La Bible authentique, quelle version ? - Texte Reçu et Texte d'Alexandrie - La Septante Mythique - Nos bibles modernes falsifiées - Les manuscrits du Nouveau Testament
SECTION IV. - Samuel, les rois et les Chroniques.
§ 43. Les deux livres de Samuel. - On
vient de voir que l'histoire de Ruth est une digression au milieu de l'histoire
générale, mais une digression ayant un but spécial ; c'est un fil conducteur qui
relie les diverses parties de l'ensemble du récit. Les livres de Samuel nous
donnent l'histoire des deux derniers juges Héli et Samuel (qui ne furent pas
comme leurs prédécesseurs des hommes de guerre , mais des prêtres et des
magistrats civils) , et des deux premiers rois Saül et David.
Les deux livres n'en formaient primitivement qu'un seul, la division actuelle
ayant été introduite par les Septante et la Vulgate : ces deux versions leur
donnent le nom de premier et second livre des Rois , parce qu'ils racontent en
effet le commencement de l'histoire des rois d'Israël et de Juda.
On ne saurait trancher avec certitude la question relative à l'auteur de ces
livres ; mais les plus grandes probabilités sont en faveur de l'ancienne
tradition qui attribue I Sam. , I-XXIV, à Samuel lui-même, et le reste à Gad et
à Nathan. Ce fut probablement dans les dernières années de sa vie que Samuel
écrivit son histoire (V, 5; VI, 18). Dans tous les cas , la place de ces livres
dans le canon, les prophéties qu'ils renferment (1 Sam., II, 30. 2 Sam., XII,
10-12), les citations qui en sont faites dans les livres suivants et dans le
Nouveau-Testament (1 Rois, XI, 26. 2 Rois, II, 4-11. 1 Chron., XVII, 21, 25.
Voyez Actes, XIII, 22. Matth. , XII, 3), disent assez quelle est l'autorité dont
ils jouissent.
Gad était contemporain de David , probablement l'un de ses compagnons dans le
désert (1 Sam. , XXII, 5). Il est appelé voyant. Nathan fut un des principaux
conseillers de David ; il reçut à diverses reprises les ordres et les
communications que Dieu le chargeait de transmettre à son roi (2 Sam., VII, 2 ;
XII, 1. Ps. LI). Son nom est cité Zach. , XII, 12 , comme représentant la
famille des prophètes. - On trouve aussi dans les livres de Samuel des odes ou
cantiques de différents auteurs. Le cantique d'Anne est remarquable par ses
nombreux rapports avec celui de Marie (1 Sam., II, 10. Luc, I, 46-55) ; il
renferme une prophétie très-claire du Christ, qui y est appelé pour la première
fois le Messie (l'oint) et le roi.
Samuel était, comme son nom l'indique, une réponse de Dieu aux prières de sa
mère; il fut consacré à Dieu dès son enfance. Revêtu du pouvoir suprême dans
l'Etat, il gouverna sans ambition, il remplit ses fonctions avec une intégrité
irréprochable, il les résigna sans hésitation ni résistance. Il était à la fois
craint et respecté par Saül, qui lui conserva le titre et les fonctions de juge
jusqu'à sa mort ( 1 Sam. , VII , 15). Les révélations qu'il reçut , l'esprit qui
l'animait, étaient tels que tout Israël, depuis Dan jusqu'à Béersébah,
reconnaissait que Samuel avait été établi prophète par l'Eternel.
Il est très-important, quand on étudie Samuel et les livres historiques en
général, de faire attention à l'ordre chronologique.
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§ 44. L'alliance de Dieu avec David. - Pour bien comprendre l'alliance de
Dieu faite par David , Dieu assurant à sa postérité une domination éternelle, il
faut lire et comparer 2 Sam., VII, et XXIII, 5. 1 Chron., XVII. Ps. LXXXIX et
CXXXII.
On voit par 1 Chron., XXVIII, 1-7, 1 Rois, VIII, 15-26, XI, 9-13, que ces
promesses trouvèrent en Salomon un accomplissement partiel.
