1642 le chapelain de Cromwell, cherchant à inspirer aux chefs et aux soldats un esprit dç modération. Il blâma sévèrement l'exécution du roi et le bannissement de sa famille. A la restauration il intervint pour amener une réconciliation entre les épiscopaux et les presbytériens, mais il échoua. L'acte d'uniformité fut promulgué en 1662, et Baxter dut quitter l'Église avec 2000 autres non-conformistes. Il se retira à Àcton, Middlesex, où il se consacra surtout à des travaux littéraires. L'Acte d'indulgence 1672 lui ayant rendu le droit de prêcher, il s'établit à Londres, mais fut de nouveau en butte aux tracasseries du pouvoir, et en 1685 il fut condamné par le lord chef de justice Jeffries à une amende et à la prison. En nov. 1686, après 18 mois de prison, il fut gracié par l'intercession de lord Powis, et termina en paix ses jours. BAXTERIANISME. On désigne sous ce nom en Angleterre le calvinisme mitigé, dont Baxter était le représentant. C'est moins une école proprement dite, ou une secte, qu'une tendance. Dieu a bien élu un certain nombre d'hommes pour le salut, mais il n'en a point déterminé pour la condamnation. BAY (Michel de), ou Bains, né à Mélin, Hai-naut, 1313, étudia à Louvain, où il se distingua par son zèle, son sérieux et sa piété. D'abord directeur d'un établissement de bienfaisance, il fut nommé en 1551 docteur et prof, provisoire de théologie à Louvain. Il substitua k la scolas-tique pélagienne des scotistes la doctrine de la Bible, des pères et de saint Augustin en particulier, sur la grâce, préludant ainsi aux controverses jansénistes. Le professeur titulaire, à son retour de Trente, s'écria que le diable seul avait pu introduire de pareilles nouveautés dans l'enseignement, et il obtint de la Sorbonne la condamnation de 18 de ses thèses. De Bay répliqua vivement et prouva par l'Écriture l'incapacité de l'homme pour faire le bien et l'impossibilité du salut par les œuvres. Ce qui rendait la lutte plus sérieuse, c'est que ces deux doctrines étaient précisément celles qui caractérisaient la Réformation. En dépit du légat papal, De Bay fut envoyé à Trente par Philippe II, ou plutôt par Granvelle, 1563, comme délégué du roi, et il se fit remarquer au concile par son éloquence et par son caractère, mais sans avoir eu l'occasion de mettre en avant ses vues particulières. A son retour la dispute commença. Ses adversaires ne purent obtenir sa condamnation par l'université de Louvain, mais après plusieurs tentatives ils réussirent à faire condamner par Pie V, bulle du 1** oct. 1567, 76 propositions tirées de ses ouvrages, comme reproductions adoucies des doctrines d'Augustin. En 1569 il publia un mémoire justificatif et prouva que les propositions qu'on lui imputait n'étaient pas de lui. La bulle n'en fut pas moins publiée, mais l'université de Louvain refusa de la recevoir, conserva à De Bay sa position, le nomma doyen, puis chancelier, quoiqu'il maintint que les évêques tirent leur pouvoir directement de Dieu. II fut même nommé inquisiteur général. Sixte Y lui fut plutôt favorable et se borna à imposer silence aux 2 partis, f 16 sept. 1589. universellement respecté. Ses ouvrages, presque tous polémiques, ont été publiés après sa mort par le bénédictin Gerbéron, 2 vol. 4°. BAYLE, Pierre, né 18 nov. 1647, au Carlat, comté de Foix, d'une honorable famille de Montauban. Son père, Jean, Guillaume, ou Jacob, était pasteur au Carlat; + 30 mars 1685, laissant 3 fils: Jacob, qui fut le collègue de son père et fut enfermé dans un cachot où il mourut le 12 nov. 1685; Pierre, dont il est ici question, et Joseph, qui, après avoir étudié à Puy Laurens et à Genève, précepteur chez le marquis de Benac à Paris, f le 9 mai 1684. — Pierre, jusqu'à 19 ans, n'eut d'autre maître que son père. Il tomba deux fois malade, à Puy Laurens et à Saverdun. pour avoir trop travaillé. En février 1669 il se rendit à l'université de Toulouse, où, sous l'influence d'un jésuite, il abjura le protestantisme le 19 mars; mais au bout de 18 mois, comprenant qu'il avait fait une œuvre précipitée, ne pouvant admettre le culte de la créature, ni le mystère de la transsubstantiation; cédant aux raisons de son cousin Naudis de Bruguières et de son frère Jacob, il quitta Toulouse le 19 août 1670, abjura le 21, et partit pour Genève où il arriva le 2 sept. Nommé régent de seconde en 1671, puis précepteur à Rouen d'abord, et ensuite à Paris, il fut appelé comme professeur à Sedan en nov. 1675, et y resta jusqu'au moment où l'université fut fermée par arrêt du conseil, 9 juillet 1681. La ville de Rotterdam fonda immédiatement pour lui et pour Jurieu. deux chaires réunies sous le nom d'École illustre. Il venait de publier des Pensées diverses k l'occasion de la Comète qui parut en 1680, pour combattre le préjugé vulgaire qui voyait dans ces météores des présages effrayants. En 1682, il publiait à Amsterdam sa remarquable Critique de l'Hist. du calvinisme par Maimbourg. Il entreprenait en 1684 sa célèbre revue littéraire: Nouvelles de la républ. des Lettres, qui lui fit tant d'admirateurs et tant d'ennemis, et qui inaugura la véritable critique française. Enfin il parut en 1690 à Amsterdam, sans nom d'auteur un Avis important aux réfugiés sur leur prochain retour en France, qu'on attribua à Bayle quoiqu'il le désavouât, et qui était une fine et spirituelle critique du travail de Jurieu qui avait prédit pour 1689 la fin des persécnlions. Jnrieu irrité s'en prit à Bayle, et après trois années de répliques, de dupliques et de disputes peu édifiantes, Jurieu qui avait eu le dessous, mais qui avait pour lui la majorité du Consistoire, les préventions de Louis XIV et les terreurs chimériques de Guillaume d'Orange, obtint le 30 oct. 1693 que Bayle fût privé de sa charge et de son traitement, et qu'il lui fût interdit d'enseigner. Bayle qui avait des goûts modestes et à qui ses livres fournissaient le nécessaire, ne s'émut pas beaucoup de ces loisirs forcés, et des offres très avantageuses lui ayant été faites d'autre part, il les refusa, ne se souciant plus de s'exposer à ces « entremangeries professorales. » A partir de ce moment il se consacra tout entier à ses travaux littéraires, et notamment à la composition de son grand Dictionnaire historique et critique, dont il avait déjà publié le Projet en 1692, et dont la ire édition parut 1695-97. Il en a paru onze éditions, sans parler des abrégés, et des traductions en anglais et en allemand. Cet ouvrage aussi remarquable par la sagacité critique et par l'étendue des connaissances, que par l'agrément du style, par son bon sens et par son esprit plein de saillies, eut un immense succès et concilia à Bayle de nombreux admirateurs. Mais d'un autre côté certains passages obscènes, la recherche de la vulgarité, l'affectation d'an scepticisme outré, la complaisance avec laquelle l'auteur semblait mettre en relief les objections soulevées contre la Providence, la révélation, le christianisme et la doctrine évan-ffélique, lui suscitèrent des ennemis acharnés. A l'instigation de Jurieu, le Consistoire de Rotterdam chargea une commission de voir Bayle et de lui demander des explications. L'entrevue fat courtoise, et Bayle, après s'être justifié d'une manière générale, surtout quant à son intention d'attaquer les dogmes chrétiens, s'engagea à tenir compte des observations qui lui étaient faites, soit par des changements d'expressions, soit par des retranchements ou des additions. C'est ce qu'il fit en quelque mesure dans sa 2e éd. 1702, 3 vol. f°, mais, comme on le comprend, certaines modifications de détail ne pouvaient pas changer l'esprit général du livre, qui reste aujourd'hui, avec tout ce qu'il renferme de richesses, l'un des arsenaux les mieux fournis de la critique négative. Il semble que Bayle, se rappelant la double abjuration de sa jeunesse, ait voulu se mettre en garde contre toute affirmation prématurée et qu'il se soit infligé comme pénitence le Que sais-je? de Montaigne, dont il avait fait ses premières lectures, et dont il avait si mal profité. Il se défendit toute sa vie d'être un incrédule ou un athée; il ne cessa de remplir ses devoirs religieux; quelques-unes de ses pages trahissent une foi simple et vraie à l'Évangile, et c'est par l'esprit, et non par le cœur, qu'il se laissa entraîner souvent à faire ressortir les difficultés incontestables que présentent, pour la raison, certains faits ou certaines doctrines que l'Église elle-même déclare être des mystères incompréhensibles. Quoi qu'il en soit, et comme il touchait à tous les sujets, ses ennemis eurent beau jeu à détacher des fragments de son travail et à en poursuivre la condamnation. Jurieu, en particulier, après l'avoir dénoncé comme impie au Consistoire et au synode de Delft (qui n'y fit aucune attention), le dénonça au prince d'Orange, devenu roi d'Angleterre, comme ennemi de l'État et comme partisan secret de la France; il ne fallut rien moins que la protection de lord Shaftes-bury pour le mettre à l'abri de nouvelles persécutions. Bayle continua donc ses travaux, développant et complétant son Dictionnaire, et comme il lui restait un grand nombre de notes et de notices littéraires, historiques ou autres, qui ne pouvaient entrer dans son cadre, il les publia à part sous le titre de: Réponse aux questions d'un provincial, Rotterd. 1703-06. Le 28 déc. 1706 on le trouvait mort tout habillé dans son lit; il soufTrait depuis plusieurs mois d'une affection de poitrine, mais n'avait rien voulu faire pour la guérir; toujours sceptique. — La révocation de l'Édit de Nantes et les persécutions religieuses furent le seul point sur lequel il manifesta clairement ses opinions. Indigné de ces mesures iniques, auxquelles il dut en partie la mort de son frère, il écrivit en 1685: Ce que c'est que la France toute catholique sous le règne de Louis-le-Grand; et en 16186: Comment, philosophique sur ces paroles de J.-C.: Contrains-les d'entrer, ou Traité de la tolérance universelle. Il niait la compétence de l'État dans les questions religieuses, ce qui fit bien vite mettre son livre à l'index chez les catholiques; mais ses idées ne trouvèrent pas même grâce chez certains protestants, comme Jurieu, qui ne voyaient dans la tolérance qu'une indifférence déguisée. Ses œuvres diverses, presque toutes inédites, ont été publiées à La Haye 1727, par Des Maizeaux, 4 vol. f°. L'édition la plus récente de son Dictionn. est celle de Beuchot, 16 vol. 8°. 1820-24. BÉÀRN (Le), province de France enclavée auj. dans le département des Basses-Pyrénées, faisait autrefois partie du royaume de Navarre. C'est sous le règne de Henri II d'Albret et de Marguerite sa femme, sœur de François que la Réforme s'y introduisit. Marot, Calvin, Mé-lanchthon, Lefèvre d'Étaples, Gérard Roussel trouvaient au château de Pau un accueil empressé et une retraite sûre. Marguerite, sans avoir franchement embrassé la religion réformée, écoutait cependant le prêche, chantait les psaumes, et tolérait l'exercice du culte huguenot; les gens de la cour pouvaient y assister; les nouvelles doctrines se répandirent peu k peu de la cour dans la ville et de celle-ci dans les campagnes. Mais Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, fille de Marguerite, favorisèrent d'une manière plus énergique le développement de la Réforme dans leurs États. Antoine s'était déclaré l'adhérent du calvinisme. Des ministres zélés, Vignaux, David, Boisnormant venu de Genève sur la demande expresse du roi, prêchaient publiquement, élevaient des temples nombreux; beaucoup de jeunes gens partaient pour la Suisse afin de s'y former aux fonctions du ministère. Lorsque Antoine, circonvenu par les intrigues de Catherine de Médicis, eut abandonné son parti, Jeanne d'Albret ne faiblit pas. Grâce à une sage administration, grâce aux efforts des prédicateurs toujours plus nombreux, un grand changement s'opéra dans le Béarn. L'Évangile se répandit comme une traînée de poudre d'un bout à l'autre de la province, sauf chez les Basques qui ne voulurent pas répudier leurs anciennes traditions. Mais dans le reste du pays, des districts entiers passèrent au protestantisme; les curés durent abandonner leurs par roisses. Un changement moral correspondit à ce changement religieux; par des lois souvent un peu sévères, Jeanne réprima la paresse, l'ivrognerie et la mendicité qui en est la conséquence. En 1566 fut fondée une Académie célèbre, d'abord à Lescar, puis à Orthez, où, sous les yeux de maîtres illustres, Viret, Nicolas des Gallars, Lambert Daneau, les jeunes Béarnais purent recevoir une éducation classique complète; la théologie, la philosophie, leur étaient enseignées aussi bieu que le latin et le grec; celte académie forma de nombreux pasteurs. Deux révoltes successives des seigneurs catholiques, 1569 et 1570, faillirent compromettre la é cause de la Réforme. Jusque-là les deux cultes avaient été tolérés et avaient vécu paisiblement côte à côte, et, chose inouïe au 16^ siècle, ils se célébraient parfois dans le même édifice. Mais Jeanne crut sa sécurité compromise, etaprèsavoir vaincu la révolte, elle interdit l'exercice public delà religion catholique; les revenus des prêtres et des moines furent affectés à des œuvres de charité et aux frais du culte; les couvents transformés en hôpitaux et en établissements d'instruction. Toutefois, cette interdiction dura peu. A la mort de Jeanne, son fils Henri, plus tard Henri IV, lui succéda, et sous son règne, même après qu'il fut monté sur le trône de France en abjurant, les huguenots n'eurent rien à craindre. Il n'en fut plus de même sous Louis XIII son fils et successeur. Malgré les protestations des notables et en particulier de Lescun, il proclama l'édit de réunion qui annexait le Béarn à la France 1617, et à la tête d'une armée il entra dans sa nouvelle province, fit fermer les lieux de culte, chassa les pasteurs et rétablit le culte catholique. Ces mesures de rigueur ne suffirent cependant pas; car sous Louis XIV on voit Foucault dragonner le Béarn. La plupart des gentilshommes abandonnèrent la foi de leurs ancêtres ou s'expatrièrent. Cette foi se conserva pourtant de famille en famille dans mainte humble cabane, jusqu'au moment où elle put relever la tête, en recouvrant ses temples et ses pasteurs, 1789. Dans ce pays autrefois presque tout réformé il ne reste plus auj. que 4 à 5000 protestants, 8 églises et 16 annexes, qui composent la consistoriale d'Orthez. L. B. BÉAT, ou Beatus, diacre d'Osma, au 8®e siècle, qui avec l'év. Etherius, s'opposa le plus énergiquement aux erreurs de l'Adoptianisme q. v., professées par l'archev. de Tolède. BÉATIFICATION, v. Canonisation. BEATON, David, né 1494, de la famille des comtes de Fife; élevé en France. Il remplaça son oncle, l'archev. de Saint-André, Écosse, quand celui-ci f 1539. Jaques V le nomma son garde des sceaux; il avait négocié le mariage de ce prince, d'abord avec Marguerite de France 1533, puis avec Marie de Lorraine 1538. Nommé cardinal la même année. A la mort du roi 1542, il se fit nommer légat du pape et grand chancelier de Marie Stuart, sous le nom et en l'autorité de laquelle il commit beaucoup de cruautés. Il est connu par la part qu'il prit au supplice de Wishart. A la fin sa tyrannie étant devenue insupportable, une conspiration se forma contre lui et il fut assassiné de nuit dans son château ✓ de Saint-André, 1546 ou 1547, peu de mois après Wishart. BEAUMONT, François (de), baron des Adrets, né 1513 en Dauphiné, fit ses premières armes en Italie sous Lautrec, et fut nommé 1555 colonel des légionnaires du Dauphiné. Engagé dans une capitulation qu'il n'avait pas consentie, il réclama de d'Ailly auprès de François II la restitution du prix qu'il avait dû payer pour sa rançon, mais il fut débouté de sa demande par l'influence des Guise, qui n'aimaient pas en lui le protestant. Des Adrets, de son côté, tenait contre les Guise et pour la famille çoyale, Catherine et François; comme religionnaire il était surtout en rapports avec le prince de Condé, et c'est de lui qu'il prétendait tenir ses pouvoirs. Ayant appris les cruautés commises k Valence par le gouverneur de cette ville, la Motte-Gon-drin, et le soulèvement du peuple indigné de tant d'horreurs, 1562, Des Adrets accourut de Lyon avec une troupe d'insurgés, assiégea Gon-drin, mit le feu k l'hôtel où il s'était réfugié, et fit mettre à mort tous ceux qui essayèrent de s'enfuir. Le baron fit ensuite de Valence son quartier-général; il reçut de Condé le titre de son «lieutenant en l'armée chrétienne, assemblée pour le service de Dieu, » interdit l'exercice du culte catholique dans le Dauphiné et commença pour la délivrance des églises opprimées une série d'expéditions où il se signala par la vigueur et la vertigineuse rapidité de ses manœuvres, par la hardiesse de ses entreprises, par Theureuse chance qui les couronna, non moins que par le caractère implacable de ses représailles. Il avait sous ses ordres des soldats qui avaient à venger leurs pères, leurs frères, leurs femmes, leurs amis, impitoyablement massacrés, volés ou déshonorés depuis des années, pt il ne lui fut pas toujours facile de calmer cette soif de vengeance. Il avait d'ailleurs coutume de dire que « le seul moyen de faire cesser les barbaries des ennemis est de leur rendre des revanches, » et que « pour réduire les catholiques aux lois de la bonne guerre, il fallait leur faire voir que les réformés savaient faire la mauvaise aussi bien qu'eux. » Personne sans doute ne songera à justifier Des Adrets des cruautés qui ont déshonoré ses victoires, mais il faut, pour le juger, se placer au point de vue de son temps et des circonstances où il se battait, se rappeler qu'il avait contre lui le féroce bourreau Montluc, se rappeler aussi qu'il ne faussa jamais sa parole, et que lorsqu'il avait promis à une garnison la vie sauve, il ne se crut pas, comme Montluc, autorisé par sa religion à violer les engagements pris. «Après Valence, Des Adrets entra à Lyon, où il proclama la liberté de conscience, et plaça la ville sous la garde de 2000 protestants; puis à Grenoble, où le culte réformé fut célébré le 3 mai 1562; puis à Vienne, avec le concours du magistrat Gabet. A la nouvelle des massacres d'Orange (5 juin), dont Varillas dit « qu'on n'avait jamais eu pareil exemple chez les chrétiens, » Des Adrets quitte Grenoble, se rend à Montélimar et à Pierrelatte où il rassemble en bâte 3 à 4000 hommes, dont 300 échappés aux massacres, et il fond sur la ville. La garnison épouvantée se réfugie dans le château et demande à capituler; mais ceux d'Orange, dit Brizard, furieux du massacre de leurs concitoyens, enfoncent les portes, fondent sur l'ennemi et ne font aucun quartier; les uns sont précipités du rocher, les autres passés au fil de l'épée. Des Adrets marche ensuite sur Bourg et Pont-Saint-Esprit, où il met des garnisons; sur Boulène, qui résiste et est mis à mort. Il revient sur Grenoble qui s'est soulevée, qui capitule à son approche, et qu'il épargne sans qu'il y ait eu ni sang versé, ni aucun désordre commis. Il traverse Lyon, dont il change le gouverneur, et marche sur Montbrison qu'il enlève avec sa furie ordinaire, 16 juillet. La garnison ayant tenté de résister, est passée par les armes; ceux qui ont échappé sont contraints de se précipiter du haut de la citadelle et Des Adrets s'amuse de ce jeu infâme. De retour à Lyon il apprend que le seigneur de Soubise vient d'y arriver, 19 juillet, comme lieutenant-général du prince de Condé. A cette première mortification s'en ajoute une seconde sous la forme d'observations sur sa conduite. Des éloges exagérés n'empêchent pas le baron de sentir l'amertume des reproches qui lui sont adressés; on lui recommande un peu plus de douceur envers les vaincus. Dissimulant son irritation il se prépare à rentrer en campagne, et remporte de nouveaux succès sur les bords du Rhône, jusqu'à Sorgues, mais il échoue devant Carpentras et doit ramener à Valence ses troupes harassées. Il laisse succomber Siste-ron, vole au secours de Montpellier, mais sans succès; veut courir au secours de Vienne, de Grenoble et de Lyon, mais se laisse surprendre par Nemours, et comprend que son étoile a pâli. Lui-même, froissé peut-être dans son amour-propre, n'a plus le feu sacré. Il s'abouche avec Nemours, et sous prétexte qu'il a toujours été au service du roi contre les Guise, il cesse d'être le chef des protestants pour n'être plus que le serviteur de la monarchie. Nemours attise dans son cœur le mécontentement en exagérant la sévérité avec laquelle il est jugé dans son propre parti, et après de longues et laborieuses négociations, après une courte captivité à Montpellier et à Nîmes, il rompt avec les protestants, reconnaît qu'il a traité avec Nemours, non par cupidité, mais « par vengeance et après l'ingratitude redoublée, « et se retire dans sa terre de La Frette 1563, où il abjure en apparence le protestantisme. Sa carrière comme chef huguenot avait à peine duré une année. Il reprit du service en 1567, mais les catholiques n'eurent jamais pleine confiance en lui; il fut même emprisonné comme suspect, et l'édit de pacification le tira seul du danger; le roi même lui rendit sa faveur. De Thou le vit à Grenoble en 1571, vieux, maigre, mais vigoureux et l'air d'un véritable homme de guerre. Après la Saint-Barthélemy, Des Adrets qui était resté protestant de cœur demanda sa retraite: il refusa 1577 d'entrer dans la Ligue, et f 1586 après avoir fait acte de catholicisme, ayant perdu la confiance des uns sans réussir à gagner celle des autres. Il fut enterré dans une chapelle de l'église paroissiale. Il avait survécu à ses 3 fils et ne laissa que 2 filles. BEAUSOBRE, Isaac, né à Niort 1659, f à Berlin 1738. Savant ministre protestant, élève de Saumur, il était pasteur à Châtillon-sur-Indre quand la persécution éclata. Son église fut fermée; il brisa les sceaux qui y avaient été apposés, et dut s'enfuir. Il se rendit d'abord en 7 Hollande, puis à Dessau auprès de la princesse d'Auhalt, où il écrivit sa Défense de la doctrine des réformés (contre des attaques luthériennes), et eniin à Berlin où il exerça pendant 46 ans les fonctions pastorales, également recommandable par sa piété et par son éloquence qui lui avait valu l'admiration du grand Frédéric. Il cumulait à la tin de ses jours tous les titres et fonctions compatibles avec son ministère. Il fut chargé avec son collègue Lenfant de reviser le recueil des Psaumes 1701, mais ce travail devenu nécessaire fut d'abord mal reçu des réfugiés; plusieurs regardaient comme inadmissible que des ministres berlinois sussent mieux le français que le roi David lui-même. Il publia ensuite, aussi avec Lenfant, une nouvelle version du N. T. 1718; les Remarques historiques qui devaient l'accompagner ne parurent qu'après sa mort, La Haye 1742. Il s'occupa surtout de Thist. de la Réformation, dont 4 vol. furent publiés en 1783, comprenant les années 1517-1530. Ce volumineux ouvrage devait être précédé d'une hist. des précurseurs de la Réforme, c.-à-d. de toutes les sectes qui dans tous les temps avaient nié l'autorité de Rome, pauli-ciens, bogomiles, vaudois, etc. Lenfant s'était chargé des hu sites. Beausobre n'a mené à bonne lin que l'Hist. du manichéisme, 2 vol. 4<> Ams-terd. 1734-39. ouvrage encore aujourd'hui très estimé. Un de ses (ils, également pasteur à Berlin, a publié à Lausanne 1755, 4 vol. des serinons de Beausobre. L'autre, Louis, a écrit Le Pyrrhonisme du sage, Berlin 1754. BEBEL, Henri, né à Justingen en Souabe vers 1472 ou 1480, étudia à Cracovie la théologie et le droit, fut professeur à Bâle, puis curé dans sa ville natale, enfin 1497 prof, d'éloquence et de poésie à Tubingue. Il fut, avec Erasme, Reuchlin et Mélanchthon, un des restaurateurs de la culture classique. 11 flagella les vices de son temps, sans ménager le clergé, et reçut de Maximilien 1er, pour ses poésies latines, la couronne de laurier, 1501. Malgré le caractère licencieux de quelques-uns de ses écrits, entre autres du Triomphe de Vénus, qui le faisait assez bien venir dans les couvents, il appartient par sa science et par ses études critiques à cette phalange d'hommes distingués qui préparèrent les voies à la Réforme en faisant la guerre aux légendes, aux superstitions et aux mensonges. Il a écrit encore un Comment, sur la langue latine, un Traité sur l'Antiquité des Germains, un Éloge des Suéves, et des Facéties en 3 livr. f 1516. BEBENBURG, Léopold (de), est un des hommes du 14®e siècle qui ont le mieux compris les droits de l'Etat. Destiné à la carrière ecclésiastique, il étudia à Bologne surtout le droit canon, et après avoir pris ses grades il fut appelé à Mayence, à WUrzbourg, comme chanoine et enfin à Bamberg comme évêque 1352. f 1363. Il prit le parti de Louis de Bavière dans sa lutte contre Jean XXII et Benoît XII, et le représenta à la diète de Francfort 1338. Il soutenait, non par des abstractions philosophiques, mais par l'histoire, que les rois et les empereurs tenaient leurs pouvoirs, non de l'évêquede Rome, mais du choix des électeurs. Ses motifs n'avaient aucun caractère de rébellion, et il resta par là dans les meilleurs termes avec Innocent VI, qui lui donna à Avignon la consécration épisco-pale. BECCARELLI, v. Quiétistes. BECCUS, v. Jean X, patriarche de Constan-tinople. BECK 1° Jean, missionn. au Groenland, né 7 juin 1706 à Kreuzendorf, Silésie supérieure. Converti par la lecture du N. T., mis en prison pour ses convictions, il s'échappa et se réfugia à Herrnhut, où Christian David l'encouragea à aller dans le Groenland. Il y alla en effet en 1734 avec Frédéric Bohnisch. Ses premiers succès datent de 1738, lorsque le 3 juin il reçut à Neu-Herrnhut quelques Groënlandais du sud, parmi lesquels Kajarnak qui se convertit avec toute sa famille. II y eut encore un réveil en 1742. f au Groenland 19 mai 1777. 2° Jaq.-Christophe, né 1711 à Bâle, f 1785, prof, d'histoire et de dogmatiq., auteur d'un Dict. bibliq., d'une Synopsis sur les différentes branches de la théol., et de plusieurs dissertations et traités sur le Déluge, le Séparatisme, etc. Orthodoxe, mais sans raideur et avec une tendance libérale. BECKET, Thomas, figure énergique et remarquable, plutôt que noble et sympathique. Né 1119 à Londres, cet homme élevé par des parents peu aisés, fut l'artisan de sa propre fortune, et ne dut la grandeur de sa brillante carrière qu'à ses talents, à sa souplesse et à sa force de volonté. Il fit ses études à Paris; de retour à Londres, il attira l'attention de Théo-bald, archev. de Cantorbéry, qui se l'attacha, l'emmena avec lui à Rome, l'y envoya seul une seconde fois avec une missiou de confiance, et le récompensa par le titre d'archidiacre et par le bénéfice de Beverley. C'était l'époque où les rapports étaient le plus tendus en Angleterre entre le pouvoir civil et le pouvoir spirituel sur les limites respectives de leurs attributions. Becket se consacra entièrement à son ministère et se rendit si recommandable que Henri II, sur la recommandation de Théobald, le nomma grand chancelier du royaume et précepteur de son fils. Dans ses nouvelles fonctions, Becket fit tout pour plaire au roi; il fut courtisan, politique, mondain, complaisant, et quand l'archevêché de Cantorbéry fut devenu vacant.. Henri II intima au chapitre l'ordre de porter ses voix sur son favori. Le chapitre obéit en mnrmurant, et Becket fut nommé, 1162. Mais immédiatement, par une métamorphose que rien ne faisait pressentir et qui fut un scandale pour le royaume et pour le roi, il se tourna contre son souverain, lui contesta toute compétence ecclésiastique, se rendit à Tours ou le pape se trouvait 1163, pour lui remettre le pal-lium, ne voulant tenir que de lui son archevêché, revint à Londres, où dans une assemblée du clergé il refusa lui seul, de reconnaître les anciens droits de la couronne, à moins qu'on y ajoutât une réserve en faveur des droits de l Église. Il se fait condamner comme rebelle par le parlement, s'enfuit le 2 nov. 1164, se rend à Sens où était le pape, puis au couvent de Pon-tigny, et se fait bienvenir de Louis-le-Jeune. Mais le pape a compris qu'il fallait faire des concessions; Becket, qui les condamne avec violence en profite cependant pour rentrer en Angleterre, mais il y rentre en ennemi bien résolu de reconquérir le terrain abandonné par le pape. Il recommence à attaquer les statuts de Clarendon qu'il avait jurés; il attaque les droits d'Henri, et 4 gentilshommes, fondant îur lui dans la cathédrale, le percent de leurs ^pèes, 29 déc. 1170. On a voulu faire le roi complice de ce crime, mais il l'a formellement désavoué. Becket fut canonisé par Alex, qui l'avait poussé à la résistance, et Henri dut faire pénitence sur son tombeau, mais Henri VIII le raya de son calendrier. BÉDE, surnommé le Vénérable, né à Wear-mouth, Durham, 672, f 26 mai 735 dans son couvent de Jarrow, fut par sa vie, ses talents et sa piété, une des gloires de l'Angleterre et de son époque. Ses parents l'envoyèrent dès l'âge de 7 ans étudier dans le monastère du célèbre Benoit. On a peu de détails sur sa vie- Il fut ronsacré diacre à 19 ans, et fut bientôt si considéré que le pape Serge l'appela à Rome, mais il refusa. Il ne quitta son couvent qu'une seule fois dans les dernières années de sa vie. Il passait son temps à enseigner et à lire la Bible; des rois lui faisaient la cour, ses élèves devenaient évêques et archevêques, et il resta toujours un simple frère. Sa fin fut aussi paisible que sa vie; souffrant et malade, il chantait et priait pendant ses insomnies; le jour, dans son lit, il donnait encore ses leçons. Il avait entrepris la traduction de l'Évangile de Jean; le jour de l'Ascension il n'avait plus qu'un chapitre à dicter; après qu'il eut fini le dernier verset, il expira en disant: « Gloire soit au Père, au Fils et au Saint-Esprit. » Il a laissé une foule d'ouvrages sur presque toutes les branches, grammaire, exégèse, physique, histoire, astronomie, poésie, biographies, etc. Les principaux sont: son Hist. ecclésiastique de l'Angleterre, en 5 livres; sa Chronique, ou les Six Ages du monde; son Martyrologe, son Manuel de dialectique, des Psaumes et Cantiques, et ses Commentaires. Ses œuvres ont été souvent réimprimées, Paris 1544, Bâle 1563, Cologne 1612 et 1688, Londres 1843, par Giles. Son surnom ne lui fut donné qu'après sa mort. BEETHOVEN, Louis (van), né 29 déc. 1770 à Bonn, d'une famille hollandaise, protestante et musicienne; le plus grand des symphonistes depuis Bach, il appartient à la musique religieuse par son: Christ au Mont des Oliviers 1800; une Messe 1810, et sa Missa solemnis 1818; peut-être aussi par son Hymne à la joie, de Schiller. Patronné par le prince Lichnowski, il se fixa dès 1787 à Vienne, où il f 24 mars 1827. Sa surdité avait influé sur son caractère, mais ses amis lui pardonnaient son humeur farouche à cause de son génie et de ses souffrances. BEGGARS, Beghards, ou Béguins, religieux des deux sexes, qui parurent vers la fin du 12rae siècle et qui, sans faire de vœux proprement dits, s'associaient pour vivre ensemble et pratiquer les vertus chrétiennes. Il y avait plus d'agglomérations de femmes, ce qui s'explique par les croisades qui avaient fait beaucoup de veuves ou de filles délaissées, notamment dans les hautes classes; c'était aussi une bonne époque pour la vie contemplative. Peu à peu ces religieux s'affilièrent aux tiers ordres, les uns des dominicains, les autres surtout des franciscains; ils apprirent à mendier, à vagabonder, à former ci et là des relations faciles, ne craignirent pas de s'aboucher même avec des hérétiques, si bien qu'à la longue leur nom devint un sobriquet et fut pris comme synonyme d'hypocrites, d'hérétiques, et parfois de sorciers. Clément V lança contre eux deux bulles, 1311. Jean XXH protégea les béguines fidèles, et Grégoire XI étendit la même protection aux beghards qui offraient des garanties. On ne sait d'où vient leur nom; les uns le dérivent de beg, ou beggen, demander, mendier; les autres de sainte Bègue, sœur de sainte Gertrude et fille de Pépin; les autres enfin, avec Moréri, de Lambert-le-Bègue, prêtre de Liège vers 1180, qui aurait été leur fondateur. On nomme béguinage un ensemble de petites maisons indépendantes, réunies dans un enclos commun, où vivent ces religieuses, chacune conservant sa liberté personnelle, la plupart faisant de petits ouvrages pour accroître le bien-être de la communauté, et se réunissant pour les repas ou pour les exercices du culte. Il existe encore beaucoup de béguinages en Allemagne, en Hollande et en Belgique. BEKKER, Balthasar, né 1634 à Metslaurier, Frise occidentale, + juin 1698 à Amsterdam, cartésien, fut pasteur dans plusieurs églises de la Hollande, combattit l'astrologie et notamment la crainte des comètes 1682 et 1685, la foi aux possessions, aux démons, à la sorcellerie, à la magie; expliqua par l'accommodation les histoires de la Bible qui supposent l'existence du diable, rapporta à Néron le lion rugissant de 1 Pier. 5, 8., et se montra par la hardiesse de ses affirmations et par la frivolité de quelques-unes de ses pensées un des précurseurs du rationalisme moderne. Il fut d'abord suspendu, puis destitué. Son principal ouvrage a pour titre: Le Monde ensorcelé, 1691, trad. en franc. 1694. BELGIQUE. Ce pays, qui n'existe comme royaume que depuis une cinquantaine d'années, mais qui a toujours eu son individualité distincte et dont la population se compose d'éléments celtes, germains et même romains, semble avoir été évangélisé déjà par les disciples immédiats des apôtres; on nomme Eucharius, l'un des 70 disciples qui serait arrivé l'an 42 de Rome à Trêves, avec Valerius et Maternus. Ce dernier, que la tradition identifie avec Je jeune ressuscité de Naïn, et qui serait ressuscité une seconde fois en Belgique, aurait fondé les églises de Tongres, de Maastricht, de Namur et de Dinant. + 130. Après Constantin, on trouve dans la Belgique orientale 4 évêchés: Trêves, Metz, Toul et Verdun; et dans la Belgique occidentale 10 évêchés, dont Cambrai, Tournai, Morin ou Thérouenne, avec Reims pour archevêché. Sous les Mérovingiens de nombreux prélats se distinguent par leurs talents et leurs vertus, saint Éloy, saint Médard, saint Hubert. Les églises et les couvents se multiplient sous les premiers Carlovingiens. Les irruptions normandes font des martyrs, et les reliques doivent être transportées de monastère en monastère, jusqu'au moment où les Normands bien installés se civilisent et se convertissent à leur tour. Puis viennent les luttes de la noblesse contre les bourgeois, et celle, des évêques contre les communes. Les croisades rallient les familles désunies, et l'on voit à Jérusalem Gode-froy de Bouillon, Robert de Flandres et Baudouin du Hainaut. L'évêché souverain de Liège brille par son ambition, mais aussi par les talents de ses titulaires et par leur libéralité dans les moments difficiles, ainsi dans la famine de 1045. Les beggars d'abord, puis, au 14™e siècle, les lollards trouvent dans la Belgique une terre hospitalière. Des sectes panthéistes travaillent à ruiner l'Église, mais les Jean de Ruysbrœck, les Gerhard Groot, les frères de la vie commune, les Érasme préparent de diverses manières les voies à la Réformation. La doctrine de Luther est saluée avec joie par le peuple, et quand les controverses deviennent trop violentes, les magistrats croient tout calmer en demandant qu'on se borne à prêcher l'Évangile. Avec Charles-Quint s'ouvre l'ère des martyrs. Henri Boes et Jean Esch sont brûlés les premiers le 1er juill. 