Quand la grandeur temporelle de la maison de David commença à décliner, Dieu
envoya ses prophètes pour confirmer la stabilité de son alliance, et garantir à
Juda pour l'un de ses descendants une gloire sans pareille sur la terre (Amos,
IX, 11-15. Esaïe, IX, 6, 7, 11. Jér., XXIII, 5, 6 ; XXXIII, 14-26). Ces
promesses se rapportent au règne universel et permanent du Messie, à ce règne
éternel qui est maintenant commencé, et qui ne sera établi définitivement que
quand tous ses ennemis seront mis au-dessous de lui comme son marchepied (Luc,
I, 31-33, 39. Actes, II, 25-36; XIII, 32-37).
On peut voir par Esaïe , LV, 3. Héb., I, 5. Actes , Il, 30 , que David lui-même
avait bien compris que l'alliance et les promesses de Dieu se rapportaient à
notre Seigneur et aux bénédictions spirituelles qu'il répandrait sur le monde.
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§ 45. Les mouvements de la prophétie. - Sous Samuel nous avons un réveil
de l'esprit prophétique. Depuis Josué jusqu'à Héli il semble qu'il n'y ait guère
eu « d'apparitions de visions » ( 1 Sam., III, 1. Jér., XV, 1. Actes, XIII, 20 ;
III, 24). Sous les juges la première alliance continua de subsister sans
modifications ; le sacerdoce et l'administration civile demeurèrent ce qu'ils
étaient. La loi donnée par Moïse fut maintenue dans toute sa vigueur, et donna ,
par l'accomplissement de quelques prédictions, des preuves évidentes de son
origine divine et de son autorité. Mais aux jours de Samuel des changements
considérables eurent lieu dans le pays; de grandes calamités l'humilièrent dans
ce qu'il avait de plus cher ; des succès extraordinaires mais passagers le
relevèrent par moments ; le sacerdoce allait être transféré dans une autre
branche, la monarchie allait s'établir. Bientôt encore l'unité nationale sera
brisée, le royaume sera divisé. L'idolâtrie sera publiquement professée et
nécessitera une répression publique et vigoureuse. Puis viendront une longue
série de douleurs nationales qui se termineront par l'exil et la captivité.
Des changements intérieurs aussi profonds rendaient
nécessaire une intervention spéciale de Jéhovah.
Il fallait que la révélation prophétique fût
réveillée et que son horizon s'agrandit. Comme Moïse
avait demandé des pouvoirs extraordinaires qui fissent accepter
sa mission, il en fut de même pour Samuel. Il apparaît
comme prophète et commence une ère prophétique qui
se poursuit sans notable interruption jusqu'aux jours de Malachie.
Une vocation surnaturelle et une vision prophétique lui sont accordées dès le
commencement de son ministère. A peine au sortir de l'enfance , il fut chargé de
répéter à Héli une prédiction qu'un homme de Dieu lui avait déjà faite une
première fois, et le rapide accomplissement de cet oracle, ainsi que d'autres
circonstances encore, établirent de bonne heure son autorité. Bientôt le peuple
demanda un roi ; comme ce caprice impliquait une défiance de la protection et de
l'amour de celui qui avait fait d'Israël une théocratie, Samuel le combattit au
nom de l'Eternel. Cependant Dieu finit par accorder au peuple ce qu'il demandait,
et le prophète fut chargé de veiller à tout ce qui pouvait se rapporter à ce
changement dans la forme du gouvernement, de tracer les limites des droits de la
royauté, de désigner le roi choisi de Dieu, puis plus tard de transporter la
couronne sur une autre tête et dans une autre famille. Jusqu'ici les oracles et
les fonctions du prophète sont essentiellement civiles et administratives.