1523. La persécution se poursuit sous Philippe II qui, lorsque les calvinistes lui présentent 1562 leur confession de foi, Con-fessio belgica, leur répond par un renvoi pur et simple aux articles du Conc. de Trente. Le duc d'Albe compte par milliers ses victimes, mais sa politique aboutit à la révolte et à la perte définitive des sept Provinces-Unies. L'université de Louvain maintient encore la doctrine augus-tinienne en opposition au semi-pélagianisme catholique; Baïus et le jansénisme reslent fidèles. Les jésuites sont la ruine dy pays, mais les savants travaux des bollandistes sauvent un peu l'honneur de la Société. L'édit de tolérance de Joseph H, 13 oct. 1781, permet aux prolestants de se bâtir un temple à Bruxelles, En 1783 introduction du mariage civil et suppression des ordres purement contemplatifs. Mais Léopold II rétablit les choses dans l'état où elles étaient sous Marie-Thérèse. En 1795, annexion à la République française. Après la chute de Napoléon, la Belgique est réunie aux provinces hollandaises, sous le nom de royaume des Pays-Bas et la liberté des cultes est garantie. Le parti catholique s'agite et par son alliance momentanée avec les libéraux il obtient en 1830 l'indépendance du royaume. La Belgique compte aujourd'hui près de 5 millions d'habitants, tous catholiques, sauf 25 à 30,000 protestants, juifs ou libres-penseurs déclarés tels. L'Église ne lient à l'Etat que par le salaire, mais elle a réussi à prendre pour un temps la haute main dans les affaires publiques. L'archev. de Ma-lines est l'autorité suprême, ne relevant que du pape. Le nonce a des fonctions exclusivement politiques. Il y a des évêques à Liège, Namur, Tournay, Gand et Bruges, chacun indépendant dans son diocèse. Les ordres religieux foisonnent, les couvents se multiplient et d'immenses richesses s'accumulent dans leurs mains. L'Église protestante officielle est régie par un synode. A côté d'elle, et faisant des progrès chaque année, la Société évangélique, ou Église missionnaire belge, travaille par la presse et par des prédications à répandre l'Évangile dans les villes et dans les campagnes, au milieu de populations que le catholicisme ne satisfait plua et qui cependant tiennent encore au christianisme. Les juifs ont 5 synagogues. BELLARMIN, Robert-François-Romulus, nè 4 oct. 1542 à Montepulciano, Toscane, f 27 sept. 1621 au collège de Saint-André à Rome. Son père était d'une famille noble, mais ruinée; sa mère, Oynthia Cervina, sœur du pape Marcel II, très distinguée par sa piété, exerça ooe grande influence sur Robert, le 3m« de ses iils qui, tout enfant, s'essayait déjà à la prédication, et qui, après un an passé à l'université de Padoue, se décida à entrer dans Tordre des jésuites et commença son noviciat à Rome en 1560. Sa tendance était plutôt scolastique et intellectuelle que mystique. Après avoir complété ses études de latin et de sciences par deux années de théologie à Padoue, il fut envoyé à Louvain 1569 où il enseigna la scolastique et l'hébreu, où il étudia à fond les Pères et où il passa 7 ans. Consacré prêtre 1570 par Jansenius laîné, év. de Gand, il fut chargé de réfuter Bains, mais il le fit avec d'autant plus de modération qu'il n'était pas loin de partager les idées qu'il combattait. Il eut aussi l'occasion de voir de près le protestantisme. A l'approche de (Jnillaume d'Orange, il s'enfuit à Douai, d'où Grégoire Xlil le fit venir à Rome pour y enseigner la conlroverse dans le Collège romain nouvellement fondé. Ce cours dura 12 ans et fat publié sous le titre de: Disputationes de cmtroversiis christianœ fidei, 3 vol. f° Rome 1581, 1582 et 1593; réimpr. 4 vol. f° Paris 1688; Prague 1721. C'est l'arsenal le plus complet de la foi catholique, et il a la même importance pour l'élude du dogme, que les Annales de Baronius pour l'histoire. Il y fut répondu de divers cotés, entre autres par Martius Chem-nifa, Jean Gerhard et Charnier. Une grande clarté dans le plan et dans l'exposition, une foule de citations des pères et des docteurs du moyen âge forment les principaux mérites de cet immense ouvrage; ajoutoos-y la loyauté scrupuleuse avec laquelle il reproduit les arguments des protestants, exactitude telle qu'elle a inspiré des doutes sur la coovenance de répandre ce live. A partir de 1590 il cessa d'être professeur et devint un homme public, chargé demissioos plus ou moins considérables. Sixte V l'envoya à Paris comme adjoint au légat H. Gaétan, pour conférer avec les chefs de la ligue et fiire de la controverse avec les protestants; il vit le siège de Paris. Grégoire XIV l'employa pour la revision de la Yulgate. Clément VIII le nomma son théologien et le créa cardinal 1598, en le priant de ne pas lui déguiser la vérité; en 1602 il lai donna l'archev. de Capoue, où Bel-larmin, pendant trois ans, chercha à faire prévaloir dans le clergé et les couvents les principes d'une réforme morale qu'il avait déjà recommandés à Clément. En 1605 il fut deux fois sur le point d'être nommé pape, en concurrence avec Léon XI et avec Paul V; la crainte qu'inspirait la puissance croissante des jésuites empêcha seule son élection. Nommé par Paul V bibliothécaire du Vatican, il renonça à son archevêché par fidélité à ses principes; il avait toujours prêché la résidence. Il écrivit contre Blackwell, l'archev. catholique d'Angleterre qui, malgré la défense du pape, avait prêté le serment d'allégeance exigé de Jaques à la suite de la conjuration des poudres. Il prit parti contre le doge et le sénat de Venise dans les affaires italiennes et fit valoir avec une grande puissance le droit des papes contre le pouvoir temporel des princes. L'abondance de ses arguments, une certaine logique, et même sa modération apparente font de lui le principal théologien de l'ultramontanisme. Il fut amené peu à peu à développer davantage encore son système et en vint jusqu'à dire, dans sa controverse avec Barcley à l'occasion de la Ligue, que les papes ont le droit de prescrire aux princes les lois quils doiveot faire ou abroger. Sixte-Quint aurait même voulu davantage, mais il fallut se contenter de cela. Il soutenait en outre que les rois tiennent leur pouvoir du peuple, en ajoutant que les peuples ne peuvent voter que sous la direction du pape. Les catholiques les plus fervents ne voient plus dans ces idées qu'une doctrine du temps passé. Les conséquences naturelles de celte confusion du temporel et du spirituel sont la persécution religieuse. Cepeodant Bellarmin ne paraît pas être allé jusque-là; on dit même qu'il fit prévenir Sarpi, son adversaire, des embûches qui lui étaient dressées pour le tuer, et dans le collège des cardinaux il opina toujours plutôt dans un sens pacifique. Après avoir encore administré 4 ans le diocèse de Montepulciano, il se démit de cet emploi, son âge ne lui permettant plus d'en remplir les devoirs, et il se retira dans le couvent de Saint-André, où il passa ses dernières années, ne s'occupant plus que de recueillement, d'édification et de préparation à la mort. Il laissa une réputation incontestée de piété, de zèle et de désintéressement. 11 fut plus d'une fois question de le canoniser, mais on recula devant la crainte de froisser les cours catholiques, peu amies des jésuites. Sa vie a été écrite par plusieurs, en vue de sa canonisation. Il lavait aussi écrite lui-même 1613 à la demande de son généra), mais elle est presque introuvable. Outre ses Disputations, on a encore de lui un Catéchisme, ou Doctrine chrétienne, le plus connu de ses ouvrages: un traité Depotestate summi Ponlif.; un ouvrage historique de controverse: De Iranslatione imperii Romani a Grœci$ ad Francoet plusieurs livres d'édification sur les Sept paroles, l'Élévation du cœur à Dieu, le Bonheur éternel des saints, l'Art de bien mourir, les Plaintes de la colombe, où il déplore l'abaissement moral des ordres religieux, etc. Il a laissé aussi des hymnes religieux. — Condamné en France comme ultramontain, on lui fit sentir plus d'une fois à Rome qu'il était trop modéré. BÉNÉDICTINS, ordre religieux fondé par saint Benoît de Nursie, q. v. Dans sa vie solitaire Benoît avait appris à connaître les dangers de l'isolement et d'un ascétisme exagéré; à Vicevaro, les dangers d'une vie contemplative sans contrepoids, poussant par l'oisiveté à l'indiscipline et aux désordres. Il comprit que ce qui pouvait se faire en Orient n'était pas bon en Occident, et il s'occupa d'organiser la vie monacale dans des conditions nouvelles. Il esquissa pour son couvent un ensemble de règles qui furent complétées plus tard, qui portent son nom, et qui, par leur sagesse, ont traversé les siècles et font encore autorité aujourd'hui dans plusieurs congrégations. Les meilleures éditions sont celles de dom Martène, Paris 1690, et de dom Calmet, Paris 1734, 2 vol. 4°. En voici les principales dispositions. L'abbé d'un couvent est choisi par les moines eux-mêmes, qui lui doivent une obéissance absolue; il porte le titre de père et doit le justifier par son gouvernement. Si les moines, qui ont le titre de dom (dominas) sont nombreux, chaque dizaine est sous la direction d'un doyen, par lequel ils communiquent avec le père; c'est celui-ci qui nomme le prieur. Les néophytes s'engagent à la stabilité, c'est-à-dire à persévérer dans leur vocation; à la conversion des mœurs, c'est-à-dire à renoncer à la vie mondaine; et à l'obéissance. Le vêtement et la nourriture seront austères, mais sans excès. Trois heures par jour sont consacrées à la lecture et à la méditation, mais sept au travail manuel. Chaque couvent doit avoir sa vie propre et se suffire à lui-même, pour n'avoir avec le monde extérieur que le moins de rapports possibles; de là la règle qui permet d'admettre comme novices de jeunes enfants et de les préparer pour devenir moines. De là aussi l'admission de prêtres, et les privilèges qui rendent les couvents indépendants du clergé séculier, au moins du clergé inférieur. Comme l'ordre répondait à des besoins et qu'il rendait de réels services, il se répandit rapidement et couvrit bientôt l'Europe entière; il était civilisateur sans être agressif ou militant. Chacun suivant ses aptitudes avait sa tâche spéciale; ils furent défricheurs, agriculteurs, éleveurs, copistes, prédicateurs, missionnaires, compilateurs, et ils se sont fait une telle réputation que le nom même de bénédictin est devenu synonyme de travailleur. Parmi leurs principaux couvents on peut nommer Glanfeuil et Le Bec, Corbie, Saint-Denis, Saint-Germain-des-Prés, Lérins, Cluny, Einsiedeln, Reichenau, Fritzlar, Fulda, la nouvelle Corbie, etc. Grégoire II leur prêta le puissant appui de son influence en Italie, et le fait qu'ils introduisirent les premiers la vie monacale parmi les Angles et les Saxons, leur assura dans le nord une prépondérance longtemps sans rivale. Ils recherchaient volontiers les jeunes gens riches et de noble naissance, et leur donnèrent une brillante éducation dans les lettres, les arts et les sciences. C'est aux 12®* et 13»© siècles que se place l'époque de leur plus grande prospérité, mais leurs richesses mêmes leur furent fatales, non seulement en leur attirant des envieux et des ennemis, mais encore en faisant de la charge d'abbé un poste et un bénéfice recherché par les ambitions mondaines. Des gens qui n'y avaient aucun titre furent souvent appelés à ces fonctions; quelquefois de riches laïques s'en emparaient comme d'une sinécure à exploiter, et les rois en faisaient la récompense de services rendus ou espérés. Cependant ils se soutinrent, grâce au tiers-ordre des laïques, et quelques réformes partielles leur conservèrent en partie leur crédit. Des hommes éminents en grand nombre illustrèrent cet ordre: Cassiodore, Bè-de-le-Vénérable, Elfric, Ethelwold, Sturm, Bo-niface, Ansgar, Adalgar, Dunstan, Damien, Innocent III lui-même, etc. Grâce à l'indépendance réciproque des couvents, si les uns perdaient de leur vie intellectuelle ou religieuse* les autres maintenaient les traditions; si quel-ques-uns éprouvaient le besoin d'une réforme, ils y procédaient librement, et ceux qui désiraient une centralisation plus forte s'organisaient en congrégations, ce qui amena peu à peu la création d'ordres, ou de sous-ordres nouveaux. Déjà Benoît d'Aniane avait commencé: Bernon fit la même chose en fondant Cluny. Les cisterciens, les camaldules, la Vallom-breuse, et beaucoup d'autres encore ne sont que des variétés de l'ordre principal qui se distingua toujours par son costume (d'où le nom de moines noirs donné aux bénédictins). La formation des ordres mendiants, plus mobiles, plus bruyants, plus en vue, leur porta préjudice, et le concile de Trente (session 25), en les obligeant à se réunir en congrégations, leur ôta quelque chose de leur indépendance, mais les amena à s'adonner toujours plus aux travaux qui ont fait leur gloire, à l'enseignement et aux recherches scientifiques. Parmi ces congrégations les plus connues sont celles des Flandres, de Bourgogne, des Pays-Bas, de Saint-Vannes, de Verdun, et surtout de Saint-Maur. q. v. Leurs ramifications furent innombrables, et plusieurs luttèrent avec succès contre les jésuites, v. Montalembert, Guizot, etc. — Il y eut aussi des bénédictines, que l'on fait remon* ter à tort à Scolastique, la sœur de saint Benoit: celui-ci n'avait pas pensé à elles, et Héloïse s'en plaint dans plusieurs lettres. La décadence de cet ordre de religieuses fut rapide: plusieurs de leurs couvents ne furent bieiitôt plus que des retraites avantageuses pour des dames nobles, sans qu'il y eût de vœux prononcés; d'autres se réformèrent sous l'impulsion de vigoureuses abbesses, ou se transformèrent en d'autres congrégations. BÉNÉDICTIONS. A côté du sens général et scripturaire de ce mot, l'Église romaine a conservé, notamment depuis le concile de Trull, 692, certains usages religieux, signes, cérémonies, prières, par lesquels elle implore sur les personnes et même sur les choses une bénédiction particulière de Dieu. Ce ne sont ni des consécrations proprement dites, ni des dédicaces de temples, ni des confirmations, ni des actes sacramentels, mais des invocations dans des circonstances qui appartiennent plutôt à la vie privée; on bénit une maison nouvellement construite, un four, une barque, un vaisseau. L'Élise protestante ne connaît pas cette cérémonie comme telle, mais elle donne à ces actes religieux le nom ordinaire de prière. Le prêtre, chez les catholiques, peut bénir le peuple, mais il ne peut pas bénir l'évêque, à cause de Hébr. 7, 7. BÉNÉFICES. On comprend d'une manière générale sous ce nom certains revenus et avantages temporels correspondant à certaines charges et fonctions ecclésiastiques, les deux choses étant si intimément unies que le mot peut désigner indifféremment l'une ou l'autre, ou toutes les denx à la fois. Le revenu peut affecter toutes les formes, rentes, dîmes, fruits, vignobles, chasse, pèche, maison d'habitation. Son institution repose sur le droit de chacun de vivre de son travail, Luc 9, 7; 1 Cor. 9, 14; elle est donc à la fois juste et naturelle, et du jour où l'Église s'organisa civilement, il fut pourvu à ce que ses ministres, réguliers ou séculiers, eussent leur existence assurée. Dans le principe, l'évêque seul était possesseur de biens ou de bénéfices, et il donnait à chacun de ses prêtres on moines le nécessaire; mais dans un diocèse an peu étendu, c'était un mode de faire qui, à la longue, devenait impraticable, et dès le 6me siècle on voit les évêques procéder à des dotations de paroisses, de fabriques ou de monastères, fixes, mais toutefois révocables, choisissant en même temps les hommes les plus méritants pour remplir les fonctions et en percevoir les revenus. Plus tard, ce sont quelquefois les princes, ou de riches et pieux particuliers, parfois de grands pécheurs désireux d'expier un crime, qui font à certaines paroisses ou couvents, des dotations, en stipulant des conditions qui varient d'un endroit à l'autre, mais qui supposent presque toutes le droit de nommer le titulaire, toute réserve faite quant à l'approbation épis-copale. De là le patronage tel qu'il existe encore pour beaucoup d'églises en Angleterre. On distinguait alors la nomination ou désignation, qui appartenait au fondateur et à sa famille, et la collation ou institution proprement dite, qui appartenait à l'évêque. Malgré ce qu'il y a de juste et de simple en théorie dans ce mode de procéder, les nombreux abus qui en résultèrent ne tardèrent pas à ouvrir les yeux sur les inconvénients de ces propriétés ecclésiastiques. Souvent on les adjugeait à des gens incapables ou indignes, uniquement comme prix de services rendus; parfois aussi on les multipliait entre les mains d'un seul bénéficiaire, qui trouvait lk un moyen facile d'accroître rapidement sa fortune, mais qui ne pouvant desservir ses nombreuses paroisses, les négligeait, ou les faisait desservir au rabais, par des hommes peu qualifiés. Des règles durent être posées, soit aux patrons, soit aux autorités ecclésiastiques, pour déterminer les conditions de l'élection, mais elles furent facilement éludées par ceux qui avaient intérêt à le faire, et à l'époque de la réformation ce fut une des traditions avec lesquelles les princes purent rompre sans exciter le moindre mécontentement. Il va sans dire aussi que les bénéficiaires n'ayant que l'usufruit, et non la propriété, ils étaient tenus de rendre terres et maisons en bon état et de faire à leurs frais les réparations nécessaires. On a longtemps discuté la question de savoir si le surplus d'un bénéfice, et par conséquent les économies réalisées, appartenaient de droit au titulaire et s'il pouvait en disposer par legs ou donation en faveur de ses proches; la conscience et les circonstances influeront nécessairement sur la réponse à faire, et il est impossible de fixer une règle uniforme. — On appelle bénéfice de compétence, en droit canon, le privilège accordé à un débiteur de ne pouvoir être condamné à une amende plus forte que ce qu'il possède au moment de sa condamnation. On a compris aussi sous ce nom le droit du débiteur, s'il est condamné à une amende, de réserver ce qui lui est strictement nécessaire pour vivre; cela s'applique en particulier à la saisie des traitements; dans plusieurs pays la loi a précisé les chiffres et le maximum des saisies suivant les cas et les individus. BÉNÉZET. lo Jeune pâtre de 12 ans, qui en 1177, un jour d'éclipsé de soleil, eut une vision du Christ qui lui ordonnait de construire le pont d'Avignon, f 1184. — 2° Antoine B., né 31 janvier 1713 à Saint-Quentin, réfugié en Hollande, quaker en 1727, passa en Amérique où il se fixa. S'occupa le premier des sourds-muets, et surtout de l'abolition de l'esclavage et de la traite; exerça une gr. influence par ses lettres et ses écrits, sur Clarkson, l'abbé Raynal, et les reines d'Angl., de France et de Portugal, f 17 mai 1784. — 3° François, né 1726 à Montpellier, assista Rabaut comme proposant et fut arrêté 30 janv. 1752 près du Vigan. Convaincu d'avoir prêché l'Évangile, il fut condamné à mort et pendu le 27 mars; il f en chantant le Ps. 51. Une complainte en vers a célébré son martyre. BENGEL, Jean-Albrecht, célèbre théologien wurtembergeois. Né 24 juin 1687 à Winnenden, t à Stuttgard le 2 nov. 1751. Il perdit de bonne heure son père, qui était diacre à Winnenden, et peu de temps après, les Français ayant incendié et détruit sa ville natale, il fut emmené à Stuttgard et y fit ses études au gymnase 1699-1703. Il partit de là pour Tubingue, où il se distingua bientôt comme théologien et comme prédicateur. Élevé dans l'amour et le respect des choses saintes, il eut toujours une prédilection pour les théologiens qui donnaient à la piété la place principale, Spener, Arndt, Chemnitz, Franke, etc. Mais la piété n'est pas incompatible avec la science; Bengel suffirait à le prouver. La direction du séminaire de Denkendorf, qu'il prit en 1713 après un long et fructueux voyage en Allemagne, l'appela naturellement à une étude approfondie de la Bible dans les textes originaux. Il ne négligeait pas les classiques, ni les Pères de l'Église, comme le montrent ses premières publications, sur Cicéron 1719, sur Grégoire le Thaumaturge 1722, sur Chrysostome 1723, mais il faisait passer avant tout le reste l'étude de l'Écriture, et sans se douter de l'importance de ses travaux, il donna à la science biblique une direction toute nouvelle qui le fit presque passer pour un révolutionnaire. Il avait remarqué dans une édition du N. T. d'Oxford les variantes qui accompagnaient le texte, et pour se rendre compte de la nature et de l'importance de ces variantes, il résolut de recourir aux mss. originaux. Il en collationna au moins une trentaine, de différentes familles, il en apprécia la valeur respective, et publia en 1734 son Apparatus criticus où il expose les principes qui, selon lui, doivent être prépondérants dans le choix des variantes. La leçon la plus difficile, dit-il, doit généralement être préférée à la leçon plus facile; lorsqu'il y a accord entre les mss. latins et celui d'Alexandrie, le texte doit être considéré comme authentique; les mss. et les pères latins présentent en général un texte plus ancien que le texte grec ordinaire, etc. Des observations très variées et de nombreuses réserves adoucissaient ce qu'il y avait d'un peu absolu dans ses principes. Néanmoins une clameur immense accueillit le travail du modeste savant; protestants et catholiques réclamèrent contre la prétention de changer l'œuvre d'Érasme par une nouvelle étude des textes originaux, pendant que, de son côté, Wettstein reprochait à Bengel de n'avoir pas été aussi loin que ses prémisses le requéraient. Bengel compléta son œuvre en publiant 1742, en latin, un Commentaire sur tout le N. T., le Gnomon Novi T., qui a été dès lors réimprimé plusieurs fois et traduit en plusieurs langues. Il ne se proposait pas d'expliquer lui-même la Parole, mais simplement d'inspirer à tous le désir de la lire, en leur fournissant quelques indications sommaires et en élucidant des textes obscurs. Il avait publié en 1741 son Ordo temporum, une suite des périodes de l'histoire, d'après les chiffres nombreux qui se trouvent dans les prophètes, et par une série de calculs plus ingénieux que solides, il était arrivé à conclure que notre terre avec sa constitution actuelle durerait 7777 ans; le millénium devait commencer en 1836. Des Discours édifiants sur ÏApocau nombre de 60, destinés à populariser ses vues, parurent 1747. et obtinrent un immense succès; ils furent réimprimés souvent, et traduits en anglais, en danois, en suédois, etc. Les chiffres se sont trouvés faux, et cela devait être; lui-même l'avait pressenti. Mais il avait fait preuve d'une modération, et en même temps d'une sagacité remarquable dans la manière presque prophétique dont il annonçait le développement social dont nous sommes aujourd'hui les témoins. Le temps vient, dit-il, où l'adultère se masquera sous le nom de galanterie. Nous marchons vers le règne du scepticisme et du naturalisme. La nature et la raison seront bientôt élevées à une telle hauteur, qu'on ne saura plus distinguer ce qui est surnaturel. Les hommes qui attaqueront avec la plume la religion chrétienne recevront de riches pensions et feront fortune; les grands et les petits seront moqueurs et libres-penseurs. Qui sait si dans 60 ans la France n'aura pas échangé ses rois pour des empereurs? La carte de notre globe sera entièrement remaniée. La religion naturelle et le fanatisme se donneront la main contre la Bible, et ceux qui n'auront pas en eux-mêmes le critère de la vérité se rejetteront dans le papisme. C'est une grande faute que l'Église protestante n'ait pas entrepris pins tôt l'œuvre des missions, etc. — Bengel écrivit encore en latin et en allemand quelques autres ouvrages dans le même sens, puis une Harmonie des 4 Évangiles, et quelques traites de polémique et de controverse. Il entretint avec Zinzendorf d'excellents rapports, ainsi qu'avec les moraves et les dissidents en général; il s'opposa à toutes les mesures administratives qu'on aurait essayé de prendre contre eux, les défendit au besoin, et par son esprit de tolérance, sa piété, son amour, exerça sur eux une influence salutaire en les mettant en garde contre leurs propres exagérations. Nommé prélat d'abord à Herbrechtingen 1741, puis à Alpirsbach avec residence à Stuttgard 1749, il reçut en 1751 le titre de docteur en théol. de 'université de Tubingue, qui ne fut pour lui qu'un encouragement de plus à travailler sans se lasser. Il touchait d'ailleurs au terme de sa carrière: une fluxion de poitrine l'enleva à l'âge de 65 ans. Sa fin fut ce qu'avait été sa vie, paisible, calme et sans ostentation; ses dernières paroles furent: Seigneur Jésus, je suis à toi à vivre et à mourir. Il avait épousé en 1714 Jeanne-Bégina Seeger, qui lui donna 12 enfants, dont 6 moururent jeunes; ses 4 filles contractèrent d'heureux mariages; son fils aîné, Victor, étudia la médecine et ne survécut que 7 ans à son père; le plus jeune, Ernest, fut doyen à Tubingue. Bengel avait demandé à Dieu de lui conserver sa compagne jusqu'à la fin de son pèlerinage et il fut exaucé. Sa vie a été écrite par son élève et ami Oetinger, par son fils, par Moser, par Fresenius, et enfin par son arrière-petit-fils Burk, archidiacre à Stuttgard 1831. Le nom de Bengel reste un des plus purs, des plus populaires et des plus vénérés de la théol. allemande. BENIGNUS aurait été, d'après la tradition, au disciple immédiat de Polycarpe; il aurait préché l'Évangile à Autun, Langres et Dijon, et aurait souffert le martyre. Une abbaye porte son nom à Dijon. BENJAMIN de Tudela, rabbin espagnol, f 1175, auteur d'un Itinéraire (Mazaloth) en Palestine, qui ne brille pas par l'exactitude des renseignements. BENNO, né 1010 à Goslar d'une famille noble; fut moine en 1028, diacre en 1035, prêtre en 1040. Il fut appelé en 1051, à la fois par Henri et Léon, à la direction du couvent-sémi -naire de Goslar, jusqu'en 1066. En 1067, év. de Meissen, par la protection d'Henri IV. Il joua an rôle équivoque dans la révolte des Saxons 1073, fut mis en prison et ne fut relâché qu'en 1076 après avoir de nouveau prêté serment de fidélité à l'empereur. Toutefois ses intrigues politiques ne cessèrent qu'en 1088, et tout en restant fidèle aux maximes ecclésiastiques de Grégoire VII, il se consacra dès lors presque exclusivement aux devoirs de sa charge, à l'administration de sa paroisse et à l'évangélisation des Slaves, + le juin 1106. Canonisé en 1523; ses prétendus restes furent, après de longues pérégrinations, transportés à Munich dont il devint le patron, 1576. BENOIT. Quatorze papes de ce nom: 1® Benoit Ier, surnommé Bonose, 574-578. Inconnu. 2* Benoit II, romain, 684-85. 3° Benoît IH, élu malgré les envoyés impériaux de Lothaire et de Louis, qui veulent en vain lui substituer Anastase. Il succéda à Léon IV 855, ou à la papesse Jeanne 857, si l'épisode de cette femme est authentique. 4* Benoit IV, romain, 900-903, gouverna sagement. Il couronna Louis de Provence emp. de Rome. 5° Benoît V, romain, 964-965, élu par le parti opposé à Léon VIII, que l'emp. avait fait nommer en remplacement de Jean XII. Othon irrité le fait détenir à Hambourg, où il meurt. 6° Benoît VI, romain, élu 972 concurremment avec son successeur Boniface VII; sa conduite scandaleuse le fait jeter en prison, où il périt d'une manière cruelle, empoisonné ou étranglé, par ordre de son rival. 7o Benoit VU, 975-983, parent d'Albéric, eut à lutter contre Boniface VII l'antipape. 8° Benoît VIII, pape 1012-1024, en concurrence avec Grégoire VI qui le contraignit à sortir de Rome, mais il remonta sur son siège a l'aide de l'emp. Henri II. Il combattit 1016 les Sarrasins qui avaient envahi ses États, et le> extermina. 9° Benoît IX, abominable petit garçon de 10 à 12 ans, nommé Théophylacte, élu 1033 en qualité de neveu ou cousin des deux papes qui l'avaient précédé. Il était fils d'Albéric, comte de Tusculum. Pape, il vécut dans la plus crasse dissolution et se livra à toutes les infamies, adultères, etc. Il commit de sa propre main plusieurs assassinats. Les Romains dégoûtés 1<> chassèrent; Conrad le rétablit, mais en 4044 il fut de nouveau chassé et remplacé par Sylvestre II. Il réussit à revenir encore, mais se voyant si fort haï du peuple, il vendit sa papauté à un homme de bien nommé Gratien, qui prit le nom de Grégoire VI; puis, cela fait, il garda l'argent et la papauté, jusqu'au moment où, forcé par un concile convoqué par Henri III. il donna plus ou moins volontairement sa démission, 1048. 10* Benoît X, Jean de Velletri, élu 1058 par le parti épiscopal, malgré l'opposition de Da-miani et d'autres. Il fut chassé quelques mois après par les Romains qui, avec le concours de l'Allemagne et l'appui d'Hildebrand, élurent Gérard de Florence, Nicolas II. Benoît s'humilia et f 1059. 11° Benoît XI, oct. 1303-6 juillet 1304; fils d'un berger de Trévise, il fut d'abord maître d'école, puis général des frères-prêcheurs.Homme d'un caractère doux, appelé à remplacer Boni-face VIII, il trouva bien des fautes à réparer; il annula les bulles de son prédécesseur contre Philippe-le-Bel, mais il mourut bientôt, empoisonné dans des figues, à ce que l'on dit, et sans avoir pu achever ce qu'il avait commencé. Son successeur fut le premier pape d'Avignon. 12o Benoît XH, 1334-1342. Jacques Fouruier, fils d'un boulanger de Saverdun, a plus de bonnes intentions que de puissance. Un des papes d'Avignon. Il se porta comme arbitre pour terminer les contestations de plusieurs princes. Il aimait à récompenser le mérite. Il s'attira de violents ennemis en voulant réformer son clergé. Commentateur des Écritures, il passa pour ignorant parce qu'il était modeste et qu'il n'était pas juriste. La procession du saint sacre* ment s'établit. 13o Benoît XIII; Pierre de Lune, né en Aragon d'une famille distinguée, passa successivement de la carrière du droit à celle des armes, puis il reprit l'enseignement du droit dans l'université de Montpellier. Nommé cardinal 1375 par Grégoire XI, le dernier des papes d'Avignon, il fut élu pape 1394 à la mort de Clément VII par les cardinaux avignonnais, en concurrence avec Boniface IX. Avant son élection, il s'est engagé à abdiquer au besoin, dans l'intérêt de la paix, ses titres et ses droits provisoires. Une fois pape, il oublie ses serments; il amuse Charles VI, roi de France, et les autres princes de l'Europe par de belles promesses, et finit par leur déclarer qu'il garde la tiare. Dès lors il n'est plus qu'un schismatique, on l'assiège dans Avignon 1398; il s'échappe et s'enfuit, d'abord à Château-Renard, près d'Avignon, puis à Peniscola dans le royaume de Valence. La France lui retire son obéissance. II est même question d'offrir la papauté k Charles V, mais cela n'aboutit pas, et le parti français le reconnaît de nouveau. Benoît continue de garder son titre et de lancer ses foudres sur la terre, pendant qu'Alexandre V lui fait concurrence k Bologne et Grégoire XII à Rome. A la fin le concile de Constance les renvoie tous, et Benoit, le plus opiniâtre de tous, cède à son tour, abdique et f 1424, âgé de 90 ans. 14<> Benoît XIII bis; romain, de la famille des Ursins (Orsini) pape 1724-30. Ne reconnaissant pas la papauté de Pierre de Lune (ci-dessus), il garde pour son nom le chiffre XIII. Dominicain, successivement év. de Manfredonia, de Césène et de Bénévent. Il confirme le rappel de Bitschi concédé par son prédécesseur et refuse au roi de Portugal de nommer son nonce cardinal avant qu'il ait quitté Lisbonne; les relations entre Rome et le Portugal sont ainsi interrompues 1725; la rupture s'accentue en 1729. Il se montre zélé pour la discipline et bien intentionné, mais d'un esprit un peu étroit et sans intelligence des besoins de son temps. Il autorise l'enseignement de la doctrine de saint Thomas sur la grâce et la prédestination, et confirme par une bulle la Constitution Unigenitus. Il tient un concile à Latran 1725 pour la réforme de l'Église, mais il s'y fait peu de chose. Il a le tort de nommer au cardinalat un homme indigne, son domestique Nicolas Coscia. Il veut canoniser Grégoire Vil, 1729, mais toute l'Europe s'alarme, et il f 1730. Auteur d'Homélies sur l'Exode. 15o Benoît XIV, 1740-1758. Prosper Lamber-tini, né k Bologne 1675, évêque d'Ancône, puis archev. de Bologne. Homme instruit, éclairé, conciliant, k idées libérales, convaincu que les principes de la papauté ne pouvaient plus 9e produire dans toute la rigueur du moyen âge, il montra par sa conduite qu'il renonçait k des prérogatives surannées, vécut en bonne harmonie avec toutes les cours, pourvut k une meilleure éducation du clergé, fonda 4 académies à Rome, veilla à ce que les places vacantes fussent consciencieusement repourvues et chercha à répandre dans les missions l'espoir du véritable christianisme. C'est par la charité, dit-il, et en leur faisant du bien, qu'il faut amener k la foi les infidèles. Il voulut diminuer le nombre des fêtes, mais il se heurta k trop de résistances. Il lâcha de calmer les querelles religieuses, adoucit les rigueurs que l'on exerçait à l'occasion de la bulle Unigenitus, réforma les jésuites du Portugal, et cultiva lui-même les lettres et les sciences. Voltaire lui dédia son Mahomet, qui est une apologie de la tolérance, et reçut en retour ses éloges et sa bénédiction. Il + au moment où il allait s'occuper de la suppression de l'ordre des jésuites, réclamée par le Portugal, v. Pombal, et les jésuites alarmés firent tous leurs efforts pour acquérir une influence décisive dans l'élection du nouveau pontife; ils y réussirent et Clément XIU fut nommé. Benoît a laissé de nombreux ouvrages, entre autres: De la Béatification, de la Messe, des Synodes, etc. Autres personnages de ce nom: 1° Benoît de Nursie9 fondateur de l'ordre des bénédictins; né 480 k Nursie, dans la Sabine; envoyé de bonne heure à Rome pour ses études, mais dégoûté de la vie licencieuse qu'il y trouva, il s'enfuit déjà en 494 pour aller vivre dans la solitude, n'ayant auprès de lui qu*un moine, Romanus, qui pendant 30 ans pourvut à son austère nourriture. Il occupait à Subiaco une grotte presque inaccessible. Sa vie à partir de ce moment est peu connue; écrite par Gré-goire-le-Grand sur le rapport de 4 de ses disciples, elle est pleine de légendes et de miracles; il fait flotter la hache qu'un Goth a laissée tomber au fond du lac; il permet à son ami Maur de marcher sur les eaux pour aller sauver Placide qui se noie, etc. Ce qui subsiste comme authentique, c'est que les paysans païens des environs, effrayés de son apparence peu soignée, le prirent souvent pour une bête fauve. Mais les chrétiens admirèrent sa sainteté, et les moines de Vicovaro le choisirent pour leur abbé. Us s'en repentirent bientôt, trouvant sa discipline trop sévère, et ils cherchèrent à l'empoisonner; mais il fit le signe de la croix sur la coupe qu'il allait boire et elle se brisa en morceaux. II se rendît alors au Mont-Cassin, au nord de Naples, cime escarpée dominant de fertiles plaines et de sombres vallées, et il y passa les 14 dernières années de sa vie. Il permit à d'autres solitaires de se joindre à lui, mais à la condition de se soumettre à ses directions et de travailler. Ils évangélisèrent autour d'eux, démolirent un ancien temple d'Apollon, construisirent de leurs propres mains le monastère qu'ils devaient habiter et qu'ils ont rendu si célèbre au moyen âge, et protégèrent les populations du voisinage, une fois contre la famine, une autre fois contre les attaques des barbares. Benoît eut en 548 une rencontre avec Totila, le vaincu de Bé-lisaire et de Narsès,et lui annonça ses prochains triomphes, ses revers et sa mort. Lui-même f 21 mars 543, en prière devant sa fosse qu'il avait fait préparer. — V. Bénédictins. / 2° B. d"Aniane. Witiza, fils du comte Goth Ai-jmlfe de Maguelone, naquit en Languedoc 750. Jouissant de la faveur de Pépin et de Gharlemagne, il voyait un brillant avenir s'ouvrir devant loi, lorsque, pendant un voyage en Italie, son frère étant sur le point de se noyer, il fit le vœu, s'il était sauvé, de renoncer à tous les intérêts terrestres. Il tint parole 774, et se jeta dès lors dans la vie monastique avec tout le zèle et tonte l'ardeur dont il était capable. Il résolut d'égaler et si possible de surpasser le patriarche des ordres religieux latins; il prit son nom de Benoit, et après quelques années passées au couvent du Saint-Sequanus, près deLangres, qu'il travailla à réformer, il résolut, pour être plus libre dans son action, de fonder un monastère snr les domaines paternels, sur les bords de YAniane en Languedoc 780. Il en fut l'abbé naturel et y introduisit la règle de saint Benoît, mais avec quelques changements empruntés à Pàcome et à Basile. Le respect du peuple et la reconnaissance des moines firent bientôt de lui une des personnalités les plus considérables de l'Aquitaine. Charles et son fils Louis-le-Débon-naire le comblèrent de faveurs; Alcuin l'employa pour combattre l'adoptianisme, concile de Francfort 794, mais la dogmatique n'était pas son fort, et les écrits qu'il a laissés sur ce snjet n'ont guère de valeur. Ses ouvrages sur la vie monastique sont plus importants, Codex regularum, Concordia regularum, etc. lia écrit de même un recueil sur les différents modes de pénitences. Louis, qui l'établit chef de tous les monastères de son empire, sut exploiter aussi la puissance et la popularité de Benoît en vue de sa succession au trône paternel, et c'est bien lui qui décida Gharlemagne, malgré les efforts contraires d'Adalbert et de Wala. Le règne de Lonis fut l'apogée de son pouvoir, mais malgré les avantages de sa position politique il ne cessa jamais de se préoccuper des intérêts du mona-chisme; il les fit valoir entre autres à la diète d'Aix-la-Chapelle 817. Après sa mort, 12 févr. 821, ses adversaires politiques reprirent le dessus, et la vie religieuse dont il avait été le réformateur et le représentant perdit beaucoup de sa ferveur, de son prestige et de son crédit. 