Mais la prophétie revêt sous David un autre et plus grand caractère. Le royaume
lui est de nouveau confirmé (2 Sam., VII, 12-17. Ps. LXXXIX). Le glorieux règne
de Salomon est annoncé, mais en des termes qui laissent entrevoir un autre roi,
plus saint et plus élevé. La promesse faite à Abraham était à la fois temporelle
et évangélique; il en est de même de celle qui est faite à David. A Abraham, le
Messie avait été annoncé, plus ou moins clairement, comme la semence promise; à
Moïse, comme le prophète qui devait venir ; à tous ceux de cette époque, comme
prêtre ; à David il l'est en outre comme roi. C'est pour cela qu'il insiste sur
l'autorité du Messie , qu'il parle de l'hostilité des rois de la terre, du
sceptre d'équité qu'il a dans les mains, de sa sacrificature immuable , de
l'excellence de sa nature, de sa mort, de sa victoire sur la mort, de sa
domination tant sur les Juifs que sur les Gentils (voyez Ps. II, XVI, XLV, CX,
etc.). Moins de cent ans après, les tribus opprimées règnent d'une mer à l'autre,
et les ténèbres des siècles passés, éclairées tout-à-coup par de nouvelles
révélations, introduisent l'aurore d'un jour qui semble devoir être sans nuages.
Il vaut la peine de remarquer que , tandis que Samuel et Nathan promettent, à
David la durée de son royaume, c'est, David lui-même qui reçoit de Dieu, par
révélation, l'intelligence de cette promesse, et son regard aperçoit à travers
les gloires terrestres de son royaume les gloires plus grandes et éternelles du
royaume de Jésus. Les prophètes révèlent et magnifient le type, mais lui , il en
célèbre la réalisation ; il appelle le Christ son Seigneur et il rend partout
hommage à sa personne et à son oeuvre (voyez Ps. CX).
A mesure que le royaume et le caractère de Christ sont ainsi mis en évidence ,
l'Esprit de Dieu veille à ce que ces prophéties toutes chrétiennes soient reçues
dans les coeurs de tous, et fassent faire de nouveaux progrès dans la foi et
dans la piété. Elles se traduisent en saints cantiques et se mêlent aux
dévotions et à tous les actes religieux de l'Eglise. Les Psaumes sont dès cette
époque la plus importante de toutes les révélations qui sont venues s'ajouter à
la révélation de Moïse ; ils sont parfaitement appropriés à leur but, qui est
d'inspirer (les espérances évangéliques aux fidèles de l'ancienne économie. Il y
a une vraie beauté dans cette clarté progressive de la prophétie, dans cette
gradation de la lumière. A Abraham c'est la semence qui est révélée. Quand ses
descendants sont devenus des tribus , c'est dans la famille de Juda que la
promesse est circonscrite. Quand la monarchie paraît, c'est à la postérité de
David. Et ces prédictions ne sauraient être attribuées à la flatterie ou à
l'égoïsme. D'abord ce n'est pas à David qu'elles sont primitivement adressées.
Ensuite ce n'est pas à lui qu'elles s'appliquent dans toute leur plénitude.
C'est à un autre; et celui qui parle c'est Nathan, le prophète inflexible qui ne
ménage ni David après sa chute, ni Salomon dans son apostasie. La fidélité des
serviteurs de Dieu, de Nathan en particulier, a eu d'autres conséquences encore,
mais elle prouve incidemment l'indépendance et la vérité de ses prophéties.
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§ 46. Les livres des Rois. - Dans les anciens manuscrits des Bibles
hébraïques les deux livres des Rois n'en formaient qu'un seul; ils renferment
l'histoire d'Israël et de Juda depuis la fin du règne de David jusqu'à la
captivité de Babylone. La division actuelle date des Septante et de la Vulgate,
qui en font les troisième et quatrième livres des Rois, les deux premiers étant
les livres de Samuel.
On ne connaît rien de certain sur l'auteur de ces deux livres
l'opinion la plus probable, c'est que plusieurs des prophètes
ayant écrit les mémoires de l'histoire contemporaine, ces
mémoires auront été compilés et
coordonnés par Jérémie ou par Esdras. La tradition
juive est en faveur de Jérémie, et Haevernick s'est
récemment encore déclaré le partisan de cette
opinion. - Les événements qui sont racontés vont
jusqu'à la délivrance de Jéhojachin qui
était en prison à Babylone, vingt-six ou vingt-huit ans
seulement après la destruction de Jérusalem. De nombreux
caldaïsmes dans l'expression semblent à De Wette prouver un
auteur des derniers temps, et Haevernick établit entre le style
des Rois et celui de Jérémie de nombreuses et
remarquables affinités. A la simple lecture on reconnaît
aisément d'une part des documents divers, contemporains des
événements; de l'autre un rédacteur unique. La
vivacité de la narration trahit un témoin oculaire. On
renvoie fréquemment à des documents officiels, tels que
les chroniques des rois de Juda et d'Israël , titre qui ne peut se
rapporter qu'aux annales nationales (Ester, II, 23; VI, 1). Enfin
l'égalité du style, la similitude d'expressions,
là même où les mots n'ont aucune importance,
démontre la révision du tout par une seule et même
main.
Les deux livres contiennent des prophéties et d'autres preuves intérieures de
leur inspiration; l'un et Vautre sont cités comme authentiques et canoniques par
notre Seigneur et ses apôtres (Luc, IV, 25, 27. Jacq., V, 17).
Les dates différentes des Rois et des Chroniques expliquent les différences du
style. Dans les Chroniques on trouve en abondance des formes araméennes (2
Chron., X, 18), des termes et des expressions postérieures, des noms plus
récents (1 Chron., XIV, 2; XIX, 12; XXI, 2. 2 Chron., XVI, 4) et des mots
synonymes employés pour d'autres qui pourraient donner lieu à des malentendus (1
Chron., XIX, 4. 2 Chron., XXII, 12).
La différence dans l'ordre des événements s'explique par le fait que ni l'un ni
Vautre des écrivains ne prétend vouloir suivre la succession régulière et
l'ordre des temps (voyez plus loin les tableaux.)
1 Chron., XIV et 2 Chron., I, 14-17; IX, 25 , ne sont évidemment pas à leur
place). On explique de même des additions, des omissions, des abréviations, par
le but particulier des auteurs.
On trouve encore d'autres différences d'où semblent résulter d'apparentes
contradictions, mais elles ne portent guère que sur des noms propres ou sur des
chiffres. Il est bien reconnu que le texte de Samuel, des Rois et des Chroniques
nous est parvenu dans un plus mauvais état de conservation que celui d'aucun des
autres écrits de l'Ancien-Testament, et l'on ne saurait attribuer à l'auteur ce
qui n'est en réalité que le fait des copistes (cf. 2 Chron., VIII, 18 et 1 Rois,
IX , 28. - 1 Chron., XI, 11 et 2 Sam., XXIII, 8 ; - XXI, 5 et 2 Sam., XXIV, 9; -
XVIII, 4 et 2 Sam., VIII, 4 ; - XIX, 8 et 2 Sam., X, 18). - Ces inexactitudes de
transcription ne touchent, du reste, à aucun article de foi ou de vie religieuse,
et jusqu'à ce qu'elles puissent être rectifiées , il faut se contenter de les
reconnaître et de les constater.
Ces deux livres renferment plusieurs prédictions inspirées , et ils sont cités
plus ou moins directement dans le Nouveau-Testament (2 Chron., Il, 5 , 6; cf.
Actes, VII, 48, 49. - 2 Chron., XIX, 7; cf. 1 Pierre, I, 17). Il est digne de
remarque que le cantique de bénédiction, que David adresse à l'Eternel (1
Chron., XXIX, 10, 11), soit reproduit plus 'tard en substance par notre Seigneur
(Matth., VI, 13), et que Jean le place dans la bouche des esprits bienheureux
qui louent Dieu dans le ciel (Apoc., V, 12, 13).
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§ 47. Les deux livres des Chroniques. - Comme les précédents, ces deux
livres n'en forment qu'un dans l'ancien canon des Juifs, et ils portent le nom
de paroles des jours, c'est-à-dire journal , par allusion probablement aux
anciennes annales, d'après lesquelles on peut croire qu'ils ont été composés.
Les Septante leur ont donné le titre de livres des choses omises (Paralipomènes)
, les considérant comme une espèce de supplément aux livres qui précèdent, avec
les indications et explications que pouvaient avoir rendu nécessaires les
immenses changements amenés par la captivité. - Le nom actuel de ces livres leur
vient de saint Jérôme.