3° B. le Lévite, ou le diacre, de l'archevêché de Mayence, sous Autgar ou Otger, 825-847; auteur d'un recueil de capitulaires publiés sous les noms de Pépin, Charlemagne et Louis, donnés comme la suite (chap. 5, 6 et 7) des capitulaires d'Anselgis, longtemps acceptés comme authentiques, dénoncés comme suspects par Blondel, défendus par Baluze, et maintenant, depuis Savigny, reconnus comme l'œuvre d'er-clé iastiques faussaires, aux gages des archev. Riculphe 786-813 et Autgar. On ne peut dire si Benoît fut lui-même le complice de ces fraudes, ou s'il ne fut que le rédacteur innocent, mais dans tous les cas malhabile, de cette compilation dont les procédés et la tendance rappellent les fausses décrétales. Le but immédiat fut peut-être de relever par ce travail la réputation compromise du diocèse et de faire rendre à l'archevêque le titre de primat; mais il était surtout de revendiquer les droits du clergé contre le pouvoir civil et temporel. Ce but ne fut réellement pas atteint, l'œuvre du faux Isidore étant survenue pour faire plus et mieux dans l'intérêt de la hiérarchie, et si deux siècles plus tard quelques évêques mentionnent encore les Capitulaires de Benoît, leur effet ne fut que local et momentané. 4° René B., prêtre, docteur en Sorbonne, publia en 1566, avec des réflexions, une trad. française de la Bible, pour laquelle il utilisa la version de Genève. Plusieurs passages soulevèrent des plaintes; l'ouvrage fut mis à l'index et condamné; l'auteur lui-même fut renvoyé de la Sorbonne, et ne fut réhabilité qu'au bout de 20 ans et après sêtre rétracté. 5° Élie B., né à Paris 20 janv. 1640; jeunesse agitée, étudia à Montauban, fut consacré en 1664 et successivement nommé pasteur dans la Beauce et à Alençon. Son zèle et ses talents lui valurent la haine des jésuites. La Révocation le força de quitter la France; il fut appelé à Delft comme prédicateur et f 15 nov. 1728. Il avait épousé une mégère qui le tourmenta pendant 47 ans. Son principal ouvrage est une Hist. de l'édit de Nantes, un peu lourde, mais riche en documents officiels, pleins d'intérêt. Il a laissé aussi divers mélanges et lettres de circonstance, sans parler de 12 ou 15 dissertations en mss. encore inédits. 6° Jean, prof, de grec à Saumur entre 1630 et 1650, auteur de quelques travaux sur les Psaumes et le Cantique. 7° Marc-Antoine, pasteur à Montauban 1610, eut des difficultés avec sou collègue Beraud, et tous les deux furent condamnés par le synode d'AIais à changer de résidence. 80 N. Benoît, ouvrier en soie, réfugié en Angleterre, auteur d'un Avis à Archippe, où il professe et défend les vues baptistes. BENTLEY, Richard, théol. anglais, né 1662 à Oulton. Yorkshire, doyen du collège de la Trinité à Cambridge, 1700, et prof, de théol. 1716. Connu comme critique et philologue, il s'occupa de comparer les meilleurs mss. du N. T., ainsi que les meilleures versions. II en avait déjà annoncé la publication, mais il y renonça en présence des attaques violentes soulevées par son projet. On a de lui des Sermons et un ouvrage apologétique contre Collins. f 1742. BÉRENGER 1° de Tours, né à Tours vers 998, f 1088, élève de Fulbert de Chartres, esprit indépendant, nommé en 1030 scolas tique, ou maître d'école et professeur dans sa ville natale, étudia d'abord les classiques latins, puis la Bible, les pères et surtout Augustin. Son enseignement obtint un grand succès, parce qu'il amenait ses élèves à penser par eux-mêmes et à examiner avant d'accepter les paroles du maître. Archidiacre d'Angers 1039, il revint à son école l'année suivante comme principal directeur, et par sa science, ses manières et son mode d'enseignement, il se concilia l'amour et le respect de ses élèves à un degré qui tenait de l'enthousiasme. Vers cette époque Paschase Radbert travaillait à faire prévaloir la nouvelle doctrine de la transsubstantiation; Scot Erigène la combattait, et Bérenger, dans une lettre à son ami Lanfranc, prieur du couvent de Bec, soutint que le pain et le vin ne changeaient pas de nature dans l'eucharistie, mais conservaient leurs qualités essentielles et n'étaient que le symbole du corps et du sang de Christ. Cette lettre tomba en d'autres mains à Rome, et un concile fut convoqué aussitôt, 1050, où Lanfranc, ami de Bérenger, mais mécontent d'être compromis par cette lettre, se porta lui-même comme son accusateur. Bérenger fut condamné sans avoir été ni entendu, ni même cité. Un second concile convoqué le sept, de la même année à Vercelli, et auquel Bérenger eût assisté si Henri 1er de France ne l'eût fait mettre en prison à Paris, le condamna également. Le pape fit même saisir deux de ses amis, ecclésiastiques d'Angers, qui avaient essayé de le défendre, et le livre de Ratram fut lacéré. Hil-debrand vint à Tours comme légat du pape; il ne tenait pas beaucoup à la transsubstantiation, il aurait voulu qu'on se bornât à une définition générale, sans s'arrêter au comment; il s'entendit avec Bérenger dans ce sens, et Bérenger, pour l'amour de la paix, signa que le pain et le \in étaient le corps et le sang du Sauveur; c'étaient les paroles mêmes de l'institution et il ne s'aventurait pas. Mais Henri, malgré la protection du comte Gaufried d'Anjou, ne lui rendit ni ses biens, ni son bénéfice, ni aucune indemnité. En 1059, sous Nicolas II, Bérenger vint à Rome, comptant sur l'influence et la bonne volonté d'Hildebrand, mais le parti contraire était devenu si puissant et si audacieux qu'Hildebrand lui-même n'osa pas résister, et sous la pression de l'év. Humbert, Bérenger fut contraint d'anathématiser son opinion. Dans une lettre à Lanfranc il compare sa rétractation au reniement de saint Pierre. De retour en France il continua d'enseigner, en appelant la transsubstantiation une folie du pape. Il a toujours des amis et des partisans, mais son protecteur Gaufried meurt, Eusèbe Bruno d'Angers se retire de lui; on lui recommande tout au moins plus de modération, puisque à Rome même on use de ménagements à son égard; mais Lanfranc ayant écrit contre lut, il lui répond, vers 1069, par sa Dèfevse, qui a été longtemps perdue et que Lessing a retrouvée dans la biblioth. de WolfenbUtiel (publ. par Vischer, 1834). Au concile de Poitiers 1076, les passions étaient si excitées qu'on faillU se battre. Grégoire Vif, fatigué de celte discussion qui entravait ses plans et son activité, chercha à terminer la chose un peu à l'amiable. Bérenger ayant reconnu que le pain après sa consécration était le vrai corps de Christ, sans dire comment, Grégoire dît que cela suffisait; il prétendit même qu'un jeune prêtre avait eu une vision de la Vierge et qu'elle lui aurait dit qu'il fallait s'en tenir aux Écritures autenthiques, contre lesquelles Béranger ne disait rien. Ce dernier avait oflert d'en appeler au jugement de Dieu, à l'épreuve du fer rouge, mais le pape ne le permit pas. Dans un nouveau concile 1079 il dut confesser que le pain est substantiellement changé en la vraie chair de Christ; il prit le mot dans le même sens que Luther, c'est-à-dire salvâ sua substantiâ, et signa, mais les évêques acharnés après leur proie, exigèrent qu'il prit le mot dans le même sens qu'eux; Grégoire effrayé l'exigea de même, et le pauvre vieillard dut s'exécuter. Grégoire leva l'excommunication. Bérenger rentra en France, pleurant sa faiblesse et ce qu'il appelait son sacrilège. Las d'une lutte qu'il ne se sentait plus la force de poursuivre, il se retira dans l'île de Saint-Côme près de Tours, où il passa ses dernières années dans la prière, le jeûne et le repentir, persévérant dans ses convictions jusqu'à la fin, et laissant dans l'esprit du peuple l'impression d'une sainteté extraordinaire. Sa doctrine sur la cène, sur la messe, sur l'Église et sur l'autorité des Écritures est celle des Églises évangéliques. 2° Jean, né 1730 au hameau des Ferrands près Valence, proposant en 1749, étudiant à Lausanne 1750-1752, dès lors pasteur en Dau-phiné sous le nom de Colombe (allusion à Can-tiq. 2, 14), consacré avril 1758, condamné à mort 7 sept. 1759, exécuté à Mens en effigie, condamné de nouveau et rependu en 1766 à Grenoble. 11 lui naquit à Mens 8 avril 1767 un fils Jean, qui devint médecin, député, comte et en6n pair de France. Bérenger fut modérateur-adjoint du synode de 1777, il assista à celai de 1783, et il eut le bonheur de connaître l'édit de nov. 17S7 par lequel Louis XVI permettait aux protestants de naître, de se marier et de mourir. Le Concordat de Tan x leur donna davantage. Enfin un décret du 25 fructidor an xm (sept. 1805) accorda une consistoriale à Mens, et Berenger en fut nommé président; mais il était âgé, et il donna bientôt sa démission. Après an court séjour à Paris, auprès de son fils, il revint à Mens où il + 1813. BGRGMJS, Jean, prédicateur du Brandebourg, né 1587 à Stettin, étudia à Heidelberg *t Strasbourg, voyagea avec des élèves en France, Angleterre et Pays-Bas, puis en Pologne, fut nommé professeur de théol. réformée à Francfort s. 0. 1616, et prit part avec Calixte an colloque de Thorn 1642. Il était plutôt unioniste que calviniste rigide, et se montra fraternel enrers les luthériens, malgré leurs attaques passionnées. Ses sermons se distinguent avantageusement par le tact, le goût et la modération, f 1658. — Son frère Conrad lui succéda 1624 à Francfort, et passa en 1629 à Brème comme directeur du Collège illustre. L'un et l'autre jouirent de la faveur des princes. Ils étaient oniversalistes et prétendaient même que c'était là la doctrine réformée. BBRLEBURG (Bible de). Édition, version et commentaire de la Bible, qui parut à Berle-burg, Westphalie, de 1726-39. C'est l'œuvre d'auteurs inconnus, évangéliques, mais ennemis de l'Église établie et de l'orthodoxie courante, avec une tendance mystique très prononcée et la prétention, sans une connaissance suffisante des textes originaux, de donner une traduction meilleure et une explication plus claire et plus profonde des passages difficiles. A côté d'un littéralisme parfois heureux, parfois ridicule à force d'être exagéré, on y remarque un excès de spiritualisme qui n'a pas môme le mérite de l'unité; les tendances de M"»e Guyon y coudoient les hardiesses d'Origène, et l'on reconnaît facilement que les divers auteurs, d'accord sur certains points sans doute, ne l'étaient pas sur d'autres, môme des plus importants. En général ils rejettent la prédestination, ils voient la rédemption dans le fait de la solidarité plus que dans l'expiation; ils admettent le rétablissement de toutes choses, ils ont un chiliasme très prononcé, ils méconnaissent la doctrine du péché; ils placent l'homme primitif à une hauteur immense, ils prouvent qu'Adam n'avait point de sexe, eic. Les questions les plus puériles sont traitées avec le même sérieux que les plus graves, et l'incohérence de ce travail, au milieu d'excellents fragments, explique le prompt discrédit dans lequel il est tombé. Cette version est presque introuvable. Slier a de nouveau attiré l'attention sur le travail des anonymes de Berleburg. BERNARD, ou Bemhardt. 1<> de Menthon. fondateur de l'hospice du Saint-Bernard, à la fois forteresse et maison hospitalière; créateur de la route destinée à franchir le col qui abouti! aux plaines de l'Italie; son nom fut donné en signe de reconnaissance au Grand et au Petit-Saint-Bernard qui dominent le passage de l'hospice. Né 923 au château de Menthon, près d'Annecy; archidiacre d'Aoste, f 1008. On a sur lui plusieurs notices, mais qui ne concordent pas; les unes le font fils d'un noble et d'une mère pieuse; d'autres le font fils du duc de Savoie. Il fut élevé par son oncle ecclésiastique, et il s'éprit d'une vive admiration pour Nicolas de Myra qui avait détruit un temple païen de Lycie. La légende lui prête une foule de miracles. 2<> Bernard deClairvaux, né 1091 à Fontaine en Bourgogne; 3®« fils d'une famille noble, chevaleresque et pieuse, subit plus que ses frères l'influence bénie de sa mère Aletb, qui l'avait consacré h Dieu déjà avant sa naissance. Il se distingua à Châtillon, où il étudiait, par une intelligence vive, mais il était recueilli, silencieux, et frayant peu avec ses camarades. Sa résolution était prise de se faire moine; sa famille essaya en vain de lui montrer dans la théologie, comme dérivatif, une carrière analogue, offrant plus d'avantages et moins d'inconvénients. Il persista, se persuadant à lui-même que c'était le dernier vœu de sa mère, et il réussit si bien à faire des prosélytes à sa cause, que bientôt, en 1113, n'ayant que 22 ans, il se présenta à la porte du couvent de Cîteaux avec une trentaine d'amis, dont 4 de ses frères et un oncle, tous demandant d'être reçus comme novices. L'abbaye, fondée en 1098 près de Dijon, effrayait par la sévérité de sa règle; elle n'en attirait pas moins grand nombre de religieux, et il fallut penser à s'étendre. Deux ans après, Bernard, qui avait scrupuleusement rempli tous ses devoirs de novice et de moine, se transportait 1115 à quelques lieues de là dans une claire vallée de la Haute-Bourgogne, clara vallis, Clairvaux, et fut le premier abbé du nouveau monastère. Il vivait de rien, de racines et de feuilles d'arbres, ne dormait presque pas, et portait jour et nuit un cilice qu'il dut cependant abandonner quand la chose fut découverte. Il consacrait son temps à la prière et à la lecture. La Bible était son étude favorite, et il avait coutume de dire qu'il aimait mieux puiser à la source que plus bas dans des canaux latéraux. Il finit par tomber malade à force de macérations ascétiques; son ami, l'év. de Châlons-sur-Marne, Guillaume, d'accord avec le chapitre de Tordre, le condamna à un an de repos, et lui-même ne comprit que plus tard, quand il se vit prématurément affaibli et vieilli, que s'il y a un devoir dans la sobriété, c'est aussi un devoir que de soigner ses forces et sa santé. Il savait si bien vivre en dehors des choses visibles, absorbé dans la contemplation, qu'il longea, dit-on, pendant tout un jour le lac de Genève, sans en avoir rien aperçu. Mais à côté de la vie intérieure il y avait en lui une grande activité pratique, et il se consacrait tour à tour tellement à l'une et à l'autre qu'il ne savait plus, disait-il, s'il était ecclésiastique ou laïque. Ses sermons, sa nombreuse correspondance, les 160 couvents qu'il fonda et organisa, la règle de l'ordre qu'il réforma, ses écrits sur différents sujets, sur Malachie, la Vie contemplative, les Erreurs d'Abélard, les Devoirs de la papauté, sont une preuve du zèle avec lequel il savait au besoin payer de sa personne, mais il y en a d'autres preuves encore et pendant plus de vingt années on le vit sur la brèche, mêlé aux plus graves événements de son temps, parlant avec la même hardiesse aux rois, aux peuples et aux papes, prenant le parti des petits et des opprimés, et s'opposant au moine Raoul, qui ne demandait rien moins que le massacre de tous les juifs. Parmi les faits les plus saillants de sa carrière publique il faut noter son intervention dans l'élection simultanée d'Innocent II et d'Anacletll à la papauté, 1130. Appelé à donner son avis, il se prononça sans hésiter pour le premier, et pendant cette lutte qui dura 8 ans et qui se termina par la mort d'Anaclet, il ga-}ïna de nombreux adhérents au pape qu'il protégeait. Dans les voyages qu'il fit à cette occasion en Italie, en Allemagne et en France, il électrisait les populations, et ses biographes racontent de lui des faits qui tiennent du miracle. Puis vinrent ses luttes contre Abélard. Ces deux grandes natures devaient nécessairement entrer en conflit, mais leur terrain n'était pas le même, et le conflit ne pouvait aboutir. Bernard l'emporta, mais il n'eut pas toujours le beau rôle. Il poursuivit de même de toute sa fougue Pierre de Bruys, Arnold de Brescia, et ceux de leurs disciples qui, sous une forme quelconque, tentaient uue réforme de l'Église. C'est lui enfin qui prêcha, à Pâques Hi6, au concile de Véze-lay, la croisade à laquelle prirent part Louis-le-jeune et Conrad IÛ, et qui, malgré ses glorieux pressentiments, finit d'une manière si malheureuse. Il prit parti aussi 1147 et 1148 contre les albigeois, mais sans grand succès. Il attaqua l'évêque de Poitiers, Gilbert de la Porée, au concile de Reims, sous prétexte de trithéisme 1148, mais Gilbert ne put être convaincu de ce dont il était accusé. Enfin épuisé de fatigue, Bernard tomba malade et fut emporté en quelques jours. Il vit venir la mort avec sérénité et f 20 août 1153. Il fut canonisé 20 ans après par Alexandre III, 1173. Ses Œuvres ont été publ. par Mabillon 1690, 2 vol, f°. — Bernard était aussi poète, et c'est comme tel, aussi bien que comme orateur, qu'il a mérité le surnom de mellifluus; parmi ses hymnes, l'une des plus connues est celle qui commence par: Salve ca-put cruentatum, que Paul Gerhard 1659 a si bien reproduite dans son: O Haupt voll Blut und Wunden. 3« Bernard, dit de Tolède, né à Agen, f 1125; d'abord soldat, puis bénédictin, abbé du couvent de Sahaguneen Castille, 1080, contribua plus que personne à faire prévaloir en Espagne les doctrines absolutistes de Grégoire VII et d'Alphonse VI. Après la prise de Tolède sur les Maures, il fut nommé archev. de cette ville, puis en 1187 cardinal et primat d'Espagne. Le roi et une partie du clergé finirent par trouver qu'il allait trop loin dans sa revendication de l'autorité papale. Il se proposait de se mettre à la tête d'une nouvelle croisade, mais Pascal II s'y opposa. 4° Bernard de Botone, né à Parme d'une famille considérée, étudia à Bologne, devint professeur et chanoine, enseigna à Rome et à Bologne, et f 1288. Il a surtout étudié les Décrétâtes, qu'il a commentées dans sa Glotsa ordinaria. 5° Bernard de Compostelle, archidiacre, chargé à Rome sous Innocent III de recueillir les décrétâtes de ce pape, mais comme son travail renfermait quelques pièces qui ne convenaient pas à la curie, il fut supprimé. — Un autre B., aussi de Compostelle, a commenté les décrétâtes d'Innocent VI et de Grégoire IX. 6° Bernard de Pavie, évêque vers 1190, a recueilli sous le nom d'Extravagantes des lois et décrets publiés après Gratien, et qui sont hors du cours du droit. 7<> Bernard, espagnol, se rendit de Rome en Poméranie pour évangéliser ce pays, 1122. Il arriva en pauvre état à Julin et fut mal reçu par les habitants; on le traita de gueux parce qu'il était mal mis; de fou parce qu'il offrait de rester dans une maison à laquelle on mettrait le feu. Il essaya d'abattre l'arbre sacré de Joui, alors on le chassa et il se sauva à Bamberg où il passa la fin desès jours à prier pour lesPomé-raniens. Il désigna, pour reprendre son œuvre, l'év. Otton, qui réussit en effet mieux que lui. 8* Bernard, Claude, surnommé le Pauvre prêtre, un des hommes les plus pieux de son Église. Né à Dijon 1588, lils d'un magistrat distingué; après une jeunesse orageuse, il raconte qu'à la suite d'une vision dans laquelle son père l'exhortait à se convertir, il changea de vie, entra dans les ordres, se fixa à Paris, et se consacra pendant 20 ans aux malades, aux pauvres, aux condamnés et à la prédication. Il distribua en libéralités immédiates un héritage de 400,000 fr. f 164* d'une maladie dont il fut atteint en accompagnant au gibet un scélérat endurci. 9° Samuel, célèbre comme peintre sur émail, né8 nov. 1615, f 24 juin 1687. Un des fondateurs de l'Acad. de peinture de Paris; abjura. Son fils Samuel, joaillier, fut un financier célèbre et abjura aussi. Ses nombreux enfants s'allièrent à la noblesse dont ils redorèrent les blasons; lesMolé, Lamoignon, Clermont-Tonnerre en descendent. 10° Jaques B. né 1 sept. 1658 à Nyons, pasteur à Venterol, puis à Vinzobres, proscrit en 1683, s'enfuit à Lausanne où il donna des leçons, et de là en Hollande, oii il rédigea la Bibl. Univ. et la suite des Nouvelles de la républ. des Lettres; pasteur et prof, à Leyde depuis 1705; t 27 avril 1718; publiciste plus laborieux que distingué. — V. aussi Bernon et Bernward. BERNARDIN 1* le saint, né 1380 à Massa Carrara, d'une famille distinguée de Sienne, entra dans l'ordre des franciscains de l'étroite observance, après avoir fait ses preuves auprès des malades, et montré pendant la peste de 1400 un admirable dévouement. Il se fit aussi une réputation comme prédicateur, devint vicaire-général de son ordre, qu'il travailla à réformer, et refusa successivement les évêchés de Sienne, Ferrare et Urbin. Il f 1444 pendant une mission dans les Abruzzes, et fut canonisé déjà 1450 par Nicolas Y. Ses œuvres, d'un caractère mystique, 5 vol. f° ont été publ. à Venise 1591, Paris 1636, Venise 1745. 2° Bernardin Ocbino, v. Ochino. BERNARDINS, nom des religieux de Cîteaux depuis les nouvelles règles que leur donna saint Bernard; ils sont cependant plus connus sous le nom de cisterciens, q. v. BERNE. Les tendances conservatrices de la population agricole de ce puissant canton n'offraient pas à la Réforme un terrain facile, mais les désordres des dominicains 1507-1509, puis la vente scandaleuse des indulgences par Jetzer 1518 éveillèrent l'attention. Un certain nombre de prêtres pieux protestèrent, Kolb, Séb. Meyer, Berthold et Jean Ilaller. Déjà Luther et Zwingle en avaient appelé aux Écritures, et si la majorité des magistrats et du clergé bernois étaient hostiles aux nouvelles idées, une minorité respectable commençait à penser qu'il y avait quelque chose à faire. La conférence de Bade 1526 s'était prononcée catégoriquement contre toute réforme et la cause semblait perdue, mais plusieurs prêtres évangéliques, Berthold Haller en tête, refusèrent de se soumettre, et pour différents motifs le gouvernement s'abstint de les inquiéter. La controverse s'envenima. Les 7 cantons catholiques ayant eu l'imprudence d'intervenir d'une manière comminatoire. Berne en prit ombrage et décida de liquider seul la question pour son propre compte. Le Grand Conseil, séance du 17 nov. 1527, convoqua pour les premiers jours de l'année suiv ante une conférence ecclésiastique, à laquelle les évêques de Constance, Valais, Bàle et Lausanne furent invités à se rendre, sous peine, s'ils ne venaient pas, de perdre tous les droits et bénéfices qu'ils possédaient dans ce canton. Il était convenu qu'on discuterait sur la seule base de l'A. et du N. Testament; que d'ailleurs la discussion serait libre, que personne ne serait inquiété pour ses opinions, ni nationaux, ni étrangers, et que les résolutions ne seraient imposées à personne. Cette conférence connue sous le nom de Dispute de Berne s'ouvrit le 7 janv. 1528 dans l'église des franciscains. Les évêques avaient refusé d'y paraître, mais ils y étaient représentés par des amis et des savants de leur bord. Cependant les partisans d'une réforme y possédaient la majorité numérique, et en outre une supériorité morale et intellectuelle incontestable. On y remarquait entre autres le bourgmestre de Zurich. Rœust, Zwingle avec une quarantaine de prêtres. Œcolampade de Bàle, Blaarer de Constance, Bucer et Capiton de Strasbourg. Six des cantons catholiques, s'en référant à la conférence de Bade blâmèrent vivement cette nouvelle tentative; Eck et Cochlâus la condamnèrent, et Charles-Quint en témoigna par lettre du 27 déc. 1527 son mécontentement, mais ces difficultés n'arrêtèrent ni le gouvernement, ni les partisans d'une amélioration, bin thèses furent successivement introduites par Haller ou par Kolb, et discutées par les hommes les plus marquants des 2 partis. 1° Christ seul chef de l'Eglise, 2° l'Église n'a pas le droit d'imposer d'autres commandements que ceux qui sont dans la Bible; 3° Christ est notre seule justice et sanctification; 4° Le corps et le sang de Christ ne se trouvent pas en substance dans le sacrement; 5° La messe est contraire à l'Écriture, un blasphème contre le sacrifice de Christ et une abomination par ses abus; 6° Christ est le seul médiateur et intercesseur; 7° contre le purgatoire; 8° contre les images; 9° contre le célibat forcé; 10° les péchés contre la chasteté ne sont préjudiciables à aucune classe autant qu'aux ec-désiastiques. Ces dix points furent adoptés en 20 séances et le 26 janv. Haller prononça le discours de clôture. Le 7 févr. un édit de l'autorité civile donnait force de loi à l'œuvre de la conférence, la Réformation était proclamée; le 13 févr. les paroisses étaient consultées et se prononçaient presque toutes affirmativement; les vallées bernoises ne se décidèrent que plus tard. Bâle, Bienne, Schaffouse et d'autres villes ressentirent le contre-coup de celte paisible et sérieuse discussion; plus tard Genève 1535 et Lausanne 1536 devaient suivre le même exemple. Les actes originaux, avec les signatures, sont encore à la biblioth. de la ville en double exemplaire. Mais il ne suffisait pas d'avoir décrété la Réforme, il fallait encore l'organiser, la régulariser, la faire pénétrer dans les mœurs, et ce n'est pas l'affaire d'un jour. Longtemps on vit les paroisses réformées, surtout à la campagne, conserver les traditions anciennes; le clergé lui-même n'était pas à la hauteur de sa mission. Les désordres dans l'Oberland 1528, et les deux guerres de religion de 1529 et 1531, retardèrent le travail d'organisation, dont la nécessité se faisait cependant sentir de jour en jour davantage. Enfin après la paix du 24 nov. 1531 on décida de se mettre à l'œuvre, et le 9 janv. 1532 le synode se réunit; 230 ou 240 pasteurs étaient présents, et Capiton qui venait d'arriver de Strasbourg, fut inûté à diriger les débats. Après avoir réduit au silence la faction trop belliqueuse du clergé et rappelé dans quel esprit Christ doit être prêché, il introduisit le grave et principal sujet pour lequel le synode était convoqué, l'organisation de l'Église, sa discipline et ses rapports avec les magistrats. Capiton lui-même rédigea les articles, et il montra tant de lumières et de sagesse qu'il entraîna même des hommes encore opposés à la Réformation. Il suffit de 4 à 5 jours pour s'entendre (du 9 au 14 janv.) et pour élever un monument qui demeurera toujours cher à l'église de Berne. Les Actes du synode de Berne sont le toit sous lequel cette église s'est abritée, la règle qui a fait sa gloire et sa prospérité. Ils forment, avec les dix conclusions de la dispute, ses livres symboliques, et pendant plus de 3 siècles ils ont été vénérés comme la bannière et comme l'un des plus beaux monuments de l'époque de la Réformation. C'est un vrai chef-d'œuvre, même pour notre temps, dit Hundeshagen. Et Vulliemin ajoute: Ne nous figurons pas une aride et froide ordonnance; c'est une œuvre d'inspiration, toute vivante de la piété de ses auteurs, de la sage modération de Capiton, de l'onctueuse douceur de Haller. — Ces Actes du synode reçurent la sanction du Grand Conseil le jour même où le synode eut achevé son travail, 14 janvier et ils furent imprimés officiellement à Bâle la même année, puis 1728 et 1775. BERNIS, François-Joachim De Pierre (de), cardinal français, né 1715 à Saint-Marcel, Ar-dèche, archev. d'Albi, + * Rome 1794, connu par ses petits vers, sa galanterie, la protection de Mad. de Pompadour, et la part qu'il prit à l'expulsion des jésuites et à l'alliance autrichienne. Ses poésies affectées le firent surnommer par Voltaire Babet la Bouquetière. Son poème la Religion vengée ne fut publ. qu'après sa mort et n'a pas réussi. Bernis avait été reçu de l'Acad. franç. à l'âge de 29 ans à cause des grâces de son esprit et de sa personne. BERNON 1° noble bourguignon, premier abbé de Cluny et réformateur de plusieurs autres monastères, f 927. — 2° Bernon, appelé aussi Bern, ou Bernard, moine d'un couvent de bénédictins près Trêves, nommé 1008 par Henri II abbé de Reichenau, géra cette abbaye pendant 40 ans et lui rendit son lustre compromis par Immo son prédécesseur. Il était savant, poète et musicien. Il enrichit sa bibliothèque, releva le niveau des études, travailla à l'amélioration du chant sacré, + H a écrit quelques livres sur les fêtes chrétiennes et quelques biographies. BERNWARD, ou Bernard, 13e évêque de Hildesheim, près Hanovre, d'une famille noble, neveu de l'électeur palatin Adalberon. Après de brillantes études il devint 987 précepteur du jeune Otton III et chapelain impérial. Nomme évêque 993, il protégea sa ville contre les invasions des Normans par un ensemble de tours et de murailles et mérita d'être appelé le second fondateur de Hildesheim. Il défendit pendant 7 ans et avec succès les droits de son évêché contre l'archev. de Mayence, et eut le bonheur, dans un voyage à Rome, de calmer une émeute contre le pape. Il possédait une riche bibliothèque et s'intéressait à la théol., à la philosophie, aux mathématiques et aux beaux-arts. Après l'an 1000, quand on eut cessé de croire à la fin du monde, il fit bâtir à ses frais une magnifique abbaye des bénédictins, qu'il plaça sous le vocable de saint Michel, et il f 1022, peu après avoir fait la dédicace de son église. Canonisé 1193. BERQUIN, Louis (de), gentilhomme artésien, né 1490, brûlé à Paris le 22 avril 1529 pour cause de religion. Aussi remarquable par la pureté de ses mœurs que par son amour de l'étude, Berquin avait adopté avec ardeur les principes de la Réforme et publia entre 1523 et 1529 un certain nombre de petits ouvrages de controverse qui lui valurent l'amitié d'Erasme, un peu la faveur du roi, et beaucoup la haine des moines et de la Sorbonne. Arrêté une première fois le août 1523 à la suite d'une descente de la police dans sa maison et de la saisie de ses livres et papiers, il fut relâché le 8 par l'intervention de François 1er. La Sorbonne lai en voulait surtout à cause du mépris avec lequel il parlait de l'ignorance des docteurs et des subtilités de l'école. Arrêté une seconde fois, mai 1523, sur la plainte de l'év. d'Amiens, il est condamné comme hérétique par les délégués du pape, sur des traductions falsifiées de quelques-unes de ses propositions; le parlement hésite avant de confirmer cette sentence, et le roi attirant la cause à lui, le fait relâcher, nov. 1526. Erasme lui écrivait de se modérer, de se foire donner une ambassade royale qui lui permit de s'éloigner, de ne pas se fier davantage à la protection du roi, de « laisser bourdonner les frôlons et de se renfermer dans les douceurs de l'étude; » conseils inutiles. Ber-quin resta sur la brèche, traduisant Erasme, Luther et Mélanchthon. Une image de la vierge ayant été mutilée dans un des carrefours de Paris, les sorbonnistes s'emparèrent de l'incident pour émouvoir le peuple, le parlement et le roi. Quoique Berquin n'y fût pour rien, on affecta de voir en lui le chef des hérétiques et des briseurs d'images. Douze juges commissaires, délégués par le parlement, le condamnèrent à être étranglé, puis brûlé sur la place de Grève. Il ne s'attendait pas à une sentence aussi rigoureuse, mais il n'en parut point ému, refusa toute rétractation et se rendit au supplice avec une entière et chrétienne sérénité. Sa voix fat étouffée sur l'échafaud par les clameurs d'hommes apostés par les moines. Le religieux qui l'accompagnait tâcha de faire croire qu'en mourant Berquin avait reconnu son erreur. BERRUYER, Joseph-Isaac, né à Rouen 1681, t à Paris 1758, jésuite, élève du paradoxal Har-douin; auteur d'une Hist. du peuple de Dieu, qui parut en 3 fois, 1728, 1753 et 1758, et qui reproduit en les paraphrasant de la manière la plus frivole, et parfois la plus licencieuse les principaux événements racontés dans J'Écri-ture. Ce livre, surtout la partie, obtint un succès de scandale, digne du 18^ siècle. Il fut blâmé par l'Église et même par les jésuites; plusieurs évêques le condamnèrent, Benoît XIV le mit à l'index, et l'Inquisition, sous Clément XIV, condamna deux écrits qui essayaient de le justifier. Il n'en eut pas moins de chauds partisans à une époque où il était de mode d'attaquer le christianisme. Berruyer avait peut-être pour but de discréditer la Bible pour en empêcher la lecture. BERTHIER, Guill.-François, né à Issoudun 1704, f à Bourges 1782, jésuite, successivement professeur à Blois, Rennes, Rouen et Paris, continua l'Hist. de l'Église gallicane, commencée par Longueval 1730, puis par Fontenay et Brumoy, et y ajouta 6 vol. qui vont jusqu'à 1529. Il rédigea depuis 1745 le Journal de Trévoux, dirigé contre l'incrédulité, et eut de vifs démêlés avec Voltaire et les encyclopédistes. Après la suppression de son ordre, il se retira à Offenbourg d'abord, puis à Bourges, où il écrivit une réfutation du Contrat social et diverses œuvres théologiques et spirituelles. En 1762 il avait été nommé garde de la bibliothèq. royale et précepteur de Louis XVI. BERTHOLD 1° abbé d'un couvent de la Basse-Saxe, appelé comme missionnaire en Li-vonie, homme dévoué et résolu, mais trop belliqueux, organise une espèce de croisade pour la conversion des Lives, remporte sur eux une victoire; mais est tué dans la bataille, 1198. 