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§48. L'auteur. - On est en général d'accord à considérer Esdras comme
l'auteur ou le rédacteur des Chroniques. Ces livres sont relativement plus
modernes que ceux des Rois; ils racontent la restauration qui eut lieu sous
Cyrus (2 Chron., XXXVI , 21, 22), et ils citent les écrits de Jérémie (XXV). Le
style d'Esdras a d'ailleurs une ressemblance frappante avec celui des Chroniques,
et le livre qui porte son nom s'unit de la manière la plus intime, comme s'il en
était la suite, à celui que lui attribue la tradition (2 Chron., XXXVI, 23.
Esdras, I , 1-3). Si cette manière de voir est exacte, on doit regarder comme
une addition postérieure le fragment 1 Chron., III, 19-24, qui donne la
généalogie de Zorobabel jusqu'au temps d'Alexandre.
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§ 49. Observations. - Il ressort des livres eux-mêmes que les histoires
qu'ils racontent sont extraites d'autres ouvrages, également écrits par des
prophètes. Ces documents semblent être en général cités littéralement, même
lorsque le fait rapporté s'applique plutôt à l'époque de l'auteur qu'à celle du
rédacteur (voyez, par exemple, 2 Chron., V, 9; VIII, 8), ce dernier se
préoccupant moins de modifier les documents qu'il emploie que de les rattacher à
son propre récit. Plusieurs passages sont identiquement les mêmes, ou à peu près,
dans les Chroniques et dans les Rois, probablement parce qu'ils ont été puisés à
une source commune. Les documents cités sont au nombre de douze environ, mais
trois ou quatre d'entre eux sont peut-être le même écrit sous d'autres titres.
Les livres de Samuel, des Rois et des Chroniques, avec beaucoup de traits
communs, ont cependant des différences caractéristiques. Ils racontent à peu
près la même histoire , et il est bon de les étudier et de les comparer. C'est
ainsi seulement qu'on peut se faire une idée exacte de l'histoire juive, et
expliquer souvent des expressions trop concises et obscures. Les différences
dans leur plan sont aussi remarquables que leur accord et leur unité quant au
fond. Samuel raconte la fondation de la monarchie, et il donne la biographie
plutôt que l'histoire des premiers rois. Les livres des Rois racontent
l'histoire de la théocratie sous le gouvernement royal; ils sont riches en
aperçus rapides sur le caractère, les péchés et les châtiments des chefs et du
peuple. Les Chroniques s'occupent davantage du culte public et de tout ce qui
s'y rapporte, des cérémonies, des prêtres, des généalogies , des tribus, des
familles et des questions de propriété qui ne devaient pas manquer de surgir au
retour de la captivité. De là ces nombreuses chronologies; de là aussi le relief
donné à ces rois, à David, Salomon, Ezéchias, Josias, qui ont relevé, restauré,
agrandi le culte public.
Les tableaux généalogiques de ces livres, bien moins intéressants pour nous,
étaient de la plus haute importance pour les Juifs, des promesses se rattachant
pour plusieurs, et des propriétés pour tous, à la preuve de leur filiation. Ces
tableaux poursuivent la généalogie de la famille à laquelle ont été faite les
promesses, pendant l'espace de trois mille cinq cents ans , un fait certainement
sans exemple dans les annales de l'humanité.
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§ 50. Caractère théocratique des livres historiques. - Le trait le plus
remarquable des livres historiques de l'Ecriture, et spécialement des Rois et
des Chroniques, c'est leur caractère religieux et théocratique. L'histoire
profane raconte les changements officiels et publics qui se font dans la
destinée des peuples , avec leurs causes et leurs effets. L'histoire de l'Eglise
constate les développements de la foi, les progrès de la vie morale, tout ce qui
concerne la société ecclésiastique. Mais ici le roi, le peuple, l'Eglise, tout
est représenté comme placé sous la direction immédiate de Dieu. Le caractère de
chaque roi est déterminé par le degré de sa fidélité dans l'accomplissement
religieux de sa charge. De Josaphat il est dit : Il suivit la voie d'Asa son
père , et ne s'en détourna point , faisant ce qui est droit devant l'Eternel.
D'Ezéchias : Il fit ce qui est bon, et droit et véritable, en la présence de
l'Eternel son Dieu ;... et il prospéra. Jéroboam est dépeint en deux mots : Il a
péché et fait pécher Israël. - Ces livres racontent l'histoire de Dieu et de sa
loi dans une nation, et cette nation est une monarchie ; Josué et les Juges
racontent la même histoire, Dieu et sa loi, dans la même nation, républicaine,
tantôt aristocratique, tantôt démocratique; les livres de Moïse développaient la
même pensée, mais la nation n'était encore qu'une grande famille. Partout on
retrouve le même caractère; c'est le gouvernement de Dieu qui est mis en saillie.
Dans les prophètes et dans les Actes nous voyons, comme par une échappée, ce que
doit être un jour, et pour le monde tout entier, l'histoire de Dieu et de sa loi.
Ce n'est qu'à ce point de vue qu'on peut bien comprendre toute l'importance
donnée dans l'Ecriture à l'érection du temple, les appels fréquents à la loi
ancienne, surtout au moment où les deux royaumes touchaient à leur fin, comme si
l'Esprit de Dieu voulait se dégager ostensiblement de toute responsabilité, en
faisant retomber ce désastre national sur ceux qui l'avaient provoqué par leur
désobéissance ; l'intervention toujours plus active des prophètes qui
tour-à-tour bravent la colère du peuple et celle du souverain ; la déposition et
la succession des rois; et le rapport intime, qui est toujours mis en évidence,
entre les événements politiques d'une part et la fidélité ou l'idolâtrie; -
voyez 2 Rois, V à VIII; X, 31 ; XVII, 13, 15, 37; XVIII, 4-6, et toute
l'histoire d'Elie. 1 Rois, XV, 3-5. 2 Rois, XI, 17. Si des nations avaient la
vraie sagesse, les récits de l'Ecriture seraient leurs meilleurs guides, car ils
sont écrits de manière à instruire et le monde et l'Eglise.
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§ 51. David et Salomon. - On peut dire que les
règnes de David et de Salomon sont l'âge d'or de la
nationalité juive. David se montra, dès le commencement,
extrêmement scrupuleux à ne faire, pour parvenir au
trône, aucune démarche qui ne fût dirigée de
Dieu (2 Sam., II, 1. 1 Sam., XXIII, 2, 4). Il agit toujours comme
« son serviteur. » Et quand il fut arrivé au
pouvoir, son premier soin fut toujours de travailler à la gloire
de Dieu et au bien-être religieux de son peuple (2 Sam., VI, 1
-5; VII, 1 , 2). Pendant une guerre de sept années, il ne tira
jamais l'épée contre un seul de ses sujets, et quand elle
fut terminée il ne châtia pas les rebelles, et ne punit
qu'un seul crime, le meurtrier de son rival (2 Sam., IV, 10-12). Comme
roi il travailla à la prospérité et à la
grandeur matérielle de son pays; comme représentant
visible de l'Eternel, il se rappela toujours sa dépendance, ne
cherchant point à s'élever, et il se conforma strictement
à l'esprit de la théocratie. C'est probablement à
ce caractère de son administration, bien plus qu'à ses
vertus privées, qu'il dut d'être appelé de Dieu
« un homme selon son coeur (1 Sam., XIII, 14) , » et
« qui fera toute sa volonté (Actes, XIII , 22). » Il
est impossible en effet de justifier toutes ses actions et de le
regarder comme un caractère accompli. Mais quand on pense
à la piété de sa jeunesse, à la profondeur
de sa repentance, à l'énergie de sa foi, à la
ferveur de sa dévotion, à la souplesse et à la
variété de son génie, à sa grandeur
d'âme, à sa chaleur de coeur, à son courage
militaire dans un siècle de guerriers, à sa sagesse et
à sa justice comme administrateur, et surtout à son
adhésion franche et sans réserve au culte et à la
volonté de Dieu, on le regardera certainement comme un
modèle d'autorité royale et de soumission spirituelle.