2° Archev. de Mayence, 1485-1504, comte de Henneberg, exerça une grande influence dans l'empire, et s'occupa avec zèle de rétablir la discipline et l'ordre dans les couvents. 3° Célèbre prédicateur franciscain. Berthold Lechs, né à Ratisbonne vers l'an 1220, enterre le 19 déc. 1272, étudia la théologie sous le pieux frère David, qui en fit son ami et qui, lui ayant reconnu des talents remarquables, l'engagea à se consacrer à la prédication. Il visita comme frère prêcheur l'Allemanie, les Grisons (Pfeffers), Augsbourg, l'Autriche, la Moravie, la Thuringe. Sa parole était puissante; on raconte que pendant qu'il parlait il semblait qu'il eût sur le front des couronnes resplendissantes; ses auditoires étaient immenses; la statistique du temps parie de 60, de 100, même de 200 mille auditeurs. Quelques-uns de ses sermons, qui ont été conservés, publiés par Kling en 1824, puis par Stolz, et plus complètement par Gœbel, d'après les mss. de la biblioth. de Hei-delberg, se font remarquer par une grande simplicité pratique, par leur onction, l'amour de Dieu et des âmes, la pureté de la doctrine et de fréquents appels à la conversion. 4o Berthold de Rohrbach, prédicateur laïque du 14m<5 siècle, prétendait avoir reçu de Dieu des révélations particulières. Après avoir été arrêté une première fois à Wtlrzbourg 1356, et s'être rétracté, il tomba une seconde fois entre les mains de l'Inquisition à Spire et fut brûlé; il souffrit courageusement le supplice. C'était un mystique, selon les uns un beghar. selon les autres un ami des vaudois. U prêchait contre les abus et la corruption de l'Église, et disait qu'un laïque pieux peut faire plus de bien qu'un prêtre qui n'a pas l'esprit de Dieu. 4° Un des fondateurs de l'ordre des carmélites, q. v. 6° Berthold Pirsbinger, né à Salzbourg 1465, év. de Chiemsee sur l'Isar 1508, s'occupa sérieusement de la réformation de l'Église. On lui attribue le Onus eccleêiœ, la charge de l'Église, 8 qui parut à Landshut 1521, et qui par la vigueur avec laquelle il dénon;a la corruption de TÉglise et la nécessité de la réformer dans son chef et dans ses membres, produisit une grande sensation parmi les catholiques et parmi les protestants. Il résigna 1525 ses fonctions épis-copales, peut-être à cause du bruit que son livre avait fait et se retira dans la solitude où il se consacra à l'étude. Il écrivit entre autres une Théologie allemande, qui parut à Munich 1528, mais qui était plutôt un recul. En présence de la Réforme commencée, craignant d'être compromis, il rétracta quelques-unes de ses anciennes thèses et parla durement des évangéli-ques. f 19 juillet 1543 à Saalfelden. Son Onu* a été réimprimé, mais falsifié 1620; Gerhard en a rétabli le vrai texte dans sa Confessio catho-lica. Longtemps oublié, Berthold a été comme exhumé vers 1850 pour les besoins de la controverse. BERTI, Jean-Lorenzo, né 1696 à Saravezzo, Toscane, f à Pise 1765, ermite de l'ordre des petits-augustins, puis professeur de dogmatique, auteur d'une Théologie historique, dogmatique et scolastique, 10 vol. fo, Rome 1739-47, Munich 1749; abrégé, Bamberg 1770. Il fut assez disciple de saint Augustin pour avoir dû se disculper à plusieurs reprises d'être janséniste. BERTRAM, v. Ratram. BÉRLILLE. Pierre (de), né 1575 au château de Sérilly, près Troyes, fondateur de l'ordre des carmélites et de la congrégation de l'Oratoire. jouit de la confiance de Louis XIII et de la reine-mère, fut chargé de plusieurs missions importantes, sollicita à Rome la dispense pour le mariage d'Henriette de France avec le prince de Galles, fut nommé cardinal 1627, et f subitement 1629 en célébrant la messe. Homme éclairé, il encouragea Descartes, et favorisa la publication de la Bible polyglotte de Lejay. Ses œuvres ont été publ. par le père Bourgoing, 1644. BÉRYLLE, év. de Bostra, Arabie, vers 240; gouverna son égl. avec autant de zèle que de talent. Il pencha un moment vers le sabellia-nisme, disant que J.-G. n'existait pas avant l'incarnation; mais Origène le ramena à la foi 244. BESOLD, Christophe, né à Tubingue 1577, prof, de droit, étudia aussi la théol. et l'hébreu. Il connaissait 8 langues. Après la bataille de NOrdlingen 1634, quand la cause évangélique paraissait perdue, il abjura publiquement le protestantisme, qu'il avait déjà abjuré en secret le 12 août 1630, et il mit au service de la Bavière et de l'Autriche toute sa science et son intelligence, pour revendiquer en faveur de ces pays les biens des couvents wurtembergeois sécularisés à l'époque de la réformation. Son retour au catholicisme, très exploité, trouva peu d'imitateurs. Il fut récompensé de sa défection par une place de professeur à Ingolstadt, et il venait d'être appelé par le pape en cette même qualité à Bologne, avec un traitement de 4000 ducats, lorsqu'il f le 15 sept. 1633. * Il est pourtant dur de mourir, » dit-il en sentant sa fin prochaine. BESSARION, Jean, né 1395 à Trébizonde, de parents pauvres, étudia à Constantinople, puis dans le Péloponèse, entra 1423 dans l'ordre de saint Basile où il quitta son nom grec pour celui de l'anachorète égyptien dont il a écrit la légende. Nommé archev. de Nicée 1437 par l'emp. Jean VII Paléologue, qui ne voyait plus contre les Turcs d'autre remède qu'une alliance étroite avec l'Occident et qui désirait à cause de cela la réunion des deux Églises, il accompagna son souverain en Italie avec quelques autres savants théologiens de son pays. L'union fut prononcée au concile de Florence, grâce à l'esprit conciliant de Bessarion, qui reçut d'Eugène IV pour sa récompense le chapeau de cardinal. Mais celte union factice n'eut d'autre résultat que d'aliéner à l'empereur la sympathie de son peuple et de compliquer par des dissensions intestines l'état déjà critique de l'empire. Bessarion resta dès lors en Italie où, par son goût et ses connaissances variées, il devint le centre de ceux qui cultivaient les lettres, et l'un des précurseurs de la Renaissance. 11 fut deux fois sur le point d'être nommé pape; la jalousie de l'év. d'Avignon le fit seule échouer. Il ne cessa d'ailleurs de travailler au bien de son pays, soit à Mantoue et en Allemagne en essayant d'organiser une croisade contre les Turcs, soit en acceptant le titre de patriarche de Constantinople qui lui paraissait devoir étendre sa bienfaisante influence sur son ancienne patrie. Chargé de plusieurs missions importantes, il réussit dans presque toutes et revint comblé d'honneurs. Mais il échoua dans sa tentative pour réconcilier Louis XJ avec le duc de Bourgogne; il en conçut un tel déplaisir qu'il f à son retour, en passant à Ravenne, 19 nov. 1472. II légua à Venise sa bibliothèque, l'une des plus riches de l'Europe. Son mausolée est à Rome dans l'église des Saints-Apôtres. Ses écrits, qui sont nombreux, n'ont pas encore tous été publiés; on ne possède encore, en latin, que son livre: Contre le calomniateur de Platon, ses Discours en faveur d'une croisade contre les Turcs, une trad. du Socrate de Xéno-phon, et une trad. de la Métaphysique d'Aristote. Il avait travaillé à réveiller en Italie le goût pour la philos, de Platon. Sa position, ses talents, son caractère font de Bessarion le lift» naturel entre l'Orient et l'Occident, comme entre le moyen âge et le monde moderne. RESSEL, une des gloires de l'ordre des bénédictins , savant, de manières agréables et d'une éloquence insinuante; né 5 sept. 1662 à Buchheim, il entra au couvent 1692, prononça ses vœux en 1693, fut reçu docteur en théol. à Vienne 1696, et f 1749, trois ans après avoir célébré le jubilé de son professorat. Il est connu surtout comme ayant décidé l'abjuration du duc Antoine-Ulrich de Brunswick, 10 janv. 1710. Auteur de plusieurs ouvrages d'Hist. eeclésias-tiq. et de controverse. BETHLÉHÉMITES, moines anglais du 13** siècle, peu importants. Ceux d'Amérique, du même nom, sont une confrérie de franciscains, fondée surtout en vue du soin des malades et de l'éducation de l'enfance, par Pierre de Béthen-court vers 1660. Innocent XI 1687, et Clément XI 1707, reconnurent cette congrégation et lui assurèrent des privilèges; elle compte auj. 40 maisons, presque toutes dans les îles Canaries; le général et la maison-mère sont à Guatimala. Une branche féminine s'est formée aussi sous le patronage de Marie-Anne del Galdo. BETKINS, Joachim, né à Berlin 1601, pasteur à Linnen où il resta 30 ans, f 1663. Son histoire est importante surtout au point de vue du piétisrne, dont il fut une des manifestations les plus énergiques et les plus décidées. Elle sert aussi à faire connaître l'état des esprits pendant et après la guerre de 30 ans. Il appelait la chrétienté un anti-christianisme, parce que tout était anti-chrétien, et il en rejetait la responsabilité sur le clergé, qui prêchait la justification comme s'il n'y avait pas de sanctification. Ses écrits sont pleins de fougue et d'originalité; il faut nommer surtout, malheureusement en latin, 1° Christianismus ethnicus, Berlin 1633; 2° le Mystère de la croix 1637; 3° le Sacerdoce, ou la Sacrificature royale du N. T. comparée à l'absence actuelle du vrai Sacerdoce, 1640; 4<> la Mesure vraie du Christianisme et du pastoral en Allemagne; 5° l'Anti-christianisme; 6® Irenicum, ou le Courage de la paix, exhortation aux chrétiens à l'occasion de la guerre des Turcs; 7° la Participation des chrétiens aux souffrances de Christ leur chef; 8° La perte de l'Allemagne, Excidium Germaniœ, publ. après sa mort, 1666, par Breckling qui s'appelle son fils spirituel. BEVERIDGE, Guill., né 1638 à Barrow, Lei-cester, f 5 mars 1708, comme év. de Saint-Asaph. distingué par sa science et par sa piété; auteur de plusieurs livres d'hist. ecclésiastique, de chronologie et de droit canon. BÈZE (Théodore de), ou plutôt Besze, né 24 juin 1519 à Vézelay, Nivernais, d'une famille riche et considérée; son père était bailli. Un de ses oncles, conseiller au parlement de Paris, se chargea de son avenir, le prit auprès de lui, lui donna pour maître Melchior Wolmar, qu'il suivit à Orléans, puis à Bourges, mais que son père ne lui permit pas de suivre quand il fut appelé en Allemagne 1535. Il fit son droit à Orléans, prit son grade de licencié à Paris 1539, et obtint bientôt par la protection d'un autre oncle, l'abbé de Froidmont, le prieuré de Long-jumeau et un autre bénéfice. Tout en étudiant les Pandectes, il lisait Catulle et Ovide; il alla jusqu'à tenter de les imiter et ses essais ne tardèrent pas à lui faire une réputation. Il cultiva la poésie légère, dans un temps où elle était à la mode et où des reines même ne reculaient pas devant une littérature hazardée et licencieuse. Ses ennemis lui reprochèrent plus tard ces péchés de jeunesse, Juvenilia, et voulurent en tirer des conclusions contre la pureté de ses mœurs; ils exploitèrent entre autres une Dubia et une Candidu qu'il a chantées, mais qui n'ont jamais existé, ainsi qu'une charmante pièce la-line préconisant la supériorité de l'amitié sur l'amour, où ces pudiques censeurs crurent trouver l'éloge des crimes de Sodome. Sans nier qu'un jeune homme riche, beau, spirituel, abandonné à lui-même sur le pavé de Paris, ait pu se laisser entraîner au libertinage, on peut dire que rien ne le prouve, attendu que les assertions du p. Maimbourg ne sont pas des preuves, et que Bèze repousse avec toute l'énergie d'une âme honnête ces ignobles accusations. Le seul fait à sa charge et que l'on a dénaturé, c'est le prétendu enlèvement de la femme d'un tailleur nommé Claude, qu'il aurait séduite et épousée à Genève du vivant de son mari. Or voici l'histoire vraie. Violemment épris d'une jeune fille d'une condition inférieure, mais chaste et vertueuse, Claudine Denosse, il la décida à un mariage de conscience, s'engageant à ne jamais prendre les ordres, ce qui compromettait ses bénéfices, et à légitimer leur union dès que ce serait possible. C'était en 1544, il avait 25 ans. Il recula longtemps, mais en 1548 pendant une maladie dangereuse, il se rappela les leçons de Wolmar, sa piété se ranima et il résolut de vivre à l'avenir selon les préceptes de l'Évangile. C'était se condamner à l'exil, mais il n'hésita pas. Abandonnant ses bénéfices et sa fortune particulière, il partit avec sa femme pour Genève où ils arrivèrent le 24 oct. 1548. Après avoir fait légaliser son mariage, il s'occupa de se procurer des moyens d'existence. Il pensa d'abord à monter une imprimerie avec Crespin, mais à la suite d'un voyage à Tubin-gue auprès de son ami Wolmar, il accepta une place de prof, de grec dans la nouvelle académie de Lausanne, et se trouva par là en relations ordinaires avec Viret, Merlin, Hotman, Mathurin Cordier. Il se mit aussi à foire des lectures sur le N. T. pour l'instruction des réfugiés qui affluaient de France, et à publier des écrits de théologie, de controverse et d'édification. Mais dès 1557 il fut appelé à intervenir autrement que par la plume ou par la parole dans la grande guerre de l'époque. Il dut se rendre avec Farel auprès des cantons évangéli-ques et des princes protestants de l'Allemagne, pour plaider la cause des vaudois persécutés. Il refit encore deux fois le même voyage pour demander l'intervention des princes en faveur des prisonniers protestants de Paris. Dans un de ces voyages il avait fait à Worms la connaissance de Mélanchthon, et il s'était engagé vis-à-vis de quelques docteurs luthériens, quant à ia Cène, dans un système de concessions qui lui fut vivement reproché. De retour à Lausanne il eut à intervenir dans le débat soulevé contre Viret par l'État de Berne; il prit parti pour le réformateur, et pour éviter une destitution il donna sa démission et vint à Genève, où Calvin l'attirait 1548. Il fut d'abord nommé bourgeois, puis pasteur, professeur et enfin recteur de l'académie naissante. En 1560 il dut se rendre auprès de l'électeur palatin, pour l'intéresser au sort du malheureux Dubourg, puis immédiatement après à Nérac, à la demande de Condé, pour tâcher de rattacher le roi de Navarre au parti protestant. En 1561 il assiste au Colloque de Poissy, dont il est le principal orateur, et sur les instances de la reine de Navarre, il prolonge de 3 à 4 mois son séjour à Paris, mais sans que la conciliation des deux Églises fasse aucun progrès. Il y est encore quand a lieu le 1er mars 1562 le massacre de Vassy; il est délégué avec Francour à Monceaux où étaient les princes; assez bien reçu par la reine, il l'est très mal par le roi de Navarre qui lui dit que tout c?la est de la faute des protestants, et que lui-même, Bèze, mériterait d'être pendu. Ce fut la guerre. Condé se mit à la tête des protestants; Bèze lui servit de chancelier à Meaux et à Orléans, parcourut les bords de la Loire pour secouer les tièdes, revint à Paris pour le 3e synode national, partit pour l'Allemagne et les cantons suisses afin de justifier la prise d'armes des protestants, passa à Genève au mois de septembre, mais en repartit bientôt comme aumônier de l'armée huguenote, assista à la bataille de Dreux et ne rentra à Genève qu'après la paix. Calvin étant mort, il fut nommé à sa place modérateur de la Vén. Compagnie des pasteurs, et conserva ces difficiles fonctions jusqu'en 1580, cumulant ses fonctions pastorales avec celles de professeur, recevant les réfugiés, correspondant avec toutes les Églises, intervenant dans les luttes théologiques, multipliant ses écrits de toute nature. Il avait à peine 45 ans. En 1571, sur la demande de Coligny, il assista au synode de La Rochelle, dont il fut élu président; puis à Nimes à un nouveau synode national, et à peine de retour à Genève il vil accourir en foule les victimes de la Saint-Barthélémy et dut aviser à les recevoir, les loger, les nourrir et les consoler. Le 21 mars 1586 il était à Montbéliard, appelé par le prince Frédéric pour tenter un rapprochement entre les deux Eglises protestantes, et si les discussions n'aboutirent pas, Bèze eut du moins, grâce à son esprit de conciliation, la joie de voir avant son départ les luthériens et les réformés prendre la Cène en commun. Il fit encore beaucoup d'autres voyages, en Bourgogne dans l'intérêt de ses neveux, à Strasbourg pour s'entendre avec Henri de Condé, en Allemagne pour faire comprendre aux princes la solidarité qui liait leurs intérêts à ceux des réformés français; à Berne pour faire prévaloir des idées de paix et d'union 1588. Mais les affaires, à Genève, n'allaient pas; le trésor était à sec, l'académie menaçait ruine. Bèze se chargea de tous les cours pendant 2 ans, sans négliger ses autres devoirs, malgré son âge et les vertiges dont il souffrait. Il quitta l'enseignement en 1600, à l'âge de 81 ans, fit encore une visite à Henri IV à l'Eluiset, Savoie; il eut le bonheur de célébrer la journée de l'Escalade, 12 déc. 1602, et f le 13 oct. 1605. Sa femme étant morte de la peste en 1588, après 40 ans d'une heureuse union, ses amis le décidèrent à se remarier avec Catherine del Piano, veuve d'un Génois. Il ne laissait pas d'enfants. Il fut enterré non à Plainpa-lais, mais dans le cloître de Saint-Pierre, par crainte des Savoyards qui avaient menacé de l'exhumer et d'envoyer son corps à Rome. — Quand on pense à la richesse de cette vie si agitée, si remplie d'occupations de tous genres, missions diplomatiques, enseignement, prédications, voyages, conférences, on se demande comment un seul homme a pu suffire à tant de travaux; mais l'étonnement augmente quand on ajoute à ces preuves d'une activité extérieure prodigieuse tout ce qu'il a fait encore comme homme de cabinet, les volumes nombreux et considérables qu'il a composés La liste seule ne prend pas moins de 20 colonnes dans Haag, et nous ne la reproduirons pas; mentionnons seulement ses Poèmes, odes, sylves, épigram-mes, élégies, etc.; sa tragédie d'Abraham sacrifiant; sa comédie du Pape malade; son édition du N. T. grec, revue d'après de nombreux mss. originaux (entre autres le fameux codex qui porte son nom et qu'il donna à l'université de Cambridge), ses trad. du N. T. en latin et en français; ses Notes ou Comment, sur le N. T. (folio, 6 éditions de son vivant); ses écrits sur la Cène, ses essais de Confessions de foi, sa trad. des Psaumes, ses Discours ou Harangues prononcées en divers lieux; ses traités contre Castalion, Baudouin, Brentius, Gentilis, Xain-tes, Andreâ, etc.; sa Vie de Calvin, son Hist. des égl. réf. de France; divers comment, sur l'A. T., et une quantité innombrable de lettres, dont les unes sont conservées à Genève (3 ou 4 vol.), d'autres à Berne, Saint-Gall, Paris, et dans une foule d'autres biblioth. publiques et particulières. M. Baum, dans son Thêod. de Bèze, a reproduit un choix fort bien fait et assez complet des principales brochures, d'ailleurs presque introuvables, de ce riche et fécond écrivain; plusieurs auraient suffi à faire une réputation. Le caractère satyrique, et même sarcastique, de quelques-uns de ses écrits s'est adouci avec l'âge, mais rien ne dépasse les limites de ce que se permettaient les controversistes d'alors. Quant à sa trad. des Psaumes, v. Marot. — Si Bèze a soutenu le droit de l'État d'intervenir dans les questions d'hérésie, c'est une inconséquence qu'il a partagée avec tous les hommes de son temps; il n'avait pas encore entièrement rompu avec toutes les traditions romaines. BIBERÀCH, Nicolas (de), témoin inconnu de la vérité; vécut dans la 2« moitié du 13me siècle, visita Rome et séjourna quelque temps à Erfurt. Il a écrit dans un mélange de vers et de prose contre la corruption du clergé (De aver-tendomato, et: Occultus), mais rien contre les erreurs de l'Église. BIBIANA, sainte, martyre à Rome sous Julien. Le préfet Apropianus ayant perdu un œil l'attribua aux sortilèges des chrétiens et les persécuta cruellement; il tomba surtout sur la famille du chevalier Flavien dont tous les membres furent mis à mort; Bibiana, attachée à un poteau, fut tuée lentement à coups de verges. Une église fut érigée au 5®e siècle sur son tombeau, près la porte Saint-Laurent; Urbain VIII la fit restaurer 4625 par Bernini; la statue de la sainte passe pour le chef-d'œuvre de ce maître. BIBLIANDER (l'homme du livre), Théodore, né à Bischofzell, Thurgovie, vers 1505, collègue de Myconius à Zurich, puis successeur de Zwingle comme professeur de l'A. T.; très versé dans l'hébreu et dans les langues sémitiques, ce qui lui amena de nombreux élèves, entre autres Bullinger. Il combattit les doctrines calvinistes sur la prédestination, et attaqua Pierre-Martyr avec une aigreur si passionnée 1356, qu'il s'aliéna les esprits et reçut sa démission 1560. f de la peste 26 nov. 1564. BïCKELL, Jean-Guill., né 2 nov. 1799 à Marbourg, prof, de droit en 1826, juge et président de la cour d'appel à Cassel, ministre de la justice en 1846, et l'un des soutiens les plus décidés du ministère Hassenpflug. f 1848. Conservateur en politique, il prit une part active aux luttes ecclés. de la Hesse, demanda le régime synodal et combattit le rationalisme. Auteur d'une Hist. du droit ecclésiastique. BIDDLE, ou Bidelle. premier chef d*s unitaires anglais, né 1615 à Watton. écrivit 1647 douze arguments contre la déité du Saint-Esprit, se rétracta, puis recommença ses attaques contre la Trinité, en s'appuyant de témoignages des Pères, fut condamné à la prison par la cour presbytérienne de Westminster, fut relâché 1651, publia de nouveau 2 catéchismes hétérodoxes qui furent brûlés par la main du bourreau, et lui-même enfermé par ordre de Cromwell dans une des Sorlingues. De retour à Londres il reprit ses petites réunions, mais la Restauration le renvoya en prison 1662, où il mourut dans le courant de l'année. Sa moralité était irréprochable. Il admettait la personnalité, mais non la divinité du Saint-Esprit. BIEL, Gabriel, né à Spire, f P*ss» pour le dernier des scolastiques; il étudia à Er-furt 1442, fut prédicateur à Mayence. concourut à la fondation de l'université de Tubingue 1477, fit un voyage à Rome, et après avoir enseigné quelques années la philos, et la théologie à Tubingue, obtint d'Eberhard un canonicat dans le nouveau couvent de Saint-Pierre à SchSnauerwald où il mourut. Il approuvait les décrets du conc. de Bâle, mettait les conciles au-dessus du pape, condamnait la corruption de l'Église, et prétendait que c'est Dieu, et non le prêtre, qui donne l'absolution. Dailleurs très catholique, comme le prouvent ses Sermons et son Exposition du canon de la sainte messe. BILLICAN, Théobald. dont le vrai nom était Gerlach, né à Billigheim, près Landau, à la fin du 15m® siècle; reçu bachelier à Heidelberg 1512, se convertit k la réforme après le congrès du 26 avril 1518, présidé à Heidelberg par Luther. Il se maria et l'université lui refusa le titre de docteur; il prêcha contre le purgatoire et sur Christ seul médiateur et il dut quitter la ville. Après une douzaine d'années passées à Nôrdlingen, qu'il amena à la foi évangélique, il se décida 1535 à retourner à Heidelberg, où il y avait un milieu intellectuel plus approprié à ses besoins. L'université ne le vit pas revenir avec plaisir, et des démarches furent faites pour le forcer à s'éloigner, mais le prince s'y refusa en alléguant que Billican ne revenait pas comme théologien, mais comme juriste. Il donna en effet des cours sur les Décrétales et le Droit féodal, mais ne fut pas reconnu comme prof, régulier. Le nouveau duc, Frédéric II, lui fut encore moins favorable. Après quelques mois de prison, sans jugement, 1544, il fut relâché, et finit ses jours à Marbourg comme prof, de rhétorique, f 8 août 1554. Il a laissé des travaux sur Michée, Aris-tote et la Communion sous les deux espèces. Il était très luthérien. BINGHAM, Joseph, né 1668 à Wakefield, élève d'Oxford, bachelier 1687, maître ès arts 1690, pasteur d'abord près de Winchester, puis 1712 à Havart, près Portsmouth, où il f 1723. Il est connu par 2 vol. de Sermons et par ses Origines ecclés. ou Antiquités de l'Égl. .chrétienne 1708-1722; la 2e éd. 1724 forme 2 v. R Cet ouvrage, d'une grande valeur pour le temps, fut bientôt traduit en plusieurs langues. 11 conduit le lecteur jusqu'à lafde Grégoire-le-Grand. BLAARER, Ambroise, d'une famille patricienne, né 12 avril 1492 à Constance. Plac£ de bonne heure en Souabe dans un couvent de bénédictins, il se rendit ensuite à Tubingue où il se lia avec Mélanchthon et fit de bonnes études classiques. De retour au couvent 1515 il fut nommé prieur et prédicateur. Il essaya d'introduire dans le culte la lecture de la Bible; mais cela déplut à l'abbé, et le 8 juin 1521 il dut quitter le couvent et retourna à Constance. Il ne parait pas être intervenu activement dans les premiers essais de réforme, mais déjà en 1524, à la demande du Conseil, il prêche contre le culte de Marie et il est nommé pasteur. Sa tendance était modérée; à plus d'une reprise il intervint comme conciliateur entre Luther et les théologiens suisses à propos de la Cène, des images, des autels et des orgues. Il se maria en 1533 et fut appelé l'année suivante comme pré-dicateui à Stutlgard, après avoir fait adopter le 2 août 1534 une formule de concorde, qui satisfaisait également les Suisses et les luthériens et qui introduisit en Wurtemberg une Église unie plus de 2 siècles avant que la Prusse en fût dotée. Il s'établit ensuite à Tubingue d'où il rayonna dans la partie méridionale du pays. Les difficultés qu'il rencontra de la part des catholiques, et surtout de la part des luthériens stricts, l'entravant dans son œuvre, il retourna 1538 à Constance, où l'attiraient un frère et une sœur bien-aimés. Il avait servi le Wurtemberg 4 ans sans rien recevoir; à bout de ressources, ayant sacrifié tout son patrimoine, il fut obligé à cause de sa famille de demander un modeste traitement, et le Conseil lui alloua 75 livres. Il evangélisa le sud de la Bavière, de Lindau à Augsbourg, prit part à de nombreuses conférences, se rendit en 1548 à Winterthour, prêcha à Bienne et en Thurgovie de 1551-1559, et revint à Winterthour où, après avoir refusé de bonnes positions à Bâle, Berne et Gemmingen, il f le 6 déc. 1564. Il a composé en vers et en prose plusieurs petits ouvrages d'édification, de controverse et d'actualités. C'était un homme de cœur, un penseur et un excellent prédicateur; il s'attachait plus à l'essentiel qu'aux choses secondaires. BLAIR, Hugh, célèbre prédicateur, profess. d'éloquence sacrée et de rhétorique. Né 2 avril 1718 à Édimbourg, membre de l'église presbytérienne, il fut après un court ministère dans le comté de Fife, rappelé dans sa ville natale où il fut successivement pasteur à Canon-gate, dans la Cité, et enfin de 1758-1800, à la cathédrale. En 1757 il avait aussi été nommé docteur, et en 1762 prof, d'éloquence et de belles-lettres, fonctions qu'il conserva jusqu'en 1783. Ses 5 vol. de Sermons, publiés à Londres 1777 sont très bien travaillés, de vrais morceaux de rhétorique, mais froids, et l'on n'y sent pas le christianisme vivant; ils obtinrent un immense succès, et furent trad. en allemand, français, hollandais, italien et slavon. Ses Lectures sur la rhétorique et les belles-lettres, 3 vol. 8°, sont pleines d'observations fines sur la véritable éloquence; il blâme sévèrement l'usage anglais de lire les sermons. Il avait aussi publié en 1763 une Dissert. crit. sur les poèmes d'Ossian. BLAISE, saint, év. de Sébaste en Arménie, martyr sous Dioclétien 316. Par ses prières, il sauva un enfant qui avait une arête dans le cou, et dès lors, le jour de sa fête, 3 févr., les catholiques font des cérémonies qui doivent les préserver des maux de gorge. Comma le martyr fut déchiré avec des peignes de fer, les cardeurs. l'ont pris pour leur patron. BLANDINE, vierge martyre à Lyon, sous Marc-Aurèle 177. Après avoir été torturée un jour entier par des bourreaux qui s'en fatiguèrent, elle fut exposée aux bêtes féroces, mais celles-ci, plus humaines, l'épargnèrent. Au bout de quelques jours elle fut ramenée dans le cirque, assista au supplice de ses frères dans la foi, fut de nouveau fouettée de verges, puis assise sur la chaise ardente et enfin livrée aux taureaux de l'arène qui mirent un terme à ses souffrances en la lançant en l'air avec leurs cornes. Les païens eux-mêmes avouèrent n'avoir jamais vu une femme subir tant de cruautés avec autant de constance. BLANDRATA, Georges, ital. Biandrata; né 1515 d'une famille noble de Saluces, qui avait toujours marqué parmi les adversaires de l'Égl. de Rome. Il étudia la médecine, mais bientôt devenu suspect de protestantisme, il s'enfuit en Pologne, puis vint à Genève où il eut avec Calvin pendant plusieurs années des entretiens, qui ne réussirent pas à dissiper ses doutes sur la Trinité. Calvin, fatigué d'un scepticisme qui ne lui paraissait pas sérieux, cessa de le voir. Biandrata se rendit à Zurich auprès de Vermi-gli, mais sans plus de succès. Il se décida enfin à retourner en Pologne 1558, où il trouva, outre la clientèle du roi Étienne Bathori, des amis partisans de ses doutes et de ses idées religieuses. Mais toujours poursuivi par Calvin et par les théologiens suisses, il renonça à la lutte, se retira en Transylvanie 1563 auprès de Jean Si-gimond, fut accusé, probablement à tort, d'avoir favorisé l'établissement des jésuites dans le pays, et f vers 1590, étouffé dans son lit, dit-on, par un neveu qui convoitait son héritage. BLAS1E (Sainte-), célèbre abbaye de bénédictins dans la Forêt-Noire, fondée au 8"" siècle sur les bords de l'Âlbe et sous le patronage du couvent de Rheinau, qui lui fit don d'abord des os de saint Biaise, mais qui se les fit restituer plus tard, sauf un bras. Enrichie par le comte Régimbert de Seldenburen, elle devint indépendante, eut son propre abbé 945 et se construisit un couvent 948. Sa prospérité ne cessa d'aller croissant; son abbé était prince de l'empire en 1746. Après la paix de Presbourg, l'abbaye fut sécularisée et donnée au duché de Bade. Elle a toujours eu un renom scientifique, mais plus histoire qu'en théologie. Plusieurs de ses tûoines sont devenus célèbres, Herrgott, Chuno, Ekhhorn, Neutgart, etc. BLASTARÈS, prêtre, puis moine de l'ordre de saint Basile, auteur vers 1335 d'un Gompen-diam de toutes les lois et règles ecclésiastiques et civiles, rangées par ordre alphabétique des matières sous 303 titres, d'après le recueil de Photius et les Gomment, de Zenaras et Balsa-ffloo. Ce travail répondait à un besoin et fut reço avec reconnaissance par le clergé d'orient. BLEEK, Fréd., 1793-1859. Originaire du Holstein, il étudia à Kiel et à Berlin, fut pri-vat-docent sous Schleiermacher 1818, et prof, de critique sacrée à Bonn depuis 1829. Auteur dune Introd. à l'ép. aux Hébreux, id. à l'A. et auN. T., Essais de critique évangélique, Explication des trois évang. synoptiques, Comment. sttrl'Apocal. Esprit sagace et lucide, il défend les droits de la science, mais n'abandonne pas le terrain de la foi. BLEMMYDÉS, savant grec du 13™ siècle, qui travailla avec ardeur à la réunion des Églises grecque et romaine. Il était moine et prêtre en Macédoine, lorsque l'emp. Ducas Batazès, 1222-1255 convoqua une discussion religieuse à Nicée, résidence des empereurs grecs, pendant que les latins occupaient Constantinople. Blem-mydès y prit part 1233 et défendit avec érudition le dogme latin de la procession du Saint-Esprit. Il fut nommé plus tard patr. honoraire de Constantinople, mais il resta et f dans son coivent. Il a laissé 2 Traités sur la doctrine la-line. BLONDEL, David, né 6avril 1591 à Châlons-sar-Marne, fit de brillantes études et fut rtommé 1614, pasteur à Hou dan, Seiue-et-Oise, où il resta une trentaine d'années, très considéré, quoique sans talents bien remarquables pour la prédication. Il assista, presque toi^jours comme secrétaire, à une vingtaine de synodes provinciaux et à 4 synodes nationaux, refusa en 1631 la place de professeur à Saumur, fut autorisé en 1644 à venir résider à Paris, où il pouvait rendre plus de services à l'Église par ses écrils que par sa prédication; accepta en 1650 la chaire de prof, d'histoire à Amsterdam, vacante par la mort de Vossius, mais perdit bientôt la vue sous la double influence d'un travail excessif et d'un climat trop humide. 11 n'en continua pas moins ses études, dictant puisqu'il ne pouvait plus écrire, et f le 6 avril 1655. Suspecté tour à tour de latitudinarisme, d'universalisme et d'arminianisme, il n'a mérité ces reproches que parce qu'il a blâmé l'aigreur ou la violence des controverses sur ces questions. L'importance de ses travaux historiq. et critiques lui valut du synode de Castres un don de mille francs pour achat de livres; du synode national de Charen-ton 1645 un supplément de traitement de mille francs, et de la cour de France, mais dans In dernière année de sa vie, une pension de 3000 livres, dont il jouit peu. Ses ouvrages, qui sont en général lourdement écrits, les phrases incidentes s'enchevêtrant les unes dans les autres, sont en revanche appréciés pour leur excellenle •méthode, la sûreté des renseignements, la profondeur de la science, la clarté de la critique et l'impartialité des jugements. Il y en a une vingtaine, d'étendue et de valeur diverses. Le premier fut une Modeste déclaration de la sincérité et vérité des égl. réf. de Fr. Sedan 1619, 8° en réponse à l'év. de Luçon, qui fut depuis Richelieu. Vint ensuite, Genève 1628, 4°, son Pseudo-Isidorus, où il démontre contre le jésuite Torrès, d'Espagne, l'imposture des Fausses décrétâtes. Son traité folio, Genève 1641, De la primauté en l'Église, est une réfutation magistrale du liv® du cardinal Du Perron 1620, revendiquant contre Jaques 1er d'Angleterre la suprématie absolue du pape. En 1646 il prouve dans son Apologie, que les mots de prêtre et d'évêque désignaient à l'origine les mêmes fonctions. Mentionnons encore son Familier éclaircissement, dans lequel il combat l'un des premiers, l'histoire de la papesse Jeanne, Amst. 1647-1649-1657, souvent réimpr. et trad., combattu par Coignard, Des Marets et Spanheim, approuvé par Charnier et Du Moulin, et accueilli avec joie par les catholiques; son livre contre les oracles Des Sibylles: son Convnoni -torium en faveur de la liberté de conscience, et ses Généalogies de France, en latin, 2 vol. contre Chifflet, sur les généalogies des rois de France; c'est pour ce livre, composé lorsqu'il était déjà aveugle, que la cour lui aurait faitune pension de 3000 livres. Il a publié aussi un recueil des Actes authentiq. des égl. réf. de France, Germanie, etc. Amst. 1655, in-4<> et un certain nombre de dissertations sur des points particuliers. — L'aîné de ses frères, Moïse, fut pasteur à Meaux, puis à Londres; le second, Aaron, à Etaples et & Imécourt. — Un autre Blondel, né à Paris 1665, f ^ Londres 4 oct. 1734, médecin distingué, ne paraît pas avoir appartenu à la même famille. BLOUNT, Charles, déiste anglais, qui fit grand bruit et obtint un succès de scandale par quelques-uns de ses écrits. Né 1654; se suicida 1693, parce que, devenu veuf, il ne put obtenir la main de sa belle-sœur. Ses principaux ouvrages sont: Anima mundi, traitant de l'état des âmes après la mort, 1679; la Vie d'Apollonius de Thyanes, avec notes, 1680; Origine de l'idolâtrie 1680; la Religion des laïques 1683; les Oracles de la raison, et le Manuel des Déistes, posthumes. BLUMHARDT i<> Chrétien-Gottlieb, né 1779 k Stuttgard; il eut une enfance et une jeunesse matériellement difficiles, réussit cependant à achever ses études à Tubingue, vint à Bâle 1803 comme secrétaire de la Société chrétienne allemande, concourut 1804 à la fondation de la Soc. biblique; rappelé chez lui en 1807, il fut jusqu'en 1816 pasteur à Burg, mais il revint à Bâle comme directeur de la maison des missions, qui venait de se fonder et il sut leur donner une énergique et bonne impulsion, réveillant en même temps dans toute l'Allemagne l'intérêt missionnaire, et multipliant les sociétés auxiliaires. Il établit des rapports réguliers avec la Church Missionary Society de Londres, qui se chargea des élèves formés à Bâle, et il décida son Comité à se créer aussi une mission indépendante, en Russie d'abord et dans le Caucase. Mais les missionnaires ayant été bannis en 1836, elle tourna son activité vers les Indes orientales et vers la côte occidental^ d'Afrique, f 19 déc. 1838. On lui doit le Magasin des Missions, revue trimestrielle très bien rédigée et une Hist. génér. des missions, dont la trad. franç. mieux ordonnée, a pour titre Hist. de l'établissement du christianisme, etc. 4 vol. Genève 1838. 