Salomon continua la politique de son père , et en recueillit les mêmes
bénédictions. Sa domination s'étendait depuis la Méditerranée jusqu'à l'Euphrate,
depuis la mer Rouge et les déserts de l'Arabie jusqu'aux frontières les plus
septentrionales du Liban ( 1 Rois , IV, 21). Les états tributaires qui formaient
la plus grande partie de son royaume vivaient tranquilles et soumis; et comme
ils continuaient d'être régis par leurs propres rois , Salomon pouvait S'appeler
le roi des rois. Les Cananéens qui restaient encore en Palestine étaient devenus
, soit des sujets paisibles, soit d'utiles serviteurs. Les trésors de Salomon
étaient immenses, se composant en majeure partie des dépouilles conquises par
son père sur les nations vaincues, et mises à part, les unes pour pourvoir aux
frais de la construction d'un temple solennel à l'Eternel, les autres pour
affermir la majesté royale et rehausser l'éclat du trône. La sagesse de Salomon
était plus célèbre encore et plus incontestée que ses trésors. Ce n'est pas
l'Ecriture seulement , c'est encore toute la littérature orientale qui lui rend
hommage. Trois mille proverbes , dont quelques-uns nous ont été conservés,
témoignent de ses vertus et de sa sagacité. Mille et cinq cantiques, dont le
Cantique des cantiques et le psaume CXXVII seuls nous restent , le placent au
premier rang des prophètes hébreux ; ses ouvrages sur l'histoire naturelle enfin,
qui tous ont péri, après avoir été longtemps admirés, prouvent qu'il n'était pas
moins savant que poète et philosophe.
Mais trop d'éclat le perdit; il fut trahi par sa propre grandeur. Ses trésors,
ses femmes , ses chariots, tout était contraire à l'esprit et aux préceptes de
la loi (Deut. , XVII , 16, 17). Ses exactions lui aliénèrent le coeur de son
peuple , et, par-dessus tout, ses femmes le séduisirent et le firent égarer ; il
bâtit des temples à Kémos, ou Péhor, l'obscène idole de Moab; à Moloc, le dieu
des Hammonites; et à Hastaroth , la déesse des Sidoniens. Ses dernières années ,
par conséquent , furent troublées par des « adversaires » de divers genres.
Jéroboam conspira contre lui ; de même Hadad, en Edom ; Damas se déclara
indépendante sous la direction de Rézon; et Abija fut chargé d'annoncer à
Salomon lui-même que, comme il avait brisé l'alliance de laquelle il tenait la
couronne, son royaume serait divisé, déchiré, et la plus grande partie donnée à
l'un de ses serviteurs. On peut croire que des châtiments aussi mérités lui
ouvrirent les yeux sur l'énormité de ses péchés, et qu'il passa la fin de sa
vie, dans la repentance. L'ensemble de son règne fut prospère : Juda et Israël «
étaient en grand nombre comme le sable qui est sur le bord de la mer;... ils
mangeaient, buvaient et se réjouissaient... Ils habitaient en assurance, chacun
sous sa vigne et sous son figuier, depuis Dan jusqu'à Béersébah (1 Rois, IV, 20,
25). »
Le grand événement de la vie de Salomon fut l'érection du temple. De même que ce
monument était l'accomplissement d'une prophétie, et qu'il était le symbole de
l'habitation de Dieu au milieu de son peuple (2 Sam. , VII, 13, 6, 10) , il
devenait lui-même une prophétie et un type; le type du peuple juif et de
l'Eglise, la prophétie de l'habitation éternelle de Dieu au milieu des siens et
de l'envoi du Saint-Esprit (Jér. , VII). Son histoire est à cet égard en quelque
sorte l'histoire du peuple juif lui-même. Lorsqu'il tomba , la nation fut
dispersée ; quand il se releva de ses ruines , les exilés se rassemblèrent de
nouveau. L'histoire peut également dater la captivité de la destruction du
temple, ou du premier départ pour la terre de l'exil (voyez § 124) (Il Rois, IX,
8, 7. 2 Chron., VII, 20. Jér., VII. Esaïe, XLIV, 28).
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