2o Jean-Christophe, né 1805 à Stuttgard, fils d'un boulanger, maître à la maison des missions de Bâle, puis pasteur à Môttlingen, près Calw. En 1852 il acheta les bains de Boll, près de Goppingen, dont il fit un établissement de santé pour le traitement des maladies physiques, mentales et morales par le repos, le régime, la prière et une cure d'âme attentive. Il a obtenu des résultats remarquables et a été pour beaucoup d'âmes le messager du salut, pour beaucoup de malades l'instrument de leur gué-rison. f à Boll, 25 févr. 1880. BOCHART, ou Bouchard, famille de robe, originaire de Bourgogne, mais établie à Paris. 1<> Jean, avocat au Parlement sous François 2° Son fils Etienne, avocat général à la chambre des comptes et conseiller au Parlement, épousa en secondes noces Jaqueline Luillier, dont il eut 7 enfants, entre autres Christophe, avocat, père du pasteur Matthieu, et René, père de Samuel. 3° René, pasteur, d'abord en Angleterre, puis à Dieppe 1590 et depuis 1594 à Rouen, où il fait construire un temple pouvant contenir 7 à 8000 personnes. Il épouse 1595 Ester Du Moulin, sœur de Pierre, dont il a une fille et un fils, le célèbre Samuel, + 1614 après un ministère de 23 ans. 4<> Samuel, né à Rouen 30 mai 1599, fait ses premières études avec son père, puis à Paris, â Sedan, à Saumur; accompagne Caméron à Oxford, se rend à Leyde où il étudie encore la théol. sous André Rivet et les langues orientales sous Erpénius, et rentre en France où il ne tarde pas à être nommé pasteur à Caen. Le jésuite Véron l'ayant provoqué à une discussion publique, Bochart dut accepter et choisit comme assistant son collègue Baillehache (pasteur de Caen 1626-1664). La conférence dura 9 jours, du 22 sept, au 3 oct. 1628, et roula sur tous les points controversés. Véron en ayant publié une relation tronquée, Bochart rétablit les faits dans ses Actes de la Conférence, 1630, 2 vol.. et le jésuite lui ayant répondu par des libelles diffamatoires, le parlement indigné lui imposa silence. Bochart put reprendre en paix ses savantes recherches, et publia 1646 la partie de sa Geographia sacra, le Phaleg, qui traite de la dispersion des peuples à la suite de la confusion des langues; la 2®o, intitulée Chanaan, parut en 1651 et traite surtout des Phéniciens et de leurs colonies. Son enthousiasme pour les langues orientales lui faisant voir de l'hébreu ou du phénicien partout, il se laissa entraîner à des étymoiogies et k des hypothèses chimériques; son livre est aujourd'hui dépassé sous plusieurs rapports et doit être rectifié sous d'autres, mais il était pour le moment un immense progrès et il obtint un succès tel que Christine de Suède, désirant en connaître l'auteur, l'invita à venir à Stockholm. Il fit ce voyage en 1652, avec son élève Huet, le futur évêque d'Avran-ches, mais revint bientôt à Caen pour y reprendre ses modestes fonctions. En 1660 il fut délégué par la Normandie au synode de Loudun. Il faisait partie de l'académie de Caen fondée en 1652; c'est pendant une de ses séances, en dis-cutant avec Huet, qu'il fut frappé d'une attaque d'apoplexie, et f le 16 mai 1667. Sa réputation était immense comme théologien, naturaliste, philologue et géographe. Outre les ouvrages cités, il faut mentionner encore sa Lettre à tf. Morley, chapelain du roi d'Angleterre sur 3 questions controversées, Vendôme 1650; sa Réponse au P. La Barre, jésuite, Genève 1662; son Hierozdcon. suite de monographies sur les divers animaux nommés dans la Bible, vrais ou allégoriques, Londres 1663, 2 vol. f<>: 3 vol. de sermons, publ. après sa mort. Dans la collection de ses œuvres, Leyde 1675, on trouve aussi de curieuses dissertations sur des sujets bibliques, et une Lettre à Segrais, 1663, pour prouver qu'Énée n'est jamais venu en Italie. 5° Matthieu, petit-fils d'Etienne, par Christophe sieur du Ménillet, donc cousin-germain de Samuel; pasteur à Alençon, auteur de plusieurs ouvrages de controverse estimés, f 20 fév. 1662. BOCKHOLD, ou Bockehohn, Jean, plusconnn sous le nom de Jean de Leyde, était originaire de La Haye. Né vers 1510. Après avoir visité l'Angleterre, le Portugal et Lubeck, comme ouvrier tailleur, il s'établit en cette qualité à Leyde, où il se maria et où il ouvrit en outre aux portes de la ville une petite taverne. Il avait bonne façon, chantait bien, faisait des vers, composait au besoin des comédies-bouffes, et donnait de l'entrain au métier. C'était un libre-penseur à la mode de son temps. Il se rendit deux fois en 1533 à Munster, Westphalie, où les anabaptistes enthousiastes de la Hollande s'étaient réfugiés à cause des persécutions: il fit la connaissance de Matthiesen, qui le décida à se joindre! eux comme apôtre. 1534. Il avait alors de 21 à 30 ans. Matthiesen ayant expié par sa mort une folle imprudence commise à Pâques contre l'Église, Bockhold, en vertu d'une prétendue révélation, réclama sa charge, sa succession et sa femme; il établit dans la ville une constitution théocratique avec un conseil de douze anciens, chassa l'év. Waldeck. se fit proclamer prophète et roi, reconnut la polygamie et tous les désordres, plongea Munster dans l'anarchie, et quand, après un siège de 6 mois la ville fut prise par trahison et retomba entre les mains de Waldeck, Jean fut livré au supplice des tenailles rougies 1535, et ne se montra pas dans la torture à la hauteur de ce qu'il avait été dans la victoire. Il est difficile de faire la part exacte de ce qu'il y eut de conviction et d'impasture chez ce fanatique, mais l'imposture semble dominer. BOECE lo Anicius Manlius Torquatus Seve-rmus Bo&tius, né à Rome entre 470 et 475, d'une des familles les plus illustres du pays, étudia à Athènes chez Proclus et cultiva avec succès les lettres et la philos, grecques. Nommé consul vers 508, comme son père l'avait été avant lui, il se montra le digne représentant des grandes traditions romaines. Il fut témoin des événements politiques de l'Italie et y joua même un certain rôle. Théodoric et ses Ostrogoths surent l'apprécier et le consultèrent souvent. Il ne se servit de son influence que pour faire du bien, mais la considération dont il jouissait finit par lui attirer des envieux, et sous prétexte de haute trahison il fut dépouillé de ses charges et honneurs, emprisonné à Pavie et finalement mis à mort au milieu de cruels supplices, 524. Les catholiques, par une singulière méprise, en ont voulu faire un saint et un martyr, croyant que c'était par son orthodoxie qu'il s'était attiré la haine de l'arien Théodoric. Sans nier qu'il ait pu se trouver sous des influences chrétiennes, il est resté païen. La tendance de son esprit le poussa toujours à chercher dans la philosophie une trêve aux maux qui suivent les invasions des barbares. Son ouvrage le plus remarquable est intitulé: De consolatione philosophiœ; nous le possédons encore. Il a traduit aussi quelques ouvrages de Porphyre, d'Aristote. etc. La vieille division des Arts et sciences en Trivium et Quadrivium, si fort à la mode au moyen âge, se réclame de lui. 11 avait quelque tendance au néo-platonisme, quoique du reste il fut plutôt péripatéticien. 2° M. Sébastien, théologien allemand, né 1515 à Guben, f à Halle 1573; recteur à Eisenach 1536, étudia à Wittenberg, et fut successivement pasteur à Mulhouse, puis diacre et surintendant à Halle, où H s'occupa avec soin des écoles et fonda ia biblioth. de Sainte-Marie. Il appartenait avec Chemnitz, au parti strict luthérien, et eut une bonne part dans la conversion de l'archev. Sigismond. Il a écrit un Index de quelques erreurs de Zwingle. BŒHME, Jacob, théosophe chrétien protestant, né 1575 à Altseidenberg, près de Gôrlitz. Silésie. Fils de paysans, il apprit à lire et à écrire, fit un apprentissage de cordonnier, voyagea comme tel jusqu'en 1594, s'établit à Gor-litz, épousa la fille d'un charcutier dont il eut 4 fils, fut banni en mai 1624 à l'instigation du pasteur Richter, se rendit à Dresde où il tomba malade et fut ramené à Gôrlitz, où il f le 17 nov. de la même année. Richter était mort, son successeur refusa de célébrer les funérailles de Bœhme; ce fut un diacre qui s'en chargea, en ayant soin de dire qu'il aurait mieux aimé faire 5 lieues que d'avoir à présider à ce service funèbre. — Bœhme rechercha de bonne heure la vie en Dieu, et sa piété, intime mais pleine de • force, lui valut souvent les moqueries de ses camarades et les censures de ses maîtres. Les discussions théologiques dont il fut témoin dans ses voyages le poussèrent à la conquête de la vérité. Ce fut la grande affaire de sa vie. Il étudia Paracelse, des astrologues, des mystiques, des chimistes; il se lia avec Balthasar Walter qui venait de passer 6 ans en Orient à la recherche de la sagesse et qui déclara l'avoir enfin trouvée dans l'échope du cordonnier; Walter appelait Bœhme le philotopkus teutonicus. Mais après tout on peut dire que Bœhme n'eut d'autre maitre que la Bible. Sa faculté de s'absorber était si puissante que 4 fois il eut des extases touchant à la vision, qui le transportèrent dans un autre monde. Une première fois ce fut pendant ses voyages: il se vit entouré d'une lumière divine et demeura 7 jours dans cette contemplation céleste. Le seconde fois, en 1600, la même lumière lui apparut et il put lire jusqu'au fond des cœurs et déchiffrer les secrets de la nature. En 1612 et 1619 nouvelles vivions. Il parlait peu, ne s'en glorifiait pas, mais elles déteignaient sur toute sa théologie, si même elles n'en étaient pas le produit, et tous ses livres s'en ressentent. Dans son premier, l'Aurore, il raconte comment il a appris à connaître toutes ces choses, et comment il a été amené à les écrire; il ne voulait pas jeter sur le saint mystère un coup d'œil indiscret; il voulait seulement connaître le cœur de Jésus et s'y cacher entièrement. C'est alors, ajoute-t-il, que les portes se sont ouvertes pour moi, tellement que j'en ai plus vu et appris en un quart d'heure que je n'en eusse appris pendant des années dans les plus hautes écoles de ce monde. » Outre l'Aurore il a écrit dans les 5 dernières années de sa vie: Les trois principes de l'essence divine, la Triple vie de l'homme, Quarante questions sur l'âme (ou Psychologia vera), le Miroir de l'éternité, la Contemplation de Dieu, l'Incarnation de Jésus-Christ, et plus de 20 autres traités ou dissertations sur des sujets de vie intérieure. Il n'a du reste rien publié lui-même; c'est son disciple Abr. de Frankenberg qui a réuni et édité ses œuvres complètes pour la première fois, Amsterd. 1682, 10 vol. Plusieurs de ses écrits ont été trad. en français par Saint-Martin dès 1669. Les idées mystiques.de B. avaient fait de rapides conquêtes, surtout en Hollande et en Angleterre. Un fils de Richter, chose curieuse, s'en fit l'ardent propagateur. Charles 1er, 1646, fit traduire ses œuvres en anglais. Elles trouvèrent aussi de violents adversaires et la discussion en vint un moment à passionner le public, au point qu'à Hambourg en 1690 il y eut des troubles populaires contre trois pasteurs suspects de bœhmisme. Parmi ceux qui lui ont rendu un beau témoignage, malgré quelques réserves, il faut nommer Spe-ner et Fréd. Schlegel. On ferait une longue liste des livres écrits à son sujet dans la plupart des langues de l'Europe. BOGATSKY, Ch.-Henri (de), né d'une famille russe de la Basse-Silésie le 7 sept. 1690; élevé par une mère pieuse qui lui communiqua sa foi en la prière, il apprit jeune encore à cher-cher en Dieu sa force et le bonheur. Son père voulut lui faire embrasser la carrière militaire, niais il ne se sentait pour les armes aucune vacation; il se rendit à Iéna en 1713 pour faire ses études de droit, et dans une courte visite à Halle il eut l'occasion de voir et d'entendre Francke, Freylinghausen et d'autres piétistes, contre lesquels il avait des préventions, mais qui exercèrent sur sa vie une influence décisive. Il résolut d'abandonner le droit et de se consacrer entièrement au service de Dieu; il quitta Iéna, se rendit à Halle 1715 pour y faire sa théologie et comprit toujours mieux ce que c'est que la justification d'après l'Écriture: t Je lisais avec foi la Bible, dit-il, pour y trouver sa pure morale, et j'y trouvai de plus en plus Christ et son doux Évangile. > Mais sa mauvaise santé le contraignit d'abandonner les études, 1718; il retourna en Silésie, et sans brevets ni parchemins exerça pendant le reste de sa vie l'humble et paisible ministère d'un témoignage fidèle rendu en temps et hors de temps, prêchant Christ dans les familles nobles qui le recevaient, le prêchant encore dans ses promenades et dans ses voyages. Il épousa en 1726 sa cousine Eléo-nore de Felss, dont il eut deux fils, mais qui mourut déjà en 1734. Ses fils ayant été placés dans des établissements d'éducation, il accepta en 1740 la charge de pasteur et directeur spirituel à la cour du duc de Saalfeld, et à la mort du duc, 1746, il revint à Halle où le jeune Francke lui offrit l'hospitalité dans la Maison des Orphelins. Il y passa en paix ses 28 dernières années jusqu'à sa f 15 juin 1774, se rendant utile à la maison par son influence et ses cultes domestiques, aux étudiants de l'université par ses conférences et ses conseils, à l'église par ses cantiques et ses ouvrages d'édification. Le Dr Knapp de Halle a publié sa Biographie 1801, et plusieurs de ses livres ont été plusieurs fois réimprimés, entre autres son Trésor pour chaque jour. Son travail le plus considérable, ce sont ses Considérations sur le N. T. 7 vol. 1755-1761. Ses cantiques, fort nombreux, sont plutôt faits pour le culte privé que pour le culte public. BOGOMILES, hérétiques de Bulgarie; v. Cathares. BOGORIS, roi des Bulgares, q. v. BOHÈME. Grande contrée du centre de l'Europe, habitée en partie par des Slaves, ou Tschè-ques. Elle fut évangélisée au 9®* siècle, sous l'influence grecque, par Cyrille et Méthodius, et conserva longtemps le culte en langue vulgaire. Mais à partir de Boleslaw 1er rinfluence romaine se fit sentir, l'évêché de Prague fut détaché de l'arche v. de Ratisbonne; la Bohême elle-même, séparée de la Bavière, fut rattachée à la Saxe, et Jean XIII y établit définitivement la hiérarchie romaine 967, avec tous les abus de son Église. Les protestations ne manquèrent jamais d'autant plus que la question religieuse je compliquait d'une question de race, et l'on vit successivement Militsch, Stickna, Janowsky et d'autres, préparer les voies à Jean Huss et à ses compagnons. Les supplices de Constance excitèrent les passions au lieu d'arrêter le mouvement de réforme. La suppression de la wape dans la Cène devint un signe de ralliement. Les hussites prirent les armes et se divisèrent bientôt en calixtins ou utraquistes, plus modérés, qui ne réclamaient que le rétablissement du calice et quelques réformes de détail, et taborites, qui insistaient pour l'abolition de loates les erreurs de doctrine, ou autres, non justifiées par l'Écriture. Le concile de Bâle en faisant par ses Compactata certaines concessions aux calixtins 1433, assura pour un siècle environ une paix relative. Les taborites en revanche s'unirent davantage aux chrétiens de la Moravie; ils formèrent avec eux une alliance fraternelle. Des penseurs distingués, des prédicateurs, des savants, des nobles illustrèrent ce petit troupeau des frères de Bohême (c'est le nom qu'ils prirent), et ils comptèrent bientôt jusqu'à 200 lieux de culte. L'avènement de Luther les trouva prêts, et en 1519 ils ont déjà leurs églises et leurs docteurs luthériens, saus qu'on puisse préciser le moment oit ils passèrent d'une confession dans l'autre, la transition ayant té en quelque sorte toute naturelle. Un grand nombre d'églises réformées existaient aussi en Bohême vers 1620. Mais les jésuites, qui étaient a Vienne depuis 1551, furent lâchés contre la Bohême pour la ramener à l'unité romaine, et ils y réussirent en partie, grâce à l'appui de Ferdinand II. À force de vexations ils exaspérèrent les protestants et leur firent commettre des fautes qui devaient être durement châtiées. Rodolphe 11 avait publié en faveur des frères des Lettres patentes de tolérance, qui leur garantissaient le libre exercice de leur culte; les catholiques tirent en sorte que cet édit resta à l'état de lettre morte, et quand le comte de Thurn réclama au nom de l'édit royal, les catholiq. lui firent une réponse dérisoire, qui mit le feu aux poudres; les mécontents montèrent au château de Prague et suivant, parait-il, un vieil usage de la Bohême, ils jetèrent les gouverneurs par la fenêtre. C'était le 23 mai 1618; ce fnt le commencement de la guerre de Trente ans, qui aboutit aux traités de Westphalie et à la proclamation de la liberté religieuse. Malheureusement la Bohême profita peu; elle avait perdu par la mort, l'exil ou l'émigration, un grand nombre de ses habitants et des meilleurs, qui avaient été porter en Saxe et dans les pays libres de l'Allemagne leur travail, leur intelligence et leur industrie. La contre-réfjrmation décrétée par Ferdinand continua son œuvre de proscription, de confiscations, d'enlèvements d enfants, de dragonades. et ce n'est que lorsque Joseph II eut rendu un nouvel édit de tolérance. 13 octobre 1781, que les protestants recommencèrent à se montrer, d'abord timidement, puis plus nombreux; ils restaurèrent leur culte, firent venir des pasteurs à leurs frais, mais, ruinés comme ils l'étaient, ils ne purent, et ne peuvent encore aujourd'hui pourvoir qu'à grand'peine au strict nécessaire de leurs conducteurs spirituels. — v. Morans, et Palacky, Hist. de Bohême. BOISSARD, Georges-David-Fréd., né 16 août 1783 à Monlbéliard, pasteur réformé à Lillr* 1805, à Nancy 1807, appelé à Paris 1809 comme premier pasteur et fondateur de l'égl. de la Conf. d'Augsbourg. f subitement 1836. Auteur d'une Hist. de la Bible, estimée; d'un Précis de l'hist. de l'égl.; d'un recueil de Prières pour le culte domestiq., livres de chants, catéchismes; Observations sur la Loi du sacrilège; divers articles et biographies dans l'Encyclop. des gens du monde, et dans le Musée des protestants célèbres. Son caractère large, éloigné de tout esprit de secte, lui valut ce quatrain du pasteur Marron: Qui neqne Calvinum, nec te, Luthere, wsgistros Invocat; o puro et aacro fonte petit, Unius in Christi jura tua verba, tabellâ BoisôàrduB carnm spirat in h&cce eaput. Son fils unique, né Ie»* mars 1811, a été successivement pasteur dans le Loiret et la Marne. — Un pasteur de la même famille, Louis B., f 1872 à Glay, a laissé 2 vol. sur l'Égl. de Russie, 1867. BOLINGBROCKE. Henri Saint-Jean (de), né 1672 à Battersea, f 1751, célèbre ministr d'État-anglais sous la reine Anne 1704, conclut la paix d'Utrecht 1713, combattit dix ans le ministère Walpole 1725-1735, mais n'a rien fond.' de stable; son caractère mobile y prêtait peu. Il fit plusieurs séjours en France, il épousa même en secondes noces une française, nièce de Mme de Maintenon. Il a écrit un certain nombre d'ouvrages sur la politique et la philosophie: dans ses derniers écrits en français, il afficha un déisme sans réserve qui lui valut les éloges et l'amitié de Voltaire. Sa position élevée, ses talents et sa tournure d'esprit l'avaient mis en relation avec les plus grands écrivains de son époque, Prior, Swift, Pope à qui il donna l'idée de son Essai sur l'homme, etc. Ses œuvres, réunies par Mallet 1754, ont été réimpr. en 1809, 8 vol. 8o. BOLIVIE, État de l'Amérique du Sud, compris entre le Pérou, le Brésil, la Plata et le Paraguay; c'est l'ancien Haut Pérou devenu libre depuis la déclaration d'indépendance du 6 août 1825; doit son nom au général Bolivar qui l'affranchit. Population, environ deux millions. La religion officielle est le catholicisme, mais sans exclusion d'aucun culte; les couvents y pullulent; des novices y sont reçus, avec la seule réserve, malheureusement illusoire, qu'ils seront libres de rentrer dans le monde quand ils voudront. Le sénat est chargé des affaires religieuses. Le peuple est très dévot, les mœurs très relâchées; le mariage est peu respecté, les incestes sont fréquents; l'ivrognerie et le jeu ruinent les santés et les familles. BOLLÀNDISTES, v. Acta Martyr. BOLSEC, Jérôme-Hermès, né à Paris, d'abord carme vers 1543, puis médecin, attaché au service du seigneur de Falais, demeurait à Veigy, Chablais, sur les terres de Berne, à 3 lieues de Genève. Il avait embrassé la réforme, s'était marié, et s'occupait un peu de théologie. En 1551 il rompit en visière avec Calvin au sujet de la prédestination, fut cité devant la Vén. <x>mpagnie le 8 mars, puis ayant récidivé en public le 16 oct., fut conduit en prison par J. de la Maisonneuve, et une procédure fut instruite contre lui. Après une discussion publique entre lui et Calvin, le Conseil décide de consulter les églises suisses, et après leurs réponses qui penchent en général pour la modération, Bolsec est condamné le 22 déc. au bannissement. Plus tard, il fut aussi expulsé des terres bernoises. En avril 1562 il confessa ses erreurs et ses torts devant le synode d'Orléans, dédiant à Charles IX son Mirouer de Vérité, avec son autobiographie en vers; puis il rompit de nouveau avec l'Egl-, qui ne lui avait pas rendu sa confiance et rentra dans le giron romain. Pour se venger et pour plaire au clergé de Lyon, il composa 1577 une Vie de Calvin et 1582 une Hist. de la vie et des débordements de Théod. de Bèze, deux pamphlets infâmes et sans aucune valeur historique. Il f à Annecy vers 1584. v. Haag, la France l>rotart. de H. Bordier. BONA, Jean, né 10 oct. 1609 ù Mondovi, Piémont de la même famille que le connétable François de Bonne. Entré 1624 dans un couvent de cisterciens, il fut nommé général de l'ordre en 1661, et cardinal en 1669. C'était un homme pieux et très instruit. Après la mort de Clément IX, 1670, plusieurs espéraient qu'il serait élu à sa place; le poète Daugières composa même à ce sujet une poésie où l'on trouve entre autres ce vers: Esset papa bonus, si Bona papa foret. Mais ce vœu ne se réalisa pas. f 27 oct. 1674. Outre sa collaboration au recueil des hollandistes, on a de lui un grand nombre de traités ascétiques; ils ont été publiés à Turin 1747 en 4 vol. f°. Les principaux sont (en latin), un Guide vers le ciel, l'Horloge ascétique, les Principes de la vie chrétienne, un Traité de la divine Psalmodie, deux livres sur les Liturgies et sur les Pains azymes, etc. Plusieurs ont été trad. en français. BONAVENTURE, de son vrai nom Jean Fi-denza, né 1221 à Bagnarre, Toscane, d'une famille distinguée et pieuse. A l'âge de 4 ans il tomba gravement malade; sa mère le recommanda à l'intercession de saint François, et l'enfant guéri s'écria: 0, la bonne aventure ! De là son surnom, qui en grec correspond au nom d'Eutyches. Il entra chez les franciscains en 1243, et devint général en 1255. Il avait été nommé prof, de scolastique à Paris 1253, et rivalisait (le science avec Thomas d'Aquin, mais sa réputation de sainteté l'emportait encore sur sa renommée comme savant. Haies disait de lui: Il ne semble pas qu'Adam ait pu pécher en Bonaventure. Il gouvernait avec tant de prudence que son opinion était recherchée de tout le monde. Le docteur et chanoine Guill. de Saint-Amour, ayant écrit contre les ordres mendiants au nom de l'université de Paris, Bon. para le coup et fit condamner le livre. Appelé à l'archevêché d'York, il refusa. A la mort de Clément IV, les cardinaux divisés sur le choix de son successeur, s'engagèrent à nommer celui qu'il désignerait; son choix se fixa sur Thibaut, qui devint Grégoire X, et qui par reconnaissance le nomma cardinal 1272, et év. d'Albano. f le 15 juillet 1274 à Lyon, où il avait été suivre les discussions d'un concile relatives à la réunion de l'Égl. de Rome avec l'Égl. grecque. Il fut canonisé 1482 par Sixte IV, et Sixte V lui décerna le titre de docteur sèraphi-que. Bonaventure essaya, comme ses contemporains, de concilier la mystique qui doit fournir la matière, avec la scolastique qui doit donner la forme. Son idée dominante était celle d'un renoncement absolu pour se livrer entièrement à Dieu et pour vivre de la vie en Christ en détruisant tous les penchants naturels. Il a écrit des commentaires sur le maître des sentences de P. Lombard, et plusieurs autres ouvrages et comment, sur divers sujets, surtout mystiques. Ses œuvres compl. publ. à Rome 1586-1596, forment 6 vol. fo. BONIFACE lo pape 418-422, nommé en concurrence avec Eulalius. Augustin lui dédia ses 4 livres contre le pélagianisme. 2<> Boniface II, goth, et nommé sous l'influence des Ostrogoths, 530-532. On a de lui une Lettre à saint Césaire d'Arles, dans les Epist. rom. Pontif. de D. Constant. 3<> Boniface III, romain, élu et f 607, obtient de Phocas que le patr. de Constantinople ne prendra plus le titre d'évéque universel, réservé à l'év. de Rome seul, ce qui, d'après l'opinion de son antéprédécesseur Grégoire, faisait de ce dernier un précurseur de l'Antéchrist. 4° Boniface IV, 608-614. Ayant reçu de Phocas le Panthéon, il l'appelle Sainte-Marie de la Rotonde, le consacre à Dieu sous l'invocation de la Vierge et de tous les saints, et y fait porter 28 voitures d'ossements sacrés extraits des catacombes. 5o Boniface V, 617-625. Il défend aux juges de poursuivre ceux qui ont cherché dans les églises un droit d'asile. Sous son pontificat, Édouard, roi de Northumberland, devient chrétien, gagné par les missionnaires de l'Évangile. Cantorbéry devient siège métropolitain. 60 Boniface VI, romain, fils d'un évêque, 896, ne régna que 15 jours. Quelques-uns en font un antipape; la majorité le tient pour un vrai pape. Comme il ne fit rien, c'est peu important. 7o Boniface VII, 974-985; Francon; regardé par quelques-uns comme un antipape. Il fit mourir son prédécesseur Benoît VI, et s'enfuit a Constantinople après avoir volé l'Église. Domnus II, Benoît VII et Jean XIV le remplacent successivement, bien qu'il n'ait pas donné sa démission. Après la mort d'Othon II, il revient 985, tue son collègue Jean XIV et conserve quelque temps encore le saint-siège. Après sa mort 985, son corps fut traîné par les pieds et abandonné sur une place publique. 80 Boniface VIII; Benoît Cajetan d'Anagni, d'abord avocat et notaire du pape à Rome, cardinal en 1281, élu pape 1294 en remplacement deCèlestin V démissionnaire. Accusé d'incrédulité, d'un caractère impérieux et violent, il eut pour ennemis les gibelins, et à leur tête les Colonne; il eut des démêlés avec l'Allemagne, l'Angleterre et la France. Arbitre entre Édouard I®' et Philippe IV, le Bel, il prononce en faveur de ce dernier et unit les deux rois par des mariages. Philippe, pour faire face aux frais de la guerre, ayant levé des contributions sur les biens ecclésiastiques et souvent abusé du droit de régale, Boniface se brouille avec lui. En 1296 le pape publie sa bulle CleHcis Idkm, mais Philippe l'ayant repoussée, Boniface cède. En 1298, il prend une décision qui déplaît au roi; celui-ci s'unit aux Colonne et fait arrêter l'év. de Pamiers qui avait répandu dans son 'diocèse des propos séditieux sur son compte. Boniface convoque un concile à Rome, Philippe défend à ses prélats de s'y rendre. Le pape lui écrit une première lettre, courte et sèche, mais qu'il rétracte bientôt; puis une seconde, plus longue, Ausculta, fiH, que Philippe furieux fait brûler, d'accord avec les États du royaume réunis le 10 avril 1302. Le pape y répond par sa bulle Unam sanctam, dans laquelle, sous prétexte que le corps de l'Église ne peut avoir deux têtes, il revendique pour lui toute l'autorité. Il excommunie Philippe le 13 avril 1303. Les États de Paris sont convoqués une seconde fois; ils appellent le pape un hereticus perfcctui, parce que, dit-on, il ne croyait pas même à l'immortalité de l'âme, et Boniface s'enfuit à Anagni, où bientôt il est arrêté et fait prisonnier par le chancelier de France Guill. de Nogaret, assisté de Sciarra Co-lonna, qui frappe le vieillard au visage de son gantelet de fer. Le pape se montre grand dans son malheur: Prêt à mourir, dit-il, du moins je mourrai pape. Le roi voulait le faire juger par un concile, mais 4 jours après son arrestation, Boniface est délivré par le peuple d'Anagni. Un mois après, il meurt à Rome, des suites de son saisissement et de la colère qu'il avait éprouvée, mais après avoir de nouveau délié les sujets du roi du serment de fidélité. 11 oct. 1308. Il avait 86 ans. Avec lui s'accentua la lutte de l'esprit laïque qui veut s'affranchir, contre l'autorité spirituelle dont on commence a moins s'effrayer. 9û Boniface IX, noble napolitain, cardinal 1381, pape 1389, + 4404. Il se signale par de nombreuses exactions, par son avarice, et par sa complaisance pour les dérèglements de sa famille. Il établit des annates perpétuelles, et se fait payer la promesse de charges et de bénéfices non encore vacants. 10° Boniface, ou Winfried, né 683 à Kir ton, De-vonshire, reçut de bonne heure des impressions religieuses et renonçai une haute position pour entrer successivement dans plusieurs monastères. C'est là que, vers l'âge de 35 ans, il se sentit intérieurement poussé à prêcher l'Évangile en Germanie. L'échec de ses travaux en Frise, suite de guerres qui désolaient ce pays, le conduisit à chercher l'appui de Rome, d'où muni d'une recommandation du pape Grégoire II il se rendit en Thuringe, ou l'Évangile avait été précédemment prêché par Willibrord et quelques autres missionnaires. Dans un second voyage que B. fit à Rome, Grégoire parvint à l'engager, quant à son œuvre et à l'organisation des églises de Germanie, à une dépendance complète vis-à-vis du siège papal. Investi par là d'une sorte de position officielle, il parcourut la Hesse, la Thuringe, la Franconie, affrontant toutes sortes de périls au milieu de populations presque sauvages, renversant une multitude d'idoles et fondant partout des églises et des monastères, entre autres le célèbre couvent de Fulda, élevé sous sa direction en 744 par un de ses compagnons d'œuvre du nom de Sturm. Favorisé d'ailleurs par quelques-uns des chefs du pays il obtint de magnifiques succès, en même temps que par l'influence du christianisme, la civilisation s'introduisait dans toute cette contrée où plus de cent mille habitants embrassèrent la foi. En Bavière où le christianisme était déjà professé, il organisa l'Église, rétablit la discipline et fonda plusieurs évê-chés. Par sa nomination comme archev. de Mayence, Boniface était devenu le vrai chef des églises de l'Allemagne, quand, à l'âge de 73 ans, il voulut reprendre ses travaux au milieu des païens. Il remit sa charge et ses fonctions d'archev. à Lullus son disciple favori, et se rendit de nouveau au milieu des Frisons, pour y travailler comme simple missionnaire. Déjà il y avait obtenu de remarquables succès quand en 755 il fut massacré par une troupe de païens au moment où il allait célébrer un service religieux. Par son zèle apostolique et les fruits merveilleux de sa prédication, Boniface a mérité d'être appelé l'apôtre des Allemands. Il a été en même temps par sa soumission au siège de Rome, et la rigueur avec laquelle il lit prévaloir son organisation ecclésiastique, un des plus puissants auxiliaires de la papauté. Mais tout en participant sur ce point aux erreurs de son temps, il fit constamment preuve quant à sa personne d'une courageuse indépendance, par exemple vis-à-vis du pape Zacbarie, et par son humilité, sa piété intime et la sainteté de sa vie, il reste une des plus grandes figures missionnaires de l'Église au moyen âge. «V. Bost, Hist. de l'établ. du christianisme, torne II. Néander. La vie chrétienne dans les premiers siècles de l'Église). H. N. 11°, v. Bruno. BONIVARD, ou Bonnivard, François, né 1493 à Seyssel, fut élevé par un oncle, chanoine de Saint-Pierre et prieur de Saint-Victor à Genève, qui lui destinait tous ses bénéfices et qui, f 1514, lui laissa en effet le riche prieuré de Saint-Victor, fondation très ancienne, dépendante de C!uny,et possédant plusieurs villages. Bonivard avait visité l'Italie, où il avait gagné le titre de poète lauréat; il avait appris l'allemand et étudié le droit à Fribourg-en-Brisgau; un séjour à Rome l'avait prédisposé en faveur d'une rèfor-mation. D'un naturel inquiet, agité, d'un caractère généreux, facile, primesautier, Bonivard prenait volontiers le parti des faibles contre les puissants. Il prit parti pour les libertés ae la république genevoise contre les évêques et les notables de la Savoie, et porta un jour un toast: • A Genève libre ! • qui lui valut pour réponse ces paroles prophétiques de Phil. Berthelier: « A ce jeu vous perdrez vos bénéfices et moi ma tête. » Emprisonné 1519 par le duc de Savoie, qui le trouvait surtout incommode, il ne fut relâché qu'au bout de 2 ans; mais comme son opposition ardente et parfois tracassière continua de se manifester d'autant plus que le duc détenait son prieuré, il fut de nouveau arrêté 1530, malgré son sauf-conduit,, et mené garrotté au château de Chillon où il passa 6 ans. H fat délivré en 1536 quand les Bernois, après avoir conquis le pays de Vaud, firent le siège de Chillon avec une flottille genevoise. Dans l'intervalle la réforme avait été proclamée à Genève, mais le cloître et l'église Saint-Victor, ainsi que tous les faubourgs, avaient dû être démolis par mesure de sûreté. Bonivard fut reçu bourgeois et nommé membre du Conseil des CC; en outre on lui donna comme indemnité 800 écus d'or et une pension viagère de 140. Il fut marié 4 fois, mais ne fut pas heureux avec ses femmes; la dernière, convaincue d'adultère, fut noyée. Ses dernières années fu- }; rent solitaires et pénibles, f 1570, instituant j pour ses héritiers le collège, la ville et la biblio- j thèque. Si son nom a été rendu populaire en Suisse par son patriotisme et sa capacité, il n'a pas acquis des titres moins durables par ses travaux historiques et littéraires. Ses Chroniques de la ville de Genève, commencées en 1542, sur la demande des magistrats, étaient trop pleines d'esprit, de malice et de satires contemporaines, pour qu'on osât les publier; on craignait de froisser tout le monde, mais surtout Berne et Fribourg; il en parut un résumé dans la Cosmographie de Munster, mais le mss. original s'égara et ne fut rendu à la ville qu'eu 1724. M. G. Revilliod en a enfin publié le texte. Bonivard a encore écrit contre les Libertins son livre sur l'Ancienne et la nouvelle police de Genève; ses études d'hist. générale, sous le titre de: Avis et devis de noblesse; puis: Avis et devis de la source de l'idolâtrie et tyrannie papale, contre les faux miracles; enfin: Amarti-génée, étude des origines du péché dans le monde. BONNET, Charles, né 13 mars 1720 à Genève, f 1793; d'abord naturaliste, puis philosophe; fils de réfugiés, d'une famille riche et distinguée. Une surdité précoce l'obligea de quitter les écoles publiques pour prendre des leçons particulières. Le Spectacle de la nature, de l'abbé Pluche, fut pour lui une révélation; il lut ensuite Newton, Fontenelle, Malebranche, les Mémoires de Réaumur sur les Insectes; il se mit à observer lui-même, d'abord les chenilles 1738, et en 1740 les pucerons et leur mode de reproduction, travail qui lui valut, à l'âge <ft 20 ans, le titre de correspondant de l'Acad. des sciences. Son père lui permit alors de renoncer à l'étude du droit. En 1745 parut son Insecto-logie, dont l'idée-mère est que tous les êtres font partie d'un même système et forment une chaîne immense qui relie toutes les parties de l'univers. En 1754, Recherches sur l'usage des feuilles, quant à la nutrition des plantes et au rôle de l'air et de la lumière. Mais des ma«s d'yeux le forcent à abandonner la loupe et le microscope; il se retire en lui-même et se tourne vers la philosophie. Son Essai de psychologie date aussi de 1754, puis vient en 1760 son Essai analytique sur les facultés de l'âme, où il se rencontre avec Condillac pour imaginer une statue qui recevrait successivement les différents sens. Il accorde une grande place aux fibres, au cerveau, à l'organisation, et il s'expose à Are regardé comme un sensualiste ou un matérialiste, mais il s'en défend avec énergie dans m Considérations sur les corps organisés 1762, *t dans sa Contemplation de la nature 1764. Ce dernier ouvrage obtint un immense succès dans toute l'Europe. Sa Palingénésie, 1769, traite de la vie à venir, non seulement pour l'homme, mais pour les animaux eux-mêmes; c'est en quelque sorte le résumé de tous ses travaux et l'expression mûrie de ses convictions et de ses croyances. C'était une protestation contre l'esprit du siècle et de l'Encyclopédie; elle lui valut les sarcasmes de Voltaire et les éloges de Haller, d'Euler, et d'autres grands esprits. Enfin en 1770 il publia son dernier ouvrage: Recherches philos, sur les preuves du christianisme, insistant sur les données de la tradition évan-eelique. « Les miracles, dit-il, sont le langage de Dieu. • Il suivait avec attention les moindres opuscules de Voltaire et mettait ses amis en garde contre le • poison fernésien, » criblant des traits les plus acérés le nouveau Lucien, le Brochurier, le grand faiseur de si et de mais, tout eu lui rendant justice quand il faisait le bieû. —Œuvres compl. Neuchâtel 1779, 8 vol. ou 18 vol. 8°. B0JÏ0SE, év. de Sardique, Illyrie, soutint que Marie aurait eu plusieurs enfants après la naissance de Jésus, son fils premier-né. Condamné pour ce fait au synode de Capoue 391, pois par le pape Siricius, il fut déposé de ses fonctions, et f peu de temps après. Ses partisans allèrent plus loin que lui et furent condamnés comme ariens et comme photiniens au eone. d'Arles 4i5, qui cependant reconnaissait encore leur baptême comme valable. Plus tard les passions s'en mêlèrent; Gennadius et Grég.-le-Grand ne reconnurent plus leur baptême, et ceux-ci en firent autant de leur côté. BONSHOMMES, Boni homines, surnom de plusieurs ordres religieux q. v.; 1° les moines de Grammont, et surtout les minimes; 3<> des chanoines portugais se rattachant aux bénédictins 1433, et envoyés comme missionnaires aux Indes et en Ethiopie; 4° des cordeliers anglais; 5® les cathares et les vaudois. BOOS, Martin, un des prêtres les plus évan-géliques du mouvement réformateur qui, vers la ân du siècle dernier, semblait annoncer un réveil au sein du catholicisme et la continuation de l'œuvre dont Fénelon d'une part, et de l'autre, mais avec plus de courage, les jansénistes avaient pris l'initiative. Il naquit la nuit de No« 1762 à Huttenried, sur la frontière de la Bavière et de la Souabe, d'une famille de paysans aisés; il était le 14™ de 16 enfants. Son père et sa mère furent emportés par une épidémie, comme il n'avait que 4 ans. Un oncle, conseiller ecclésiastique à Augsbourg, se chargea de lui, l'envoya à l'école, et lui donna le choix entre la carrière de curé et l'état de cordonnier. Le jeune garçon qui avait appris tout seul les éléments du latin n'hésita pas; il fit d'excellentes études à Dillingen, où les jésuites auraient bien voulu l'empêcher d'aller entendre Sailer, Zimmer et Weber, et le jour où il dit sa première messe, son oncle célébra cet heureux événement en organisant un tir à la cible qui dura 3 jours et qui parut au jeune prêtre n'avoir aucun rapport avec le sérieux de la situation. Il raconte ainsi dans son journal le travail qui s'était fait en lui: c Je me suis donné énormément de peine pour devenir pieux; je me couchais souvent, même en hiver, sur le sol froid à côté de mon lit; je me flagellais jusqu'au sang, j'étais criblé de cilices, je jeûnais et donnais mon pain aux pauvres; je me confessais et je communiais presque tous les 8 jours; bref j'étais si dévot que les étudiants d'Augsbourg me nommèrent à l'unanimité préfet de la congrégation. Mais... M. le préfet, la tête basse, devenait tous les jours plus triste et plus angoissé. Il s'écriait: Qui rne délivrera ? Et il n'y avait personne pour lui répondre; la grâce d»* de N. S. Jésus-Christ. Personne pour luirappe 1er que: Le juste vivra parla foi. » Ces paroles qu'il apprit à connaître et h comprendre à Dillingen, devaient être et furent en effet le text*1 de toute sa vie. L'idée ne lui vint pas de quitter son église, mais il n'hésita jamais h fraterniser avec les chrétiens d'autres communions. Sans donner prise à aucune accusation d'hérésie, il fut toujours suspect; on lui saisit ses papiers, on lui fit subir de nombreux interrogatoires, il fut mis en prison, déplacé, suspendu de ses fonctions, tracassé de mille manières, et enfin exilé, sans que jamais sa douce nature se révoltât. Il fit cinq places en Bavière et dut s'enfuir en 1799. L'év. Gall de Linz, Autriche, le reçut fraternellement et lui assura onze années de tranquillité; mais les persécutions recommencèrent en 1812, et malgré la protection avouée de Femp. François, il fut enfermé en février 1816 dans un couvent de carmélites et ne put obtenir la paix qu'en quittant le pays. Le gouvernement prussien lui offrit une place 1817 dans les environs de Cologne, et c'est là qu'après plusieurs années d'un travail difficile, mais abondamment béni, il f 29 août 1825. Il n'a pas toujours moissonné où il avait semé, mais son œuvre n'a pas été vaine. BORA, Catherine (de), femme de Luther. Née 29 janv. 1499, de l'ancienne famille des Bora de Stein-Laussig, elle avait été mise au couvent de Nimptseh, mais pour échapper à la corrup-tiou de cette maison, elle s'enfuit avec 8 de ses amies dans la nuit du samedi avant Pâques, du 4 au 5 avril 1523, et arriva à Wittenberg le 7. Elles furent placées par les réformateurs dans des maisons honnêtes et tranquilles; Catherine chez Phil. Reichenbach, secrétaire puis bourgmestre de la ville. Deux ans plus tard, après avoir essayé vainement de la marier à d'autres, Luther se décida à l'épouser. Le mariage eut lieu le 13 juin 1525; ce fut Bugenhagen qui le bénit, Kranach était un des témoins. Malgré les épreuves ordinaires de la vie, cette union fut heureuse. Ils eurent six enfants: Hans, ou Jean, né 7 juin 1526; Élisabeth, née 10 déc. 1527, f 3 août 1528; Magdeleine, née le 4 mai 1529, f 20 oct. 1542; Martin, 7 nov. 1531; Paul 28 janv. 1533, médecin distingué, f 8 mars 1593; enfin en 1534, Marguerite. La mort de Magdeleine fut une de leurs plus cruelles épreuves; l'enfant avait 14 ans, et se distinguait par ses qualités de cœur et d'esprit. Catherine survécut 7 ans à Luther et vit des jours difficiles; la guerre de Smalcalde supprima un moment toutes ses ressources, et souvent elle dut réclamer pour elle et ses enfants les secours de ceux qui devaient tant à son mari. Elle f à Torgau 20 déc. 1552. C'était une femme de cœur et de foi, qui en plus d'une circonstance releva le courage de son mari, et qui se montra toujours digne de lui par l'élévation de son caractère, par son dévouement et par sa soumission. Sans être une beauté accomplie, les portraits de Kranach la représentent comme une belle personne, distinguée de traits et de tenue. BORBORITES, ou Borborien*, gnostiques, une des sous-divisions des nicolaïtes, dont les restes subsistaient encore au temps d'Épipha-nes. Ils passaient pour se vautrer dans la fange afin de bien établir leur inépris pour le corps. Us se vantaient de posséder des livres saints tout particuliers, un évangile d'Ève, un livre de Noria femme de Noé, des révélations d'Adam, etc. Ils ne comptaient pas moins de huit ciels; le 7« avait pour chef l'Eternel Zebaoth, le Créateur, sous la forme d'un âne ou d'un cochon; dans le 8* étaient Barbelo, la mère des vivants, le Père de toutes choses, le Dieu souverain et le Christ. Leur morale était ignoble. BORDELUM, petite secte du Schleswig-Hol-stein, excroissance malsaine du piétisme, qui se forma en 1739 à Bordelum, près de Flensburg, et se constitua au nombre de 15 à 20 personnes, sous la direction d'un candidat saxon du nom de Bâhr. Ils méprisaient l'Église établie, qu'ils appelaient la maison du diable; ils ne voulaient ni du dimanche, ni de la cène, ni du baptême, ni du mariage. Bâhr s'enfuit avec la femme d'un de ses amis, Borbenius avec la femme d'un autre, et finit cependant par se marier pour son compte. Ils furent persécutés en Danemark, non pour cause de religion, mais pour immoralité. Bâhr f misérablement à Bred-stâdt dans l'hiver de 1743, sans que le pasteur Schonborn ait pu le ramener à de meilleurs sentimenls. La secte s'éteignit bientôt. BOREL, ou Borrel, Adam, né 1603 dans le Séeland, f 1667, hébraïsant distingué, non moins connu comme prédicateur, donna sa démission de pasteur, estimant que l'Église officielle avait perdu son caractère chrétien, et réunit à Amsterdam 1645 le petit troupeau de ses adhérents en assemblées religieuses. Son principal écrit; Ad legern et testimonium fit sensation; c'était un appel à l'autorité absolue des Écritures. II publia en 1664 un Traité de la religion des frères, et 1667 un livre sur la Vérité de Thist. évangélique. BORGIA, famille romaine, originaire de Borja, en Espagne, figure à plus juste titre dans l'histoire profane que dans l'histoire de l'Église, bien que plusieurs de ses membres aient porté la pourpre ou la tiare. Nous mentionnerons les suivants: 1° Alphonse-Borgia, v. Calixte III. 2° Roderic-Lenzuoli, v. Alexandre VI. 3° César, fils du précédent et frère de Lucrèce, nommé cardinal 1493, puis sécularisé et redevenu laïque; épousa une fille de Jean d'Albret, prit 1501 le titre de duc de la Romagne, et après une vie très accidentée, fut tué au siège de Viana, Espagne, 1507. Modèle du tyran, d'après Machiavel. 4° François, duc de Gandie, grand d'Espagne, né 1510 à Gandie, Valence, vécut d'abord dans le monde, puis jouit de la faveur de Charles-Quint, qui le nomma vice-roi de la Catalogne. Ayant perdu sa femme qui lui avait donné 8 enfants, il renonça au monde, entra dans l'ordre des jésuites, en fut nommé 3m* général, malgré sa résistance 1565, et se distingua des Borgia par ses vertus. Canonisé par Clément IX. Le duc de Lerme, ministre de Philippe III, était son petit-fils. BORRHAUS, v. Cellarius. BORRI, ou Borro, Burrhus, François-Joseph, alchimiste, enthousiaste et aventurier; né à Milan 1627, étudia à Rome chez les jésuites, entra au service de la cour et se mit à chercher la pierre philosophale. Puis, changeant de carrière, il dénonça la corruption romaine et annonça une réforme dont il serait le promoteur, sous la direction du pape. Il raconta des visions qu'il aurait eues et prêcha de nouvelles doctrines sur la divinité de Marie, l'incarnation du Saint-Esprit, etc. Mais quand il vit que l'Inquisition commençait à s'occuper de lui, il ne se sentit plus en sûreté à Rome et retourna à Milan; il réunit en congrégation un certain nombre d'adhérents, leur imposa le vœu de pauvreté, prit leur argent et ne rêva rien moins que de s'emparer de ta ville et d'en devenir le dictateur. Son projet ne réussit pas, il dut s'enfuir, et comme il était condamné au feu, il se rendit chez la reine Christine en Suède, puis chez Frédéric III de Danemark, et enfin en Turquie, se taisant richement payer des souverains qui l'employaient. Arrété par ordre de l'empereur il fut conduit à Vienne, extradé sur la demande du nonce, condamné à se rétracter 1673, et enfermé pour la vie au château Saint -Ange, où on lui fit la vie facile, f 1695. BORROMÉE, Charles (comte de), né 2 oct. 1538 à Arona, d'une famille distinguée de la Lombardie, f à Milan le 3 nov. 1584. Sa mère était une Médicis, sœur de Pie IV. Tout jeune il montra du goût pour le sacerdoce. Après ses premières études, faites à Arona, il passa à l'université de Pavie, prit son grade de docteur en droit à 22 ans, et fut nommé la même année 1560 arehev. de Milan et cardinal, par le pape son oncle. Il n'était pas même prêtre. Cette élévation rapide d'un cardinal imberbe fit beaucoup crier, mais sa modestie et ses vertus désarmèrent les envieux. Il resta encore 6 ans à Rome, chargé de l'administration des Romaines, de la marche d'Ancône, des provinces étrangères (Portugal, Suisse et Pays-Bas), et de l'inspection générale des franciscains, des carmélites et des chevaliers de Malte. Il se fit ordonner prêtre en secret 1562, pour échapper aux obsessions de ses parents et même de son oncle, qui le pressaient de se marier et de donna- des héritiers à une famille menacée de s'éteindre. En 1565 il prit possession de son diocèse, dut retourner un moment à Rome pour tecevoir le dernier soupir de son oncle, et revint à Milan pour s'y consacrer tout entier. Ses biographes ne tarissent pas en éloges sur ses talents, son zèle, son activité pratique et son dévouement; il paya non pas de sa fortune seulement, mais de sa personne, lors de la famine de 1570 et de la peste de 1576. Il chercha partout à ranimer la vie religieuse, et travailla avec une grande énergie à réformer les ordres qui s'étaient écartés de leur règle. L'ordre des Humiliés, peu reconnaissant de tant de discipline, aposta des hommes pour l'assassiner, le 25 oet. 1569, devant l'autel, mais la balle ne fit qu'effleurer la peau. Il visitait lui-même, quelle que Ait la saison, les villages les plus éloignés de sa paroisse, et fonda des séminaires pour l'instruction de son clergé. Son temps se partageait entre l'étude, les exercices de dévotion et les soins de son diocèse. Malheureusement il eut les défauts de ses qualités, et son zèle catholique l'inspira mal dans ses campagnes contre les protestants et contre les libertés suisses. Il foada à Milan un séminaire helvétique pour doter la Suisse de prêtres imbus des doctrines ul-tramontaines; il fit en 1570 un voyage en Suisse, parcourant à pied les hameaux des montagnes, recommandant et faisant adopter les décrets du conc. de Trente, installant un nonce à Lucarne; les jésuites à. Porrentruy, à Fribourg, à Sion, à Brigue; les capucins à Lugano, Lu-cerne, Uri et Unterwald. Il posait enfin les bases d'une ligue réactionnaire, qui ne se réalisa qu'après sa mort, et qui prit le nom de Ligue d'or, ou Ligue Borromée, par laquelle les cantons catholiques s'engageaient, 1er oct. 1586, à prendre les armes contre ceux qui toléreraient l'hérésie sur leur territoire; c'était la guerre civile. Borromée mourut à 46 ans, épuisé de fa-tignes et d'austérités. Son tombeau est dans la cathédrale de Milan, sa statue de bronze à Arona. Canonisé par Paul V, 1610. Ses œuvres forment 5 vol. f». Milan 1747. — Son neveu Frédéric 1564-1631, aussi cardinal et archev. de Milan, fut plus tolérant et plus éclairé; il fonda à Milan la biblioth. ambroisienne. BOR BOSSUET, Jaques-Bénigne, né 27 sept. 1627 à Dijon, d'une famille de robe. Il est appelé par La Bruyère le dernier des pères de l'Église, et occupe incontestablement une des premières places parmi les orateurs et les écrivains du 17me siècle. Ambitieux et égoïste, il fut le flatteur de Lonis XIV, de ses maltresses et de ses confesseurs; le champion de toutes les causes du roi et l'ennemi de tous ses ennemis. Il combattit l'ultramontanisme parce que Louis ne voulait pas d'autorité au-dessus ou à côté de la sienne; il combattit le protestantisme, le jansénisme et le quiétisme, parce que le roi ne voulait qu'une religion dans le royaume. Son caractère fut loin d'être à la hauteur de son talent, mais en constatant les vices du premier, cela n'empêche pas de reconnaître l'ampleur et la richesse du second. Après avoir étudié d'abord chez les jésuites à Dijon, Bossuet entra au collège de Navarre à Paris, se rattacha en philos, à la méthode de Descartes, en théol. au système de Thomas d'Aquin et à la doctrine d'Augustin. Il soutint sa première thèse à 16 ans, et son talent était déjà si remarquable qu'on le pria un soir d'improviser un sermon dans les salons Rambouillet. En 1648 il soutint sa seconde thèse devant le prince de Condé à qui elle était dédiée. En 1652 il fut ordonné prêtre et passa docteur en théol. Il travailla quelques mois à Saint-Lazare sous la direction de Vincent de Paule, puis il vint à Metz où il avait des parents et un bénéfice, et où il fit ses premières armes contre les protestants, sous la forme d'une: Réfutation du catéchisme du pasteur P. Ferry, 1655. Il allait souvent à Paris, où la cour le faisait prêcher, pour entendre de belles paroles plutôt que de bonnes vérités. Turenne et Dan-geau mirent leur conversion sur le compte de son éloquence, et sa réputation grandit d'autant. Il fît presque coup sur coup l'oraison funèbre d'Anne d'Autriche, de la reine d'Angleterre et d'Henriette, duchesse d'Orléans, et fut dans l'intervalle, appelé à l'évêché de Condom 1669. En 1670 il fut chargé de la tâche ingrate d'élever le dauphin, et écrivit pour ce jeune prince un de ses chefs-d'œuvre, le Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même, Paris 1709; un autre chef-d'œuvre, malgré ses défauts, le discours sur l'Hisl. univ., et sa Politique tirée de l'Écriture sainte, qui n'a presque pas de valeur. Il continuait en même temps sa guerre de plume, de controverse, d'intrigues et de négociations contre les protestants. En 1671 il publie son Exposition de la doctrine de l'Égl. cathol.; en 1682 son Traité de la communion sous les deux espèces; en 1688 son Hist. des variations de l'Egl. prot. en réponse au pasteur La Bastide qui lui avait reproché, non sans raison, d'avoir varié lui-même et d'avoir présenté la doctrine catholique sous une forme que l'Église ne pouvait pas reconnaître; c'était aussi l'opinion du p. Maimbourg et d'autres. Il eut en 1678 une conférence avec Claude, à la demande d'une dame De Duras, qui voulait au moins colorer sa conversion; les deux adversaires en publièrent le compte rendu, 1682 et 1683. Enfin en 1681, après l'achèvement de l'éducation du dauphin, Bossuet reçut pour sa récompense l'évêché de Meaux, et il inaugura son entrée en fonctions par une Lettre pastorale et par son Catéchisme de Meaux, qui ne parurent que plus tard, 1686 et 1687. En 1682, à l'assemblée du clergé qui eut lieu k l'occasion des prétentions du pape, il dirigea les débats et rédigea les 4 propositions, qui sont la plus fidèle expression de ce qu'on appelle les Libertés gallicanes; il les défendit plus tard sur la demande du roi, dans sa Defen-sio declarationis, qui ne parut qu'après sa mort. Il eut à répondre aussi à Jurieu et à Basnage, et il le fit dans plusieurs écrits entre 1689 et 1701. Il prit une part active à la Révocation de l'édit de Nantes, mesure impolitique autant qu'injuste, où il voit « le plus bel usage de l'autorité. » Il correspondit plusieurs années avec Leibnitz, lui dans l'espoir de ramener les protestants au catholicisme, Leibnitz dans le désir impossible de fondre les deux communions en une seule Église universelle, 1690. Ses dernières années furent consacrées à poursuivre le quié-tisme dans la personne de Mad. Guyon et dans celle de Fénelon. Son Instruction contre les erreurs des faux mystiques, 1697, est ecrite avec une aigreur qui fut dépassée encore dans sa Relation sur le Quiétisme, 1698, et sa conduite envers Fénelon, même après que celui-ci eut eu la faiblesse de se rétracter, fut blâmée par plusieurs de ses amis comme trop personnelle et peu généreuse. Le roi le nomma conseiller en 1697, et aumônier de la dauphine en 1698. En 1700, dans l'assemblée du clergé, il s'éleva avec la même énergie contre la morale relâchée des jésuites et contre le jansénisme qui apparaissait de nouveau. Il écrivit encore contre la version du N. T. de Richard Simon 1703, et une explication de Es. 7, 14, sur l'Enfantement de la Vierge 1704. f à Paris le 12 avril 1704. Ses Oraisons funèbres sont ce qu'il a fait de mieux, au point de vue littéraire, mais au point de vue religieux on y sent plus le courtisan que If chrétien. Quant à ses sermons et discours, La Harpe estime avec raison qu'on en a exagéré la valeur, mais il s'y trouve des morceaux, entre autres le Panégyrique de saint Paul, qui appartiennent aux plus belles productions de la chaire chrétienne. Bossuet est embaumé dans un caveau de la cathédr. de Meaux; il a été exposé il y a quelques années k la vue des fidèles. Ce grand champion du catholicisme n'a pas éh* canonisé. Sa Vie a été écrite par le cardinal de Bausset. Son éloge (il avait élé reçu de TAcad. française en 1671) a été prononcé ou écrit par de nombreux panégyristes, Saint-MaroGirardin. Patin, etc. Ses Œuvres complètes ont eu de nombreuses éditions. — Il avait un neveu, du même nom, qui fut év. de Troyes, et qui a publié après sa mort plusieurs de ses ouvrages inédits. BOS 129 BOST 1» Pau I - A m i-Isaac - David, né 10 juin 1790 à Genève; après 4 années passées k Neu-wied, il fit ses études à Genève et fui consacré en 1814. Encore étudiant il s'était attaché an réveil religieux de son église, et ne cessa de lui rester fidèle, sans toutefois en accepter complètement ni les doctrines, ni l'organisation. Il fut 2anssuffragant àMoutiers-Grandval, Berne, et 7 ans agent de la Soc. continentale de Londres, comme missionnaire en France ot en Allemagne. De retour en 1825 il accepta successivement une place de pasteur dissident à Genève et k Carouge; fut condamné pour attaques contre la Compagn. des pasteurs, qu'il accusait d'avoir peu k peu dénaturé la foi de l'Église, et continua de se livrer à des courses missionnaires et à des travaux littéraires considérables. En 1840 il rentra dans l'Égl. nationale et prit du service en France, d'abord pasteur à Bourges, puis aumônier à Melun. En 1848 il se retira à Paris, et quelques années après à Laforce où il f 24 déc. 1874, quatre mois après avoir célébré ses noces de diamant. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a laissés, on remarque: Hist. des Fr. de Bohême et de Moravie; Hist. de l'établissement du christianisme, d'après Blumhardt; Mémoires pouvant servir à l'histoire relig. des égl. etc.; Christianisme et théologie; Recherches sur la Constitution de l'Égl.; Genève religieuse; Défense des fidèles; Procès: plusieurs traités de «controverse, et un recueil de Chœurs et cantiques, dont plusieurs sont devenus rapidement populaires. Il avait eu une fille et dix fils, dont six pasteurs. Le plus connu est 2° John (Jean-Marc) né 4 mars 1817 à Mou-tiers-Grandval; d'une constitution délicate, d'une àme ardente, il tenta à plusieurs reprises de faire des études régulières, mais sa santé ne le lui permit pas. Les médecins l'obligèrent à se îiiettre à des travaux manuels, et il se lit relieur, l u grand talent pour la musique lui ouvrit cependant une autre carrière; il vint à Paris, accepta un préceptorat très avantageux en Irlande; mais toujours désireux de se vouer au ministère, il voulut essayer de nouveau des études et vint à Montauban, où il passa 18 mois. Encore une fois il fut arrêté par la maladie. L'égl. évangélique de Laforce, Dordogne, l'ap-l>ela tel qu'il était; ses professeurs l'engagèrent accepter, et il fut consacré à Orléans, 1844. C'est là, pendant un ministère de 35 années, qu'il a fondé les 9 établissements qui aujourd'hui portent son nom. et qui lui valurent, en 1861 le prix Monthyon de 3,000 fr. et en 1866 la croix d'honneur. Une grande charité, un remarquable talent d'administration et une volonté énergique, lui ont permis de vaincre les difficultés nombreuses qu'il a rencontrées sur sa route, et de s'assurer des aides bien qualifiés et dévoués, f 1er n0v. 1881 à Paris; enterré à Laforce. Notice par Bouvier. BOUHOURS, Dominique, jésuite né à Paris 1628,11702, connu seulement par une traduction aussi médiocre que prétentieuse du N. T. d'après la Vulgate; il y mit 15 ans. BOURBONNAIS, ancienne province correspondant au département actuel de l'Allier. Il y avait déjà des luthériens à Moulins en 1562, et le 6 avril le ministre Cougnat était emprisonné, ainsi que le seigneur de Foulet dans le château duquel il avait prêché. De nombreuses persécutions eurent lieu pour cause de religion par le gouverneur Mon taré, qui appelait le bourreau son compère et le faisait manger à sa table. Après l'édit de Nantes plusieurs égl. se constituèrent, Moulins, Hérisson, Saint-Amand, formant un colloque avec le Berry et le Nivernais. La difficulté était toujours de se procurer des lieux de culte, et c'est dans les faubourgs qu'ils etaient ordinairement relégués, grâce au mauvais vouloir des populations et des gouverneurs. Des mesures vexatoires, notamment sous Marie de Médicis, les ruinèrent peu à peu, même avant la révocation, qui ne trouva plus rien à détruire. Avec germinal on put constater qu'il était resté du feu sous la cendre; de modestes assemblées reparurent. Aujourd'hui le Bourbonnais forme une paroisse protestante officielle, rattachée au Consist. de Bourges et à la 3mc circonscription synodale. Il y a des tem pies à Vichy, à Moulins et à Montluçon, avec des écoles prospères, d'importantes annexes à Commentry et Bézenet, et un culte régulier en été aux stations thermales de Vichy et de Néris. BOURDALOUE, Louis, né à Bourges, 20 août 1632, f 13 mai 1704, entra de bonne heure dans la Société des jésuites, se fit remarquer par des talents oratoires hors ligne, et ne tarda pas à être envoyé à Paris, où il obtint un immense succès. Il prêcha dix fois le Carême ou l'Aven t devant Louis XIV et sa cour. Après la révoc. de l'édit de Nantes, il fut chargé d'éclairer les protestants du Languedoc, et montra dans cette mission un tact et une modération qui lui font honneur. Il n'avait du reste d'un jésuite que le nom. De retour à Paris, il consacra ses dernières années aux pauvres, aux hôpitaux et aux prisons. Moins sublime que Bossuet, moins onctueux que Massillon, il est plus dialecticien et meilleur logicien; ses plans sont meilleurs et plus clairs. On peut le considérer comme le restaurateur de la chaire catholique française; il est le premier qui ait rompu avec le mauvais goût des anciennes trivialités et avec le goût plus moderne d'une afféterie prétentieuse; il est grave, sérieux, simple et instruit. Son sermon sur la Passion est particulièrement estimé. BOURDIN. Maurice, v. Grégoire VIII. BOURGES, v. Pragmatique Sanction. BOURIGNON, Antoinette, née à Lille 1616; laide et contrefaite; sa famille eut un moment l'idee de l'étouffer comme un monstre. Elle se jeta dans des dévotions déréglées, faillit se marier à 20 ans, mais se sauva au moment où la noce allait être célébrée, fut recueillie dans un couvent de Cambrai, mais s'enfuit encore, toujours poursuivie par des visions. On lui confia à Lille la direction d'un hôpital, et cette activité pratique mit un terme momentané à ses divagations. Mais ses accès recommencèrent; elle ne voyait partout que démons et possédés. Elle partit pour la Hollande, puis pour une île du Holstein où elle monta une imprimerie et publia une foule de traités mystiques en allemand, français et flamand. Après beaucoup de tribulations et d'aventures elle revint à Frane-ker où elle f 1680, laissant son bien à l'hôpital de Lille. Les adeptes qu'elle avait recrutés disparurent avec elle. Ses traités ne forment pas moins de 21 vol. 8°. Amsterd. 1679. Son idée fixe était de réformer l'Église, mais les moyens qu'elle employait compromirent son œuvre. Malgré sa laideur elle fit plusieurs passions. Ses principaux écrits sont: Traité de l'aveuglement des hommes, Traité du nouveau ciel, Renouvellement de l'esprit évangélique, l'Innocence reconnue, etc. BOWER, Archibald, né 1686 à Dundee, étndia à Douai, entra à Rome dans l'ordre des jésuites, fut successivement professeur d'histoire, de philos, et de rhétorique, et en même temps conseiller du saint-office; s'enfuit tout k coup en Angleterre 1726, se joignit à l'Église anglicane, devint en 1747 bibliothécaire de la reine par la protection de lord Littleton, et consacra ses dernières années à des travaux littéraires et historiques. Il avait épousé une femme riche et de bonne famille, f 6 sept. 1766. Son principal ouvrage est une Hist. des papes, 7 vol. 4° dont la publication commença en 1750. Les motifs de sa conversion n'ont jamais été tirés au clair, et sa personne n'a pas inspiré une grande confiance à ses nouveaux coreligionnaires. BOYLE 1° Richard, 1566-1643, né à Gantor-béry, s'éleva par son seul mérite d'une position médiocre aux plus hautes dignités de son pays sous Élisabeth et fut nommé comte de Cork. Il eut 15 enfants, dont 7 fils, presque tous distingués. Le plus jeune fut 2o Robert, né 25 janv. 1626 à Lisborn, Irlande; naturaliste distingué, aussi pieux que savant, l'un des fondateurs de la Soc. royale des sciences de Londres, 1645, primitivement Collège philosophique. Si les sciences physiques lui doivent de nombreuses observations et d'intéressantes découvertes, il ne travailla pas avec moins de zèle k la propagation et à la défense du christianisme. Président de la Société fondée en 1647 pour l'évangélisation de la Nouvelle Angleterre, il rendit de grands services k l'œuvre des missions; il fit imprimer k Oxford à 500 ex. une traduction des Evangiles et des Actes en langue malaise, des Bibles en celte vulgaire pour l'Irlande et le pays de Galles, le N. T. en arabe, ainsi que le traité de Grotius sur la Vérité de la relig. chrét. Il écrivit lui-même plusieurs ouvrages d'apologétique contre les déistes, entre autres des Considérations phy-sico-théol. sur la possibilité de la résurrection, 1675, un Résumé (summa) de la théol. chrét. 1682, Conciliation de la raison et de la religion, le Chrétien naturaliste, le Virtuose chrétien, etc. Œuvres compl. Londres 1744, 5 vol. f°, t 26 sept. 1691. Par testament il laissait sous le titre de Fondation Boyle une somme suffisante pour donner chaque année une rémunération de 50 livres à un prédicateur désigné par ses exécuteurs testamentaires, qui ferait dans une église désignée 8 conférences sur les vérités de la religion révélée ët contre les non-croyants, comprenant sous ce titre aussi bien les déistes et tes athées, que les païens, les juife ou les musulmans. BRADWARDINE, Thomas (de), né vers 1290 k Hartfield, Suffolk, fit ses études k Merton- College, Oxford, et se distingua en mathématiques, en philos, et en théologie. Il composa des. tables astronomiques, et 3 ouvrages sur l'arithmétique, la géométrie et les proportions. Mais c'est surtout comme théologien et comme réformateur qu'il s'est fait connaître. Après avoir enseigné comme docteur à l'univ. d'Oxford, il fut nommé chancelier de Saint-Paul à Londres, puis chapelain et confesseur d*Édouard III qu'il accompagna dans ses campagnes en France. Il fut ensuite nommé archev. de Cantorbéry, mais f avant d'avoir pris possession de son siège, 22août 1349. La simplicité presque rustique de ses manières lui avait valu les moqueries dédaigneuses des prélats romains k Avignon où il avait été consacré. Il fut k son époque un des rares témoins qui défendirent contre les pélagiens la doctrine de la grâce. Son livre: De causé Dei contra Pelagium, Londres 1344, publié 1618 par Savilius, est une éloquente revendication des droits de Dieu dans le salut de l'homme et de sa souveraineté absolue, contre ceux qui font t de la volonté de l'homme la maîtresse, et de la volonté de Dieu la servante. » BRAINERD, David, missionnaire auprès des Indiens de New-Jersey; plein de zèle et d'abnégation. f 1747. BRANDEBOURG, ancien état de l'emp. germanique, sans frontières naturelles et dont les limites varièrent souvent. Occupé d'abord par les Varins, puis par les Wilzes, il fut conquis par Charlemagne qui en prit la capitale, la peupla de colons allemands, et en confia la garde k une famille célèbre de chevaliers. Ceftit l'origine de l'introduction du christianisme dans ce pays. Un siècle plus tard on y trouvait encore une église chrétienne, mais les païens la détruisirent plusieurs fois. Le culte y fut rétabli sous Henri l'Oiseleur, vers 932, par Bernard Ier, margrave de la contrée; Otton y met un évêché, qui devient un centre missionnaire, 948. Après beaucoup de vicissitudes territoriales, religieuses et politiques, le margraviat est vendu par le duc de Luxembourg 1415 au hur-grave de Nuremberg, Frédéric, de la branche cadette des Hohenzollern, qui dès lors ne l'ont plus lâché et l'ont successivement agrandi. Jean-Sigismond 1618 en fit le duché de Prusse; en 1700 Fréd. III en fit un royaume et prit le nom de Fréd. Ier; dès lors l'histoire de Brandebourg se fond dans celle de la Prusse. — La réformation y trouva un terrain bien préparé; déjà dès le 14m® siècle les vaudois, puis les bohèmes et les hussites avaient travaillé les esprits; l'autorité du pape n'y était pas solide, et si le prince-électeur Joachim ne se montra pas dès l'abord favorable à Luther, ce fut plutôt par la crainte des excès que par crainte d'une réforme; la guerre des paysans le fit encore reculer davantage. Cependant les villes se prononçaient les unes après les antres, et les jeunes princes qui avaient appris à connaître Luther, qui l'avaient vu à Worms, qui avaient correspondu avec lui, étaient entrés dans le mouvement, ainsi que leur pieuse mère. Aussi, lorsque Joachim II monta sur le trône en 1535, son parti était pris, mais il ne voulut rien faire à la légère, ni user de violence. Les communes furent consultées, des conférences eurent lieu, des prédicateurs distingués furent appelés, Mélanchthon intervint avec ses tendances conciliatrices, et Luther lui-même se montra modéré, accordant aux scrupules du savant, évangélique et un peu timoré prédicateur George Buchholz, tout ce que celui-ci pouvait désirer, un crucifix d'argent et même d'or, s il le voulait; un surplis ou une chasuble de lin, de soie ou de velours; « et si le prince trouve qu'une procession autour de l'église ne suffise pas, qu'on en fasse sept, pourvu qu'on se rappelle que cela n'a rien à faire avec le salut. » Après de nouvelles négociations et quelques changements proposés par Bugenhagen et Mélanchthon, les États examinèrent de nouveau en 1540 la constitution de réforme ecclésiastique, qui fut enfin définitivement adoptée en 1542. BRANDT 1° v. Struensée. 2° plusieurs pasteurs arminiens de ce nom, à Amsterdam; ainsi Gérard B., auteur d'une Vie de Buy ter, 1690; Gaspard B., auteur d'une Vie de Grotius et d'une Vie d'Arminius, 1724. BRANT, Sébastien, né 1458 à Strasbourg dans un cabaret; prof, de droit à Bâle où il demeura 30 ans, puis syndic à Strasbourg sous Maximilien 1er. Auteur d'une satire la Nef des fous <Narrenschiff), 1494, qui donne une juste idée de l'état des mœurs de son temps. Pour lui la société est un carnaval où tous les vices agitent leurs grelots, et les hommes sont assez fous pour s'y laisser prendre. Il y a aussi des traits contre l'Église, mais il n'est pas irréligieux. BRECKLING. Fréd., né 1629 en Schleswig, 11711 à La Haye, eut une vie assez agitée; il étudia la théologie successivement à Rostock, Kônigsberg, Helmstâdt, Wittenberg, Leipzig, Iéna, Giessen. C'est à Hambourg qu'il reçut les plus vives impressions religieuses et cela d'un marchand herboriste. Après avoir servi quelque temps l'Église du Danemark, sans vouloir rien recevoir, il publia contre le relâchement du clergé une brochure qui lui valut des ennemis et des persécutions. Il dut fuir, accepta une place de pasteur en Hollande 1660, mais la quitta bientôt pour être entièrement libre, et se fixa à Amsterdam où il se lia avec tous les enthousiastes et sectaires, bons ou mauvais, qui s'y donnaient volontiers rendez-vous, sans toutefois tomber lui-même dans les excès des visionnaires; on lui reproche surtout ses opinions chiliastes. Il gagnait sa vie comme correcteur d'imprimerie. Il eut de puissants protecteurs, entre autres la princesse Marie, femme de Guillaume III, qui lui lit une pension de 400 florins, à condition qu'il se fixerait à La Haye. La princesse de Saxe lui fit aussi plus tard une pension de 80 fi. Enfin Spener, Reimar. Elsner et d'autres notabilités évangéliques ne cessèrent jusqu'à la fin de lui témoigner leur sympathie. Il s'était marié en Hollande et laissa plusieurs enfants. Son neveu Jean Moller a publié sa Vie et la liste de ses 64 ouvrages, qui respirent tous un bon esprit, mais dont le style lâche et diffus rend la lecture difficile. BREF. Ce mot qui rappelle le latin brevis, court, et selon d'autres étymologistes, l'allemand Brief, lettre, s'emploie en style de chancellerie papale pour désigner certaines communications, moins développées que les Bulles, d'un intérêt local ou temporaire, écrites sur du papier ou du parchemin ordinaire, en caractères cursifs, comme moins solennels et visant moins à la postérité. Au lieu du sceau et de la signature du pape, ils ne sont signés que du secrétariat. On trouve les principales de ces pièces dans les Bullaires publiés à diverses époques par les deux Cherubini, Barbora, Guerra, et plus récemment par Eisenschmidt 1831. BREITHAUPT, Joachim-Juste, le premier professeur de Funiv. naissante de Halle, celui qui lui a donné la direction évangélique à laquelle elle n'a cessé dès lors d'être fidèle. Né en février 1658 à Nordheim,orphelin de bonne heure, il fut appelé 1680 à la sous-direction de l'école de Wolfenbuttel, continua en 1681 ses études de théologie à Kiel, lit à Francfort la connaissance de Spener avec qui il se lia pour la vie, puis fut successivement prof, d'homilé-tique à Kiel, pasteur à Meiningen, pasteur et professeur à Erfurt en 1687. Il déploya une activité extraordinaire, se multipliant pour subvenir à tous les devoirs officiels et inofficiels de ses fonctions, prêchant, donnant des conférences, tenant des assemblées religieuses, et ameutant contre lui, non seulement les catholiques qui plus d'une fois mirent sa vie en danger, mais encore les protestants froids, et surtout les tièdes, qui désapprouvaient son zèle. L'arrivée de son ami Francke 1690 lui fut un précieux encouragement, mais déjà en 1691 Francke était destitué. Breithaupt protesta du haut de la chaire contre cette mesure, et accepta l'appel qui lui fut adressé de Halle, pomme prof, de théologie et directeur du séminaire à fonder. Il commença ses cours en nov. 1691, se fit bientôt adjoindre Francke comme prof, de langues orientales, puis en 1695 Paul Antoine. A eux trois ils firent la réputation de l'université, n'étant qu'un cœur et qu'une âme, des hommes de prière, des chrétiens de la Bible, donnant aux étudiants des soins paternels et leur faisant connaître la vraie théologie, celle de la foi, de la science et de la vie. Appelé en 1705 il Magdebourg comme surintendant général des églises du duché, et en 1715 comme abbé du cloître de Bergen, il conserva toujours sa place et une résidence à Halle. Sa correspondance était immense, et il remplissait avec un soin scrupuleux tous ses devoirs de pasteur et de surintendant. La consécration d'un ministre était surtout l'objet de préoccupations qui allaient jusqu'à l'angoisse; rien n'aurait pu le décider à imposer les mains à nn candidat non croyant ou douteux. Bien que souffrant, il travailla jusqu'à la lin, toujours actif et consciencieux, et f à Bergen 16 mars 1732. — Parmi ses ouvrages, on cite surtout ses: Institutiones theologicœ, 2 vol. 4°, et ses Poemata-miscella-nea, Magdeb. 1720. BREITINGER, Jean-Jaques, né 19 avril 1575 à Zurich; après quelques années passées dans l'enseignement, il fut appelé 1609 comme pasteur à Zurich, se distingua par son dévouement pendant la peste, par son courage à censurer les autorités quand elles manquaient à leurs devoirs, par son zèle et sa générosité à secourir les persécutés de la religion et les réfugiés de la guerre de Trente ans. Il représenta Zurich au synode de Dordrecht, et se prononça contre les Remontrants. Eloquent, évangélique, patriote, il fut le digne successeur de Zwingle et de Bullinger. f 1645. BRÈME, v. Anschar. BRENZ, Jean (latin Brentitis), le réformateur de la Souabe et du Wurtemberg. Né 24 juin 1499 à Weil, en Souabe, f H sept. 1570 à Stuttgard. II étudia à Heidelberg, où il se lia avec Mélanchthon, OEcolampade, Bucer, Billi-can, dont quelques-uns furent ses maîtres, les autres ses condisciples. En avril 1518 il entendit les conférences de Luther, dont les 95 thèses étaient déjà connues de toute l'Allemagne, et il se joignit à lui, ainsi que ses amis, sans que personne soupçonnât encore la grandeur et l'avenir de ce mouvement réformateur. Consacré par l'év. de Spire, il donna quelques cours à Heidelberg, mais bientôt devenu suspect à cause de la franchise de son enseignement, il fut heureux d'accepter l'appel de l'église de Hall, Souabe; c'est le 8 sept. 1522 qu'il y fit son premier sermon; et il y resta 25 années, avec un traitement de 80 florins, ayant refusé plusieurs places plus avantageuses. On le consultait de toutes parts; son instruction, son tact, sa modération, sa fermeté, faisaient rechercher et apprécier ses conseils. Luther le tenait en haute estime à cause de sa profonde piété et de l'équilibre remarquable de ses facultés. Lors de la révolte des paysans, Brenz réussit à préserver la ville, faisant comprendre aux révoltés leur péché, aux grands et aux riches leur responsabilité et leur devoir. Infatigable comme théologien et comme écrivain (plus de 8 vol. f°), il savait se multiplier aussi comme organisateur, et si son pays lui doit la Confemo wirtembergica, il travailla également, et d'une manière décisive, à doter d'une (institution ecclésiastique d'autres États de l'Allemagne, notamment le Brandebourg^ lâche d'autant plus difficile, que tout était à créer et qu'il fallait tenir compte des habitudes et des mœurs de chaque pays. Il s'attachait à l'essentiel et savait au besoin céder sur les détails secondaires. Luthérien sur la doctrine de la Cène, il était cependant moins absolu que plusieurs de ses contemporains; les concessions qu'il crut devoir faire, ou les explications qu'il donna, l'ont fait considérer comme nn de* chefs des Ubiquitaires. La guerre de Trente an* le força de fuir en grande hâte, déc. 1546; il se rendit à Bâle, où il apprit la mort de sa femme,. Marguerite Grâter, dont il avait eu 6 enfants. Inquiet sur le sort de ces derniers, et protège par les ducs Ulrich et Christophe, il rentra à Stuttgard, mais dut pendant plus d'un an se-cacher pour échapper aux recherches. Il raconta lui-même que dans le grenier d'une maison oîi il avait trouvé un refuge, mais rien déplus, une poule vint chaque jour pondre un œuf auprès de sa cachette, seule ressource dont il ait vécu pendant une semaine. En sept. 1550 il se remaria avec Catherine, fille de son amr le pasteur Isenmann, dont il eut 12 enfants. Envoyé en mission auprès du Concile de Trente, il revint sans seulement avoir été entendu, et le duc Christophe le nomma recteur de l'égl. paroissiale de Stuttgard. C'est là qu'il passa ses. dernières années, soignant les intérêts généraux de l'Église, en Suisse et en France, comme en Allemagne, mais sans négliger sa propre paroisse à laquelle il se devait avant tout. Sa fin fut édifiante comme avait été sa vie, à la foi* modeste, désintéressée et bien remplie. BRÉSIL. La population de cet empire s'éiè\>v à environ douze millions d'âmes; la grande majorité est catholique, mais d'un catholicisme puéril, matériel et grossier, comme partout où des conversions en masse se sont produites sous l'influence des jésuites. La liberté des cultes date de 1810. Depuis 1820 les privilèges des couvents et du clergé ont été successivement réduits, et le gouvernement a montré une grande fermete contre les usurpations de pouvoir des évêques. Il y a un archevêché à Bahia ou San-Salvador, avec 11 évêchés, 12 vicariats généraux, H séminaires et environ 1300 paroisses. Le cierge est ignorant, peu moral et mal payé. Le nombre des couvents a été réduit à 20, et aucun novice ne peut être admis, sans l'autorisation de l'empereur. La population protestante défasse le chiffre de 60 mille, mais ne peut être exactement fixée; un certain nombre de communautés se sont fondées sous le protectorat de la Prusse; il y en a aussi de hollandaises, d'anglaises, de suisses et de vaudoises du Piémont. BRETSCHNEIDER, Charles-Gottlieb, théol. allemand, né à Gersdorf 11 févr. 1776, f à Gotha 22 janv. 1848; connu par son Dictionn. grec-latin du N. T., par plusieurs travaux sur les Apocryphes, par son édition des œuvres des réformateurs, par divers essais dogmatiques, par des brochures de circonstance, par des articles de journaux, et par sa collaboration au Dictionn. de la conversation de Brockhaus. Sa tendance était plutôt rationaliste que mystique, sans aller cependant jusqu'à rejeter le surnaturel. Un des premiers il éleva quelques doutes *or l'authenticité de l'Évangile de Jean. Il entra dans le ministère sans en avoir la vocation, comme il l'avoue lui-même, et ne céda qu'aux conseils de Reinhard qui n'y regardait pas de m près. Consacré à Dresde, il professa quelques temps à l'univ. de Wittenberg. La guerre de 1806 le décida à prendre une paroisse, et il finit par accepter en 1816 la place de pasteur-surintendant à Gotha, qu'il ne quitta plus. Il a rendu pins de services par ses travaux exégétiques et historiques que par sa prédication un peu sèche et qui ne touchait pas au fond de la vie religieuse; on eût dit qu'il ne regardait la théologie que du dehors, et qu'il en parlât comme si elle ne le concernait pas. Son autobiographie, publiée par son fils en 1848, laisse l'impression d'une âme droite, qui a fait le bien dans la mesure de ses aptitudes. BRÉVIAIRE, c.-à-d. abrégé; recueil de prières qui dans l'origine, c.-à-d. vers le 91»® siècle, était écrit à l'usage de tous, par opposition au plenarium, ou pléniaire, qui était le missel, ou livre de messe, à l'usage des prêtres seuls. Sa rédaction a beaucoup varié suivant les temps et les lieux; les papes sont intervenus à plusieurs reprises, mais aussi longtemps qu'il ne s'agissait que d'extraits copiés à la main, il était difficile d'arriver à une uniformité même relative. Chacun faisait plus ou moins son choix. Le bréviaire renferme ordinairement 4 parties: «les Psaumes pour les différentes heures du jour; des fragments pour les fêtes relatives à Christ; des prières pour les fêtes des Saints; ^nfin une partie d'édification générale. Puis viennent les Appendix: l'office de Marie, les psaumes des degrés, les psaumes pénitentiaux, des bénédictions, etc. Si l'apôtre a dit: Priez sans cesse, l'Écriture semble indiquer spécialement certaines heures pour la prière, Dan. 6, 10. 13. Ps. 53, 18. Act. 2, 15. 3, 1. 10, 9. 16, 25.; c'est en vue de satisfaire à ce devoir et à ce besoin que l'Église a eu l'idée d'un livre de ce genre. La lecture journalière en est imposée à tous les prêtres, et à tous ceux qui possèdent des bénéfices ou qui ont fait des vœux. BRIÇONNET, 1° Guillaume, cardinal, év. de Saint-Malô, puis archev. de Reims et premier ministre de Charles VIII, inspira la malheureuse campagne de ce roi contre l'Italie; il fut excommunié par Jules II, et f 1514. Avant d'entrer dans les ordres il avait été marié et avait eu 2 fils, qui furent évêques: 2o L'un à Toulouse, 3° L'autre, le plus célèbre, aussi Guillaume, d'abord à Lodève, puis à Meaux. Il fut envoyé par Louis XII comme ambassadeur auprès de Jules II, et il assista 1511 au conc. de Pise, qui avait surtout pour mission de limiter les pouvoirs des papes. Mis par son père en possession de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, il essaya, 1514, mais sans succès, d'y faire revivre les anciennes règles de l'ordre. Il se consola de son échec en accordant une paisible hospitalité à des savants et à des hommes pieux, tels que Lefèvre d'Étaples, Vatable, Pontanus, Farel, etc. Nommé 1516 à l'évêché de Meaux, il fut envoyé la même année comme ambassadeur à la cour de Léon X. A son retour, deux ans après, il voulut essayer aussi de réformer son diocèse, mais il se heurta contre la violente opposition de ses curés qui voulaient continuer de vivre à Paris, et des cordeliers dont il troublait la paresseuse oisiveté. Il cessa d'agir en public, mais il poursuivit, surtout avec Lefèvre et Farel, l'étude des Écritures. 11 leur offrit un asile en 1521, quand ils se virent menacés de persécutions, et il leur permit même de monter en chaire et de distribuer des Bibles. Il entretenait avec la sœur du roi, Marguerite, la future reine de Navarre, une correspondance, dont quelques fragments ont été publiés par M. Génin, et qui jette une singulière lumière sur les dispositions de la cour d'alors. Mais Farel allant toujours plus loin dans ses affirmations évangt* liques et dans la guerre aux abus, Briçonnet déjà suspect d'hérésie prit peur, d'autant plus que le mouvement s'accentuait davantage en Allemagne. Farel, le premier, dut quitter Meaux, où la réforme comptait déjà de nombreux adhérents, et le faible prélat, voyant l'orage s'avancer, fit tout pour le conjurer. Il rendit coup sur coup plusieurs décrets pour rétablir sa réputation d'orthodoxie, 15 oct. et 13 déc. 1523; et comme cela ne suffisait pas, il demanda que le parlement nommât une commission d'enquête et fit visiter son diocèse. La Bible de Lefèvre fut condamnée au feu, et plusieurs personnages considérables furent décrétés de prise de corps; ils réussirent à gagner Stras* bourg ou Bâle. Briçonnet se justifia de son mieux, laissant persécuter ses anciens amis, et f 25 janvier 1534. Ses ouvrages se réduisent à quelques discours dans lesquels, désirant une réforme, il ne la veut pas au prix d'un schisme. II était pieux, mais n'était pas à la hauteur des besoins de son temps. BRIDAINE, Jaques, célèbre prédicateur catholique, né 21 mars 1701 près d'Uzès, avait toute la fougue méridionale, une foi vivante, l'amour des âmes, une imagination colorée, une éloquence populaire. Il fit jusqu'à 256 missions et fut même appelé à Paris, où il prêcha à Saint-Sulpice quelques-uns de ses meilleurs sermons, un entre autres sur l'éternité, qui fit une immense impression et dont La Harpe cite l'exorde comme un chef-d'œuvre; de môme son sermon sur l'aumône. L'abbé Carron en a publié quelques fragments, avec une Notice sur sa vie, intitulée Le modèle des Prêtres, Paris 1804. Cinq volumes de sermons ont paru dès lors, 1823. qui rappellent comme genre les sermons de Spurgeon; mais le catholicisme s'y fait sentir, + 22 sept. 1767 à Roquemaure. BRIGITTE 1° ou Brigide, sainte irlandaise, née 467 à Fochard, Ârmagh, fondatrice de Kil-dare et de plusieurs couvents dont elle fut l'abbesse. Patronne de l'Irlande, f 523. 2° Fille de Birger, prince suédois, de la vieille famille royale des Brahé. Née 1302, elle se sentait appelée à la vie ascétique, mais à l'âge de 16 ans, pour obéir à son père, elle épousa Wulpho-Gudmarson, prince de Néricie, qui avait les mêmes penchants qu'elle. Ils se firent recevoir du tiers-ordre des franciscains, et vécurent religieusement. Ils eurent 8 enfants, s'adonnèrent aux œuvres de bienfaisance, fondèrent un hôpital et visitèrent eux-mêmes les malades. Son mari + 1344, ayant voulu faire un voyage à Saint-Jacques de Compostelle, et étant entré en Suède dans un couvent de cisterciens. Elle partagea alors ses biens à ses enfants, fonda 1363 à Wadstena, Linkô-f>ing, un couvent pour 60 religieuses, avec 13 moines pour directeurs, et partit en 1365 pour Rome, où elle fonda une maison pour les étudiants et les pèlerins suédois. Elle fit ensuite à 69 ans le pèlerinage de Jérusalem, et revint mourir à Rome 1373, après avoir dicté ses Révélations à ses deux confesseurs, Pierre, prieur d'Alvastre, et Mathias, chanoine de Linkôping. Son corps fut transporté & Wadstena. Elle fut béatifiée 7 octobre 1391 par Boniface IX, et canonisée 1419 par Martin V, malgré Gerson. Son recueil de Révélations, suspect dès le premier jour, fut déclaré authentique par le conc. de Bâle, sur le rapport du cardinal Turrecre-inata, et il a été souvent réimprimé, mais il porte en lui-même le cachet des prêtres, l>eau-coup plus que celui de la religieuse. On y voit jusqu'au fanatisme le culte de la Vierge immaculée, et l'éloge du célibat, avec des détails puérils mis dans la bouche du Sauveur. — L'ordre de sainte Brigitte, appelé aussi Ordre du Sauveur, fondé par la sainte suédoise, fut reconnu par Urbain VI, 1370. Il se compose de moines et de nonnes, sous la conduite d'une abbesse qui est censée représenter Marie* Il se répandit surtout dans le nord, mais eut aussi quelques maisons en France et en Italie. OEco-lampade fit partie d'un de ces couvents, près d'Augsbourg, 1520-1522. Au commencement du 17m* siècle quelques maisons de cet ordre furent fondées en Espagne sous le nom de Recol-lecti, ou les Recueillis. BRILL, Jacob, né 21 janv. 1639, f à Leyde, 28 janv. 1700. Philos, et théol. mystique et plus ou moins panthéiste, auteur d'une quarantaine de petits écrits où, à force de chercher la vie cachée avec Christ en Dieu, il finit par oublier le Christ mort pour nous; le renoncement qu'il rêve aboutit presque à l'anéantissement de l'âme par son absorption en Dieu. BRITTINIENS, variété des ermites augustins, ainsi nommés de leur établissement à Brittini, marche d'Ancône. Ils furent reconnus par Grégoire IX. BROGNI, Jean (de), év. d'Ostie, cardinal de Viviers, natif d'un village des environs d'Annecy, présida le concile de Constance, en l'absence des papes déposés ou en fuite, dans la séance où Jean Huss fut condamné au* bûcher. BROMLEY, Thomas, né 1er féy. 1629 à Worcester, f 13 avril 169i. II vécut à l'époque des grandes agitations politiques et religieuses de l'Angleterre, lit sous Cromwell d'excellentes études à Oxford, où il obtint même un bénéfice au collège de Toutes-Ames; mais il le perdit sous Charles II, ayant refusé de signer la liturgie anglicane. Disciple de Bôhme, il forma avec Pordage, Jeanne Leade, et quelques amis, une société d'amour fraternel, recherchant la sanctification et proscrivant jusqu'au mariage. Ils attendaient, mais sans impatience, la seconde venue de Christ, ayant des visions célestes, et quelques-uns même le don de prophétie. Son écrit le plus important a pour sujet les Progrès de l'âme chrétienne depuis sa nouvelle naissance jusqu'à son entière sanctification, sujet qu'il a traité encore dans son livre du Voyage des enfants d'Israël dans le désert, où le non) de chaque campement et les événements qui s'y rattachent lui fournissent l'occasion de rapprochements spirituels et mystiques. Sans avoir été consacré il remplit jusqu'à la lin le ministère actif de la parole, et s'endormit en paix, en répétant: Veillez ! veillez ! BROSSE, Salomon (de), architecte soi» Henri IV et Louis XUI; né à Verneuil-sur-Oise, f 9 déc. 1626 à Paris, laissant un fils et 5 filles. Ses descendants retournèrent au catholicisme. On lui doit entre autres le Palais du Luxembourg, et il avait bâti pour ses coreligionnaires le temple de Charenton. BROUSSON, Claude, né à Nîmes 1647, y fit ses premières études et y fut reçu avocat. Il s'établît en cette qualité à Castres, puis à Cas-telnaudary et à Toulouse, où les protestants trouvèrent toujours en lui un défenseur dévoué. Il reçut dans sa maison les seize directeurs des églises, et se compromit au point qu'il fut obligé de s'enfuir 1683. Il vint d'abord à Nîmes, mais dut se réfugier en Suisse. Il fut pendu en effigie le 3 juillet 1684. Il exerçait en paix sa profession d'avocat à Lausanne, avec ss femme N. Combeile, et son fils unique, Barthélémy; mais souffrant de savoir ses frères exposés k toutes les horreurs des persécutions, il revint dans les Cévennes sous le pseudonyme de Beausocle, et sans autre consécration que celle que lui avaient donnée les prophètes en *ept. 1695, il fit de nombreuses tournées missionnaires, inaugurant le culte du Désert, prêchant le jour et la nuit, dans les cavernes et dans les bois. Sa tête fut mise à prix, d'abord pour ÎOO, puis pour 500 et 600 louis; pourchassé par les hommes de Basville, il changeait >ans cesse de résidence. Après plusieurs voyages et missions en Suisse et en Hollande, il revint encore visiter les églises du midi, et finit par être arrêté à Oléron, Béarn, le 19 sept. 1698; il fut transféré à Pau, puis dans la citadelle de Montpellier le 30 oct. Basville, dans la crainte d'un soulèvement, le traita avec une douceur relative et lui accorda la grâce d'être pendu avant d'être roué, le 4 nov. 1698. Bouil-let répète après d'autres, quoique le fait ait été exagéré et dénaturé, qu'il avait préparé avec Schomherg un projet d'invasion contre la France. — On a de Brousson 3 vol. sur l'État des réformés de Fr., plusieurs Lettres au clergé, aux catholiq. etc.; la Manne mystiq. du désert, collection d'homélies, et un certain nombre d'opuscules. BROWN, Robert; théol. anglais, né vers 1550 à Northampton, fit de bonnes études à Cambridge, mais s'y distingua déjà par le caractère inquiet qui fit le malheur de sa vie, et par ses attaques contre la hiérarchie anglicane qui furent le fond de sa théologie. Il se joignit aux anabaptistes hollandais de Norwich dont il ne tarda pas à devenir le chef, et sa prédication fougueuse grossit bientôt le nombre de ses partisans. A ses vues sur l'Église et sur les sacrements se mêlaient des tendances républicaines, qui lui valurent la prison. Relâché en 1580, par la protection de lord Burleigh son parent, il s'enfuit à Middlebourg avec un certain nombre de ses adhérents; il y publia un volume intitulé La réformation sans concessions, demandant le retour pur et simple au christianisme primitif. A la longue la division se mit dans son troupeau, qui s'était considérablement accru, et il retourna en Angleterre, où après des alternatives de soumission, de révoltes, d'excommunication et de prison, il obtint une petite paroisse dans son comté natal. Il f 1630, à l'âge de 80 ans, se vantant d'avoir été arrêté 32 fois, et plusieurs fois mis dans des cachots où il ne pouvait pas même voir sa main en la plaçant devant ses yeux. Ses sectateurs voyaient en lui un saint, sans que rien explique ou justifie cet enthousiasme. En tout cas ils restèrent plus fidèles que lui à ses doctrines, et sous le nom de — Brownistes — bravèrent les persécutions, s'établirent en Angleterre, en Hollande et en Amérique, et repoussèrent toute espèce d'organisation ecclésiastique, presbytérienne aussi bien qu'épiscopale, ne connaissant d'autre église que la réunion des chrétiens d'un même endroit, la majorité faisant la loi et exerçant la discipline. — Il ne faut confondre ce Brown, ni avec le ministre du même nom, James, écrivain distingué 1715-1764, ni avec le docteur Jean Brown, médecin écossais 1736-1788, qui fit école et qui eut aussi des disciples appelés brownist&s expliquant tout par sa théorie de l'excitabilité. BRUCIOLI, Antonio, né à Florence vers la fin du 15m« siècle, banni à la suite d'une conspiration contre les Médicis. visite la France et l'Allemagne, étudie les Écritures et peut rentrer à Florence 1527. Arrêté en 1529 comme luthérien, il réussit à s'enfuir à Venise, où il publie sa traduction du N. T., faite avec l'aide de ses cousins Francesco et Alessandro, et dédiée à Anne d'Esté; en 1536 il publie aussi l'A. T. Après quelques années de tranquillité il fut recherché de nouveau, et trois procès troublèrent sa vieillesse. Il fut incarcéré et signa une rétractation, le 22 juin 1555, sous l'influence de sa nombreuse famille, f 4 oct. 1566 dans la misère. Il avait composé contre le clergé des Dialogues, dédiés à Max. Sforza. BRUEYS, famille languedocienne, dont le nom s'écrit aussi Bruès, Bruex, Brueix. Elle se composait de plusieurs branches, et a produit quelques hommes distingués. Malheureusement elle a produit aussi 1° un traître, Alexandre, qui feignit de se jeter dans le parti des cami-sards, qui surprit leurs secrets et les dénonça à Basville. Il mourut aux galères 1707, pour avoir tué sa femme; 2° un renégat, David-Augustin, né à Aix 1640, qui étudia d'abord le droit, puis la théologie; il se fixa à Montpellier, écrivit contre Bossuet 1681 une Réponse remarquable, se laissa ensuite convertir par Bossuet 1682, puis essaya de se réfuter lui-même, mais sans succès, 1683; se fit ordonner prêtre pour plaire à Louis XIV; entreprit de prouver aux protestants qu'ils avaient tort de se plaindre dn régime paternel auquel les soumettait le roi, et quittant définitivement la théologie, il se mit à faire des comédies, de compte à demi avec Palaprat. On lui doit entre autres l'Avocat Patelin, le Grondeur, la Force du sang, le Concert ridicule, etc. f à Montpellier le 27 nov. 1723. BRUNO 1* appelé aussi Brun; 3™ fils de Henri l'Oiseleur et frère d'Othon I«r, né 925, fut destiné à la carrière ecclésiastique et envoyé de bonne heure à Utrecht, où il reçut une éducation soignée. Ses dispositions religieuses et morales étaient à la hauteur de ses talents, et il ne cessa d'employer son influence pour le bien. Son frère Othon fut à peine monté sur le trône qu'il le fit venir auprès de lui 939; il le fit son chapelain et le mit à la tête d'une école palatine, à laquelle furent appelés les professeurs les plus célèbres. Bruno eut aussi, comme chancelier, la surveillance des églises et des couvents, et il y fit observer les règles des différents ordres. En 951 il accompagna Othon en Italie, où il se montra négociateur habile. Il eut plusieurs fois à apaiser des révoltes contre l'autorité royale, qu'il estimait venue de Dieu. Wigfried, archev. de Cologne, étant mort en juillet 953, Bruno lui succéda et son frère lui donna en même temps les pouvoirs et le titre d'archiduc, afin d'humilier ou d'affaiblir le parti ducal, en le subordonnant à un ecclésiastique prince du sang. Bruno prit encore une part active aux complications du règne de son frère, vis-à-vis de l'Italie, de la Hongrie, de la Lorraine et du pape lui-même. U fut à diverses reprises envoyé en France, tantôt seul, tantôt avec une armée. pour y défendre les droits des rois mérovingiens. Les contestations entre les cousins rivaux ayant recommencé, Bruno se mit en route pour Compiègne, mais il tomba malade à Reims, où il f 11 oct. 965. Son corps fut transporté à Cologne, dans l'égl. de Saint-Panta-léon. 11 avait reçu de ses contemporains le titre de Grand et de Pacificateur; l'Eglise y ajouta celui de Saint, mais ce ne fut pas sans quelques difficultés, car on lui reprochait d'avoir trop cultivé les lettres et surtout la philosophie; l'intervention de l'apôtre Paul auprès de Christ, aurait seule vaincu la résistance. 2° Bruno, l'apôtre de la Prusse, plus connu sous son nom adoptif de Boniface; né 970, d'une famille considérable de la Saxe, de laquelle devaient sortir plus tard l'emp. Lothaire III, fut destiné à l'état ecclésiastique, pour lequel il avait une vocation sérieuse. Nommé chanoine de Saint-Maurice à Magdebourg, il vit la cour de près, accompagna Othon III en Italie, s'enthousiasma des souvenirs de Boniface, et à son retour, ayant appris la mort d'Adalbert, il ne rêva plus que le martyre, se retira du monde, se fit moine, vécut dans les bois avec quelques amis, et accepta l'appel qui lui fut adresse d'aller évangéliser la Pologne. Il s'y rendit en 1004, ayant reçu du pape et d'Henri II le titr* d'archevêque; après une visite en Hongrie, il retourna en Pologne, avec 18 de ses amis, écrivit une vie d'Adalbert, et entreprit d'évangéli-ser aussi la Prusse, pendant que ce pays était en guerre avec Boleslav. Faits prisonniers, lui et ses amis, ils eurent la tête tranchée 14 févr. 1009. Boleslav réclama leurs corps. La ville d* Braunsberg (mont de Brun) s'éleva plus tard à l'endroit où les martyrs avaient péri. 3° Bruno, fondateur de l'ordre des Chartreux; né à Cologne vers 1030, t en Calabre 6 oct. 1101. Entré dans le sacerdoce et revêtu de plusieurs dignités ecclésiastiques, il se sentit attire par la vie monastique, refusa i'archevéché de Reims 1080, et se rendit avec six de ses amis dans les solitudes montagneuses des environs de Grenoble, en un désert appelé la Chartreuse, où il fonda un monastère soumis à une règle rigoureuse 1084. Appelé à Rome 1089 par son ancien disciple, Urbain II, il l'assista de ses conseils, sans exercer toutefois une grande influence, refusa toute récompense, entre autres l'archev. de Reggio, et se retira 2 ans après dans la Calabre, où il fonda une nouvelle Chartreuse, sou* le nom de Saint-Étienne, et où il finit ses jours dans les exercices de la piété. Il a laissé quelques écrits de théol. Canonisé en 1514. Sa vie a été écrite par le p. de Tracy, 1786. 4o Bruno d'Asti, né à Soleria, év. de Segui, f 1125. Auteur de quelques ouvrages de théol.^ traités, commentaires, etc. 5° Bruno le Saxon, écrivit vers 1082 une histoire des guerres que les princes saxons eurent à soutenir contre Henri IV; il prend chaudement le parti de son pays, mais ne peut être accusé d'avoir sciemment altéré les faits. Le style est coloré, rapide, vivant. Il n'eu reste plus qu'un seul mss. connu, mais de nombreux fragments dans la Chronique de Magdebourg. L'original a été impr. en 1600, et dès lors plu -sieurs fois. 6° Jordano Bruno, v. Jordano. BRUYS ou Brueys, Pierre (de), prêtre languedocien, répandit la vérité dans plusieurs contrées du midi de la France, notamment dans le Dauphiné. la Provence et le Languedoc; il travailla courageusement pendant 20 ans, 1104-1124, combattant les vieilles cérémonies romaines et les doctrines contraires à l'Écriture. Il alla un peu loin, et manqua de modération et de prudence. Il s'élevait contre léchant, contre le baptême des enfants, contre la construction de temples matériels; il n'admettait pas que le corps de Christ fût dans la Cène; il fit brûler publiquement des crucifix, mangeait de la viande en carême, etc. Il fut brûlé à Saint-Gilles, Gard, par le peuple furieux excité par les prêtres 1130. Ses disciples, appelés de son nom Pétrobruriens, demeurèrent après lui; le plus célèbre fut Henri de Lausanne, avec lequel on Ta quelquefois confondu, et qui eut ses propres partisans. BUCER, Martin, de son vrai nom Butzer, \u il traduit quelquefois en latin par emunctor; né 1491 à Schlestadt; le plus célèbre des réformateurs de l'Alsace, non par ses talents ou par sa science seulement, mais aussi par son caractère et l'équilibre de ses facultés. A 15 ans il entra comme élève chez les dominicains; puis, lorsqu'il eut prononcé ses vœux, on l'envoya à Heidelberg oii il se passionna pour le grec et rhébreu, et finit par étudier la théologie. Il acheva ses études k Mayence, oti il reçut l'ordination, et revint à Heidelberg comme surveillant des jeunes frères qui suivaient les cours. Mais il devint bientôt suspect; non seulement il était fort en grec et en latin, mais il recommandait à ses élèves l'étude de la Bible; il approuva publiquement les doctrines de Luther à la conférence de Heidelberg 1518. Sa dispute contre Cochlâus, Francfort 1520, son enthousiasme pour Érasme, son admiration pour Luther à Worms, achevèrent de le perdre. Une enquête fut ordonnée contre lui, en même temps qu'il demandait à Léon X la permission de quitter wn ordre. Il s'enfuit d'abord à Louvain, puis *hez l'électeur palatin Frédéric qui le nomma son chapelain, puis chez François de Sickingen qui lui donna la cure de Landstuhl. C'est alors que, rompant définitivement avec Rome, il épousa une religieuse, Élisabeth Pallass, qui avait quitté son couvent, 1522. Mais la guerre le força de partir; il se rendit à Wissembourg où l'appelaient les partisans de la réforme, et à la fin de mai 1523, chassé de nouveau par la guerre et par l'excommunication de l'év. de Spire, il arriva à Strasbourg où déjà Zell, Capiton et d'autres prêchaient hardiment l'Évangile. H était dans un état complet de dénûment. Après bien des difficultés il fut reçu bourgeois de la ville, autorisé à prêcher et à faire des lectures publiques, et en 1524 nommé par l'Église et confirmé par le Sénat comme pasteur de Sainte-Aurélie. En 1528 il assista à la dispute de Berne, en 1529 au colloque de Mar-wurg; en 1530 il fut élu à la place de saint Thomas, et en 1531 nommé président du Consistoire. Il ne réforma le culte que successivement, avec beaucoup de prudence, au fur et à mesure que l'occasion s'en présentait, et autant que possible, d'accord avec la majorité de ses paroissiens. Il eut fréquemment à intervenir auprès des théologiens étrangers à propos des différends sur la Cène; tout en étant à peu près luthérien quant à la doctrine, il n'attachait pas la même importance que Luther à l'unité de vues sur ce point, et il fit ses efforts pour maintenir l'union. C'est lui qui rédigea, pour être présentée à Charles-Quint à la diète d'Augs-bourg, la fameuse confession dite tètrapolitaine, des 4 villes de Strasbourg, Constance, Memmin-gen et Lindau: il obtint ainsi pour ces villes qu'elles fussent admises provisoirement dans la ligne de Smalcalde 1531. Il fut appelé à presque toutes les conférences qui eurent pour but d'amener une entente entre les théologiens réformés suisses et les allemands, à Leipsic, Ha-guenau, Spire, Worms, Ratisbonne, mais ses tentatives de conciliation échouèrent contre l'obstination des luthériens; elles n'eurent d'autre résultat, grâce aux formules vagues qu'il proposait, que de le faire accuser de faiblesse par les uns, de duplicité par las autres. Nommé doyen du chapitre de Saint-Thomas, 1544, après avoir passé 3 ou 4 aqs à Bonn et à Cologne, cherchant à y établir la Réforme, il refusa en 1548 de signer l'Intérim et dut quitter secrètement Augsbonrg. La colère de l'emp. le poursuivit à Strasbourg et obtint sa déposition, ainsi que celle de son ami et collègue Fagius; après avoir hésité entre Wittenberg et Genève, où ils étaient appelés par Mélanchthon et Calvin, les deux amis se décidèrent pour l'Angleterre, où Cranmer leur offrait du travail et une position. Ils quittèrent Strasbourg le 5 avril 1549, arrivèrent le 25 à Londres, et se mirent à reviser la version de la Bible et la liturgie anglicane. Bucer nommé prof, k Cambridge et docteur de l'université, ne pouvait cependant se faire ni au climat, ni à la langue, ni aux habitudes du pays; il se disposait à repartir pour Strasbourg, quand la maladie l'enleva, 28 févr. 1551, peu de mois après la mort de Fagius. La duchesse de Suffolk le soigna dans sa maladie. Il fut enterré avec une pompe extraordinaire. Marie la Sanguinaire le fit exhumer en 1554, ainsi que Fagius, et brûler leurs os, mais Élisabeth, en 1560, répara cet indigne outrage en faisant recueillir pieusement les cendres de ces illustres étrangers. Bucer avait eu d'Élis. Pallas 13 enfants, dont 5 moururent de la peste eu 1541, ainsi que sa femme; il se remaria en 1542 avec la veuve de son collègue Capiton. Les anabaptistes troublèrent un moment l'église et la ville de Strasbourg, 1533-1539; des conférences et des mesures de rigueur ne produisirent aucun bien; le calme ne se rétablit que lorsqu'un synode eut décidé que les parents ne seraient pas obligés de faire baptiser leurs enfants. pourvu qu'il les élevassent chrétiennement. Bu-cer a laissé beaucoup de livres, la valeur de 10 in-f°, mais on n'en a aucune édition complète, et c'est à peine si l'on en a une liste un peu exacte; v. Haag. Le plus important est son: De regno Christi, dédié au roi Édouard; le reste se compose de commentaires, de sermons, dissert, sur la Gène, Lettres, etc. BUCHANAN, Claudius, missionnaire aux Indes, né 12 mars 1766 à Cambuslang, près Glasgow. Fils de parents pieux, il eut cependant une jeunesse dissipée et vagabonde. A Londres ses souvenirs d'enfance se réveillèrent; il eut le bonheur d'entendre et de voir de près le célèbre prédicateur John Newton; il se convertit; un ami lui fournit les moyens de se rendre à Cambridge, où il fit de brillantes études, mettant toujours la Parole de Dieu au-dessus de toute autre science. Après 4 années il fut nommé chapelain de la Compagnie des Indes à Barrack-pore, près de Calcutta, où il arriva le 11 mars 1797. C'était une sinécure; au bout de 18 mois 11 n'avait pas encore pu prêcher une seule fois; les officiers aimaient mieux employer leurs dimanches à des courses (Je chevaux. 11 appelle néanmoins cette station son Patmos, à cause de sa solitude spirituelle, et surtout parce qu'il put se livrer à son étude favorite des Écritures dans les langues originales; il profita également de ce temps pour apprendre l'indoustani et le persan. En 1800 il fut envoyé à Calcutta comme chapelain et comme professeur au collège de Fort-William, dont il devint ensuite vice-prévôt. Lord Wellesley, plus tard Wellington, était alors gouverneur-générai, et exceptionnellement bien disposé en faveur de l'Evangile. Buchanan écrivit un Mémoire sur la convenance de donner aux Indes une constitution ecclésiastique, réclamant pour la première fois la division du pays en diocèses, avec des évéques et des ministres. Il ne cessa de travailler par tous les moyens à obtenir ce résultat. Il visita en mai 1806 les églises syriennes de Malabar, et fut très satisfait de son voyage; il le fut moins de son passage à Goa, où il vit le grand inquisiteur portugais et la dernière retraite des autodafés. Il fraternisa en route avec les missionnaires luthériens, baptistes, et autres, qu'il rencontra. De retour à Calcutta en 1807, il vit avec regret lord Minto remplacer lord Wellesley, et la Compagnie devenir toujours plus hostile à tout essai d'œuvre religieuse. Il comprit que c'était en Angleterre môme qu'il devait venir plaider cette cause et il y arriva au printemps de 1808. La lutte fut longue et difficile, mais enfin en 1813 le parlement décida que l'Inde aurait son évêque, assisté de trois archidiacres; Mid-d le ton fut le premier élu, puis vinrent Heber, James, Turner, Wilson, etc. L'œuvre de Buchanan était achevée; il f en paix 9 février 1815. BUCHLEIN, Paul, plus connu sous sou nom latin de Fagiu*; né 1504 à Rheinzabern où son père était instituteur, montra d'étonnantes dispositions pour l'étude, mais eut à lutter longtemps contre la pauvreté. A 11 ans il partit pour Heidelberg, à 18 pour Strasbourg où il trouva en Capiton un bon professeur et en Bu-cer un ami, mais en 1527 il dut renoncer à la vie universitaire et accepter une place de maître d'école à Isny, Souabe, où il se maria et où, en exerçant le ministère depuis 1537, il put monter une imprimerie hébraïque qui ne publia pas moins de 15 ouvrages en 2 ans, réimpr. de Kimhi, travaux originaux de Fagius et de son ami Élie Levita. La peste de 1541 prouva que le savant était aussi un pasteur dévoué. Un triple appel qui lui fut adressé en 1542 montre la réputation dont il jouissait; il refusa la place de prof, à Marbourg, accepta pour 2 ans celle de pasteur à Constance, puis définitivement celle de prof, à Strasbourg en remplacement de Capiton. Il y arriva en 1544, et y resta (sauf une courte absence en 1546 pour réorganiser l'université de Heidelberg) jusqu'en 1549. époque à laquelle, ayant refusé de signer l'Intérim, il fut déposé et se rendit avec Bucer en Angleterre. A peine nommé prof, d'hébreuà Cambridge, il f le 13 nov. 1549, probablement empoisonné. V. Bucer. Ses écrits, au nombre de 18, intéressent plus la science que la religion; le style en est sobre, plus exact qu'élégant. BUDDÉE (Buddœus), Jean-François, ne 25 juin 1667 à Anclam, Poméranie, où sou père était pasteur, fut un des thèol. les plus universels de son temps, ce qui dit à la fois son côté fort et son côté faible. D'une piété vivante qui en fit l'ami de Spener et de Zinzendorf. il avait un tempérament éclectique, qui le rendit quelquefois suspect et lui causa des difficultés a Halle. Les langues orientales, la philologie, la philos., la théol., le droit, lui étaient également familiers. Il enseigna successivement à Witten-berg, Iéna, Cobourg, Halle 1693-1705, et enfin de nouveau à Iéna jusqu'à sa f 19 nov. 1729. Quelle que fût la branche qu'il enseignât, il prêchait volontiers et fréquemment. Il regardait la pratique de la foi comme le but et la fiu de toute théologie. Ses écrits, dissertations, programmes universitaires, etc., dépassent la centaine: mentionnons seulement ses Éléments de philos, pratique, 1697; Institutions de philos. éclectique 1705; Instit. de théol. morale 1711; Hist. ecclés. de l'A. T. 1715; Thèses sur l'athéisme et la superstition; Introductions, Église apostolique, etc. BUDE, Guillaume (de), né 1467 à Paris, f 1540; le plus célèbre humaniste et helléniste de s«n temps, ami d'Érasme qui l'appelait le Prodige de la France à came de sa vaste érudition. Apprécié par Louis XII, il fat nommé par François Ier son bibliothécaire et maître des requêtes; il décida la fondation du Collège royal, aujourd'hui Collège de France. Ses divers écrits ne lui assignent aucune place dans l'hist. ecclésiastique; il n'y figure que comme ami d'Érasme, et parce que différents indices ont Eut supposer que cet émiuent jurisconsulte serait mort protestant. En tout cas sa femme et la plupart de ses enfants embrassèrent la réforme. Une partie de ses descendants se fixèrent à Genève. où quelques-uns occupèrent des places éminentes dans l'enseignement et la magistrature. BUGENHAGEN, Jean, surnommé Pomera-**s, le Poméranien, de son lieu d'origine. Né à Wollin, 24 juin 1485. Après de bonnes études a Stettin et à Greifswald, il entra dans l'enseignement, à Treptow comme recteur en 1805, à Bel bac k en 1517 comme prof, de théol. chargé de faire connaître aux moines l'Écriture sainte. 11 composa pour eux une Harmonie des Év., qoi fat imprimée en 1530. Il fut chargé par Frèdéric-le-Sage de visiter les villes, les châteaux et les couvents de la Pomèranie, et le résolut de ses recherches fat pnblié en 1528 sons le titre de Pomerania; k côté d'un grand talent d'observation, et dans un style remarquable pour l'époque, on reconnaît dans ce travail le penseur chrétien, nourri de la Bible dès sa jeunesse. Le livre de Luther sur la Captivité de Babylone, 1520, le scandalisa d'abord, comme l'œuvre d'un hérétique, mais an bout de peu de jours il revint sur cette impression, se déclara poor la réforme, et y décida môme son abbé, Jean Bolduan. En 1521 il vit à Wittenherg Lather et Mélanchthon, et leur plut tellement qu'ils le retinrent et lui confièrent un enseignement public. Ses leçons sur les Psaumes, qui n'ont encore rien perdu de leur valeur, parurent en 1524. En 1523 il était nommé pasteur et prof, et en 1536 surintendant. C'est lui qui bénit le mariage de Luther, dont il était devenu l'ami le plus intime. Il refusa dès lors toutes les places qui lui furent offertes, même en 1514 l'évêché de Pomèranie; mais, tout en continuant de résider à Wittenberg, il ne recula pas dans les fort nombreuses missions dont il fut chargé sa dehors: à Brunswick, sept. 1528 pour or-puiser la nouvelle église; à Hambourg, à Lu-beck, en Pomèranie; en Danemark, dont il couronna le 12 août 1537 le roi Christian III et la reine, et où il passa, sauf quelques interruptions, presque 5 années; dans le Schleswig-Holstein, etc. Savant distingué, il était encore organisateur et administrateur, et rendit comme tel de grands services k la réforme. Son nom se trouve mélé aux principaux événements de son temps et toujours dans le sens de la modération: k la controverse avec les Suisses, à la rédaction des 17 articles d'AufBbonrg, k la formule de Concorde de Wittenberg, aux discussions de Smalcalde, et surtout k la trad. de la Bible: en allemand d'abord avec Luther, puis seul en bas-saxon pour la Pomèranie. Ses dernières années furent douloureuses; la mort de Luther fat pour lui un coup terrible. Puis vint la guerre de Smalcalde; pendant le siège de Wittenberg, et malgré toutes les menaces, il resta fidèle k son poste et mérita l'estime de ses ennemis eux-mêmes. Pendant l'Intérim de Leip-sig il refusa de rien changer à l'organisation du culte: Le pays, dit-il, peut avoir un autre maître, mais l'Église reste la même. Il prit aussi peu de part que possible aux controverses religieuses, et quand il fut trop affaibli pour pouvoir encore prêcher, il continua de se rendre au culte voulant prier jusqu'à la fin pour son église. Il s'éteignit en paix le 20 avril 1558. Outre ceux de ses écrits qui ont été déjà mentionnés, il faut citer divers écrits de circonstance, et des réflexions pratiques sur Job, le Deutéronomp, les Rois, Samuel, les Actes, les Épîtres, etc. BULGARES, peuple scythique ou tartare d'origine, mais qui, ayant quitté au 5"»® siècle les bords du Volga pour s'établir le long de la mer Noire et sur les rives de la mer d'Azof, finit par adopter la langue slave et un peu les mœurs de sa nouvelle patrie. Son territoire fut longtemps indéterminé et ses limites varièrent. Au 9rae siècle les Bulgares occupaient l'ancienne Dacie, la Mésie inférieure et une partie de la Hongrie. Un grand nombre d'entre eux s'étaient faits mahométans, mais ceux qui émigrèrent du côté du Pruth et du Danube, mis en contact avec le christianisme, se convertirent peu à peu sous l'influence des missionnaires grecs et romains. La lutte dura trois siècles entre les Bulgares et l'empire d'Orient. En 811 ils arrivèrent jusqu'aux portes de Constantinople, firent périr Nicéphore, prirent Andrinople, massacrèrent des milliers d'habitants, et en emmenèrent une foule d'autres comme esclaves, entre autres le pieux archev. Manuel, qui paya de sa vie la tentative qu'il fit d'évangéliser autour de lui. Mais en 842 Bogoris monta sur le trône des Bulgares, en môme temps que Théodora sur celui de Constantinople; obligé de demander la paix, il la conclut avec un échange de prisonniers, et il recouvra ainsi sa sœur, qui était devenue chrétienne pendant sa captivité. Menacé d'une famine et d'une guerre en 845, il écouta les conseils de sa sœur, s'adressa au Dieu des chrétiens et fut délivré de ses dangers. L'arrivée de Cyrille et de Méthodius, vers 860, concourut à décider sa conversion. On raconte en particulier que Mélhodius, ayant fait un tableau saisissant qui représentait le jugement dernier, le roi, déjà ébranlé dans sa conscience, se fit instruire et demanda le baptême. Il fut baptisé de nuit et reçut le nom de Michel qui régnait alors à Constantinople 861. En 866, soit ignorance de la rivalité qui régnait entre les grecs et les latins, soit crainte d'être placé trop directement sous la dépendance de Constantinople, il fit demander au pape Nicolas des docteurs chrétiens; celui-ci envoya Paul et Formose, et c'est ainsi que la Bulgarie se trouva engagée dans le grand conflit ecclésiastique du siècle. — Le nom de Bulgare ayant fini par prendre le sens d'hérétique ou de schismatique, le moyen âge l'appliqua aux cathares et aux albigeois; puis en altérant le mot dans sa forme (boulgres ou bougres) on en fit le synonyme ou le symbole des plus grossiers péchés; les vieilles versions de la Bible l'emploient quelquefois dans cette acception. \. Lombard, Les Pauliciens. BULL, Georges, né 1637 à Wels, f 1710, év. de Saint-David, docteur d'Oxford, auteur d'une Défense de la foi de Nicée, qui lui valut les éloges de Bossuet, et d'une Harmonie apostolique où il prouve l'accord de Paul et d^ Jacques. BULLE (de l'italien bollare mettre un sceau, ou de la forme même du sceau), nom donné aux lettres et communications officielles du pape à la chrétienté, quand elles ont une certaine importance et un intérêt général, par opposition aux Brefs q. v., dont l'importance est moindre. La bulle est rédigée en chancellerie, en latin, sur parchemin, en lettres gothiques, souvent avec la traduction en grec ou en italien; elle se termine par la date, marquée en vieux < style, calendes, ides, etc. et mentionne Tannée du pape. Elle est signée du pape et de quelques cardinaux. En tête figure le nom du pape et son chiffre, ou le titre en latin de: Serviteur des serviteurs de Dieu. Le sceau est en plomb et pend à un cordon de chanvre, ou de soie rouge et jaune, suivant le contenu de la bulle; il porte l'empreinte de lap. Pierre jetant le filet. Le s;eau est en or dans certaines circonstances particulières, et dans ce cas la bulle est appelée une Bulle d'or. Les bulles portent en général le nom des mots par lesquels elles commencent; ainsi Ausculta, fili, et Clericis laïcos, contre Philippe le Bel; Exsurge, Domine, contre Luther; Unige-nitus, contre le p. Quesnel. Une des plus célèbres est la B. In cœna Domini, qui se lit habituellement le Jeudi-Saint à Rome contre les hérétiques et tous ceux qui sont rebelles au saint-siège, protestants, usuriers, pirates, faussaires, juifs, etc. L'excommunication sous sa forme actuelle date d'Urbain II, 1627. Clément XIV l'avait momentanément suspendue, 1770. On appelle BuUaires les recueils de bulles; le plus complet, B. magnum, n'a pas moins de 20 vol. f° et va de Léon 1er à Benoît XIII. BULLINGER, Jean-Henri, né 1504 à Brern-garten, d'un père curé qui avait fait dans sa jeunesse un mariage, dit de conscience, qu'il régularisa plus tard. L'enfant échappa trois fois miraculeusement à la mort. 11 étudia à Emme-rich, puis à Cologne; la lecture de P. Lombard le conduisit à lire les Pères, puis les Écritures, et quand parurent les premiers écrits de Luther, il les dévora. Nommé maître au couvent de Cappel 1523, il enseignait le latin, Virgile, Cicéron, les Loci communes de Mélanchthon, le N. Testament; fidèle au culte il cessa bientôt d'assister à la messe; le couvent se réformait peu à peu. En 1528 il fut consacré au saint-ministère: il avait fait la connaissance de Zwingle et de Pellican et assisté à la dispute de Berne-Il épousa en 1529 Anna Adlischweiler, dont il eut onze enfants. En nov. 1531, après la bataille où Zwingle perdit la vie, Bullinger dut quitter Bremgarten où il avait remplacé son père comme pasteur. Il vint à Zurich et après une première prédication à la cathédrale, il fut le 9 déc. nommé d'emblée pasteur-antistès (président) de l'église de la ville, en même temps que Bibliander remplaçait Zwingle comme professeur. Sa réputation grandissait; sans être un homme de luttes, il eut longtemps à lutter: contre les Conseils du canton, qui voulaient empiéter sur les droits de l'Église; contre les catholiques, contre les luthériens extrêmes (î! refusa de signer la Formule de concorde de Wittenberg, 1536); il apaisa par le Consensus tigurinus, mai 1549, la mésintelligence qui menaçait de diviser Genève et Zurich au sujet de la Cène; il fut modéré dans son préavis sur l'affaire de Bolsec, mais très catégorique dans celle de Servet, donnant raison à Calvin. Il accueillit avec une affectueuse sympathie les proscrits de Marie d'Angleterre et ceux de Lo-carno. Il s'entremit pour calmer l'agitatiou produite à Genève par le parti des Libertins. En un mot, pasteur fidèle dans sa paroisse, il rayonna comme une lumière bienfaisante partout où on fit appel à son dévouement. L'arrivée de Ver-migli à Zurich, en 1556, lui fut un grand secours et un précieux renfort, f le sept 1575, et enterré dans le cloître de la cathédrale. — Ses principaux ouvrages sont ses Décades, recueil de sermons; cent discours sur l'Apocalypse, Chronique sur l'hist. de la Suisse jusqu'en 1532, beaucoup de lettres, et enfin la deuxième Confession helvétique, rédigée par lui de concert avec Vermigli 1562, chef-d'œuvre de clarté, de force et de modération. BUNGENER, Félix, né 1814 à Marseille d'une funille allemande, étudia la théol. à Genève et s'y fixa, se livrant d'abord et surtout à l'enseignement. Régent de première en 1843, il fut destitué en 1848 par le gouvernement radical, niais il continua, soit par des cours publics, soit fu particulier, de donner des leçons, tantôt sur des sujets d'histoire, tantôt et de préférence sur h littérature. Sans ministère régulier, il a toujours servi l'Église; il prêchait souvent, et ne reculait pas devant une controverse incisive. Écrivain distingué, fécond, il a publié des ouvrages dans les genres les plus divers, romans, fermons, biographies, histoire, qui ont presque tous obtenu un grand et légitime succès (saint Paul, Calvin, Lincoln; Conc. de Trente; Rome et la Bible; Récits de Noël, etc). Les plus remarquables sont: Un sermon sous Louis XIV, et Trois sermons sous Louis XV. Julien, ou la Fin d'un siècle a moins bien réussi. — Nature sobre, froide et sévère, B. avait une grande facilité de travail, de l'initiative et de l'originalité. 114 juin 1874. BUNSEN, Chrétien-Ch.-Josias (de), né 25 août 1791 à Corbach, Waldeck, d'une famille modeste, étudia la théol. àMarbourg, la philologie a Gôttingue, donnant des leçons, et il se chargea de l'éducation du jeune américain Astor. Après avoir visité le Danemark et la Hollande, il vint à Paris pour étudier le persan et l'arabe sous S. de Sacy. A Rome, où il épousa Frances Waddington, il retrouva Niebuhr qu'il avait connu à Berlin, fut son secrétaire d'ambassade, puis son successeur comme chargé d'affaires, et en 1834 ministre plénipotentiaire de Prusse. Il eut à négocier avec la cour papale la question des mariages mixtes, qui ne réussit pas, et qui aboutit le 1er avril 1838 à son rappel, et à l'emprisonnement de l'archev. Droste de Vischering. En 1839 il fut nommé ambassadeur à Berne, puis à Londres où il travailla à l'érection de l'évêché protestant de Jérusalem. Il fut rappelé en 1854 à l'occasion de la guerre de Crimée, pour avoir trop insisté sur l'alliance de l'Allemagne avec l'Angleterre. Ce fut la fin de sa carrière diplomatique. Il passa ses dernières années à Heidelberg, Cannes et Bonn où il f 28 nov. 1860. L'influence que Bunsen a exercée est considérable; son caractère, ses talents, son activité, sa piété l'expliquent suffisamment. On lui doit l'érection d'une chapelle protestante à l'ambassade de Rome; des hôpitaux évangéli-ques à Rome et à Londres; la création de l'Institut archéologique; des études sur Rome et les anciennes basiliques. La littérature chrétienne lui doit surtout un Recueil liturgique, une notice sur Élis. Fry, une Constitution pour • Égl. de l'avenir, deux volumes sur l'Égypte, m ouvrage sur les lettres d'Ignace, Hippolyte et sou époque, un article sur Luther, les Signes des temps, Dieu dans l'histoire, plusieurs brochures de circonstance, enfin son Bibelwerk, trad. et comment, de la Bible, qu'il n'a pu achever lui-même. Nature éminemment sympathique, il a eu d'illustres amitiés (entre autres Fréd.-Guill. IV), et il a soulevé d'ardentes inimitiés; on lui a reproché tour à tour de pencher vers le catholicisme et de fournir des armes au rationalisme; c'était un cœur large et un esprit chrétien. BUNYAN, John, né 1628 à Elston près Bed-ford, fils de pauvres chaudronniers, dont il apprit le métier. Il entra dans l'armée parlementaire et combattit Charles 1er. Sa jeunesse fut misérable, moralement et matériellement; quand il se maria pour la première fois, ils n'avaient ni écuelle, ni cuiller; sa femme ne lui apporta en dot que 2 livres de dévotion, mais ils suffirent pour réveiller en lui les enseignements pieux qu'il avait reçus de ses parents, et ces souvenirs de jeunesse le ramenèrent dans le chemin du devoir et de la piété. Il se joignit à l'église baptiste 1655, et ne tarda pas à s'y faire une position considérable par sa connaissance des Ecritures et par son éloquence d'un caractère éminemment populaire. Nommé pasteur, il vit sa congrégation s'accroître de jour en jour, et sa réputation grandir et arriver jusqu'aux oreilles de Charles II. Il fut, avec Howe et Baxter, un des prédicateurs les plus courus; aussi fut-il un des premiers atteints par la persécution: arrêté en 1660, il ne sortit de prison qu'après 12 V* ans, en 1672, par l'intercession de l'év. Barlow de Lincoln. C'est pendant sa captivité qu'il composa son admirable allégorie du Voyage du Chrétien (et de la chrétienne, 2»»e partie), aujourd'hui trad. dans presque toutes les langues. Il reprit le cours de ses prédications, sans cesse harcelé et menacé par l'autorité, jusqu'au moment où l'Acte d'indulgence du catholique Jacques U, 18 mars 1687, lui garantit une entière liberté. C'est par milliers qu'il comptait les membres de sa paroisse. L'argent afflua quand il s'agit de construire une église plus vaste. Bunyan refusa les avances du roi qui aurait voulu enrôler les non-conformistes dans sa campagne contre l'Égl. anglicane, f 31 août 1688, des suites d'un refroidissement survenu pendant un voyage dans le Berkshire pour réconcilier un fils avec son père. BURGONDÉS, peuple germanique, primitivement campé entre l'Oder et la Vistule, parent des Goths et des Vandales, très diversement jugé par Ammien Marcellin, Socrate, Sidoine Apollinaire, qui n'avaient pas les éléments pour bien juger. Poussés par le torrent de l'invasion, ils s'avancèrent vers la fin du 3®* siècle jusque dans le voisinage des Allemani, passèrent le Rhin, et s'établirent, avec des frontières qui variaient continuellement, dans les contrées situées entre la Forêt-Noire, les Vosges, l'Aar et le Jura, détendant parfois à l'ouest jusqu'à Dijon, au sud jusqu'à Lyon et Arles, avançant ou reculant suivant le sort de la guerre et les besoins de la vie. Leur grand-prêtre, ou sinnist, était chef absolu; leur roi, ou hendin, pouvait être renvoyé d'un jour à l'autre, pour une bataille perdue, ou pour une mauvaise récolte. Ils furent amenés à la foi chrétienne vers 413, et vécurent dès lors comme des frères avec les Gaulois vaincus. Valentinien III leur permit de s'établir dans les pays du Rhône supérieur, et même des Alpes jusqu'en Provence. Leur royaume dura plus d'un siècle dans ces conditions. Après Gundioc ses 4 fils régnèrent, Godegi-sel, à Lausanne et Besançon, Gondemar à Vienne, Gondebaud à Lyon, et Chilpéric II à Genève. Mais l'empire romain croulait et Gondebaud s'empara du pouvoir et fit périr ses frères. Clo-vis épousa la fille de Chilpéric, Clotilde, chrétienne fervente, et s'en fit un appoint pour s'assurer l'appui des papes. Il semble en effet qu'une partie des Burgondes se soit laissé entraîner à l'arianisme depuis la fin du 5®* siècle, sans que cependant ce soit prouvé de la nation tout entière. Mais Clotilde exploita les haines religieuses contre les meurtriers de son père, et se fit de l'asservissement de ce peuple un devoir de conscience. Gondebaud resta arien jusqu'à sa f 516. Son fils Sigismond embrassa franchement le christianisme, et convoqua le concile d'Epaone 517, sous l'influence d'Avitus. Vers 534 la Bourgogne fut réunie à l'empire des Francs. BURIDAN, Jean, né à Béthune, Artois, vers 1300, f vers 1360, ardent nominaliste, plus philos, que théologien, prof, et recteur à l'université de Paris. Persécuté par les réalistes, il se retira en Allemagne, et fonda l'univ. de Vienne. Il était préoccupé surtout des mystères de la volonté et de la liberté, qui lui suggérèrent la célèbre allégorie de l'âne, attiré également par une mesure d'avoine et par un seau d'eau. Une légende sans valeur le compromet dans les débordements de la tour de Nesle. BURNET, Gilbert, né 13 sept. 1643 à Édim-bourg, f 17 mars 1715 à Salisbury; fils d'un juriste, il étudia le droit et la théol. avec succès et se décida enfin pour la carrière ecclésiastique. Après un voyage en France et en Hollande, il fut nommé pasteur à Salton, puis prof, à Glas-cow. Épiscopal, il blâmait les persécutions dirigées contre les non-conformistes; le véritable ennemi était pour lui le catholicisme, et quand Charles H l'eut appelé à Londres comme son chapelain, il résista aux séductions de la cour et du roi, qu'il voyait engagés dans les filets de la réaction papiste, et donna sa démission. Sa disgrâce augmenta encore sous Jacques U dont il combattit l'accession au trône; il courut de grands dangers et dut s'enfuir sur le continent; il visita la France, la Suisse, l'Italie, se fixa en Hollande où il fut parfaitement reçu par le prince d'Orange, et travailla de toutes ses forces à le faire monter sur le trône d'Angleterre; il y réussit et Guillaume III par reconnaissance le nomma év. de Salisbury. Peu de révolutions furent aussi paisibles que celle-là; il n'y eut ni réaction, ni violences, ni vengeances; l'Égl. épiscopale garda ses droits en Angleterre, la presbytérienne en Écosse; les dissidents et les catholiques furent protégés. Burnet a écrit l'histoire des Hamilton, une Hist. de la Réform. en Angleterre, 1679,1715, trad. en fr. par Ro-semond 1683, et une Hist. de mon temps, depuis Charles II, ouvrage posthume publié par son fils 1724. Notice par Guizot. BURSFELD, non loin de Minden et près de Gôttingue; abbaye de bénédictins fondée 1093, complètement déchue en 1430, se releva entre 1439 et 1469 parles soins de Busch,f 1479, qui la réunit à quelques autres couvents en décadence et les soumit à la stricte observance des statuts bénédictins. A Fépoque du concile de Bâle ils étaient réunis en congrégation au nombre de 36 couvents d'hommes et plusieurs de femmes, et Pie H les reconnut. La Réforme mit fin à leur existence comme cloîtres. BUSCH, Jean, v. Bursfeld. BUSENBAUM, Hermann, célèbre jésuite et casuiste, né 1600 en Westphalie, f 31 janv. 1668; auteur des Lys entre les Épines, des Vierges consacrées à Dieu, et d'une Moélle (ilfe-dulla) de théol. morale qui, malgré ses 15 éditions, ne fit pas d'abond beaucoup de bruit, mais qui, commentée par le p. Lacroix, attira l'attention publique. Sans qu'elles y fussent clairement contenues, on pouvait en déduire sur le mariage, sur l'assassinat, et surtout sur le régicide des maximes dangereuses. La chose était d'autant plus grave que la publication de ces commentaires coïncidait avec l'assassinat de Damiens. Le parlement de Paris condamna le livre; celui de Toulouse le fit brûler, et le p. Zacharia, italien, ayant essayé de le défendre, ce fut le point de départ de l'orage qui finit par éclater sous Choiseul et qui aboutit à la suppression de l'ordre 1762. BUTTLAR, Eva (de), née 1670 à Eschwege, liesse; ses parents étaient âgés quand elle vint au monde; sa mère avait 52 ans, et la jeune fille en profita plus tard pour dire qu'elle était née non selon la chair, mais selon l'esprit. Mariée à 17 ans à un Français réfugié, de Vérins, maître de danse à Eisenach, elle l'abandonna au bout de 10 ans, 1697, pour s'attacher au mouvement piétiste qui commençait à remuer les populations dans les environs de Gotha. De piétiste elle devînt séparatiste, pnis chiliaste, visionnaire, et finit par tomber dans les excès les plus hideux. Après avoir tenu quelque temps des réunions religieuses où l'on chantait encore des cantiques de Néander et de Lampe, admirée, adulée par des enthousiastes qui voyaient en elle l'incarnation de la sagesse divine, de la sophia éternelle, et qui appréciaient sa beauté autant que son esprit, elle se laissa entraîner à fonder, 2 janv. 1702, la société chrétienne et philadelphique, qu'on appela aussi de son nom: les Éviste*, ou les Buttlaristo, qui rejetait le mariage et la propriété, mais qui permettait la communauté des femmes et celle îles biens. Poursuivis pour des actes criants et publics d'immoralité, les buttlaristes, qui ne dépassaient guère le chiffre de 40 personnes, furent obligés de s'enfuir. A Cologne ils se firent catholiques pour échapper à la juridiction civile et se plongèrent de plus en plus dans un dévergondage d'excès de tous genres. Le c papa » Winter fut appelé le Père; mais le 2 janv. 1706 commença le règne du fils en la personne d'Ap-penfeller ou Léander; Ichtershaufen devint bientôt la Colombe ou le Saint-Esprit, et Eva qui appartenait tour à tour à chacun, et à d'autres encore, fut déclarée le centre, le résumé, ou la Sainte-Trinité. Arrêtés le 22 févr. 1706, ils forent condamnés à différentes peines, mais réassirent à s'évader et se rendirent à Wetzlar, pais à Altona, où Léander sous le nom de Brach-feld s'établit comme médecin, après avoir préalablement éponsé Eva, qui n'en continua pas moins de fanatiser son entourage. La date exacte de sa mort est inconnue; elle vivait encore en 1717. Cette petite secte, malgré son peu d'importance, a compromis un moment le réveil de la piété et même l'œuvre des moraves, que les incrédules et les indifférents affectaient de rendre solidaire des folies hystériques d'Éva. BUTTMANN, François, théol. hollandais, né à Leyde 1632, f 12 nov. 1679. Fils d'un pasteur réfugié du Palatinat, il fut successivement prof, à Leyde et prédicateur à Utrecht. Tête bien organisée, disciple de Cocceius, modéré dans ses opinions, il a publié des Comment, sur l'A. T. et Synopsù theologiœ, etc. 1661. BUXTOBF (Bockstrop), famille distinguée d'hébraïsants, originaire de Westphalie. — Ie Jean, né 25 déc. 1564 à Camen, où son père était pasteur. Il étudia dans plusieurs universités, Marbourg, Heidelberg, etc., entendit Pisca-tor à Herborn, Grynâus à Bâle, Bullinger à Zurich, Bèze à Genève; revint à Bâle comme précepteur des enfants de Léon Curione, fet promu maître ès arts, fut nommé prof, d'hébreu, épousa en 1592 Marguerite, fille de Curione, qui lui donna 5 fils, dont 3 en une fois, et 6 filles, et mérita de nombreux honneurs académiques. Il refusa des places à Saumur et à Leyde, et f de la peste 13 sept. 1629. On le compte parmi les plus célèbres hébraïsants du protestantisme; il lisait tons les livres hébreux et rabbiniques et fut en relations suivies avec une quantité de notabilités juives, ce qui le rendit même un peu suspect à des protestants scrupuleux. Ayant assisté comme témoin à la circoncision d'un petit juif, il fut condamné pour ce fait à une amende de 100 florins. Sa profonde connaissance de la langue et des traditions juives lui permit de parler avec autorité du texte sacré et d'en défendre l'origine, l'authenticité et l'intégrité. Il fit ressortir le soin minutieux avec lequel les copistes l'avaient reproduit, puisqu'ils en respectaient même les irrégularités déformé, et il en tira contre les Septante et contre la Vulgate la conclusion que l'hébreu seul pouvait faire autorité en cas de besoin. C'était une thèse importante, à une époque où la Béforme en appelait à l'Écriture dans toutes ses controverses, et Buxtorf exerça sous ce rapport une grande influence. Sa collection de livres juifs, encore augmentée par ses fils et petits-fils, fut achetée en 1705 par la biblioth. de Bâle pour la somme de 1000 écus, avec une masse de lettres de savants juifs et chrétiens à lui adressées. Ses principaux ouvrages sont: le Manuel hébraïque 1602; la Synagogue juive, 1603; Lexi-con hebr. et chald. 1607; les Abréviations de l'hébreu, 1613; Biblia hebr. 1618; Tiberias,ou Comment, masorétique, 1620, etc.; tous souvent réimprimés. Il a laissé inachevés une Concordance hébr. de la Bible, et un Dictionn. chald. talmudique et rabbinique, que son fils Jean a continués et publ. en 1632 et 1639. 2<> Jean, son fils, né 13 août 1599; prodige de science dès son enfance, maître ès arts à 16 ans; se rendit en 1617 à Heidelberg, assista au synode de Dordrecht. visita de là, avec les députés de Bâle, la Hollande et l'Angleterre, revint par la France et publia à 23 ans son Dictionn. chaldéen et syriaque, 1622. En 1623 il vint à Genève, où il entendit Turretin, Diodati et Tronchin. Il refusa une place de prof, de logique à Lausanne, et remplit de 1624-1630 les fonctions de diacre à régi, de Saint-Pierre à Bâle. Il accepta alors la chaire de prof, d'hébreu, vacante par la mort de son père. Pour le remercier d'avoir refusé un double appel à Gro-ningue et à Leyde on créa pour lui une nouvelle chaire des Lieux communs et des Controverses, et en 1654 on lui donna l'exégèse de l'A. T. Il fut marié 4 fois; deux de ses enfants lui survécurent seuls, Jean du 3me mariage, et Jean-Jaques, du 4m«, qui lui succéda comme prof, d'hébreu, f 17 août 1664. Relevant et accentuant encore les idées de son père, Jean Bux- 10 torf défendit avec énergie contre Louis Capelle la haute antiquité et l'autorité des points-voyel-)es du texte hébreu, les faisant remonter à Moïse, ou tout au moins à Esdras, tandis que Capelle les faisait remonter seulement au 6me siècle de l'ère chrétienne, et niait môme l'antiquité des lettres carrées de l'alphabet hébreu. Ces deux questions, qui sont aujourd'hui vidées dans le sens de Capelle ou à peu près, passionnaient les savants de l'époque, parce qu'elles touchaient à l'inspiration de la Bible, et donnèrent naissance pendant plus de 20 ans à toute une littérature. Buxtorf en particulier se fit remarquer par sa vivacité, dans son Traité de l'origine des points-voyelles, 1648, et si les savants allemands ne prirent que faiblement son parti, il eut la consolation de voir le Con-sensu* helvétique, rédigé en 1675 par Heidegger, consacrer ses idées dans son 2®* canon. 3o Jean-Jaques, fils du précédent, né 4 sept. 1645. A 8 ans il savait l'hébreu; à 16 ans il était étudiant en théologie; à 19 ans il était nommé prof, suppléant à la chaire d'hébreu, ce qui lui assurait la succession de son père, et la même année en effet, 1664, son père étant mort, il fut chargé de le remplacer. Il consacra 3 ou 4 ans à des voyages, visita la France, la Hollande, Londres, Oxford et Cambridge, et fut reçu partout avec la sympathie due à un grand nom. En 1669 il revint à Bâle, où il cumula avec ses fonctions de prof, d'hébreu, celles de bibliothécaire de l'université. D'une santé délicate, il f l«r avril 1704, aimé et considéré de tous. Travailleur infatigable et excellent professeur, il a peu écrit; on n'a de lui qu'une préface au Tiberias de son grand-père, et une nouvelle édition de la Synagogue juive du même, avec quelques corrections et développements, 1680. 4° Jean, neveu du précédent, fils de Jean, le fils de la 3m« femme de Jean (2o), né 8 janv. 1663, f 1732. Après avoir été quelque temps pasteur dans les environs de B&le, il fut nommé prof, d'hébreu en 1704 et conserva ces fonctions toute sa vie. Aucune de ses publicati |